Le législateur OHADA dans l'harmonisation du droit bancaire.par Maxime TAKPONON Université de Parakou - Master en Stratégie et Ingénierie Juridique des Entreprises 2018 |
CONCLUSION .....................................................................61REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES........................................62 TABLE DES MATIERES.................................64 INTRODUCTION« Dans les États qui font le commerce d'économie, on a heureusement établi des banques, qui, par leur crédit, ont formé de nouveaux signes des valeurs. » Dans un contexte où la mondialisation économique tire avec elle bon nombre de contraintes d'adaptation, les Etats, dans leurs politiques monétaires, ont fait le pari de l'unité selon les régions. L'intégration économique via de grands espaces souverains, chapeautés par une organisation super étatique à semblé être le choix le plus judicieux un peu partout dans le monde. Il est aisé de le constater en Europe avec l'Union Européenne (UE) ou ici en Afrique avec la CEDEAO, l'UEMOA ou encore l'OHADA. L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA)1(*) est justifiée par ses concepteurs par une volonté d'harmoniser et d'unifier le droit des affaires dans les Etats parties à ce traité. Son objet se décrit par l'élaboration et l'adoption de règles communes simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies, par la mise en oeuvre de procédures judiciaires appropriées, et par l'encouragement au recours à l'arbitrage pour le règlement des différends contractuels2(*). Au titre des vocations de l'OHADA, les aspects organisationnels du droit des affaires ont été mis en surbrillance à travers plusieurs actes uniformes, dédiés à la création, à l'organisation et au fonctionnement de l'entreprise. Ainsi, le traité OHADA s'adapte au fil des besoins réels de l'entreprise, en particulier dans les domaines du financement et du management3(*). Ainsi, au cours de sa vie et en particulier lors de sa phase de démarrage, l'entreprise est amenée à lever des fonds. Ici, les banques se mettent clairement en avant : ce sont elles qui se sont spécialisées dans la gestion de la monnaie et de tous ses aspects. Aussi, les banques et établissements financiers assurent une mission très essentielle dans la vie économique des entreprises, et ainsi des nations, en rapport avec leur pouvoir de création monétaire, leur rôle primordial dans la mobilisation de l'épargne ainsi que dans les relations financières extérieures4(*). L'importance des engagements qu'ils portent et du risque systématique que leur défaillance fait courir à l'ensemble de l'économie justifie la création d'un cadre réglementaire particulier pour assurer une certaine sécurité à ce domaine sensible. Le droit bancaire répond avec effectivité à la gestion du monde de la finance. Il serait intéressant de chercher à connaître les motivations qui ont poussé les créateurs de lois à penser une réglementation aussi spéciale que le droit bancaire. Pour apporter de la perspicacité à l'analyse de notre sujet, intéressons nous d'abord à une définition claire de ce qu'est un législateur. L'étymologie du mot législateur vient du latin legislator; de legis, génitif de lex, et lator « celui qui propose », de latum, supin de ferre « porter ». Pour Montesquieu, il est tout simplement « La Personne qui fait les lois, qui donne les lois à son peuple». La communauté étant le caractère de ce qui est commun à plusieurs personnes, le législateur communautaire, ici législateur OHADA, peut être défini comme celui qui adopte des règles qui doivent recevoir application dans toutes les parties membres à sa communauté, et ce, partant de l'Etat au citoyen, personne physique et personne morale. Il est donc conséquent que tous les aspects de la société, soumis à législation communautaire, fassent preuve d'une attention particulière par celui qui fait les lois pour la communauté ; le droit bancaire ne pouvant être passé sous silence, car faisant objet de notre étude. Il est quant à lui défini comme l'ensemble des textes régissant le statut des établissements de crédit et contrôlant leurs activités, ainsi que les règles concernant les opérations de banque. Le rôle du législateur est donc clairement de fixer les règles, les principes dans un domaine particulier, dont celui du monde de la banque, et ainsi de s'affirmer par la présence de lois, pensées par lui, mais pour l'intérêt de la communauté. Le droit OHADA ne définit pas le droit bancaire. Il le considère comme un « droit spécial des affaires5(*) » à cause de la diversité de ses sources et de l'existence d'une législation déjà harmonisée au niveau communautaire6(*). L'histoire du droit bancaire se retrace à travers l'histoire très ancienne de la banque elle-même. Les premières traces du métier de banquier apparaissent dès l'Antiquité (Code d'Hammourabi vers 1700 avant J.-C.). Il prend son véritable essor à partir du Moyen Âge malgré l'hostilité de l'Église catholique pour les métiers de l'argent (prohibition du prêt à intérêt). Le rôle du banquier se diversifie progressivement: d'intermédiaire dans les opérations de change de monnaies dans les foires, les banques deviennent dépositaires des fonds qu'on leur confie (coffre-fort) puis dispensateurs de crédit participant ainsi au développement du commerce national et international, terrestre et maritime7(*). L'activité d'émission monétaire en Afrique de l'Ouest a une histoire vieille de plus de 150 ans. Son origine remonte à la Banque du Sénégal, créée par décret du 21 décembre 1853, signé par Louis Napoléon Bonaparte. Elle a par la suite été assurée par divers établissements dont la Banque de l'Afrique Occidentale (de 1901 à 1955), l'Institut d'Émission de l'Afrique Occidentale Française et du Togo (de 1955 à 1959) et, enfin, la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (à partir de 1959). Après l'accession des États ouest africains à l'indépendance, en 1960, et surtout à la suite de la signature du traité du 12 mai 1962 instituant l'Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), la BCEAO est devenue un établissement public international, géré par un Conseil d'Administration composé de représentants des Etats membres de l'Union et de l'Etat français.8(*) Au Bénin, les textes légaux et réglementaires qui constituent l'essence du droit bancaire sont nés en même temps que l'érection des divers organes centraux de gestion de la monnaie, ainsi que des différentes directives qui gouvernent l'ensemble de l'espace UEMOA. L'intégration financière de l'UEMOA à d'abord été impulsée par le secteur bancaire. Devenant ainsi élément majeur d'intégration, l'économie africaine a vu de grandes banques voir le jour et participer à des échanges commerciaux d'importance. Le cas le plus concret est la création de l'Afreximbank9(*), mise en route dans l'objectif de financer les échanges commerciaux avec les économies les plus en croissance de la planète. C'est aussi dans ce contexte que plusieurs rencontres internationales ont vu le jour comme le Forum International de la Finance en Afrique Subsaharienne10(*), dont le thème central a été de revisiter le modèle bancaire africain et de s'imprégner d'une culture financière réciproque. Le choix de ce sujet a semblé opportun. Dans un contexte ou les banques sont les premiers acteurs de la finance, et cela sur le plan mondial, les Etats, les Nations, les Super Etats et toutes les entités ayant le souci de toute croissance économique durable ne peuvent se passer de ces acteurs aujourd'hui pratiquement incontournables. En effet, le rôle de grandes organisations bancaires à vocation régionale se font de plus en plus remarquer. C'est le cas notamment de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD)11(*) ou de la Banque Africaine de Développement (BAD) qui réalisent des investissements directs importants dans les économies des pays de l'OHADA. Ainsi, face à la toute puissance de l'argent, il est encore plus important de savoir qui la contrôle et quels sont les textes qui permettent d'encadrer le domaine afin d'éviter toute dérive pouvant mettre en danger la stabilité économique d'un pays. Les recherches conduites dans le cadre d'un sujet qui retrace la présence du législateur OHADA dans la législation bancaire révèlent beaucoup d'intérêts. Mais les plus importants demeurent ceux théoriques d'ordre juridique et ceux pratiques d'ordre économique. L'intérêt théorique de cette étude réside dans le fait que l'OHADA à ce jour, n'a pas encore adopté un acte uniforme sur le droit bancaire. Ce constat fait donc remarquer une absence de législation par rapport au droit bancaire dans le droit OHADA, et ceci malgré que la bancarisation fait aujourd'hui partie intégrante du quotidien du citoyen OHADA, personne physique et personne morale. Le droit bancaire est aujourd'hui une branche autonome du droit des affaires, et est soumis à un ensemble de règles spéciales, applicables aux opérations de banque et aux personnes exerçant l'activité bancaire. L'intérêt pratique d'une telle étude permettra donc d'inciter le législateur OHADA à mettre à la disposition des Etats une législation plus concentrée dans le domaine de la banque. Elle permettra de fixer le cadre et les contours juridiques de la pratique bancaire, sans oublier la possibilité de soumettre les différents litiges naissant de l'exercice de ladite activité à des juridictions qui seront expressément désignées, et enfin, d'harmoniser le secteur de l'activité. Cette consécration sera davantage renforcée par l'élaboration d'un Acte uniforme relatif au droit bancaire dont le principe a été adopté par le Conseil des ministres de l'OHADA lors de sa session des 22 et 23 mars 2001.12(*) Ce sujet intéresse beaucoup de disciplines juridiques dont le droit des affaires, le droit bancaire, le droit commercial, le droit des sociétés commerciales et le droit des sûretés. Traiter d'un sujet comme le législateur OHADA dans l'harmonisation de la législation bancaire n'est pas chose aisée, car il englobe et embrasse beaucoup de domaines. C'est donc par souci de méthodologie et de délimitation du thème que beaucoup de domaines concernant la pratique bancaire ne seront pas abordés. Il ne sera donc pas fait lumière sur les différents types de banque et établissements financiers, l'ouverture des comptes en banque et la gestion de comptes. Il ne sera donc que dans le cadre de ce travail, étudié seulement l'état actuel de la législation sur les plans communautaires et nationaux qui constatent et consacrent le droit bancaire dans ledit espace, ainsi que les zones d'absence du législateur en chef dudit espace dans lesquelles son manque d'affirmation est assez remarqué. Dans la lecture de l'environnement réglementaire bancaire actuel, il est aisé de constater que le législateur OHADA voit sa volonté d'unifier quelque peu contrariée. En effet, Il ne contrôle pas entièrement certains pans de sa fonction harmonisatrice dont fait objet la monnaie et son contrôle. La gestion de l'argent n'est pas des moindres dans la gestion d'un super Etat, et les réalités monétaires contemporaines semblent confirmer ce rôle attribué aux plus puissants. Dans ce contexte, les différentes banques centrales ont le pouvoir total sur la monnaie, ainsi que sur tout ce qui entoure sa réglementation. Rappelons que le droit OHADA est destiné aux dix-sept (17) Etats africains dont ceux de l'espace UEMOA et de la CEMAC, et que dans cette optique, le législateur OHADA a créé des normes qui visent, en toute logique, ces deux espaces : si bien que l'on peut rester parfois perplexe. La question non simple du choix de la norme applicable se pose. Au fil de cette réflexion, certaines interrogations apparaissent et sont certainement légitimes : La communauté OHADA encadre t'elle assez l'activité bancaire? La volonté d'harmonisation n'est elle pas mise en danger par la coexistence de plusieurs systèmes juridiques: UEMOA et OHADA? Quelle est l'attitude du législateur OHADA dans cette coexistence? Est-il assez présent dans son rôle de créateur-unificateur de lois dans une atmosphère réglementaire partagée entre deux dispositifs distincts ? Afin de mener à bien ce travail, il sera adopté une méthodologie basée sur deux types de recherche : celle documentaire et celle empirique. C'est pourquoi, dans le cadre d'une démarche visant à apprécier la législation bancaire dans le contexte de l'OHADA, deux idées nous semblent pertinentes à mettre en avant. Dans un premier temps, il semble nécessaire de parcourir les aspects ou le législateur communautaire OHADA affirme sa présence dans le monde de la banque, à travers sa présence partielle(I), pour ensuite aller dans le constat d'une absence marquée. (II). * 1 Née du traité de Port Louis du 17 Octobre 1993, l'OHADA est une organisation qui regroupe aujourd'hui 17 Etats et qui a pour but de faciliter les échanges et investissements et de garantir la sécurité juridique et judiciaire des activités des entreprises afin d'assainir le climat des affaires. * 2 Article 1er, Traité OHADA * 3 T. HOEGAH, « Le nouvel environnement juridique des entreprises dans la zone franc, quel bilan ? », Actes du colloque CNDJ, 2001, p.116 * 4 Le Guide du Banquier de l'UMOA, p. 3 * 5 ISSA SAYEGH (J.) L'ordre juridique OHADA, communication au colloque ARPEJE, p.6 * 6 Encyclopédie du droit OHADA, Constat d'une uniformisation à double vitesse, p. 29 * 7 Th. Bonneau, Droit bancaire, Montchrestien, 9e éd., 2011, p. 1 à 33. * 8 Chronologie des évènements marquants de l histoire de la bceao et de l'Uemoa * 9 L'institution financière dédiée au financement et à la promotion du commerce africain prévoit de décaisser plus de 90 milliards de dollars entre 2017 et 2021, un montant plus de deux fois supérieur aux crédits qu'elle a octroyés depuis sa fondation en 1993 ; Jeune Afrique Economie, commerce panafricain : les objectifs intenables d'Afreximbank ? * 10 FIFAS 2015, Créer un modèle financier Africain, tenue du 15 au 17 Juin à Abidjan * 11 Le Bénin a bénéficié d'un prêt de 52 milliards FCFA de cette banque le 27 juin dernier * 12 Formation de Juristes Béninois en Droit OHADA(Magistrats Groupe /) Thème: Droit bancaire: Contentieux des sûretés et du crédit du 07 au 11 avril 2008, ERSUMA, 2008 |
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