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L'artiste et la ville en Hauts-de-France. Le cas du parcours d'art contemporain d'Amiens métropole.


par Julien Cossart
Université de Picardie Jules Verne - Master 2 Culture, Patrimoine et Innovations Numériques 2020
  

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V. Contextualisation / Terrain d'enquête

Ce premier état des lieux des arts plastiques en Hauts-de-France a été commandé par la filière Arts Visuels Hauts-de-France au bureau d'études Contexts et à l'agence Stratecom. Il a bénéficié de financements de la part du Ministère du Travail, du Ministère de la Culture, de la Région Hauts-de-France et de la DRAC Hauts-de-France. L'état des lieux s'est déroulé entre le mois d'avril 2019 et celui d'avril 2020 et croise diverses sources; quantitatives et qualitatives. Des lectures, des recherches Internet, des données statistiques, des questionnaires destinés aux artistes et aux structures culturelles, des rencontres collectives avec ces artistes et structures ou encore des entretiens individuels auprès d'acteurs culturels composent ainsi cet état des lieux. Face au problème du recensement de la population d'artistes en Hauts-de-France, une définition ouverte a été retenue; basée sur l'autodéfinition de ces derniers. Cet état des lieux a ainsi permis de construire 5 profils d'artistes que j'appliquerai par la suite à mon terrain d'enquête.

63 Agora Des Savoirs. (2015, 12 mai). Agora des Savoirs - Nathalie Heinich - L'art contemporain : une révolution artistique ? [Vidéo]. YouTube.

64 Voir Grille d'entretien en Annexes

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Commençons par le(s) territoire(s). 5 départements et près de 6 millions d'habitants constituent les Hauts-de-France; cependant, 67,8% de cette population se concentre dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais. Après l'Ile-de-France, la population des Hauts-de-France est la plus jeune et la plus urbanisée; près de 89% vit dans une aire urbaine. « 41% de la population de la région réside au sein de quatre aires urbaines représentant moins de 10% du territoire : Lille, Douai-Lens, Béthune et Valenciennes. »65 Ces espaces urbains contrastent avec les territoires ruraux qui représentent 85% des Hauts-de-France mais seulement 6% de sa population; nous pouvons citer le nord de l'Aisne pour illustrer cette opposition. Pour en venir à la culture, la dépense publique culturelle est principalement portée par les communes et se concentre dans les villes. En 2013, en Hauts-de-France, le secteur culturel comptait 30.200 emplois; 40% de ces emplois étant situés dans la Métropole Européenne de Lille et 11% représentant le sous-secteur des arts visuels66. Le code APE (Activité Principale Exercée) 90.03A, « Création artistique relevant des arts plastiques », utilisé par l'INSEE, a été un indicateur pour recenser 4.555 artistes et 184 structures en Hauts-de-France; même si, comme précisé précédemment, un réel recensement des artistes est compliqué dans la mesure où il n'y a aucune définition officielle de l'« artiste ». Ces derniers n'échappent pas à la concentration urbaine puisque 42% des artistes, ceux qui ont répondu au questionnaire pour l'état des lieux, habitent dans la Métropole Européenne de Lille; suivi d'Amiens avec seulement 5,5%. Les artistes évoquent une frontière encore présente entre l'ex-Nord-Pas-de-Calais et l'ex-Picardie; marquée par un écart important entre Lille et les territoires ruraux de Picardie. Au sein de Lille même, l'« événementialisation », que nous avons vu, a aussi ses opposants; « Les gros événements (comme lille3000) fabriquent des expositions qui deviennent de l'événementiel. Il n'y a plus de lieux en mesure de développer une programmation originale. »67

Relevons les principales conditions des artistes, dans leur ensemble, en Hauts-de-France. Pour ceux disposant d'un atelier, ce dernier est situé au domicile de l'artiste dans 70% des cas68; l'atelier en question a d'ailleurs un impact sur la pratique artistique, pour des questions de dimensions, d'espaces, etc. Si les ateliers sont souvent individuels, la part d'ateliers collectifs est aussi importante, recouvrant des colocations entre artistes comme des friches culturelles, des squats ou toutes autres dénominations pour ces lieux communs; telles que La Malterie à Lille, La Briqueterie à Amiens ou encore Fructôse à Dunkerque. Ces espaces, ainsi que les outils de travail qu'ils abritent, démontrent une mutualisation de la part des artistes qui les investissent. Dans

65 Carton, A., Dubruel, V., & Sourisseau, R. (2020). Etat des lieux des arts plastiques en Hauts-de-France. Arts Visuels Hauts-de-France, p. 9.

66 Ibid, p. 11. 67.Ibid, p. 17 68 Ibid, p. 36.

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certaines de ces structures, la mise à disposition d'un espace de travail est suivi d'un accompagnement voire d'une résidence d'artiste.

En ce qui concerne le financement de la création artistique, si le modèle de la commande est encore présent, la plupart des oeuvres sont maintenant autoproduites par les artistes69. La part des artistes bénéficiant d'aides publiques est minoritaire (31,7%), ces dernières provenant surtout de la Région et de la DRAC; davantage encore pour ceux bénéficiant d'aides privées (13%). De même, la commande publique artistique, le dispositif du « 1% artistique » ou encore le programme « 1 immeuble, 1 oeuvre » sont très minoritaires et concernent chacun moins de 5% des artistes répondant à l'état des lieux. La résidence d'artiste est, elle, moins inaccessible (30% des artistes); mais elle recouvre une diversité de situations, de la mise à disposition d'un espace à un accompagnement rémunéré de l'artiste, et résulte d'une importante sélection pour celles fonctionnant sur appel à projet. « Les appels à candidatures sont de plus en plus exigeants (construire un projet, le budgétiser, trouver qui pourrait écrire le texte, faire des repérages, etc.); il y a de plus en plus de monde dans la course. Les réponses formatées de refus n'aident pas à progresser et découragent. »70

Les lieux d'expositions sont très diverses pour les artistes; que ce soit dans leur atelier, au sein de structures culturelles, dans des galeries ou encore à l'occasion de manifestations artistiques. Si ces lieux sont variés, les artistes des Hauts-de-France s'exportent peu; « Les artistes montrent surtout leur travail dans le département où ils résident. »71 Bien qu'elles accueillent des expositions, la plupart des artistes ne fonctionnent pas par l'intermédiaire de galeries privées marchandes72. Plusieurs raisons sont évoquées : le manque d'accessibilité de ces galeries, les mauvaises relations entre ces dernières et les artistes ou encore le rejet du circuit marchand de l'art.

J'utilise ici l'état des lieux des arts plastiques en Hauts-de-France uniquement pour contextualiser les conditions des artistes; ainsi, je n'évoquerai pas les partenariats et réseaux utilisés par les structures culturelles. Cependant, les partenariats concernent aussi les artistes. Ces derniers interviennent maintenant dans les écoles, sur le terrain de l'éducation artistique. Avec le Parcours d'Education Artistique et Culturelle, qui ambitionne l'accès de tous les élèves à une pratique artistique, l'Education Nationale est devenue le premier partenaire des artistes73; entre autres coopérations. Les artistes sont aussi sollicités dans des structures sociales pour sensibiliser à l'art de nouveaux publics, pour « créer du lien social »74. La médiation des arts plastiques auprès de certains

69 Carton, A., Dubruel, V., & Sourisseau, R. (2020). Etat des lieux des arts plastiques en Hauts-de-France. Arts Visuels Hauts-de-France, p. 46.

70 Ibid, p. 51

71 Ibid, p. 54.

72 Ibid, p. 57.

73 Ibid, p. 74.

74 Raffin, F. (2020, 24 février). Débat : Trois idées (fausses) à l'origine des politiques culturelles françaises. The Conversation.

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publics s'articule avec le champ social et ouvre la porte à des financements; la justice et la santé sont aussi des champs concernés75. Les interventions sur les territoires sont aussi utilisées, par exemple, par l'intermédiaire de Contrat Local d'Education Artistique; qui est une résidence menée avec des partenaires locaux et durant laquelle la finalité n'est pas la production d'une oeuvre mais les actions culturelles qui l'entourent, les rencontres avec des publics. Au-delà de la présentation et de la médiation de l'oeuvre, les publics participent maintenant à sa création. « Si historiquement, la médiation est connectée aux fonctions de diffusion, des formes nouvelles se sont développées, visant moins à favoriser l'accès à des oeuvres qu'à permettre l'expression et la participation du plus grand nombre. »76 Les actions des Nouveaux Commanditaires, par l'intermédiaire de la Fondation de France et l'association artconnexion en Hauts-de-France, s'inscrivent dans cette démarche dans laquelle les publics deviennent des acteurs du monde de l'art. Avec les Nouveaux Commanditaires, chaque citoyen, avec un médiateur culturel et un artiste, peut commander une oeuvre d'art et l'installer sur un territoire. L'intervention des artistes sur les territoires peut en conduire certains à se questionner sur leur rôle. « Ils peuvent alors se sentir instrumentalisés, considérés comme des animateurs. »77

L'état des lieux a permis de montrer que la rémunération des artistes n'est pas encore acquise pour toutes les structures. « En 2018, un peu plus des trois quarts (76%) des structures ayant répondu au questionnaire ont rémunéré les artistes-auteurs exposés ou accueillis en résidence. »78; soit 24% qui ne les ont pas rémunéré, par manque de ressources économiques et/ou par méconnaissance de la Loi. Les rémunérations des artistes, celles provenant des structures, se répartissent principalement entre le remboursements de frais, le paiements des droits d'auteurs, des droits de présentation publique, de notes d'honoraires et autres achats; d'équipement par exemple. Pourtant, tout comme le cursus académique, les revenus ne sont pas encore un critère pertinent pour définir qui est artiste ou non, ces derniers se définissant davantage par leur engagement, leur passion; l'art est une « vocation ».

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand