2. Valeurs religieuses
Les représentations de repas sont toujours des
scènes religieuses (la Cêne en Italien « Il Cenacolo »
de Léonard de Vinci, mais aussi les noces de Cana, l'hospitalité
d'Abraham, le banquet d'Hérode, le festin de Balthazar...) car comme
nous l'avons vu plus avant la nourriture est très symbolique et
dictée par des codes souvent régulés par la religion.
Jusqu'au XIIIe siècle, L'Eglise a interdit certains
aliments (la viande de cheval) et a réglementé les consommations
en fonction du calendrier liturgique (l'on ne devait manger en théorie
qu'une fois, et uniquement des produits "maigres"-soit tout sauf de la viande,
des laitages et des oeufs).
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De nombreuses dispenses (malades, femmes enceintes, nourrices,
jeunes, les pauvres et les vieux) autorisaient toutefois une collation si la
faim était trop intense. Chez les nobles, les cuisiniers redoublaient
d'inventivité notamment pour dissimuler l'absence de viande. Le
Carême=Quadragesima correspondaient aussi à un moment de tension
alimentaire, entre deux récoltes. Le Carnaval qui
précédait ces temps difficiles et constituait une des plus grande
fête médiévale était un grand défoulement
alimentaire.
3. Valeurs médicinales &
diététiques
L'Europe médiévale ne faisait pas la distinction
entre les aliments et la nourriture avait toujours une double fonction :
alimentaire et curative. Les diététiciens du Moyen Age
concevaient l'estomac comme une « marmite de chair », qu'il convenait
de maintenir à température adéquate afin de garder les
humeurs en bon ordre (les quatre humeurs corporelles sont : la bile noire, le
sang, la bile jaune et la lymphe). En fait, la médecine
médiévale, en respect de la fameuse « chaîne de
l'être », constitué de la combinaison des quatre
éléments, eau, terre, feu, air, conçoit l'homme comme un
microcosme, en correspondance avec le macrocosme
(l'univers).L'élément dominant d'un individu permet de
déterminer son tempérament. Si l'humeur est sèche et
chaude il est colérique (air et feu), si elle est plutôt chaude et
humide c'est un sanguin (feu et eau), un flegmatique si l'humeur est froide et
humide (terre et eau) et un mélancolique si son humeur est
considérée comme sèche et froide (air et terre). Les
aliments étaient aussi conseillés en fonction de leurs
caractéristiques (sec, chaud, humide, froid) pour équilibrer ces
humeurs et corriger les excès, le colérique devra par exemple
s'abstenir d'épices.
Platina, dans « De Honesta Voluptate »,
où il indique s'intéresser à la science de la
santé et non pas seulement à l'alimentation, nous fournit une
longue liste d'aliments en détaillant l'effet de chacun sur le
métabolisme : « Le melon par exemple aurait un effet refroidissant
et humidifiant, contre lequel le vin constitue un bon antidote. Un autre
conseil précieux ira à qui se voit servir de l'ours : cette
viande n'est pas bonne pour le foie et pour la rate, écrit-il, mais elle
peut prévenir la chute de cheveux. Par ailleurs, la viande de Paon
était déconseillée car elle se digérait mal et
portait à la mélancolie. Ces conseils allaient aussi à ses
amis, membre de « l'Académie », à qui il faisait des
compliments ironiques comme à Callimaque à qui il conseillait
« de s'abstenir de manger de la chèvre rôtie à l'ail,
parce que ce mets est mauvais pour la vue et bon pour la libido... »
(Dickie, 2007 )
Pour d'autres médecins, la cornouille apaise les douleurs
menstruelles, l'hysope soulage la toux et la grenade combattrait la
fièvre. La diététique a aussi beaucoup influencé
les différents styles d'alimentation ainsi que leur
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échelle des valeurs. Les végétaux
consommés de préférence en début de repas pour des
raisons de digestion, sont considérés comme peu nourrissants par
rapport au pain ou à la viande et son mal aimés. Certains
aliments comme la chair des volailles domestiques et des volailles sauvages ou
la chair des oiseaux, d'après les médecins, correspondaient
seulement aux estomacs des nobles les plus « oisifs »
considéré comme délicats et d'autres uniquement aux
travailleurs comme la viande de boeuf par exemple qui était abattue
tardivement. L'eau de rose calmait et purifiait, elle faisait partie du rituel
de lavage des mains mais était aussi utilisée dans des
préparations médicinales contre la pleurésie et la
pneumonie.Il faut noter par ailleurs, que le mot
« recette » du latin « recepta »
désigne aussi bien l'ordonnance que la recette de cuisine. En Italien
c'est encore « ricetta », « recipe » en anglais et «
receta » en espagnol.
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