Deuxième Partie :
& à son traitement technique et
social
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Chapitre 1 : Les outils opérationnels dans la
lutte contre l'insalubrité
1 / Les procédures classiques avant un
traitement purement technique de l'insalubrité
Les principales procédures en matière
d'insalubrité
Comme nous l'avons vu précédemment, les
conditions de vie peuvent être fortement perturbées par l'habitat.
Il convient donc dans un premier temps de distinguer les différents
types d'habitat que l'on peut rencontrer et qui font défaut à la
vie et à la santé de leurs occupants.
De manière générale, on parle "d'habitat
indigne" pour désigner un logement impropre à la vie humaine,
c'est une définition politique. L'habitat indigne regroupe toutefois
plusieurs catégories de logement qu'il convient de définir:
- Le logement menaçant ruine
- Le logement précaire
- Le logement inhabitable par nature
- Le logement dangereux par l'usage qui en est fait
- Le logement surpeuplé
- Le logement insalubre
- Le logement présentant un risque imminent
- Le logement avec présence de plomb
- Le logement non salubre
- Le logement indécent
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Le point commun à tous ces types d'habitat c'est qu'ils
nuisent à des degrés variables à la santé de leurs
occupants. A chacun de ces cas, correspond une procédure, des
responsabilités et des droits différents pour le
propriétaire, le locataire ou encore la police
du maire et du préfet.
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Le tableau ci-dessous va permettre de résumer les
différentes informations:
|
Définition du risque
|
Responsabilité
|
Réglementation
|
Le logement
menaçant ruine
|
Risque structurel pour
l'immeuble
(effondrement...)
|
Responsabilité du maire
|
Code de la
construction et de l'habitat
|
Le logement
précaire
|
Cas des bidonvilles
|
Responsabilité du préfet
|
Code de la Santé
Publique (article L 1331-25)
|
Le logement
inhabitable par
nature
|
On prend en compte la
nature du logement: combles, caves...
|
Responsabilité du préfet
|
Code de la Santé
Publique (article L 1331-26)
|
Le logement
surpeuplé
|
Surpeuplement dû au
propriétaire mais qui est difficile à prouver
Logement dont les
dimensions ne
correspondent pas au nombre d'occupants.
|
Responsabilité du préfet
|
Code de la Santé
Publique (article L 1331-23)
|
Le logement
insalubre
|
Est caractérisé par un
désordre important ou une accumulation de
désordres
|
Responsabilité du préfet
dans la prise de l'arrêté et la
responsabilité du maire dans le suivi des effets
|
Code de la Santé
Publique (article L 1331-26 et suivants)
|
Le logement
présentant un
risque imminent
pour la santé avec ou sans insalubrité
globale avérée
|
Une cause d'insalubrité
majeure qui met en danger dans l'immédiat la vie des
occupants
|
Responsabilité du préfet
|
Code de la Santé
Publique (article L
1331-26-1 si insalubrité globale et
article L 1331-4 si désordre unique)
|
Le logement non salubre
|
Manquements à la salubrité insuffisant pour
considérer
le logement comme insalubre
|
Responsabilité du maire
|
Règlement Sanitaire
Départementale
|
Malpropreté
massive et
stockage de
détritus
|
Souvent dus à une mauvaise appropriation du logement
|
Responsabilité du maire
|
Code de
l'Environnement
|
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Les principales procédures relèvent des pouvoirs
de police des maires et des préfets permettant de lutter contre
l'habitat insalubre ou dangereux. Celles-ci ont été
améliorées ou simplifiées par l'ordonnance du 15
décembre 2005, la loi " ENL " du 13 juillet 2006 qui l'a
ratifiée, le décret d'application en date du 8 novembre 2006 et,
enfin, ont été complétées par l'ordonnance du 11
janvier 2007.
Nous allons étudier plus en détail la mise en
place de l'arrêté d'insalubrité. Cette procédure est
la plus courante sur le territoire roubaisien.
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L'arrêté d'insalubrité
L'arrêté d'insalubrité est mis en place
lorsqu'un immeuble constitue un danger pour la santé de ses occupants,
ou de celles des voisins, du fait de son état ou de ses conditions
d'occupation. Cet arrêté préfectoral s'instruit dans le
cadre d'une procédure formalisée. La loi SRU du 13
décembre 2000 avait réformé cette procédure.
L'ordonnance du 15 décembre 2005 en a précisé certains
points sans la modifier, à la fois pour permettre le traitement efficace
des cas les plus urgents, et pour sécuriser les droits des occupants.
Lorsque le maire d'une commune ou le président d'un
établissement public de coopération intercommunale sont
dépourvus d'un Service Communal d'Hygiène et de Santé (ce
qui est le plus fréquent puisqu'il n'y a que 208 SCHS en France), ils
peuvent saisir le directeur de l'Agence Régionale de Santé pour
lui demander d'établir un rapport sur l'insalubrité
suspectée. C'est l'ARS qui est alors tenue d'instruire le dossier. Tout
locataire ou occupant d'un immeuble peut également saisir l'ARS.
Si la commune où est situé l'immeuble est
dotée d'un SCHS comme c'est le cas à Roubaix, il appartient alors
à celui-ci d'instruire le dossier d'insalubrité. La commune
bénéficie en effet de pouvoirs d'Etat dérogatoires
complétés par une dotation globale de fonctionnement
spécifique pour instruire les affaires d'insalubrité.
Du signalement à la visite du
logement
Le premier contact dans une situation d'insalubrité est
souvent initié par une plainte, un signalement de l'occupant
lui-même ou d'un tiers. Les Inspecteurs de Salubrité doivent
apprécier l'urgence de l'intervention à partir du discours du
signalant. Cela n'est cependant pas toujours évident puisque le
plaignant peut, volontairement ou non, surestimer ou à contrario sous -
estimer l'état de son logement. La plainte a un caractère
très subjectif. Elle peut également être motivée par
des objectifs différents de la remise en état du logement: un
souhait de relogement, un conflit de voisinage, des problèmes avec le
propriétaire...
Les Inspecteurs de Salubrité ont alors pour mission de
mener une enquête sur l'insalubrité potentielle du logement afin
d'avoir un point de vue objectif et technique.
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Ils effectuent une visite des lieux afin de mettre en place un
diagnostic technique complet de l'immeuble. Les différents
désordres constatés dans le logement sont identifiés par
un examen visuel précis de l'ensemble des locaux.
Ce relevé d'informations techniques est
complété d'une sensibilisation des occupants sur les
conséquences de l'insalubrité sur leur santé. Ce point
permet de limiter les causes d'insalubrité du logement dues à
l'occupation et aux comportements inadaptés de l'occupant.
Afin de déterminer une éventuelle mauvaise
appropriation du logement, les agents du SCHS prennent en compte divers
éléments comme la propreté et l'hygiène du
logement, la présence d'animaux et leur impact sur la tenue du logement,
l'encombrement des lieux... Cette approche plus "humaine" de l'enquête de
salubrité est très inspirée des pays anglo-saxons
où l'on prend en compte les risques pour la santé induits par le
mode d'occupation et même parfois le ressenti subjectif de l'occupant.
Cette démarche n'est cependant pas encore systématique sur tout
le territoire national.
Un courrier reprenant l'essentiel du compte rendu de la visite
et les conseils de l'Inspecteurs de Salubrité est ensuite adressé
aux occupants du logement.
Le plus souvent, les propriétaires ne sont pas
présents lors de cette visite, leur présence n'est en effet pas
requise. Leur autorisation de visiter le logement est toutefois
nécessaire. Aucune visite ne peut être possible sans l'accord du
propriétaire, toutefois leur refus peut être puni par la loi.
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Le diagnostic technique
Un diagnostic est établi par l'Inspecteur de
Salubrité qui va décrire l'intégralité des
désordres puis les évaluer à l'aide d'une grille de
cotation (annexe 1) permettant ainsi de graduer le degré
d'insalubrité du logement. Il établira ensuite un rapport dans
lequel il va qualifier les différents désordres constatés,
leur gravité et les solutions proposées (travaux de sortie
d'insalubrité ou caractère irrémédiable en tenant
compte de l'évaluation du coût des travaux).
- Une première partie du rapport permettra de
présenter l'immeuble, le statut d'occupation des occupants et les
caractéristiques des ménages ainsi que les données
recueillies sur la propriété et la gestion.
- Une deuxième partie mettra en évidence les
désordres constatés dans le logement.
- Une troisième partie dégagera une
procédure ciblée au vu des informations
récoltées.
- Et enfin, une dernière partie, permettra de proposer
des mesures à prendre pour traiter l'insalubrité.
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Le CODERST et les effets de
l'arrêté
Le CODERST est le Conseil de l'Environnement et des Risques
Sanitaires et Technologiques. C'est le nouveau patronyme du Conseil
Départemental d'Hygiène, né en 1905 et disparu en 2006. Il
se réunit une fois par mois sur diverses thématiques dont les
risques sanitaires liés à l'habitat. C'est une instance de
concertation et de proposition pour la prise de décision du
préfet. Il réunit des représentants de l'Etat,
d'associations, des collectivités territoriales et des
personnalités qualifiées comme des médecins le cas
échéant...
Le CODERST représente la phase contradictoire de la
procédure : le propriétaire et les occupants y sont
conviés et peuvent y exposer leur point de vue.
Dans le cas d'un arrêté d'insalubrité, le
CODERST se prononce à la fois sur la réalité et les causes
de l'insalubrité et sur les solutions permettant d'y remédier. Il
ne prend pas en compte d'autres aspects que les facteurs d'insalubrité.
Les problèmes d'appropriation des lieux peuvent être
exprimés en cours de séance mais ils ne sont pas
déterminants. L'avis du CODERST sur la qualification de
l'insalubrité - remédiable ou irrémédiable - et sur
les mesures nécessaires à prendre pour y remédier aboutira
à un arrêté préfectoral. Il existe deux cas
d'arrêté d'insalubrité :
- Dans le cas d'une insalubrité remédiable, le
conseil précise les mesures à appliquer par le
propriétaire afin de traiter l'insalubrité, ainsi que le
délai imparti pour leur réalisation. Il peut également
prescrire, si la situation le nécessite, une interdiction temporaire
d'habiter et d'utiliser les lieux le temps de la réalisation des travaux
et un hébergement des locataires par le propriétaire. Les effets
de l'arrêté commencent à la date de sa notification.
En cas de non-exécution volontaire des travaux, le
maire ou à défaut, le préfet y procède d'office,
sans autorisation préalable du juge et après une mise en demeure
restée infructueuse à l'issue d'un délai
précisé qui ne peut être inférieur à un mois.
Ces travaux dits d'office sont réalisés au frais du
propriétaire. En attendant la réalisation des travaux, les
locataires sont protégés et le paiement des loyers est suspendu
de plein droit dès le premier jour qui suit la notification de
l'arrêté préfectoral. Le propriétaire doit assurer
l'hébergement de ses locataires en cas d'interdiction temporaire
d'habiter et ce à ses frais. S'il est défaillant dans cette
obligation, l'hébergement se fait par la collectivité au frais du
propriétaire.
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- Dans le cas d'une insalubrité
irrémédiable c'est à dire: " lorsqu'il n'existe aucun
moyen technique de mettre fin à l'insalubrité, ou lorsque les
travaux nécessaires à sa résorption seraient plus
coûteux que la reconstruction", l'arrêté préfectoral
interdit définitivement l'habitation de l'immeuble et les occupants de
l'immeuble doivent être relogés par le propriétaire
puisqu'il n'y a pas de prescription de travaux. Des mesures d'urgence
concernant la santé et la sécurité des occupants avant
leur relogement peuvent également être prescrites dans
l'arrêté. L'arrêté prévoit ensuite
l'interdiction à l'accès et l'usage des lieux, voire la
démolition de l'immeuble.
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