IV. Méthodologie
Mon enquête de terrain a commencé à partir
de mon stage au sein de l'association 50° Nord. Au départ, mon
immersion dans le monde de l'art contemporain, à travers 50° Nord,
a été délicate. Ne possédant que peu de
connaissances dans ce domaine, il y avait cette question, que je me posais,
d'être la bonne personne ou non pour avoir un rôle au sein d'une
telle association. J'ai alors rappelé mon cursus universitaire au cours
de l'entretien d'embauche; que je ne provenais non pas d'un cursus artistique,
ni de l'histoire de l'art, mais des sciences sociales. Ce sont pourtant mes
compétences acquises durant mes études en sciences sociales ainsi
que mon intérêt pour les questions culturelles qui ont retenu
l'attention de l'association. Malheureusement pour ma découverte du
monde de l'art contemporain, la COVID-19 ainsi que la crise sanitaire qui a eu
lieu à partir du 17 mars 2020 ne m'ont pas permis d'aller sur mon lieu
de travail, à Lille; le local de 50° Nord se situant à La
Malterie, une ancienne friche industrielle reconvertie, en 1995, en friche
culturelle. Mon stage s'étant déroulé du 7 avril au 21
juillet 2020, le télétravail a été
recommandé et je n'ai pu me rendre sur mon lieu de travail qu'à
l'occasion de certaines réunions, vers la fin de mon stage. Pour
préciser un peu mes missions, ces dernières, entre autres,
étaient d'assister Réjane
60 Couture, F. (2003). « L'exposition et la ville : entre le
local et l'international ». Sociologie de l'Art, 1-2(1),
115-130, p. 123.
61 Saez, J. (2008). « Les grandes villes et la culture : des
enjeux croisés ». L'Observatoire, 34(2), 16-20,
p. 19.
62 LeCoq, S. (2004). « Le travail artistique : effritement
du modèle de l'artiste créateur ? ». Sociologie de
l'Art, 5(3), 111-131, p. 123.
24
Sourisseau, du bureau d'études Contexts, dans la
rédaction de l'état des lieux des arts plastiques en
Hauts-de-France, avec notamment des recherches complémentaires, mais
aussi d'animer les réunions du groupe de travail qui supervisait la
rédaction. J'avais aussi pour missions la rédaction des
comptes-rendus des réunions du groupe de travail ainsi que la
rédaction du bilan des actions réalisées. D'autres
missions étaient prévues mais n'ont pu être menées
à terme suite à un report des délais.
C'est donc l'observation participante qui a été
ma première méthode d'enquête sur ce terrain particulier;
ce dernier ne se révélant qu'à travers mes interactions,
mails, appels téléphoniques, visioconférences, etc. Je
pourrai peut-être parler de participation observante tant j'ai pris au
sérieux mon rôle d'assistant de coordination de l'état des
lieux des arts plastiques en Hauts-de-France; délaissant, durant
quelques semaines, mon rôle d'étudiant. Ainsi, bien que le
télétravail ne permettait pas un réel terrain à
proprement parler, j'avais des contacts (très) fréquents avec des
professionnels de la culture, pour ne pas citer de noms. Hormis mes missions,
j'ai aussi demandé, avec l'accord de ma directrice de stage, Lucie
Orbie, secrétaire générale de 50° Nord, à
assister à d'autres réunions, celles qui relevaient du rôle
de 50° Nord comme espace de rencontres pour les acteurs des arts visuels.
Ainsi, j'ai pu participer à des réunions entre directeurs de
structures culturelles des Hauts-de-France ainsi que de Wallonie-Bruxelles. A
ce moment là, le principal problème était la
précarité croissante des artistes en lien avec le contexte
sanitaire et la fermeture des structures culturelles. Ces réunions m'ont
sensibilisé aux conditions précaires des artistes et m'ont
donné une première idée de mémoire. Cependant,
à ce moment de l'année, mes interlocuteurs étaient
principalement des professionnels de la culture et non des artistes. J'ai alors
décidé de commencer les premiers entretiens, exploratoires, pour
découvrir de nouveaux points à questionner à propos de
l'art contemporain. Ces entretiens ont été réalisés
au cours de mon stage, par Skype, avec ma directrice de stage ainsi que la
chargée de mission administration-communication de l'association, Fanny
Leroux.
J'avais aussi besoin de lectures sociologiques pour prendre du
recul, pour saisir les liens entre art et société, pour ne pas
écrire sur l'art contemporain en soi; qui n'est pas mon domaine de
compétences, je ne suis pas critique d'art. Après 3 mois et demi
de stage, il était temps de me séparer de ma posture de «
professionnel de la culture » et de redevenir un étudiant en
sciences sociales. Mes premières lectures ont été des
écrits de Nathalie Heinich. Dans un premier temps, La sociologie de
l'art m'a donné une perspective historique. Dans un second temps,
pour pouvoir avoir une posture sociologique sur l'art contemporain, sur
recommandation de mon directeur de mémoire,
25
Fabrice Raffin, j'ai lu Le paradigme de l'art
contemporain. Structures d'une révolution artistique. Ces lectures
ont été complétées par d'autres livres et articles
par la suite.
Etant en télétravail, je n'ai pas pu visiter de
structures culturelles ni rencontrer d'oeuvres d'art contemporain durant mon
stage. Quelques observations étaient pourtant nécessaires pour
parler réellement d'immersion dans le monde de l'art contemporain. J'ai
ainsi attendu, au début de l'été, la réouverture de
certaines structures culturelles pour préparer un week-end culturel et
touristique à Dunkerque, troisième ville des Hauts-de-France
après Amiens; en dehors de la Métropole Européenne de
Lille. C'est donc au FRAC Grand Large ainsi qu'au Lieu d'Art et Action
Contemporaine que j'ai commencé à me confronter à l'art
contemporain. A côté de ces visites, j'ai aussi visité
quelques galeries à Lille; ces espaces marchands de l'art, moins
institutionnels que des structures telles que les musées ou encore les
FRAC. Ces galeries, Carré d'artistes, Provost-Hacker et Jean-Luc Moreau,
pour les citer, restaient encore très picturales. J'aurais
préféré me confronter à l'art contemporain sur mon
terrain d'enquête, c'est-à-dire à Amiens, mais, au moment
de la rédaction de ce mémoire, le Musée de Picardie ne
comporte encore que quelques oeuvres contemporaines et le FRAC Picardie est en
rénovation suite à la nomination de Pascal Neveux comme nouveau
directeur; Pascal Neveux, président du CIPAC, la
Fédération des Professionnels de l'Art Contemporain.
Au fil de ma découverte du monde de l'art contemporain,
de mes lectures, alors que je ne savais pas encore comment écrire ce
mémoire, il m'a été proposé, par mon directeur de
mémoire, de travailler sur le Parcours d'Art Contemporain d'Amiens
Métropole; en lien avec une conférence du laboratoire de
recherche Habiter Le Monde prévue pour le vendredi 27 novembre 2020.
Cela me paraissait intéressant car Amiens a l'intérêt
d'être à proximité de mon lieu de vie, est la ville au sein
de laquelle j'ai suivi tout mon cursus; et, le terrain de l'art contemporain
étant nouveau pour moi, l'étudier à Amiens me permettait
de rester dans une certaine zone de confort géographique. D'autant que
la thématique de cette seconde édition du Parcours d'Art
Contemporain, « Art, territoires : Créer et habiter »
s'inscrit dans ma démarche, c'est-à-dire la déconstruction
de l'art comme indépendant de toute réalité sociale, et
dans une approche sociologique de l'art et de la ville, de
l'interdépendance de ces derniers; l'art apportant autant à la
ville que la ville est une source d'inspiration pour l'art.
Pour répondre à ces questions, « Quel
propos l'artiste porte-t-il sur la ville ? », « Quelle conception de
la ville révèle sa démarche artistique ? »,
j'utiliserai, vous l'aurez compris, un des propres de la sociologie,
l'enquête de terrain. « Le travail du sociologue doit être
fondé sur
26
l'enquête. Ce travail d'enquête est sa
spécificité et la condition de sa scientificité.
»63 Et ces questions ne pouvaient avoir meilleurs
interlocuteurs que les artistes en question; c'est-à-dire les 12
artistes participant au Parcours d'Art Contemporain. Les coordonnées de
ces artistes m'ont été transmises par Fabiana De Moraes, ancienne
étudiante du Master 2 Culture, Patrimoine et Innovations
Numériques; par l'intermédiaire de Fabrice Raffin. Toutes les
demandes d'entretien ont alors été transmises par mail au milieu
de l'été. La durée de ces entretiens a varié selon
mes interlocuteurs, allant de 50 minutes à 1h40, mais je m'en suis tenu
aux mêmes questions64; ces dernières étant
ouvertes aux aléas des entretiens et concernaient leur parcours, leur
activité et leur oeuvre pour le Parcours d'Art Contemporain. Certains de
ces entretiens se sont déroulés sur la Place Gambetta à
Amiens, d'autres aux domiciles des artistes, qui sont souvent leur atelier
aussi, à Amiens ou encore à Lille; un des entretiens a eu lieu
par Skype, l'artiste en question étant en Bretagne pour un autre projet
artistique. J'ai aussi réalisé un entretien avec Fabiana De
Moraes, chargée de projets Patrimoine et Arts Visuels d'Amiens
Métropole, pour saisir les conditions d'apparition du Parcours d'Art
Contemporain, son rôle et ses ambitions.
Pour revenir à mon stage au sein de 50° Nord et
à ma mission d'assistant de coordination de l'état des lieux des
arts plastiques en Hauts-de-France, cette dernière m'aura permis une
première connaissance du terrain et me permettra de répondre
à une question qui s'est posée au cours de mon enquête : En
2020, qu'est-ce qu'être un artiste en Hauts-de-France ?
|
|