B-ESQUISSE DE SOLUTIONS POUR UNE MEILLEURE EXECUTION
DES DECISIONS ETRANGERES DANS L'ESPACE OHADA.
Ces solutions ne concernent que les décisions
judiciaires rendues par les pays membres de l'OHADA, à l'exception des
décisions CCJA qui «reçoivent une exécution
forcée dans les mêmes conditions que les décisions des
juridiction nationales402». Ces solutions ne se
prêtent pas à un panachage ; il s'agit entre autre de :
-L'uniformisation du régime de la
reconnaissance et de l'exequatur des décisions dans l`espace
OHADA403 : Il s'agira au minimum pour le législateur
OHADA de modifier l'A.U.P.S.R.V.E aux fins d'instituer un régime commun
en ce qui concerne les conditions d'octroi, de refus, et de procédure
d'exequatur des décisions judiciaires dans l'espace OHADA ,comme il l'a
déjà fait dans le cadre des sentences arbitrales et des accords
de médiation404. La prémisse est constituée de
la confiance que les Etats concernés s'accordent réciproquement
en ce qui concerne la qualité et l'impartialité de leur
justice405. Cette solution est envisageable car ne
nécessitant pas le chamboulement de tout l'édifice construit, il
s'agira juste d'insérer au sein de ce dernier un chapitre
réservé à l'exequatur ;
401Sur les différentes conventions, accords et
lois, Voir supra.
402 MEYER(P), «sécurité juridique et
judiciaire dans l'espace OHADA», Op .cit.p151.
403 MEYER(P), op.cit.n°33.
404 Art 16 de l'acte uniforme sur la médiation.
405 MEYER(P), op.cit.
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-La suppression de l'exequatur entre les pays membres
de l'OHADA : Cette solution audacieuse, complexe et qui mérite
une réflexion plus poussée, ainsi qu'une réelle
volonté politique comporte des risques énormes concernant les
droits fondamentaux des parties, et de la mise sur pied d'une procédure
très exigeante et complexe. Elle n'est (malheureusement) pas
envisageable dans l'état actuel des systèmes judiciaires dans
l'espace OHADA406 ;
-L'instauration d'un titre exécutoire
communautaire OHADA : Le droit OHADA pourrait s'inspirer en ce sens
des instruments européens tout en prenant compte le contexte de la
gouvernance judiciaire dans les pays membres407. Il pourra s'agir du
règlement n°805/2004 du 21 avril 2004 instituant un titre
exécutoire européen pour les créances incontestées.
Ce dernier a pour vocation la suppression de la procédure d'exequatur
pour les décisions relatives à une créance
incontestée, qui aura été certifiée dans l'Etat
d'origine comme titre exécutoire européen408. Un titre
certifié comme tel est dispensé d'exequatur et est
considéré comme ayant été rendu dans l'Etat requis
; le créancier requérant peut alors recourir à l'une ou
l'autre des procédures409.
L'A.U.P.S.R.V.E peut également lors des prochaines
reformes tant attendues s'inspirer du Règlement Bruxelles I
Bis410, qui supprime quant à lui la procédure
d'exequatur, consacrant ainsi la possibilité d'exécuter de plein
droit une décision étrangère sur le territoire d'un pays
de la communauté ; le droit européen opte ainsi une mise en place
d'un véritable espace judiciaire en consacrant une véritable
circulation des jugements411.
Le Règlement dispose que les conditions d'un refus
d'exequatur ne sont désormais vérifiées qu'en cas de
recours éventuel du débiteur pour refus de reconnaissance ou
d'exécution d'une décision412. Le règlement
s'applique en matière civile et commerciale413 ; il concerne
dans ces matières, aussi bien les décisions, les transactions
judiciaires, sans égard à la nature de la juridiction dont ils
émanent, ainsi que les actes authentiques414. La prise en
compte de ces différentes solutions permettra de favoriser la
circulation des décisions
406 SERGE CHRISTIAN(E), op.cit.p73.
407 SERGE CHRISTIAN(E), op.cit.p74.
408 F.FERRAND, «titre exécutoire
européen», répertoire de procédure civile
européen (actualisation en février 2017), n°4.cité par
SERGE CHRISTIAN(E), op.cit.
409 SERGE CHRISTIAN(E), op.cit.p74.
410 Adopté le 12 décembre 2012 par le parlement et
conseil européen, ce règlement est entré en vigueur le 10
janvier 2015 en remplacement du règlement de Bruxelles I du 22
décembre 2000.
411 SERGE CHRISTIAN(E), op.cit.
412 Art 44 et s du règlement.
413 Art 1er du règlement.
414 Art 2 et 3 du règlement.
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étrangères dans l'espace CEMAC. A notre avis, la
dernière solution a le mérite d'être consacrée plus
que les autres, car instaurant un véritable espace juridique favorable
à l'harmonisation des affaires.
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