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L’Europe et l’Italie au Moyen-Age. Société et goûts alimentaires.


par Safia BERSALI
Université de Reims - Diplôme d'université du goût, de la gastronomie et des arts de la table ( DUGGAT) 2010
  

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Partie I
Histoire

Tout d'abord il s'agit de situer « le moyen âge » qui en général apparaît plus comme une expression qu'une période réelle, ainsi évoquée par les humanistes* Italiens à la Renaissance pour définir cette période obscure située selon eux entre la « Chute de l'Empire Romain » et la fin du XV siècle à la reconstruction éclatante de la Rome Pontificale. Le Moyen Age est donc divisé en trois périodes suivies de la Renaissance :

- Le haut moyen âge = de 410 à 1050

- Le Moyen Age classique = du XIe au XIIIe siècle - La fin du Moyen Age = du XIVe au XVE siècle

*« Les humanistes passionnés par les civilisations anciennes, romaines et grecques, mais aussi araméennes et proche orientales disaient que les "Anciens" avaient accompli de grandes choses. A la chute de Rome avait succédé cette période d'obscurantisme, un âge dit « moyen" d'ignorance et de barbarie. Mille ans plus tard, l'humanité connaissait enfin « la rinascita » la Renaissance. Les humanistes avaient l'ambition de rendre les hommes modernes aussi distingués que les Anciens, Ils entreprennent d'éditer et de traduire tous les textes antiques à partir des témoins subsistants, pour certains redécouverts (comme Quintilien par Le Pogge) ou trouvés dans l'ancien Empire romain d'Orient par des Grecs chargés par les princes occidentaux d'enrichir leurs collections comme Antoine Éparque et Janus Lascaris. Ce sont très souvent des magistrats ou des juristes, ou du moins ont une formation juridique.C'est avec Pétrarque ( 1304-1374) que naît l'humanisme en Italie, poète qui a étudié le droit, sous la direction de juristes aussi éminents qu'Oldratus de Ponte et Jean André. Ils incarnent la mobilisation spirituelle de la bourgeoisie industrieuse et négociante, et des gentilshommes urbains, contre l'ingérence des seigneurs et leur soldatesque. Ce faisant, l'humanisme juridique déconstruit l'autorité temporelle des Papes que ceux-ci jugeaient irréfragable, et ouvre la voie à l'autonomisation du pouvoir politique, celui des républiques populaires ou des monarchies». Extraits Philippe Forget 1

1 Philippe Forget est l'auteur de la revue « l'Art du comprendre » qui traite de sujets philosophiques qui mettent en jeu la compréhension de l'homme dans son rapport à soi, autrui et le monde.

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A/ L'Occident et de l'Orient médiéval

L'Occident médiéval

Depuis toujours l'Occident (le Couchant, ou le Ponant) s'oppose à l'Orient (le Levant). Il définit un territoire et une civilisation au Moyen Âge qui couvre l'ouest de l'Europe sans recouper exactement les limites de l'Empire romain d'Occident. C'est le territoire du christianisme romain dont la langue est le latin.Fidèle au pape de Rome : il s'oppose aux territoires des païens, des "schismatiques" et des musulmans et il correspond à l'aire de diffusion du christianisme catholique (et ultérieurement protestant) en pays latin, celte ou germanique. Cela n'est pas toujours explicitement défini et les limites orientales de cet ensemble sont floues et mouvantes au cours de la période : tantôt elles incluent, tantôt elles excluent l'Europe centrale.Après le Schisme de 1054 en effet, l'Occident exclut l'Empire byzantin, resté orthodoxe, fidèle aux quatre autres patriarches (Constantinople, Antioche, Jérusalem et Alexandrie). Cette dichotomie religieuse et culturelle correspond aux deux anciennes moitiés de l'Empire romain issues du partage de 395 : l'Occident (de culture surtout latine, mais aussi celtique et germanique) et l'Orient (de culture surtout grecque, mais aussi slave, arménienne ou araméenne).

La rupture avec Byzance est consommée en 1204, lorsque Constantinople est prise par les croisés de la quatrième croisade. Cet épisode laissera des blessures profondes. Le primat unificateur de la culture ne doit pas faire oublier les divisions politiques et linguistiques qui émergent dès l'époque carolingienne. L'apparition des langues vulgaires et plus tard du protestantisme remet en question la prétendue unité occidentale. L'Occident chrétien est donc au Moyen Âge synonyme de chrétienté latine et s'étend de façon remarquable grâce à l'action des missionnaires et des croisés, avant de conquérir des mondes nouveaux, avec les grandes découvertes du XVIe siècle.

On y distingue deux branches : la féodalité et le clergé, le prince et l'évêque sont au même rang. Dessous se trouvent les nobles, la petite noblesse et les propriétaires terriens. Le système social constitue donc une pyramide, au pied de laquelle se trouvent les paysans qui représentent 90% de la population et au sommet le roi.

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L'Orient médiéval

Le mot orient désigne l'est de l'Europe et correspond à l'aire de diffusion du christianisme orthodoxe en pays grec, dans les Balkans ou en pays slave. Mais là encore les limites occidentales de cet ensemble sont floues et les pays baltes, la Hongrie, les pays slaves de tradition catholique (Pologne, Bohême, Slovaquie, Slovénie, Croatie) sont tantôt inclus, tantôt exclus.

L'Orient de l'Europe médiévale se définit plutôt par l'exclusion de la notion d'Occident chrétien que par la religion. En effet, après Cyrille (dit Constantin le Philosophe) et son frère Méthode ( Evêque de Sirmium) considérés comme les Apôtres des Slaves de l'évangélisation des peuples slaves achevée au IXe siècle, il n'y aura dans l'Europe orientale médiévale ni missionnaires, ni croisades, ni inquisition, et les églises orthodoxes, multiples, vont se trouver en position de subordination face aux pouvoirs politiques des tzars, des voïvodes2, des hospodars chrétiens, voire des sultans musulmans de l'Empire ottoman.

En pratique, l'Europe orientale médiévale correspond en gros aux peuples dont la référence spirituelle est le Patriarcat de Constantinople, de tradition orthodoxe ou initialement orthodoxe, sauf pour certains, tels les Bosniaques, la majorité des Albanais ou les pomaques, devenus musulmans.Dans le système social de l'Orient médiéval, la féodalité et le clergé ne sont pas à égalité : ce dernier est en position subordonnée. C'est le « césaropapisme».3 L'église orthodoxe ne perçoit pas d'impôts (de nombreux popes sont pauvres et travaillent), mais les aristocrates peuvent lui faire des dons, et les princes lui offrir des domaines : certains monastères s'enrichissent et deviennent des centres culturels et artistiques importants. Par ailleurs l'aristocratie n'est ni étanche ni endogame : les voïvodes ont le pouvoir d'anoblir des roturiers et de les élever socialement, de sorte que l'Église n'est pas le seul ascenseur social ouvert aux roturiers , et si elle l'est, c'est aussi par décision des pouvoirs séculiers.

2 Voïvode est un terme d'origine slave, qui désigne au départ le commandant d'une région militaire. Dérivé du slavon, voï (armée) et voda (qui conduit), il était utilisé à l'époque médiévale dans toute la zone de l'Europe centrale et orientale. Malgré son origine slave, il est aussi utilisé en Roumanie pays de langue latine.

3 Le césaropapisme désigne un système de gouvernement temporel (césar) qui, dans une volonté de domination universelle, cherche à exercer son pouvoir sur les affaires religieuses (pape). L'Empereur empiète donc sur les affaires de l'Église.

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B /L'Italie Médiévale : du Haut Moyen Âge à la Renaissance

Unité politique

Au Ve siècle, l'Italie perd son unité politique, conséquence de la chute de l'Empire romain. La péninsule est au coeur de graves conflits internes mais subit également l'invasion des Ostrogoths, la guerre des Goths, et se trouve ainsi divisée en deux zones (byzantine et lombarde) jusqu'à la moitié du XIe siècle, période durant laquelle Byzance maintient son autorité seulement sur quelques territoires du sud. En effet, au VIIIe siècle, les Francs, soutenus par le Pape, arrivent à réduire les domaines romano-orientaux. Au XIe siècle, dans le sud, l'invasion des Normands réussit à créer un royaume moderne, centralisé et étroitement contrôlé par des dynasties successives. Le féodalisme disparaît peu à peu au centre nord de l'Italie.

Le Royaume Ostrogoth L'Italie à l'an Mille L'Italie en 7504

Puissance de l'Eglise

L'Eglise, n'a de cesse de s'opposer à l'influence des autres puissances européennes et de lutter contre les différentes invasions préservant ainsi la culture latine.Durant les invasions arabes au sud, les Etats de l'Eglise continuent de défendre l'autonomie du Nord mais l'influence papale et les conflits internes essoufflent les diverses oppositions.C'est dans ce contexte de luttes permanentes entre l'Empire et l'Eglise, que la société italienne voit naître des courants divergents entre le XIIe et le XIVe siècle (les factions de Guelfes et Gibelins et les factions médiévales)5, qui s'opposent militairement, politiquement et culturellement.

4 Source images : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Ostrogoti.jpg

5 Les guelfes et les gibelins sont deux factions (parte ou plus souvent brigate, ou setta médiévales qui s'opposent militairement, politiquement et culturellement dans l'Italie des Duecento et Trecento. Elles soutiennent respectivement et initialement deux dynasties qui se disputent le trône du Saint-Empire romain germanique.

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Croisades et invasions

Les croisades, auxquelles participent beaucoup d'Etats italiens, ont pour objectif d'éradiquer la progression de l'Islam et d'étendre le commerce vers l'Orient. Les derniers siècles du moyen âge voient l'association de représentants de l'antique féodalité (les Visconti 6à Milan) avec des républicains (les Savoie7 dans le Piémont). Au XVIe siècle, une bonne partie de l'Italie est au centre de la lutte entre la France et l'Espagne (bataille de Pavie en 1525) pour la domination de l'Europe.

Domination espagnole

Les conquérants espagnols (Tercios Castillans) gagnent une région clé de la Lombardie. C'est durant un siècle et demi que l'Espagne va dominer toute l'Italie méridionale et insulaire. Malgré le soutien politique de différents Etats face à l'impérialisme espagnol, la république de Venise et celle de Gênes gardent leur indépendance mais cela n'évitera pas leur déclin, alors que le duché de Savoie devient un champ de bataille entre la France et l'Espagne, malgré ses efforts de conciliation.

Guerres et économie

L'impérialisme lattant, les guerres successives et leur coût, qui oblige l'Espagne à exercer une forte pression fiscale ainsi que la peste (les villes perdent une bonne partie de leur population), ont des effets dévastateurs sur l'économie.

Dynamisme, art et culture

Jusqu'à la première moitié du XVIIe siècle, l'Italie reste un pays dynamique, dont la culture perdure malgré le déclin général. La philosophie (Giordano Bruno), la science (Galilée), la peinture (le Caravage), l'architecture, unique en Europe, (le Bernin), la musique et le mélodrame (typique de l'ère baroque) fait que la renaissance italienne, par l'art et la pensée baroque, s'impose à l'Europe. Les influences de l'illuminisme, diffusé par les philosophes français, ont un effet bénéfique, dans le sud de l'Italie, qui connaît une timide reprise de l'économie. Dans la partie centrale et septentrionale, l'Autriche, par Joseph II, apporte les réformes salutaires au développement économique et social.

6 *les Visconti : famille de Lombardie, du parti Gibelin et qui régna sur Milan de 1277 à 1447

7 *La Maison de Savoie : la Maison de Savoie est une dynastie européenne ayant porté les titres de comte de Savoie (1033), puis de duc de Savoie (1416), prince de Piémont, roi de Sicile (1713), roi de Sardaigne (1716) et roi d'Italie (1861).la Maison de Savoie remonte en 1032 lorsque la Savoie est intégrée avec le second royaume de Bourgogne, au Saint Empire Romain-Germanique. Loin de l'empereur allemand, les seigneuries se créent au hasard des guerres, des mariages et des donations.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon