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Une analyse de l'impact de la libéralisation agricole sur le revenu agriculteurs. Le cas de la filière riz de la vallée de l'Artibonite.


par Ernson Augustin
HEC-Liège/ESFAM - Master en Science de gestion 2018
  

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Chapitre III : Présentation de la riziculture haïtienne

Comme tous les PMA, l'agriculture est un secteur très important dans l'économie haïtienne en dépit du fait que sa production, sa valeur ajoutée et sa participation dans la création d'emploi ne cessent de diminuer. Considérée comme la principale source de devise du pays durant les années 1960-70, sa contribution dans la formation du PIB était de 45% (MARNDR. 2010a) contre 22% en 2013 (CIRAD. 2016), soit une diminution de 23 points de pourcentage durant la période considérée. Pour une grande portion de la population rurale, soit 80% environ, l'agriculture est le principal créateur d'emploi et moyen de subsistance (MAEE & DGCID. 2008).

La riziculture haïtienne a un rôle majeur à jouer dans la lutte contre l'insécurité alimentaire et l'amélioration du niveau de vie des agriculteurs. Malheureusement, livré à eux même, les riziculteurs haïtiens ont un accès très limité aux intrants agricoles de qualité. Ils utilisent des techniques archaïques et des outils rudimentaires. De plus, la riziculture est réalisée sous les caprices de la nature puisque l'Etat s'est désengagé et n'investit que de faibles montants qui se révèlent insuffisants pour le curage des canaux d'irrigation. Une situation qui pénalise la production du riz et contribue à l'appauvrissement des riziculteurs.

Ce chapitre concerne la présentation de la riziculture Haïtienne. Il revient d'abord, de relater les différentes composantes de l'offre et de la demande du riz et d'exposer ensuite le circuit de commercialisation ainsi que le mécanisme de la formation des prix du riz produit dans la Vallée de l'Artibonite.

3.1 Une offre du riz dominée par les importations

L'offre du riz doit répondre à la demande de consommation et d'exportation. La production est insuffisante pour répondre à la demande croissante de la population haïtienne. Pour résoudre ce problème, l'importation du riz remplace la production locale. Son poids dans la disponibilité alimentaire augmente rapidement au détriment de la production des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite, ce qui augmente la vulnérabilité de ces derniers et diminue leurs revenus. L'aide alimentaire quant à elle persiste et se stabilise entre 2% et 4% environ dans la disponibilité du riz. Toutefois, dans les périodes de catastrophes humaines (Coup d'État de 2004) ou naturelles (les inondations de 2004 et de 2008, le tremblement de terre de 2010 et la sécheresse de 2012) elle peut augmenter, comme c'était le cas en 2010 où elle représentait jusqu'à 8% de l'offre alimentaire en Haïti. L'aide alimentaire est soit bilatérale soit multilatérale (avec des Organismes comme le PAM...), mais quel que soit le cas de figure qui se présente, elle est dominée par les Etats-Unis à plus de 80%. Ces trois composantes de la disponibilité alimentaire en riz, à savoir « la production,

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l'importation et l'aide alimentaire » [(Duvivier, P. & Corantin, H. 2011) ; (CJ-Consultants, 2012) ; (FAO, 2015)] seront présentées dans les prochains paragraphes.

3.1.1 Une production rizicole insuffisante

Comme la totalité des autres denrées cultivées en Haïti, la production du riz est saisonnière et couvre jusqu'à trois (3) campagnes4 par année ; Printemps (Mars - Juillet), Automne (Août - Novembre) et Hiver (Décembre - Mars) (MARNDR. 2015). Hormis le département du nord-ouest, le riz est cultivé dans tous les départements du pays. L'Artibonite, département dans lequel bon nombres de ménages se trouvent en situation d'insécurité alimentaire [(FEWS NET. 2014) ; (Lybbert, T.J., Turiansky, A & Etienne, J.R. 2017)] couvre plus de 85% de la production totale du riz en Haïti, ce qui fait de lui la principale zone de production, aussi paradoxale que cela puisse apparaître. Il possède une superficie rizicole de 28,000.00 hectares soit 73% sur un total de 38,000.00 hectares et d'autres potentialités agricoles tel que « le fleuve de l'Artibonite » (CJ-Consultants. 2012).

La production du riz, activité essentielle et source principale de revenu pour près de 130,000.00 ménages haïtiens dont 90,000.00 dans la Vallée de l'Artibonite (FAO. 2015), évolue très faiblement au fil du temps. Elle n'arrive à répondre qu'à seulement 20%5 de la demande globale de la population [(MARNDR. 2009) ; (MARNDR. 2015)]. Cette production est insuffisante pour répondre à la demande croissante de la population à cause de la poussé vertigineuse de cette dernière et le changement de ses habitudes de consommations.

L'analyse des données publiées par le Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR) concernant l'évolution de la production du riz en Haïti nous laisse observer que cette dernière est relativement faible. Elle est passée de 155,031.77 TM en 2014 contre un total de 228,894.00 TM en 2017, soit une augmentation de 47.64% durant ces 4 dernières années. Par ailleurs, la production rizicole de l'année 2017 a enregistré une augmentation de 33.00% par rapport à l'année 2016. Elle passe de 172,144.71 TM à 228,894.00 TM. Cette hausse de la production du riz est le résultat, paraît-il, de l'augmentation de la surface cultivée et de l'accès à l'engrais par les agriculteurs dans le cadre du Programme Présidentiel baptisé « Caravane Changement ». Il paraît évident de signaler le fait que, la Vallée de l'Artibonite, à elle seule, assure plus de 85% de la production totale du pays quel que soit la période considérée. Entre 2014 et 2017, la production du riz enregistrée dans la Vallée passe de 135,029.96 TM à un total de 202,982.00

4 Certains auteurs relatent que dans la Vallée de l'Artibonite, la production de riz se fait sur deux (2) saisons : la saison pluvieuse et la saison sèche.

5 12% produit dans la Vallée de l'Artibonite contre 8% pour toutes les autres régions

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TM soit 87.10% et 88.66% consécutivement de la production rizicole totale de la République. La figure 3.1 qui suit nous donne une représentation de l'évolution de la production du riz en Haïti par région.

Figure 3.1 : Evolution de la production du riz en TM par Régions entre 2014 et 2017

250,000.00

200,000.00

150,000.00

100,000.00

50,000.00

0.00

135,029.96

Evolution de la production du riz en TM par region entre 2014 et 2017

2014 2015 2016 2017

131,958.34

Haïti Vallée de l'Artibonite Autres

116,218.38

172,113.71

156,139.65

228,894.00

202,982.00

25,912.00

Source : Calculs réalisés par l'auteur à partir des données du MARNDR (2018)

155,031.77

20,001.81

15,739.96

15,974.06

La riziculture haïtienne est caractérisée par une faible productivité (Lybbert, T.J., Turiansky, A & Etienne, J.R. 2017). De faibles rendements à l'hectare (MAEE & DGCID, 2008), soit une quantité qui varie entre 2 et 3 tonnes/h (CJ-Consultants, 2012) ont été enregistrés durant ces dernières années. Entre 2008 et 2011, parmi certains pays de la Caraïbe, Haïti a enregistré le rendement céréalier moyen le plus faible, soit 941.00 TM contre 2,325.00 pour le Cuba et 3,299.00 TM pour la République Dominicaine (FEWS NET, 2014). Cette faible productivité peut être expliquée par plusieurs facteurs parmi lesquels nous pouvons citer :

D'abord, l'utilisation des outils archaïques et peu diversifiés en Haïti en générale et dans la Vallée de l'Artibonite en particulier. En 2009, les résultats du Recensement Général de l'Agriculture (RGA) montrent que l'utilisation des équipements et matériels agricoles reste faible puisqu'un total de 2,733.00 tracteurs et 5,591.00 pompes d'irrigations seulement a été recensé (MARNDR, 2012). De plus, il parait qu'en 2010 les agriculteurs possédaient généralement une machette, une houe, une dérapine ou une pelle, ainsi, la préparation du sol se fait manuellement ou à l'aide de la traction animale (MARNDR, 2010b).

Ensuite, les riziculteurs haïtiens ont un faible accès aux services financiers (MARNDR, 2009). L'analyse des données publiées par le MARNDR relate que 74.9% des exploitants recensés en 2009 affirment que le manque de ressources financières est la cause fondamentale qui entrave le

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développement de leurs exploitations contre seulement 1.9%, soit 52,725.00, qui ont accès au crédit financier (MARNDR, 2012). De plus, il paraît que le système bancaire privé haïtien accorde moins d'1% du total des crédits alloués à l'économie aux activités agricoles en 2007 (MARNDR, 2010a). Créé en 1993, le Bureau de Crédit Agricole (BCA) est décapitalisé et n'accorde que 20% de ses prêts au secteur agricole. Le caractère saisonnier de l'agriculture combiné avec le taux de risque élevé et le délai de remboursement très court (mensuel) (FAO & PAM. 2010) sont les principales causes qui peuvent expliquer cette situation.

En outre, les intrants agricoles de qualité sont peu disponibles malgré les efforts de l'Etat haïtien qui les subventionne depuis le début des années 2000. Les subventions étatiques permettent de diminuer le prix de l'engrais de 300%, passant de 2000 Gourdes à 500 Gourdes le sac de 45 Kg entre 2008 et 2010 (FAO & PAM, 2010). Toutefois, nombreux sont les paysans haïtiens (37% environ) qui utilisent des grains tirés de leurs productions ou achetés sur le marché rural comme semences. 15% des ménages seulement utilisent des semences améliorées contre 61% des paysans n'ont aucun accès aux intrants agricoles de qualités (CNSA, 2011a).

Par ailleurs, la parcellisation de l'agriculture haïtienne est considérée comme l'une de ses contraintes majeures. Selon les données du MARNDR, en 2009, un total de 1,018,951.00 exploitations agricoles ont été recensées dans le pays. Elles se trouvaient sur un total de 736,241.50 carreaux de terre, ce qui signifie que la superficie de chaque exploitation agricole est de 0.72 carreaux de terres en moyenne. La quasi-totalité de ces exploitations sont de petite taille. Environ 73.9% se trouvent sur moins d'un carreau de terre. Chaque exploitation a en moyenne 1.8 parcelles. La superficie totale des parcelles s'élève à 768,439.4 carreaux de terres. Chaque parcelle a en moyenne une superficie de 0.42 carreaux de terre (MARNDR, 2012). Toujours selon les données du MARNDR, le département de l'Artibonite compte un total de 122,040.8 Carreaux de terre agricole pour un total de 163,588.00 exploitations, soit moins d'un carreau en moyenne par exploitation. De plus, une augmentation de la parcellisation accompagnée d'une diminution de la taille moyenne des parcelles a été constatée, passant de 1.55 hectares en 1950 à 0.75 et 0.5 hectares en 1979 et 1995 respectivement (Baptiste, BJ. 2005).

En fin, le mauvais état des infrastructures hydro-agricoles, causé par le désengagement de l'Etat et le passage à répétition des catastrophes naturelles telles les inondations, les cyclones... [(Georges, E.L. 2010) ; (MARNDR, 2010b) ; (FEWS NET, 2014)] est aussi considéré comme une contrainte majeure de la riziculture haïtienne (MPCE, 2008). Selon les inventaires du MARNDR, en 1999, 243 systèmes d'irrigation ont été identifiés, couvrant une surface de 75,000.00 hectares de terres. Le seul grand système irrigué de la république se trouve dans la Vallée de l'Artibonite, il

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couvre 38,000.00 hectares de terres. Toutefois, ses infrastructures ont connu des détériorations avec la libéralisation de la riziculture haïtienne (MARNDR, 2009).

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci