I.2. L'approche des besoins de base
Au début du XXe siècle, l'émergence de
l'école sociologique de Chicago [cf. par exemple Frazier, 1932]
redéfinit l'étude de la pauvreté en apportant une
explication "scientifique" à la pauvreté urbaine à travers
des sujets tels que la délinquance, la déviance et la dissolution
des liens familiaux. À partir des années 1970, la recherche dans
le domaine de l'économie du développement est influencée
par divers facteurs. Parmi eux, Townsend et son approche relative de la
pauvreté qui représente un tournant de taille. L'approche
relativiste devient dans cette logique un phénomène
multidimensionnel. Pour lui, « les individus, familles ou groupes de la
population peuvent être considérés en état de
pauvreté quand ils manquent des ressources nécessaires pour
obtenir l'alimentation type, la participation aux activités, et pour
avoir les conditions de vie et les commodités qui sont habituellement ou
sont au moins largement encouragées ou approuvées dans les
sociétés auxquelles ils appartiennent. Leurs ressources sont si
significativement inférieures à celles qui sont
déterminées par la moyenne individuelle ou familiale qu'ils sont,
de fait, exclus des modes de vie courants, des habitudes et des
activités ». [Townsend, 1979].
L'étude de la pauvreté s'élargit et
intègre peu à peu des idées nouvelles, celle de
satisfaction est considérée comme un préalable à
l'atteinte d'une certaine qualité de vie et non plus perçue comme
contribuant nécessairement au bien-être. Au lieu de se concentrer
sur l'utilité comme les Welfaristes, l'accent est mis sur un ensemble de
biens et services qui représentent les besoins individuels de base.
Cette étude nouvelle, dite de besoins de bases traditionnels,
intègre : la nourriture, l'eau potable, les aménagements
sanitaires, un logement, les services de santé et d'éducation, un
service de transport public etc. Les limites de cette approche sont
liées à la définition même des besoins de base.
Malgré la différence idéologique avec l'école
Welfariste, cette école reconnait le bien-fondé des politiques
visant à accroitre les revenus, et les considère comme une arme
de lutte contre la pauvreté. Néanmoins, cette approche dite de
besoins de base met plus en avant les politiques visant particulièrement
la satisfaction des besoins de base qui sont des choses essentielles à
la vie comme le dit Lipton : «On doit être avant d'être
bien».
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C'est en 1901 que Rowntree analyse et mesure
sérieusement, pour la première fois, le concept de « besoins
de base » en travaillant essentiellement sur trois catégories :
l'alimentation, le logement et les articles ménagers comme les
chaussures, les vêtements et le carburant.
Cette analyse se développe davantage avec Asselin et
Dauphin, en 2002, qui estiment que la pauvreté a atteint un niveau
inacceptable, qu'elle a engendré une iniquité sociale à
laquelle il est urgent et impérieux de remédier. Le pauvre, selon
cette perspective, est privé d'un minimum de commodités de base
jugées préalables à l'atteinte d'une certaine
qualité de vie. Cette analyse offre non seulement l'avantage de
conceptualiser la pauvreté multidimensionnelle, mais aussi de pouvoir
mesurer les privations des individus dans les domaines variés de la vie
humaine. Elle est donc plus élargie que celle proposé par
Rowntree.
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