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Les agents immobiliers et le blanchiment des capitaux en afrique centrale


par Mariette POKAM MAKOUPPO TAJOUO
Université de Dschang - Master 2020
  

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Section 2 : Les palliatifs aux difficultés de vigilance

Le législateur communautaire doit chercher des moyens pour prévenir efficacement le blanchiment dans le secteur de l'immobilier et il doit être aider pour cela par les législateurs nationaux. Le secteur financier étant tellement sécurisé, les blanchisseurs cherchent d'autres activités pour recycler l'argent issu des activités illégales et si le secteur immobilier n'est pas aussi fortement contrôlé, les criminels utiliseront les failles du système et effectueront leurs activités en toute tranquillité ; ainsi il impératif qu'au niveau nationale les États essayent de mettre en conformité les textes nationaux aux exigences communautaires en matière de lutte ( Paragraphe 1). Et aussi, tout comme le personnel des établissements financiers, que les agents immobiliers reçoivent des formations et informations sur les risques de blanchiment inhérents à leurs secteur d'activité ce qui renforcera la vigilance (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : La conformité des textes nationaux aux exigences de lutte : l'invitation des législateurs nationaux à participer à la lutte contre le blanchiment de capitaux

La lutte au niveau communautaire ne peut être efficace si des mesures ne sont pas d'abord prises au niveau nationale. Les législateurs nationaux doivent penser à une lutte d'abord interne ; Les lois nationales sont celles qui peuvent facilement être implémenter par les professionnels. Ainsi nous invitons les pouvoirs publics à intégrer dans le dispositif de l'organisation de la profession des mesures visant la lutte contre le blanchiment (A) aussi comme le règlement le demande de gérer efficacement au niveau national les risques de blanchiment inhérent au secteur immobilier (B).

A- La nécessaire implication des mesures de vigilance dans la réglementation de la profession d'agent immobilier

Le professionnel pour apporter son concours à la lutte contre le blanchiment, doit avoir reçu une formation adéquate sur la déontologie de sa profession, tenu d'être informé sur les législations relatives à sa profession, si celles-ci doivent contenir des dispositions faisant

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obligation à celui-ci de prendre des mesures de vigilance dans l'exercice de leurs activités, cela sera en harmonie avec les lois communautaires et cela sera facilement mise en oeuvre.

Les lois sous régionales sur l'acquisition d'immeubles par les personnes étrangères manquent actuellement d'instruments efficaces permettant de détecter et de sanctionner les opérations de blanchiment d'argent réalisées sous le couvert de transactions immobilières effectuées par des personnes à l'étranger et par des sociétés de domiciles étrangères. En outre, le registre foncier lacunaire et opaque doit être corrigé.

Les textes organisant la profession d'agent immobilier en Afrique centrale, sont pour la plus part vétustes, dépassés car ce sont souvent des textes adoptés avant 200373, et pour ceux un peu récent74, à leur lecture, on se rend rapidement compte que les législateurs nationaux ignorent les réalités du blanchiment dans ces textes. La lutte au niveau national peut se faire à travers l'assujettissement des agents immobiliers dans le dispositif organisant leur profession, des obligations ayant un rapport direct avec le blanchiment de capitaux.

En fait, ces dispositions font obligation à toutes personnes désirant effectuer cette activité à remplir certaines conditions, et à passer par une identification permettant de connaitre la moralité de l'agent75, et concernant la lutte contre la criminalité financière, pour y faire, il est important d'impliquer des personnes de bonne moralité. Sur ce pan le législateur a quand même posé des bases concernant les futurs professionnels qui lutteront contre le blanchiment dans le secteur76.

Cependant, ces dispositions sont insuffisantes, et pourront être complétées par certaines dispositions qui prendront en compte explicitement, les réalités du blanchiment dans le contexte de la sous-région. Ainsi une réforme des textes nationaux peut être la bienvenue. Les États pourront faire intégrer les obligations liées à l'identification des clients et la mise en oeuvre des mesures de gestion nationale des risques liées au blanchiment des capitaux dans le secteur immobilier.

La situation du Tchad interpelle encore plus, en effet, jusqu'en 2014 la profession d'agent immobilier n'était pas réglementée, malgré que les agents immobiliers sont assujettis depuis 2003 à la lutte contre le blanchiment. Il n'existe pas un cadre formel d'exercice de la

73 Au Cameroun c'est la loi de 2001, au Gabon c'est une loi de 2007.

74 Au Gabon c'est une loi assez récente, c'est la loi n° 006/2017 du 09 Août 2017.

75 Voir les articles 27 à 29 de la loi Gabonaise de 2017, les articles 6 à 8 de la loi camerounaise de 2001.

76 Cette mesure ne peut concerner que les agents exerçant en agence, ce sont les agences immobilières qui peuvent implémenter cette mesure.

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profession d'agent immobilier au Tchad, et pourtant le blanchiment dans l'immobilier fait partie des typologies les plus courantes du blanchiment au Tchad77.

Ainsi une réforme des cadres juridiques nationaux relatifs au foncier et aux transactions immobilières et sa conformité au dispositif communautaire anti-blanchiment s'imposent, avec en plus, la mise en d'une cartographie des risques de blanchiment dans le secteur immobilier ceci pour une meilleure implémentation de l'approche basée sur risques prescrites par les Recommandations du GAFI. Le cas du Gabon interpelle, et les autres pays peuvent emboiter le pas à la mesure adopté par ce dernier, qui par l'Arrêté n° 002/MTEIH/2019, a internalisé les mesures de lutte anti-blanchiment applicable dans les opérations immobilières. Ce qui invite une gestion nationale plus accrue des risques de blanchiment.

B- La gestion nationale des risques de blanchiment inhérent au secteur immobilier

Les États doivent prendre des mesures permettant d'évaluer les risques d'utilisation d'un secteur au fin de blanchiment ceci afin de prendre des mesures pour y mettre un terme. Cette implication des États est posée à l'article 23 du Règlement de 2016.

Il y ressort que l'autorité compétente78 de chaque État doit prendre des mesures appropriées, pour identifier, évaluer, comprendre et atténuer les risques de blanchiment de capitaux auxquels il est exposé et doit tenir à jour cette évaluation. Selon l'alinéa 2 de cet article, les États membres doivent désigner une autorité chargée de coordonner la réponse nationale aux risques identifiés. Selon l'alinéa 3, les États doivent appliquer une approche fondée sur les risques pour repartir ses ressources et mettre en oeuvre les mesures afin de prévenir ou atténuer le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération.

Autrement dit, les États doivent instituer une autorité chargée de coordonner, et de gérer la réponse nationale au risque de blanchiment inhérent au secteur immobilier, c'est-à-dire mettre en place une structure qui aura pour mission de coordonner les risques de blanchiment et veillera à la mise en oeuvre effective des mesures adoptées au niveau nationale.

L'évaluation, l'identification des risques d'utilisation du secteur immobilier peut se faire à travers l'attractivité que représente les investissements immobiliers dans une période donnée ; et le Règlement ajoute que l'évaluation doit être mise à jour ceci pour maitriser le

77Rapport mutuelle d'évaluation détaillée sur la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, mai 2014, pp. 23-25.

78 Il s'agit de l'ANIF Agence Nationale d'Investigation Financière.

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niveau de risque, afin que les mesures prises pour la gestion de risques soient propices aux risques identifiés. Par ailleurs, l'approche fondée sur les risques que recommande le Règlement, voudrait que les États déploient leurs ressources afin de mettre en oeuvre les mesures édictées par ledit règlement également, et donc la lutte ne doit plus viser seul le secteur financier, mais davantage le secteur immobilier et tous les nouveaux secteurs de prédilection.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry