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Partage de gouvernance et démocratie participative dans les projets pour adolescents: de nouveaux enjeux pour les professionnels du spectacle vivant


par Marguerite Corrieu
UCO Angers - Master Spectacle Vivant, gestion de projets culturels 2021
  

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ANNEXE 4 : Entretien avec Enora Davodeau et Adèle Thivillier

Date : 31 mars 2021

Présentation : Enora Davodeau est chargée de la communication et des relations avec les publics et Adèle Thivillier, attachée aux relations avec les publics au Préau. Elles sont arrivées dans cette équipe sensiblement en même temps que le confinement de mars 2020.

Marguerite Corrieu : « J'aurais voulu savoir pourquoi le choix d'ouvrir continuellement le hall et quels étaient les enjeux derrière cette ouverture ?

Enora Davodeau : Lucie Berelowitsch est arrivée à la tête du Préau en janvier 2019 et çà fait vraiment partie du projet du théâtre du Préau et du projet qu'elle a proposé : mettre la jeunesse au coeur du territoire en continuité avec ce qui avait été fait auparavant. [...]

Adèle Thivillier : C'est l'ancienne direction qui est arrivée en janvier 2009 qui a créé le festival A Vif, enfin le festival ADO. Et il y a depuis cette époque-là une vraie motivation à travailler avec les adolescents. Avant ça, le Préau était spécialisé jeune public, donc il faisait tout un travail sur l'enfance et l'adolescence. çà fait partie de l'historique du lieu, et c'est vrai que nous on a un espace dans le hall qu'on appelle « l'espace bar » [...] et c'est un espace qui normalement est tout le temps ouvert et effectivement il y a souvent des ados qui y trainent parce que c'est un espace agréable. Il y a des canapés. Il y a du café. Sachant qu'il y a un lycée juste à côté, il y a d'autres établissements scolaires pas très loin, ... Et c'est une volonté aussi de Lucie Berelowitsch d'intégrer ces ados, que ce ne soit pas seulement une salle de permanence, une annexe à l'établissement scolaire mais que ce soit des jeunes qui se rendent compte qu'ils sont dans un théâtre aussi et qu'ils peuvent faire vivre ce lieu en dépassant ce côté accueil. Donc c'est en réflexion et çà va s'activer dès qu'ils auront le droit de revenir.

Marguerite Corrieu : Et comment pensez-vous mettre en place cette réflexion ? Est-ce que ce sera au travers des actions de médiation ? Sur d'autres aspects de l'accueil ? [...]

Enora Davodeau : C'est un peu particulier cette année parce que le théâtre est fermé au public. Mais ce qu'on voulait mettre en place l'année dernier, ce qu'on a pas pu faire vu qu'il y a eu le gros confinement, c'était de faire un petit stand festival A Vif, et que l'équipe des relations publiques, on puisse aller à ce poste, qu'il soit identifié, qu'il permette de discuter avec les jeunes. Et de les sensibiliser à ce que c'est ce festival. Donc çà c'était vraiment une sorte de médiation In situ. Un petit pôle ados tout simple pour les informer sur ce que c'est ce festival, qu'est ce qui va s'y passer, est ce qu'ils peuvent participer à des choses, ...

Adèle Thivillier : Ca s'inscrit dans de la médiation directe mais assez informelle aussi. S'ils n'ont pas envie de parler du festival mais juste d'échanger, et de créer du lien c'est aussi çà. C'est l'occasion de parler des spectacles. Que ce soit vraiment un lieu d'échange et de partage. Donc çà normalement, çà sera mis en place l'année prochaine.

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Marguerite Corrieu: En quoi ces temps informels et ces temps d'accueils peuvent avoir des répercussions sur d'autres aspects ? [...]

Adèle Thivillier : Alors çà on ne l'a pas trop vécu [...] mais effectivement c'est la volonté par la suite de créer un vrai lien et que quand ils viennent, ils prennent connaissances des spectacles. [...]

Marguerite Corrieu : Quels sont pour vous les enjeux de la médiation ou de vos postes de relations avec les publics ? [...]

Adèle Thivillier : Moi je rajouterai que, de manière générale, avec les ados c'est aussi les rencontrer et discuter avec eux pour leur faire comprendre que le théâtre [...] les concerne et peut les intéresser et que ce n'est pas seulement un truc que leur prof de français leur impose. C'est aussi des choses qui peuvent eux leur plaire et dans lesquels ils peuvent s'investir et prendre des initiatives, que ce soit de participer à un atelier quand on en propose, ou jusqu'à aller à un spectacle sans leur enseignant. Moi s'il y a un message que j'aime bien faire passer et surtout aux ados, c'est que le théâtre aujourd'hui est extrêmement multiple. Et il parle de sujets qui les concernent en fait. Et nous au Préau on a quand même une forte programmation contemporaine. [...]. Et quand on est ados, on a une image du théâtre assez scolaire. Ce qui est enseigné au collège et au lycée c'est plus les classiques : Molière, Racine, ... Et très peu le théâtre contemporain. Et donc çà peut paraitre un peu lointain pour des ados. [...]

Marguerite Corrieu : Parvenez-vous à coconstruire ces projets avec le triangle artiste, médiateur culturel et professeur ?

Enora Davodeau: Oui, pour les projets de résidences. Disons qu'à la base c'est plus nous et les artistes qui mettons en place des choses qui pourraient fonctionner et après on intègre les professeurs.

Adèle Thivillier : Après çà arrive selon les établissements scolaires que l'équipe enseignante s'empare du projet et plus largement parfois que juste les professeurs de français. Cà peut être aussi trouver du lien avec le cours d'histoire par exemple, le cours d'art plastique, ... Et il y a parfois des établissements qui nous proposent des ateliers théâtre et des résidence d'artistes. Ils s'emparent du projet et nous on peut aussi les aider, les mettre en lien, ...

Marguerite Corrieu : Dans le cadre scolaire, comment parvenez-vous à coconstruire ces projets tout en laissant la place aux adolescents de s'en emparer à un moment ou à un autre ?

Enora Davodeau : Sur les projets participatifs ou en résidence en milieu scolaire, c'est quand même assez rodé à l'avance. C'est peut être sur le festival A Vif qu'il y a plus de liberté mais sur les projets il y a pas mal de contraintes. On a besoin d'inventer le projet en amont et pas toujours avec les ados.

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Adèle Thivillier : Par exemple les projets de résidence pour l'année prochaine sont en train d'être préparés actuellement. C'est aussi des projets qui demandent des subventions. [...] Mais c'est à chaque fois avec des artistes qui ont une approche pédagogique, une volonté de s'adresser à des adolescents. Donc aussi le travail avec des adolescents leur permet de s'inspirer, d'enrichir leur travail de création. Et c'est arrivé aussi parfois que les artistes travaillent sur un format de spectacle qui est jouable dans une salle de classe. [...]

Enora Davodeau: Et c'est le cas à chaque fois, le fait de travailler avec des ados fait que c'est aussi eux qui deviennent la matière du projet ou du spectacle. Donc le projet n'est pas forcément coconstruit avec eux en amont mais par contre il est complètement construit par eux, en partie, dans certains processus. [...] C'est évident que dans tous ces projets-là, les ados, ils ont une part énorme de création, et c'est eux qui font que çà se transforme en quelque chose d'unique avec eux. [...] Quand on fait des demandes de subventions, on est obligé de rentrer dans des cases et on est obligé de rentrer dans des calendriers qui correspondent très rarement aux calendriers des subventions scolaires. Parce que justement c'est des projets qui se réfléchissent en amont, par exemple là en mars avril pour des projets qui auront lieu durant la saison 20212022. Donc en fait les élèves ne seront pas les mêmes l'année prochaine. [...]

Adèle Thivillier : Par rapport aux projets participatifs, je pense que le projet qui correspond le plus à çà au Préau c'est durant le festival A Vif. C'est Le village ados qui est en fait le mercredi après-midi du festival. Il y a la rue en face du théâtre qui est banalisée, piétonnisée. Une scène est installée dans le jardin de la médiathèque qui est dans cette rue. Et en fait, les ados en amont, ceux qui ont réussi à être mobilisés, et moi j'interviens dans les établissements pour chercher des ados motivés, peuvent participer à la fabrication de mobiliers, à la signalétique, s'ils ont envie de créer un mur d'expression, ils peuvent créer ce genre de choses. Donc il y a tout un travail de préparation, en amont avec des ados sur ce qu'ils veulent imaginer, et le jour même il y a aussi une prise de paroles un peu libre sur la scène du coup, c'est une scène ouverte. Il y en a qui vont préparer en avance en disant : « Moi je veux danser avec trois copines ». [...] C'est vraiment leur espace qui leur est dédié, c'est pour eux et fait par eux. Donc comme le festival c'est fin mai, çà se met en place à partir de février. Et donc là les ados sont vraiment au coeur du processus. Encore une fois je parle de manière théorique vu que je ne l'ai pas vécu et que cette année encore çà sera limité. La scène ouverte sera moins ouverte. Et si on a le droit de la faire on devra élaborer un programme.

Marguerite Corrieu : Et dans le festival A Vif, avez-vous déjà imaginé d'autres temps où les ados peuvent s'exprimer ?

Enora Davodeau : Alors il y a le temps de l'ouverture où il y a la parade. Là selon les années, les ados sont plus ou moins investis. Pour le 10ème anniversaire du festival, c'est deux ados qui ont écrit le texte d'ouverture et qui l'ont lu, parce qu'elles étaient intéressées et qu'elles avaient déjà vécu le festival avant. Et sinon les autres moments où les jeunes peuvent s'investir c'est dans les befores. En fait le festival A Vif se déroule pas mal dans les établissements scolaires [...]. Et donc dans certains établissements scolaires il y a des befores qui sont organisés qui sont

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des petits temps avant les spectacles du soir dans les établissements scolaires. Cà peut être une restitution d'ateliers qu'ils ont fait à l'année ou même une prise de paroles un peu libre. Parfois il y a des ateliers en lien avec le spectacle du soir qui ont été faits durant l'après-midi et il y a une restitution ouverte au public. Comme c'est dans leur établissement scolaire c'est aussi une manière pour eux de s'emparer de leur lieu de vie ou de travail un peu différemment. Donc çà peut être aussi dans l'accueil du public, certains aussi vont s'investir là-dedans.

Adèle Thivillier : Il y a des spectacles en journée mais qui sont réservés aux scolaires. Les profs inscrivent leur classe à 10 heures ou à 14 heures. Et du coup il y a des spectacles le soir et il y à la journée marathon du samedi où il y a quatre spectacles qui s'enchainent. Il y a un pass journée pour aller voir les quatre spectacles.

Enora Davodeau : Et çà c'est ouvert au tout public.

Adèle Thivillier: Et avant il y avait deux journées mais à partir de cette année il y aura trois journées parcours où en fait les enseignants choisissent d'inscrire leur classe à deux spectacles, soit un le matin, soit un l'après-midi. Soit un spectacle le matin et un atelier l'après-midi. Et les ateliers c'est avec tous nos partenaires culturels de Vire, donc il y a la conservatoire, la MJC, le musée de Vire, ... Et en fait il y avait un atelier d'écriture théâtral, un atelier cinéma, un atelier danse, plein de trucs comme çà qui peuvent s'imaginer. Et les ados inscrits à cette journée parcours choisissaient l'atelier qu'ils voulaient selon le nombre de places disponibles. [...]

Enora Davodeau : Une fois qu'on a déterminé quels ateliers sont disponibles pour les jeunes, nous on transmet ces informations-là aux profs et eux les transmettent aux élèves qui ont la possibilité de choisir l'atelier qui les intéresse dans la limite des places disponibles. [...] Donc il y a une petite marge de choix pour les adolescents.

Adèle Thivillier : Et l'objectif c'est aussi de mêler les classes. Parce que lorsqu'on fournit le nombre de places aux profs, on leur donne un nombre de places limité. Si par exemple il y a un atelier danse avec 10 places, on ne va pas proposer les 10 places à une seule classe. On va proposer une place par classe différente comme çà il y aura 10 personnes qui ne se connaissent pas dans l'atelier. Donc c'est aussi l'idée de rencontre et de partage qui nous intéresse.

Marguerite Corrieu : Il me semble que dans son projet, Lucie Berelowitsch orientait beaucoup vers la participation et le théâtre participatif. En quoi cette notion de participation est particulièrement intéressante avec les adolescents ?

Adèle Thivillier : Chaque année, au festival il y avait un spectacle avec des ados sur scène. Donc cette année, c'était le projet avec Lacavale. Et c'est le spectacle qui doit jouer sur le grand plateau du Préau. Et donc çà c'est quelque chose d'assez régulier. Donc le sens où ils participent au festival dans des conditions professionnelles. Donc çà, çà les met vraiment dans un statut d'amateurs mais dans des conditions professionnelles. Et donc là sur ces spectacles-là çà demande un vrai engagement de la part des adolescents. Donc la première fois qu'on les a

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rencontrés c'était durant les vacances de la Toussaint et on leur a dit : Si vous vous engagez dans ce projet, il faut être là tous les jours. C'est trois fois une semaine de répétition durant les vacances. Et c'est pas je viens quand je veux. çà demande du coup un engagement et une mobilisation qui leur apprend aussi beaucoup de choses. [...]

Enora Davodeau : Pour le participatif comme dit Adèle il y a plusieurs niveaux : il y a cet apprentissage de travail en équipe, de respecter ses engagements, ... Et en fait il y a une part assez importante à cette d'âge-là d'ouverture et de se rapprocher de choses qui ne sont pas très connues d'eux. [...]

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo