1.2. L'agroécologie
1.2.1. L'évolution de l'approche
agroécologique
L'agroécologie est un terme qui a été
énoncé pour la première fois en 1928, dans la
littérature scientifique par Basil Bensin, un agronome américain
d'origine russe, pour décrire l'utilisation de méthodes
écologiques appliquées à la recherche agronomique (Wezel
et al., 2009). Par la suite, ce terme a évolué à
travers diverses écoles scientifiques et mouvements politiques.
Des mouvements écologistes et hostiles à
l'agriculture industrielle sont nés dans les années 1960,
notamment en Amérique latine. Faisant suite à ces mouvements,
l'agroécologie a aussi de son côté favorisé la
naissance des premiers mouvements agroécologiques dans les années
1990. À la faveur de cette effervescence, le concept a englobé
petit à petit de nouvelles dimensions environnementales, sociales,
économiques, éthiques, en lien avec le développement
(Dumont et al., 2015).
Sur le plan scientifique, les recherches et les mises en
adéquation avec les pratiques de l'agroécologie se sont
développées dans les années 1970, particulièrement
en Amérique Latine et aux États-Unis avec Miguel Altieri et
Stephen R. Gliessman. Il s'agissait de répondre aux désastres
causés par l'agriculture industrielle. Ces auteurs proposent alors
l'agroécologie comme alternative au modèle dominant d'agriculture
industrielle, basé sur l'utilisation intensive d'intrants, l'irrigation,
la mécanisation et la sélection variétale (SOS Faim
Belgique, 2011). En 1995, Altieri décrit l'agroécologie comme
étant une association de cinq principes qui sont (i) le recyclage de la
biomasse et l'équilibre du flux et de la disponibilité de
nutriments, (ii) la sauvegarde de conditions du sol favorables pour la
croissance des plantes (à travers le renforcement de la matière
organique des sols et de l'activité biotique des sols), (iii) la
minimisation des pertes de radiation solaire, air, eau et nutriments
(grâce à la gestion de
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microclimats, à la collecte de l'eau et à la
couverture du sol), (iv) le renforcement de la diversification
génétique et des espèces de l'agroécosystème
dans le temps et dans l'espace et (v) le renforcement des interactions
biologiques parmi les composants de l'agro-biodiversité. Pour lui,
l'agroécologie est « une approche systémique du
développement agricole qui s'inspire des techniques traditionnelles des
paysans pour en tirer des connaissances scientifiques modernes »
(Burger et al., 2011). Aussi, le concept d'agroécologie portait
principalement sur les aspects de la production et de la protection des
cultures ; cependant au cours des dernières décennies, de
nouvelles dimensions notamment environnementales, sociales, éthiques et
de développement deviennent pertinentes (Wezel et al., 2009).
Elle est alors considérée comme une forme d'agriculture
permettant de conserver l'écologie du milieu dans lequel elle est
pratiquée et comme une discipline faisant la promotion des bonnes
interactions entre l'agriculture et l'écologie, où les
productions agricoles valorisent les services des écosystèmes.
Dans ce sens, l'agroécologie tente de concilier
techniques endogènes locales bien maitrisées par les paysans et
acquis scientifiques, tout en utilisant les ressources humaines,
matérielles et économiques locales. Cette idée est
également soutenue par Wezel et al. (2009), qui affirment que
l'agroécologie représente à la fois une science, des
pratiques agricoles et un mouvement social.
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