Paragraphe 1 : L'encadrement de la déclaration
des opérations suspectes
Des dispositions communautaires99, il ressort que
l'agent immobilier après avoir effectué une vigilance, est tenu
de faire sa déclaration dans deux situation : en cas de soupçon
et même en dehors de soupçon (A), des critères d'alerte ont
été progressivement dégagés destinés
à attirer l'attention et la surveillance particulière de
certaines opérations ou sur certaines personnes (B).
A- L'étendue de la déclaration de
soupçon
Aux termes de l'article 14 du Décret de 2005, l'agent
immobilier est tenu, en cas de soupçon de déclarer les sommes et
biens qui sont en sa possession et qui pourraient être liés
à un crime ou à un délit ou s'inscrire dans un processus
de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme ; il doit par
ailleurs, déclarer les opérations qui portent sur des sommes ou
biens qui pourraient provenir d'un crime ou d'un délit ou s'inscrire
dans un processus de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme.
Les agents immobiliers, sont tenus par ailleurs, de
déclarer à l'ANIF100, dans les conditions
fixées par le législateur communautaire et selon un modèle
de déclaration fixé par arrêté du Ministre
chargé des Finances sur proposition de l'ANIF, les sommes inscrites dans
leurs livres ou les opérations portant sur les sommes dont ils savent,
soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles sont
le produit d'une activité criminelle ou ont un rapport avec une
infraction de blanchiment de capitaux ou de financement de terrorisme ou de la
prolifération101.
Toutefois, les agents immobiliers, doivent s'abstenir
d'effectuer toute opération dont ils soupçonnent qu'elle soit
liée à l'une des infractions visées, jusqu'à ce
qu'ils fassent la déclaration de soupçon102. Et si
l'opération devant faire l'objet de déclaration a
déjà été
99 Article 83 du Règlement CEMAC de 2016,
les articles 14 et 15 du décret de 2005, l'article 29 du
Règlement COBAC.
100 ANIF : Agence Nationale d'Investigation Financière.
101 Par dérogation à l'alinéa 1 de
l'article 83, les agents immobiliers peuvent déclarer les sommes ou
opérations ou tentative d'opération dont elles savent, ou
soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles
proviennent d'une fraude douanière ou fiscale lorsqu'il y'a
présence d'au moins un critère défini par la
réglementation en vigueur.
102 Art. 83 al 8.
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réalisée, soit parce que qu'il a
été impossible de surseoir à son exécution, soit
que son report aurait pu faire obstacle à des investigations portant sur
une opération suspectée, soit qu'il est apparu
postérieurement à sa réalisation qu'elle était
soumise à cette déclaration, la personne assujettie doit informer
sans délai l'ANIF103.
Des dispositions de l'article 83, la déclaration
résulte de la vigilance que l'agent porte sur l'opération ou les
biens dont il a connaissance, en fonction de leur nature intrinsèque et
des renseignements qu'il détient sur ses clients. L'utilisation du verbe
pouvoir par le décret de 2005 témoigne de ce large pouvoir
d'appréciation laissé à l'agent immobilier, il signifie
aussi que la certitude de la nature frauduleuse de l'opération n'est pas
exigée pour faire la déclaration104. Sauf que le
Règlement de 2016 est plus impératif105 et exige que
toute information qui pourrait infirmer ou confirmer le soupçon doit
être déclarée à l'ANIF106. On pense qu'il
est nécessaire que le Décret de de 2005 fasse l'objet d'une
réforme ceci parce qu'il est contraire au nouveau règlement.
Aux termes de l'article 15 du Décret de 2005, l'agent
immobilier, même en dehors de tout soupçon est ténu de
faire une déclaration. Ainsi il doit déclarer toute
opération pour laquelle l'identité du donneur d'ordre ou du
bénéficiaire effectif ou du constituant d'un fonds fiduciaire ou
de tout autre instrument de gestion d'un patrimoine d'affectation reste
douteuse en dépit des diligences effectuées. En plus, toute
information de nature à infirmer, conforter ou modifier les
éléments contenus dans la déclaration de soupçon
est portée, sans délai, à la connaissance de
l'ANIF107.
Face à la difficulté de déterminer les
actes de délinquance, des indicateurs d'alerte ont été
dégagés.
103 Al. 9 de l'article 83.
104 Selon un auteur l'utilisation des verbes paraître et
apparaître dans la loi camerounaise de 1997 et dans le code
monétaire et financier Français dans sa rédaction d'avant
2001 conduisait certains professionnels à soumettre la
déclaration de soupçon au constat d'indices et de faits concrets
de nature à rendre vraisemblable la provenance illicite des sommes. En
2001, la loi Française relative aux Nouvelles Régulation
Economique dite loi NRE (Loi n° 2001/420) modifie certaines dispositions
du code monétaire et financier et introduit le verbe pouvoir,
remplaçant le verbe apparaître.
105 L'utilisation du verbe tenir, l'utilisation des verbes au
présent dans le règlement de 2016 témoigne du
caractère impératif des obligations déclaratives
contrairement au passé où il était utilisé plus le
verbe, apparaît, paraît et pouvoir.
106 Art. 83 du Règlement CEMAC de 2016.
107 Al. 5 de l'article du Règlement CEMAC de 2016.
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