Le choix d'une politique d'équilibrage financier
correspond à celui d'un niveau de risque envisagé par
l'entreprise. Une situation de trésorerie ne se subit pas
forcément : l'entreprise peut faire des choix de politique
financière qui influenceront le risque de liquidité pris.
L'entreprise cherchera à clôturer son exercice au moment où
son BFR conjoncturel est au plus bas afin de présenter aux tiers une
situation bilancielle favorable au regard du BFR à financer.
Pour ce faire trois scénarios sont possibles. Chaque
scénario correspond à une politique financière qui passe
par le choix d'une fixation du FR en fonction du BFR conjoncturel à
financer. Cette politique implique une plus ou moins grande prise de risque
financier de liquidité :
· Première politique : Fixer le FR au niveau
du BFR maximum
Cette politique reflète une aversion relativement
forte pour le risque de liquidité : le solde de trésorerie est
supposé n'être jamais négatif. Il ne peut au minimum,
qu'être nul (cas dans lequel le fonds de roulement devient égal au
BFR maximum). Les financements de court terme s'avèrent donc inutiles.
L'entreprise présente une forte autonomie financière de court
terme et donc une faible dépendance quotidienne vis- à-vis de ses
banques.
Par contre, une bonne gestion de trésorerie passera
par des recours à des placements financiers (blocages de
trésorerie) à court terme, afin d'investir au meilleur taux, les
excédents de trésorerie qui résulteraient de l'adoption
d'une telle politique.
Néanmoins, les coûts d'une telle politique sont
loin d'être négligeables en termes de besoins en capitaux
permanents nécessaires pour alimenter le fonds de roulement important
qu'impose ce choix. Par conséquent, les ressources ainsi
mobilisées et même placées pourraient être
utilisées à des emplois plus rentables, notamment dans des
investissements.
Cette politique peut être choisie par des entreprises
qui ont un accès privilégié en termes de coût et de
volume aux capitaux permanents : ceci est souvent le cas des grandes
entreprises cotées ou encore les holdings. Ces derniers optant
généralement pour un mode de croissance externe passant par des
prises de participation et des rachats de sociétés, ont
spécialement
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besoin d'une forte autonomie financière
vis-à-vis des banques pour mener à bien leur stratégie de
développement. Cependant, des tensions quotidiennes de trésorerie
entraveraient probablement leurs décisions stratégiques.
Cette politique est également particulièrement
rentable lorsque le coût de mobilisation des capitaux permanents est
inférieur à celui des concours bancaires à court terme.
· Deuxième politique : Fixer le fonds de
roulement au niveau du BFR minimum
Cette politique est à l'opposé de la
précédente. Elle représente le choix, souvent contraint,
de nombreuses sociétés pour lesquelles on constate une
insuffisance de capitaux à long terme, telles que certaines PME, ou des
entreprises en création ou encore en phase de lancement sur le
marché, qui ont un mode de croissance très rapide, de mobiliser
des besoins de financement importants à la fois dans les investissements
et dans le BFR généré par une activité en hausse
permanente.
Si l'exigence en capitaux permanents est ici moins importante
que dans le cas précédent, le niveau de risque financier de
liquidité généré est lui par contre, très
important, puisque le bouclage du bilan se fait généralement par
recours systématique aux concours bancaires à court terme
(exemple : découvert bancaire, escompte, affacturage, etc. En effet,
dans ce cas, le BFR conjoncturel excède toujours le fonds de roulement
mobilisé, à l'exception de la période de clôture de
l'exercice.
L'entreprise n'a aucune autonomie financière à
court terme. Son équilibre financier ultime est assuré par les
concours quotidiens de ses banquiers. Dès lors, sa
pérennité est totalement liée au bon vouloir de ses
banquiers qui peuvent à tout moment lui retirer leur confiance
étant donné la forte exigibilité des fonds
prêtés.
Les fonds apportés permettant l'équilibrage
financier vont provenir des :
- Crédits accordés en contrepartie d'existence
à l'actif de créances d'exploitation (ex : escompte...) ;
- Crédits accordés à l'entreprise sans
contrepartie à l'actif, de créances d'exploitation (ex :
découvert, crédit spot...).
Il peut être rentable de choisir une telle politique
lorsque le coût des dettes financières à court terme est
inférieur à celui des capitaux à long terme.
·
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Troisième politique : Fixer le fonds de
roulement au niveau d'un BFR moyen, type BFR moyen
Cette politique pourrait être présentée
comme la solution optimale recommandée. On retient ici une solution
intermédiaire. A certaines périodes de l'année, compte
tenu de la saisonnalité de l'activité ; l'entreprise utilise des
crédits de trésorerie pour assurer l'équilibre financier
du bilan ; son fonds de roulement devient alors inférieur à son
BFR conjoncturel. A d'autres périodes, l'entreprise dégagera des
excédents de trésorerie qui pourront faire l'objet de placements
financiers ; son fonds de roulement devenant alors supérieur à
son BFR conjoncturel.
Le coût d'une telle politique est plus
modéré que celui de la première politique
présentée car les capitaux permanents les plus onéreux ne
sont pas systématiquement utilisés. Alors que le risque de
liquidité est également plus faible que dans la deuxième
politique et la dépendance de l'entreprise à l'égard de
ses banquiers n'est plus permanente.
L'entreprise gagne donc en autonomie financière
à court terme ce qui accroît éventuellement son pouvoir de
négociation en matière de conditions bancaires. De plus,
l'entreprise pourra alterner des périodes d'excédents de
trésorerie dont le placement assurera des produits financiers, avec des
périodes de déficits de trésorerie dont le financement
générera des charges financières en partie
compensées par les produits financiers antérieurs.
Finalement, quel que soit le cas retenu, les moyens d'action
pour restaurer l'équilibre financier menacé d'une entreprise,
sont au nombre de deux, chacun n'étant pas exempt de risques. Parmi les
actions adoptées dans cette politique on trouve :
Actions de haut de bilan visant à augmenter le
fonds de roulement :
- Augmentation de capital avec un risque lié à
la stabilité de l'actionnariat actuel.
- Augmentation de l'autofinancement avec le risque de devoir
diminuer les versements de dividendes et donc de générer le
mécontentement des actionnaires surtout les plus financiers d'entre
eux.
- Augmentation des emprunts à moyen et long terme, avec
cette fois le risque d'augmenter les charges financières de l'entreprise
et de diminuer son autonomie financière.
- Diminution de l'actif immobilisé pouvant
entraîner un vieillissement voire un appauvrissement de l'appareil de
production.
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Actions de bas de bilan visant à diminuer le besoin
en fonds de roulement :
- Diminution des volumes de stocks par une gestion en flux
tendus ou « juste à temps ».
Cette politique est souvent dangereuse en cas de rupture
d'approvisionnement.
- Diminution du crédit clients au risque de
mécontenter ces derniers.
- Augmentation du délai fournisseurs au risque
également de générer leur mécontentement (hausse
des prix, baisse de la qualité, rupture de contrat...).
Pour conclure cette partie on peut dire qu'aucune politique
d'équilibre financier n'est considérée comme étant
une théorie optimale. Chaque cas nécessite donc une analyse
détaillée des cycles d'investissements et d'activité de
l'entreprise étudiée et gérée. De plus, le choix
ultime de l'entreprise lorsque celui-ci n'est pas subi à défaut
de pouvoir être anticipé, se fait souvent sous contrainte de
pouvoir mobiliser les ressources suffisantes pour mettre en oeuvre la politique
financière choisie.
Le facteur de risque essentiel à nos yeux reste
l'insolvabilité potentielle d'une entreprise incapable de gérer
son BFR conjoncturel et qui à terme, serait contrainte de déposer
son bilan voire de cesser son activité alors que celle-ci est
globalement rentable en matière de marges industrielle et
commerciale.
Les approches que nous venons de voir ont
l'inconvénient majeur de reposer sur l'analyse statique du bilan
patrimonial et comptable de l'entreprise. Or, ce document annuel a donc une
périodicité réduite, nuisible à une analyse
pertinente d'une trésorerie qui se génère et se
dégénère quotidiennement.