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Pour une publicité efficace des sûretés réelles mobilières.


par Gaëtan Jouve
Université Clermont Auvergne - Master droit privé parcours droit civil 2019
  

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Section 2 : L'exemple du permissioned ledger, une blockchain privée expérimentée par IBM et les greffes des tribunaux de commerce.

Difficile de se frayer un chemin dans la jungle des blockchains. Heureusement, nous pouvons compter sur d'audacieux éclaireurs hexagonaux. Ainsi, « Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce a annoncé le 15 mars dernier le déploiement d'un réseau blockchain développé par IBM afin d'améliorer la gestion du R.C.S.306 ». Cette actualité fortuite est une aubaine pour notre étude. Bien que le projet soit encore nébuleux, sa seule mise à l'essai confirme le potentiel de la blockchain en matière de publicité légale. Commençons par cerner les points communs et les différences entre les vocations du R.C.S. et d'un registre des sûretés réelles mobilières, afin de définir la mesure de l'inspiration que nous pouvons tirer de ce projet. Puis, grâce aux détails techniques glanés grâces aux différentes sources d'actualité juridiques et la communication d'IBM, nous proposerons une brève phase de rétro-ingénierie qui débouchera sur notre seconde proposition de registre.

1. Registre du commerce et des sociétés et registre des sûretés réelles mobilières, des registres voisins ? En jetant un bref regard à la table des matières de l'ouvrage « publicité légale » de Pascal BEDER307 on soupçonne d'entrée la mitoyenneté qui peut exister entre le registre du commerce et des sociétés et le registre des sûretés mobilières dont nous avons besoin. L'auteur propose une distinction de la publicité légale en deux notions déduite de leurs objets respectifs. Ainsi traite-t-il dans un premier chapitre de « « la publicité légale de l'état civil » de l'entreprise308 » tandis que la « Publicité propre à l'état de « santé » et publicité de la défaillance de l'entreprise309 » sont décrites dans un second chapitre où il est question tant de la publicité des sûretés réelles mobilières que de la publicité relative aux difficultés des entreprises au R.C.S.

Le premier chapitre nous renseigne quant au fossé qui peut exister entre le registre du commerce et des sociétés et le registre des sûretés mobilières tel que nous l'imaginons. En

305Barbara THOMAS-DAVID et Jean-Luc GIROT, « La blockchain expliquée autrement - Libres propos par Barbara Thomas-David et Jean-Luc Girot », préc. p. 2.

306Vincent FOURNIER, Philippe BOBET, « La blockchain se déploie dans les greffes des tribunaux de commerce, Focus sur une première dans le secteur judiciaire, développée par IBM », Journal Spécial des Sociétés, 6 avr. 2019, numéro 27., P.4.

307Pascal BEDER, « Publicité légale », op. cit.

308Ibid.

309Ibid.

effet, une grande part de la raison d'être du registre du commerce et des sociétés trouve son origine dans l'encadrement de la personnalité morale des entreprises et dans l'identification à fin de contrôle des entreprises personne morale comme physique. Voilà autant de fonctions qui sont étrangères à la vocation des registres des sûretés réelles mobilière. On peut donc légitimement conclure que si le recours à la blockchain à était décidé pour perfectionner ces fonctions du R.C.S. alors cette innovation ne nous sera d'aucun secours quant à notre projet.

Ainsi il faut admettre, au moins dans une certaine mesure, que ces deux registres ont des vocations distinctes, mais cela débouche-t-il nécessairement sur des blockchains foncièrement différentes ?

Un article traitant de cette actualité évoque « Le rapprochement des greffiers, garants de la diffusion d'une information certifiée relative à la vie des entreprises, et de la technologie blockchain310 ». On constate une distinction importante, l'information du R.C.S. est certifiée. Ce n'est pas le cas de l'information du registre des sûretés réel mobilière tel que nous l'avons imaginé. Comme nous l'avons évoqué plus tôt, il n'est pas souhaitable que le contenu des avis intègre une blockchain, dans la mesure où ils n'ont vocation qu'à informer les tiers quant à la présence fort probable d'une sûreté grevant un bien meuble sans pour autant prétendre à une quelconque vocation probatoire. On peut en conclure qu'une blockchain servant l'intérêt du registre des sûretés réelles mobilières sera probablement beaucoup moins volumineuse que la blockchain pensée pour perfectionner le registre du commerce et des sociétés.

On nous informe également que « Les mises à jour du registre (du R.C.S.) peuvent concerner les ressorts géographiques de plusieurs tribunaux de commerce, nécessitant de fait une coordination entre les différents greffes311 ». Les articles présentent cette coordination entre les greffes comme l'une des principales raisons du développement de cette blockchain entre greffiers. Cette problématique ne se pose pas dans le cadre de notre projet. L'enregistrement des documents constitutif de la sûreté auprès des greffes compétentes géographiquement (les greffes du tribunal de commerce du lieu de résidence du constituant) n'a pas de sens dans le système d'inscription par simple avis au sein d'un registre totalement dématérialisé. Ainsi blockchain où non, nous considérons que tout problème de compétence géographique à déjà trouvé matière à solution lors de nos précédentes recommandations.

Le second chapitre de l'ouvrage de Pascal BEDER, à l'inverse du premier, nous permet de dresser un pont entre les deux registres malgré leur tranchée mitoyenne. En effet, nous faisons nôtre l'analyse de cet auteur qui a choisi d'aborder la publicité des sûretés réelles mobilière dans le même chapitre que les formalités obligatoires de publicité dans le cadre des procédures collectives publiées au R.C.S. Ce choix nous paraît on ne peut plus cohérent, car publicité des sûretés réelles mobilière et publicité des mesures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire partagent un objectif commun. Nous avons déjà démontré que la publicité légale des sûretés réelles mobilières a en effet pour rôle d'informer une multitude de tiers312 (dont les créanciers chirographaires) quant à l'état de santé économique de l'entreprise du constituant. Les créanciers non privilégiés pourront ainsi évaluer la capacité du constituant à honorer ses obligations les concernant directement. Il s'agit là d'une mission essentielle de la publicité des sûretés réelles mobilières visant à assurer à chacun une prévisibilité et une transparence maximale quant à l'aggravation de sa situation313. Du côté du R.C.S., les

310CNGTC, communiqué de presse, 14 mars 2019, accessible en ligne sur le site du CNGTC :

https://www.cngtc.fr/fr/actualites.php (consulté le 20 août 2019).

311Ibid.

312Qui ne saurait être réduite aux seuls créanciers garantis et sous acquéreur potentiel.

313Voir supra (Partie 1, Titre 2, Chapitre 1, Section 1 : « Aider le tiers à anticiper l'aggravation de sa situation

formalités obligatoires de publicité des procédures collectives ne poursuivent pas une mission différente. La discipline collective qui s'abat comme une chape de plomb, l'entrée en jeu de concurrents invincibles en la personne des super privilégiés, voilà autant d'aggravation de la situation des créanciers dont il faut les informer au plus tôt314.

En raison de cet objectif commun, toute innovation de nature à améliorer l'efficacité de la publicité légale inhérente aux procédures collectives est adaptable en un progrès de l'information des tiers dans le cadre de la publicité des sûretés réelles mobilières.

En raison du sujet de cette étude, nous avons donc hâte que la blockchain pensée par IBM et les greffes des tribunaux de commerce fasse ses preuves. Pour ce qui est de l'après, la rubrique actualité du site de la société d'édition Wolters Kluwer rapporte d'intéressants propos tenus par le président honoraire des greffes des tribunaux de commerce. Monsieur Philippe Bobet a déclaré qu'après « une phase de découverte et de déploiement de la solution qui vient de commencer et qui va se terminer à la fin de l'année315 » il serait temps de faire le point « pour savoir si d'autres projets pourraient se greffer autour316 ».

Nous avons bien une idée de projet à greffer autour de la blockchain du registre du commerce et des sociétés. Il s'agirait d'un modeste espace dédié au stockage de l'historique des inscriptions, modifications et radiations d'avis d'un registre informatisé et global des sûretés mobilières. Une fois cette solution mise en place, il sera temps de remplacer le fichier national des gages sans dépossession par l'interface autofinancée par la publicité commerciale de notre registre.

Le registre du commerce et des sociétés et le registre global des sûretés mobilières, poursuivant des objectifs communs et ayant tous deux vocation à être confié aux greffes des tribunaux de commerce, on ne comprend pas pourquoi il ne pourra pas faire l'objet d'un outil de gestion blockchain en partie commun.

Une sûreté réelle mobilière, pour tout type de bien et un seul registre pour en assurer la publicité, voilà un excellent début. Unir la publicité légale, de l'inscription d'une sûreté à l'annonce de l'ouverture d'une procédure collective, au sein d'un unique réseau blockchain voilà un bel horizon.

2. Notre projet. Que ce soit pour penser une future greffe de l'historique des inscriptions du registre des sûretés mobilières à la blockchain R.C.S., ou pour imaginer une blockchain indépendante qui s'inspirerait de ce modèle, nous devons étudier la solution mise en place par le Conseil national des greffes des tribunaux de commerce.

Seulement voilà, cette étude touche à sa fin et le temps qui nous était imparti pour la réaliser nous file entre les doigts. On pourrait s'en chagriner tant les prochains mois s'avèrent riches en retour d'expérience quant à l'usage de la blockchain en matière de publicité légale. Malgré tout, la sagesse des stoïciens antique nous enjoint à ne pas nous troubler de ce qui ne dépend pas de nous pour mieux tourner nos efforts vers les oeuvres du champ des possibles.

Ainsi dans l'espoir de glaner des détails techniques quant à la blockchain mise sur pieds par IBM et les greffes des tribunaux de commerce nous avons dans un premier temps écumé

»), pour une démonstration de l'effet que peut avoir la souscription d'une sûreté réelle sur les chances des créanciers chirographaires d'être intégralement désintéressé en cas de défaillance du constituant.

314Ne serait-ce que pour qu'ils puissent déclarer leurs créances.

315« L'objectif est d'avoir une blockchain complète et exhaustive, destinée uniquement aux greffiers, accessibles à tous les greffiers de France », Propos de Philippe BOBET rapporté par le site d'actualité juridique

:

https://www.actualitesdudroit.fr/browse/affaires/societes-et-groupements/20848/la-blockchain-au-soutien-du-rcs-les-greffiers-des-tribunaux-de-commerce-deploient-leur-solution

316Ibid.

Wolters Kluwer (consulté le 10 août 2018), accessible en ligne

Wolters Kluwer (consulté le 10 août

:

https://www.actualitesdudroit.fr/browse/affaires/societes-et-groupements/20848/la-blockchain-au-soutien-du-rcs-les-greffiers-des-tribunaux-de-commerce-deploient-leur-solution

2018), accessible en ligne

les sites et les revues d'actualité juridiques. Puis nous avons étudié le propre communiqué de presse du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. De ces recherches nous avons retenu que cette blockchain a été « mise en oeuvre avec le protocole Hyperledger Fabric317 » et que le dispositif sera « une blockchain de consortium (permission) 318». Grâce à ces informations, nous proposerons une solution technique aux deux problèmes majeurs que nous avons identifiés quant à la création d'une blockchain pour le registre des sûretés réelles mobilières. En partant des mêmes bases que les instigateurs du projet de blockchains R.C.S. et en considérant que ces deux registres sont voisins, il est fort probable que nous aboutissons à des solutions voisines.

Que pouvons-nous déduire de ce que nous avons appris ? Premièrement qu'est-ce que le projet Hyperledger Fabric ? On sait que « IBM a réalisé la plateforme en s'appuyant sur son expertise dans le domaine de la blockchain et de la cryptographie, et en utilisant le protocole Hyperledger Fabric, géré sous l'égide de la fondation open source Linux319 ». Il faut comprendre que ce « projet n'a pas pour but de mettre en place un registre partagé directement utilisable, mais plutôt de mettre à disposition des entreprises les piliers fondateurs pour construire des blockchains « business-ready » (prêtes à être utilisées par l'entreprise)320 ». Nous n'avons qu'une ébauche (voire annexe 1) de l'oeuvre, toutefois nous pouvons à présent parfaitement cerner l'outil qui procéda à sa création. En effet, les projets menés grâce à Hyperledger Fabric sont légion321. Et même si les détails de l'architecture du réseau blockchain du R.C.S. ne nous sont pas encore accessibles, rien ne nous empêche de chercher d'autres modèles issus du même moule afin de trouver celui qui siéra à notre registre idéal.

Grâce à la seconde information que nous détenons, nous savons que c'est une blockchain de consortium qui a été choisi. Nous pouvons réduire le champ de nos recherches en supposant que ce type de blockchain qui s'adapte aux exigences d'une forme de publicité légales pourra sûrement satisfaire les objectifs d'une autre. Notons que cette blockchain de consortium a « été choisie, parce qu'elle permet un contrôle sur les accès et la manière dont la gouvernance est articulée322 ». Autrement dit « Dans un permissioned ledger, à la différence d'une blockchain publique (comme le sont par exemple les monnaies cryptographiques Bitcoin et Ethereum), seuls des acteurs autorisés peuvent participer au

317CNGTC, communiqué de presse, 14 mars 2019, accessible en ligne sur le site du CNGTC : https://www.cngtc.fr/fr/actualites.php (consulté le 20 août 2019) .

318« L'objectif est d'avoir une blockchain complète et exhaustive, destinée uniquement aux greffiers, accessibles à tous les greffiers de France », Propos de Philippe Bobet rapporté par le site d'actualité juridique

Wolters Kluwer (consulté le 10 août 2018), accessible en ligne :
https://www.actualitesdudroit.fr/browse/affaires/societes-et-groupements/20848/la-blockchain-au-soutien-du-rcs-les-greffiers-des-tribunaux-de-commerce-deploient-leur-solution

319Ibid.

320Laurent LELOUP, « Blockchain, la révolution de la confiance », op. cit., p. 109.

321« IBM est un des premiers membres fondateurs d'Hyperledger, un projet de développement collaboratif open source créé afin de faire progresser les technologies blockchain interindustries », annonce IBM (consulté le 6 août 2018), accessible en ligne : https://www-03.ibm.com/press/fr/fr/pressrelease/54825.wss

C'est parce que ce projet est « open source » que nous allons facilement pouvoir trouver de nombreux exemples de réseaux blockchain mis au point par différents agents économiques.

322« L'objectif est d'avoir une blockchain complète et exhaustive, destinée uniquement aux greffiers, accessibles à tous les greffiers de France », Propos de Philippe Bobet rapporté par le site d'actualité juridique

consensus en devenant un noeud du système323». Après notre analyse de l'impraticabilité des blockchains publiques en matière de publicité légale, on ne peut que se féliciter de ce choix d'une blockchain privée.

Enfin, conclusion de nos investigations, la blockchain mise au point pour servir l'efficacité du R.C.S. partage avec la blockchain que nous imaginons pour le registre des sûretés mobilières le souci de résoudre deux problèmes fondamentaux que nous avons détaillés précédemment. Premièrement, il est impossible de stocker des documents volumineux sur une blockchain, car elle n'a pas été pensée pour cela. Deuxièmement, il est impossible de mettre à jour ou supprimer un document sur la blockchain. Ce point qui fait toute la fiabilité de ce dispositif confine aux pourrissements de document obsolète qui s'entasseront à l'infini sur un blockchain qui finira par crouler sous leurs poids.

Il n'y a qu'une réponse possible à ces deux problématiques. Il ne faut stocker sur la blockchain que les données qui le méritent, des données qui seront perpétuellement pertinentes. En pratique, cela signifie qu'il ne faut en aucun cas stocker les avis de notre registre des sûretés mobilières sur une blockchain. Il faut stocker uniquement l'historique des inscriptions qui conservera sa véracité et son utilité malgré la valse des inscriptions, modifications et radiations des avis.

Pour parvenir à cet objectif, on peut passer par plusieurs modalités techniques. Le filtrage et la délocalisation des données. Grâce au schéma rudimentaire (Annexe 1) que nous avons eu du communiqué de presse du conseil national des greffes des tribunaux de commerce, nous savons qu'un filtrage a été envisagé. Puisque les greffes doivent valider toute information transmise par la « SARL Y (Annexe 1) ». On constate également que des données susceptibles d'évoluer dans le temps, tel que « l'état civil » de l'entreprise ne seront pas localisé sur la blockchain puisque seules « Les notifications envoyées sont inscrites sur la Blockchain ». On retrouve le but avancé par toutes les actualités : améliorer la coordination entre les greffes des différents tribunaux de commerce.

Fort de cet exemple, nous proposerons à l'occasion de notre dernière recommandation un système légèrement différent et plus détaillé.

323Laurent LELOUP, « Blockchain, la révolution de la confiance », op. cit., p. 109.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams