Paragraphe II : Le renforcement de la coopération
judiciaire entre le Tchad et le Cameroun
La coopération judiciaire entre le Tchad et le Cameroun
contribue elle également à la consolidation de cette relation
dont la pérennité et le caractère harmonieux n'est plus
à démontrer. En réalité cela atteste du
désir, une fois de plus de ces États, de maintenir et de
resserrer les liens qui les unissent, et surtout de poursuivre cette
coopération dans un esprit de compréhension mutuelle et de
confiance réciproque94.
La coopération judiciaire entre le Tchad et le
Cameroun, loin d'être de nature nihiliste, a des justifications
précises, aussi bien théoriques que pratiques. Cela implique donc
que cette coopération bénéficie de fondements clairement
définis (A) ; en outre ladite coopération se matérialise
par des éléments précis (B).
A. Une coopération judiciaire fondée
Le fondement de la coopération judiciaire entre le
Tchad et le Cameroun, est de nature juridique, il s'agit
précisément d'une convention internationale. Aux termes de cette
convention, les actes judiciaires et extrajudiciaires, tant en matière
civile, sociale ou commerciale qu'en matière pénale et
administrative, destinés à des personnes résidant sur le
territoire de l'une des parties contractantes sont transmis directement par
l'autorité
94 Préambule de l'accord de
coopération en matière de justice entre le Gouvernement de la
République du Tchad et le Gouvernement de la République du
Cameroun.
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compétente au parquet dans le ressort duquel se trouve
le destinataire de l'acte95. La remise ou la tentative de remise des
actes judiciaires et extrajudiciaires ne donne lieu au remboursement d'aucun
frais ; toutefois, la remise ou la tentative de remise des actes judiciaires
par un officier ministériel peut être faite soit aux frais de
l'État requérant, soit aux frais de la partie
requérante96. Il faut préciser qu'en matière
civile ou commerciale, les personnes résidant sur le territoire de l'une
des deux parties contractantes, de faire effectuer dans l'autre État,
par les soins des officiers ministériels des significations ou remises
d'actes aux personnes y demeurant97.
Ces différentes procédures s'exercent dans le
cadre de l'entraide judiciaire entre le Tchad et le Cameroun ; cela est
perceptible davantage en matière de casier judiciaire. En effet, dans ce
cadre, les États se donnent réciproquement avis des condamnations
pour les crimes et les délits prononcés par les juridictions de
l'un d'entre eux à l'encontre des ressortissants de l'autre et des
personnes nées dans le territoire de l'autre État98.
En cas de poursuite devant une juridiction de l'un des États, le parquet
de ladite juridiction peut obtenir directement des autorités
compétentes de l'autre partie un bulletin de casier judiciaire
concernant la personne faisant l'objet de poursuite99. Lorsque les
autorités judiciaires de l'un des États, hors le cas de
poursuites, ou les autorités administratives, désirent se faire
délivrer un bulletin du casier judiciaire tenu par l'autre État,
elles peuvent l'obtenir directement des autorités compétentes,
dans les cas et les limites prévus par la législation de
l'État requis100.
S'agissant de l'état civil et de la législation,
le Gouvernement de la République du Cameroun remet à celui du
Tchad, une expédition ou un original des actes de naissance d'enfants,
des actes de mariage et des actes de décès dressés au
Cameroun ainsi que des extraits de jugements et arrêts rendus au Cameroun
en matière de divorce, de filiation, d'état civil et
d'interdiction judiciaire concernant les personnes nées au
Tchad101. Les extraits de jugement et arrêts rendus en
matière de divorce sont également transmis au Gouvernement de
95 Article 1, Accord op cit.
96 Article 3, Convention op cit.
97 Article 4, Convention op cit.
98 Article 14, Convention op cit.
99 Article 15, Convention op cit.
100 Article 16, Convention op cit.
101 Article 17 (1).
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la République du Tchad lorsqu'ils concernent les
personnes nées au Tchad102. Les expéditions et
extraits desdits actes, jugements et arrêts dressés, sont remis
tous les six mois par le Gouvernement de la République du Cameroun au
Gouvernement de la République du Tchad103.
La coopération judiciaire entre le Tchad et le Cameroun
est donc implémentée en droite ligne avec la norme communautaire
CEMAC relative à l'accord de coopération judiciaire entre les
États membres de la CEMAC104. La volonté émise
dans une telle coopération serait peut-être celle de créer
un espace commun 105, ce qu'il est convenu d'appeler un
marché judiciaire commun106. De manière pratique,
« parler d'un espace judiciaire commun dans la zone CEMAC
revient à envisager une aire où les règles applicables
dans le domaine judiciaire sont le plus proche possible et témoignent
d'une synergie des actions menées par les différents États
membres en la matière dans le but de relever le défi qui
s'impose107 ».
La coopération judiciaire entre le Tchad et le Cameroun
a donc des fondements divers, mais le plus important c'est le fait
matériel qui rend cette coopération aussi particulière.
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