Paragraphe II : L'application renouvelée de la libre
circulation des personnes, des services et capitaux
Corollaire du principe de la liberté de circulation des
marchandises, la liberté de mouvement des personnes, services et
capitaux a été très vite consacrée par le
législateur communautaire CEMAC138. La mise en oeuvre de ce
principe dans la sous-région est l'une des conditions majeures pour
l'émergence d'un marché commun139. Cette approche se
comprend aisément, d'autant plus que traditionnellement, la construction
d'un marché commun ne revêt
135 J. DUTHEIL DE LA ROCHERE, Droit communautaire
matériel, Hachette supérieur, coll. Les fondamentaux, Paris,
mars 2001, p.22
136 E. GNIPIEMBA TONNANG, Droit matériel et
intégration sous-régionale...., op cit, p. 103.
137 M. BAMBA, La liberté de circulation et le
développement en Afrique de l'Ouest et du Centre..., op cit,
p.209
138 Consacré de façon laconique aux articles 27,
63 et 64 du Traité de Brazzaville, le principe de la libre circulation
des personnes, des services et des capitaux fera l'objet d'une
réglementation plus achevée grâce à un Acte des
Chefs d'Etats du 27 décembre 1972 portant Convention commune sur la
libre circulation des personnes et le droit d'établissement en UDEAC.
139 Le marché commun est le produit de la mise en
oeuvre simultanée du principe de la libre circulation des biens et celui
de la libre circulation des facteurs de production. Car comme l'affirme le
doyen BALMOND, la libre circulation des biens, n'est que l'affirmation en aval,
du régionalisme d'intégration. L'adoption du tarif commun et
l'harmonisation des législations douanières, rappelle-t-il
« aussi complètes soient-elles, prennent en compte le
phénomène économique dans sa phase ultime, une fois le
produit ou la marchandise apparus ». Le phénomène
devrait selon l'auteur « être également
appréhendé en amont, à travers l'examen des facteurs de
production qui permettent d'obtenir les produits ». Et la libre
circulation des produits étant en effet, souligne-t-il encore «
une condition indispensable à l'établissement d'un
véritable marché commun ».
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La coopération diplomatico-économique entre la
République du Cameroun et la République du Tchad de
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de sens que si les peuples des États membres
bénéficient de la faculté de circuler et de
séjourner librement sur tout le territoire
communautaire140.
Cette prescription communautaire s'imposant donc aux
États membres, le Tchad et le Cameroun dans leurs relations
s'attèlent à l'application du principe de la libre circulation
des personnes, des services et capitaux. Ainsi, avant de présenter les
modalités par lesquelles ces États observent ce principe (B), il
faut d'abord déterminer la consécration de ce principe (A).
A. La consécration de la libre circulation des
personnes, services et capitaux par les normes communautaires
La libre circulation des personnes, services et capitaux est
un principe consacré par les normes communautaires qui encadrent
l'intégration sous-régionale en Afrique centrale141.
Il s'agit d'une consécration pérenne de ce principe142
dans la sous-région. En effet, les normes communautaires en raison de
leur caractère conditionnent leur application par les États
membres, non seulement au sein de la communauté, mais également
dans leurs rapports bilatéraux. La norme communautaire a pour
caractères l'effet direct, la primauté et l'applicabilité
immédiate143. Celle-ci s'impose donc aux États membres
de la communauté intégrative, le Cameroun et le Tchad
étant deux États membres de la CEMAC144.
La question de la liberté de circulation des personnes
et des services est mise au coeur du débat à l'occasion de la
relance du mouvement d'intégration des pays de la
sous-région145. La liberté de circulation des
personnes poursuit désormais un triple objectif : accroître d'une
part les chances des travailleurs des États membres de trouver du
travail et d'enrichir leur expérience professionnelle, faciliter d'autre
part, par la mobilité de ces derniers, la réponse des ressources
humaines aux besoins de l'emploi, et développer enfin, entre ces
travailleurs, la compréhension mutuelle, l'émergence d'un tissu
social
140 ICARD (Ph), Droit matériel et politiques
communautaires, op cit, p. 213.
141 Voir dans ce sens Traité régissant l'UEAC et
traité révisé de la CEMAC.
142 En effet, le traité régissant l'UDEAC
consacrait déjà ce principe.
143 Voir dans ce sens A. PELLET, « Les fondements
juridiques internationaux du droit communautaire », in European
Academy Law, 1997, pp. 198-271
144 Voir dans ce sens traité révisé de la
CEMAC du 25 juin 2008, op cit.
145 E. GNIPIEMBA TONNANG, Droit matériel et
intégration sous-régionale..., op cit, p. 138
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communautaire et donc «l'union sans cesse
grandissant» entre les peuples de la sous-région, but essentiel du
traité CEMAC146.
La consécration de la libre circulation des personnes,
des services et des capitaux par les normes communautaires, tant au niveau
régional que sous-régional, constitue donc une obligation pour
les États membres qui sont tenus de l'observer.
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