SECTION II : LES CONDITIONS D'EXEQUATUR DES
SENTENCES
ARBITRALES.
Les sentences arbitrales sont des émanations de justice
privée ; leur autorité est donc relative aux parties et sur le
territoire où elles ont été rendues. Cependant, les Etats
partie à l'OHADA, désireux de promouvoir l'arbitrage comme
instrument de règlement des différends
257 MOISSINAC MASSENAT(V), les conflits de procédure
et de décision en DIP, LGDJ 2007 ; 961 et s.
258 Voir supra.
259 FRISSON ROCHE(M.A) ; l'impartialité du juge, recueil
Dalloz 1999, chronique p50.
260 Cass civ 1ere, 3 décembre 1996, bull civ n°427.
261 VERGE(M.E), les principes directeurs du procès
judiciaire, étude d'une catégorie juridique, thèse de
doctorat de droit privé, université d'AIX Marseille 2000 ;
p99.
262 MESSI ZOGO (F.R) op.cit.p30.
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contractuels263, ont conféré aux
sentences arbitrales étrangères grâce à l'exequatur,
une autorité analogue à celle qui s'attache aux jugements rendus
par les juridictions Etatiques264. Nous présenterons les
conditions d'exequatur des sentences arbitrales selon le droit OHADA
(paragraphe 1), avant celles prévues par le droit conventionnel
(paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : LES CONDITIONS SELON LE DROIT OHADA.
L'on peut distinguer les conditions fixées par l'acte
uniforme sur l'arbitrage(A), des conditions fixées par le
règlement de la cour commune de justice et d'arbitrage(CCJA) de l'OHADA
(B).
A-LES CONDITIONS D'EXEQUATUR SELON L'ACTE UNIFORME
SUR
L'ARBITRAGE.
Selon l'article 34 du nouvel acte uniforme265, les
sentences dont la reconnaissance et l'exécution sont soumises aux
dispositions de l'acte uniforme sur l'arbitrage266, sont d'abord des
sentences rendues sur le fondement de l'A.U.A. Cela recouvre les sentences
arbitrales dont le siège du tribunal arbitral se trouve dans un Etat
partie ; cela recouvre aussi les sentences où le siège du
tribunal arbitral se trouve dans un Etat tiers à l'OHADA mais où
l'A.U.A a été choisi comme loi de procédure, il s'agit
encore des sentences rendues sur le fondement des règles
différentes de l'A.U.A mais qui ne peuvent être reconnus, sur la
base d'une convention internationale.
L'A.U.A prévoit deux(2) conditions pour l'exequatur de
la sentence arbitrale : d'une part l'existence de la sentence arbitrale doit
être prouvée ; d'autre part, la sentence ne doit pas être
contraire à l'ordre public international267.
Pour ce qui est de la preuve de l'existence de la sentence
étrangère, L'A.U.A exige que celui qui sollicite l'exequatur de
la sentence arbitrale établisse la preuve de son existence. Celle-ci est
établie par la production de l'original de la convention d'arbitrage
accompagné de la copie de ces documents réunissant les conditions
requises pour leur authenticité. Cette exigence se justifie par le fait
que la production de la convention d'arbitrage permettra au juge
263 Préambule du traité de l'OHADA.
264 Art 18 de l'accord de coopération judiciaire entre les
Etats membres de la CEMAC.
265 Adopté à l'origine le 11 mars 1999, L'acte
uniforme sur l'arbitrage a été révisé à
Conakry le 23 novembre 2017.
266 Nous allons l'abréger A.U.A dans nos prochains
développements.
267 Art 31 du nouvel A.U.A.
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de vérifier que l'arbitre a statué sur la base
d'une convention, et donc que le litige lui a été
véritablement soumis268.
Cependant les dispositions in fine de l'article 3-1 du nouvel
acte uniforme dispose que «la convention d'arbitrage doit avoir
été faite par écrit ou par tout autre moyen permettant
d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite
à un document la stipulant». Selon cette disposition, la
preuve orale d'arbitrage est exclue ; ce qui est critiquable. Un auteur a
considéré que cette condition était inopportune s'agissant
de l'arbitrage international, dans la mesure où elle restreindrait
l'accueil dans un ordre juridique étranger, l'accueil des sentences
reposant sur des conventions d'arbitrage purement orales269.
Ces critiques peuvent également être prises en
compte pour ce qui est du droit OHADA. Nonobstant l'article 3 de l'A.U.A exige
que la convention d'arbitrage soit faite par écrit, ce problème
continuera de se poser pour l'exequatur des sentences arbitrales rendues dans
les pays tiers à l'OHADA non membres de la convention de new York. A la
suite de NGONO VERONIQUE(C.), nous pensons que le juge est saisi d'une
sentence arbitrale rendue dans de telles conditions, il pourrait écarter
les exigences procédurales de la production d'un écrit, et se
satisfaire d'autres conditions adaptées à la
situation270.
L'autre condition est le respect par la sentence arbitrale de
l'ordre public international des Etats parties. Nous ne reviendrons plus sur
l'ordre public car étant évoqué plus haut271.
Une question se pose pourtant ; de quel ordre public international s'agit-il ?
Est-ce celui d'un Etat où la sentence postule à l'exequatur ? Ou
alors s'agit-il de l'ordre public de tous les Etats membres de l'OHADA ?
Il semble bon de considérer qu'il s'agit de l'ordre
public international d'un seul Etat, vu que c'est dans l'ordre juridique que la
sentence doit s'intégrer, de plus il nous semble impossible
d'additionner la somme des ordres publics des Etats parties, car chaque Etat
connait ce qui est fondamental pour son ordre272. Les sentences CCJA
ont également leurs conditions propres.
268 TCHAKOUA (J.M.), «l'exécution des sentences
arbitrales dans l'espace OHADA : regard sur une construction
inachevée à partir du cadre camerounais» revue africaine des
sciences juridiques, vol 6, n°1 ; 2009 p5.
269 BELLET et MEZGER, l'arbitrage international dans le
nouveau code de procédure civile ; rev crit DIP 1981, p611.
270 NGONO VERONIQUE(C.) op.cit.p18.
271 Voir supra p55.
272 MESSI ZOGO (F.R) op.cit.p33.
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