4. L'enquête de terrain
4.1. La préparation de l'enquête 4.1.1. Le
choix du lieu de l'enquête
Le choix du lieu de l'enquête s'est porté sur le
territoire de l'OUEST Audois. Les acteurs rencontrés sont les acteurs
hospitaliers de l'établissement de référence du territoire
mais également des professionnels issus des organisations du premier
recours. Nous voulions ainsi évaluer d'une part, leur connaissance des
organisations du premier recours et de la structure mais aussi d'autre part,
connaître leur ressenti en terme de levier de coordination.
Les professionnels rencontrés sont des cadres de
santé, une directrice de soins, la pilote MAIA du territoire et
l'infirmière coordinatrice du réseau de gérontologie.
4.1.2. La construction du modèle
d'analyse
Pour répondre à la question de départ,
nous avons proposé une problématique puis une hypothèse de
travail émise lors de l'élaboration du cadre conceptuel. Afin
d'effectuer cette étude et confirmer ou infirmer l'hypothèse par
une enquête réalisée sur le terrain auprès de
différents professionnels, nous avons établi un modèle
d'analyse (annexe 1) qui nous a permis de mettre en avant les
éléments à retenir pour l'élaboration des questions
destinées aux entretiens de l'enquête. L'analyse de la
construction de l'hypothèse a montré qu'elle pouvait être
décomposée en deux objets de recherche que nous avons
eux-mêmes déclinés en dimensions afin d'en définir
les différents aspects au vu du cadre conceptuel que nous avons
évoqué en première partie. Enfin, nous avons
répertorié les différentes dimensions sous la forme
d'indicateurs pour les repérer et mesurer.
4.1.3. Le choix de l'outil
Afin de mener l'enquête sur le terrain, l'entretien
semi-directif est l'outil qui a été retenu car il laisse libre
cours à l'expression des personnes interrogées. Ainsi,
après l'élaboration du modèle d'analyse, une grille
d'entretien (annexe 2) a été constituée de telle sorte
qu'elle puisse correspondre aux indicateurs du dit modèle.
34
4.1.4. Les limites de l'enquête
L'enquête a été réalisée au
moment du dé-confinement induit par la crise sanitaire que notre pays a
connu en mars 2020. Les professionnels rencontrés ont été
largement sollicités durant cette période inédite et nous
ne voulions pas leur sur ajouter des contraintes avec cette enquête.
C'est pourquoi, les professionnels représentés sont tous issus du
Centre Hospitalier de Carcassonne, du réseau de santé de la MHVA
et de la MAIA du territoire.
4.1.5. Présentation des lieux de l'enquête
et des professionnels
Les personnes sollicitées ont été
rencontrées sur leur lieu d'exercice professionnel. La majorité
des professionnels sont issues du Centre Hospitalier de Carcassonne et occupent
des fonctions d'encadrement de proximité, de pôle et de direction
des soins. Afin de connaitre les interactions avec les professionnels de la
ville, nous avons rencontrés une pilote MAIA mais aussi une
infirmière coordinatrice d'un réseau de santé. L'ensemble
de ces professionnels sont tous issus du territoire présenté dans
les premières parties de ce travail et exercent des fonctions
d'encadrement dans des établissements et organisations de ce même
territoire.
Tableau 1 : profil des professionnels rencontrés
:
Fonction
|
Lieu d'exercice
|
Ancienneté
|
Expérience
|
Direction des soins
|
Centre Hospitalier de Carcassonne
|
6 mois
|
15 ans
|
Cadre Co
gestionnaire de pôle n°1
|
Pôle Cancérologie Pneumologie Rhumatologie et
Médecine Polyvalente, Gériatrie
|
2 ans
|
10 ans
|
Cadre Co
gestionnaire de pôle n°2
|
Pôle Chirurgie, Anesthésie, Bloc et
Gastro-Entérologie
|
1 an
|
15 ans
|
Cadre de santé 1
|
Médecine Polyvalente
|
18 mois
|
8 ans
|
35
Fonction
|
Lieu d'exercice
|
Ancienneté
|
Expérience
|
Cadre de santé 2
|
Direction des Ressources Humaines
|
3 ans
|
17 ans
|
Faisant fonction cadre de santé
|
Chirurgie orthopédique
|
2 ans
|
2 ans
|
Pilote MAIA
|
MAIA du territoire Ouest Audois
|
5 ans
|
23 ans
|
Infirmière coordinatrice
|
Réseau de Gérontologie de la Moyenne et Haute
Vallée de l'Aude
|
20 ans
|
25 ans
|
4.1.6. Le déroulement de
l'enquête
Les rendez-vous ont été pris par messagerie
électronique et se sont déroulés dans les bureaux des
professionnels rencontrés. Nous nous sommes adaptées à la
charge de travail mais aussi aux impératifs de chacun. Ainsi
l'enquête s'est déroulée sur une quinzaine de jours.
L'ensemble des entretiens a été
enregistré et leur durée varie entre 30 minutes et une heure.
4.2. Présentation et analyse des
résultats
4.2.1. Premier objet de recherche : équipe mobile
de coordination hospitalière
Cet objet de recherche aborde deux dimensions :
l'équipe mobile hospitalière et la coordination.
4.2.1.1. Dimension 1 : l'équipe mobile
hospitalière ? Indicateur 1 : l'équipe
Cet indicateur nous a permis de comprendre comment
était définie la notion d'équipe par les professionnels de
terrain mais aussi les missions qu'ils lui attribuent. De plus nous voulions
également savoir si ces professionnels établissaient une
différence entre une équipe hospitalière traditionnelle et
une équipe mobile.
36
L'équipe est définie, par les professionnels,
par 5 notions essentielles comme : « ensemble d'acteur », «
accompagner une prise en charge », « pluridisciplinaire »,
« équipe médicale et paramédicale », et enfin
« compétence ». Les réponses en fonction des
professionnels interrogés sont répartis comme suit :

3,5
2,5
0,5
1,5
3
2
0
1
Éléments de réponses pour la
définition de
l'équipe
Accompagner une prise en charge
Pluridisciplinaire
Ensemble d'acteur
Équipe médicale et paramédicale
Compétence
Après avoir défini la notion d'équipe
nous voulions savoir les missions que les professionnels attribuent à
une équipe mobile.

CDS 2
CDS 1
Pilote
Ffcds
IDEC
Cco2
Cco1
DSSI
0 1 2 3 4 5
Les équipes mobiles du CH et du
terrioire
Soins Palliatifs
UMG
Plaies et cicatrisations
Autres
MAIA
37
? Indicateur 2 : les missions d'une
équipe mobile
Les professionnels rencontrés attribuent 5 missions
principales aux équipes mobiles hospitalières. Les
réponses recueillies sont les suivantes :
Les missions d'une équipe
mobile
Compétences/Expertise
Faire du lien
Mobilité
Complémentarité/Transv ersalité
Prise en
charge/Accompagnement patient famille
IDEC Pilote Ffcds CDS 2 CDS 1 Cco2 Cco1 DSSI
|
|
0 1 2 3 4 5
Afin de compléter ces réponses, nous avons
demandé aux professionnels de citer les équipes mobiles
présentes sur le Centre Hospitalier mais aussi sur le territoire.
38
? Analyse commentée de la dimension 1
Pour la majorité des professionnels rencontrés
une équipe se définit comme un ensemble d'acteurs
pluridisciplinaires agissant dans un seul but : la prise en charge du
patient.
Quand nous avons voulu connaître la différence
qui existait entre une équipe spécifique d'un service et une
équipe mobile, seule la notion de mobilité est apparue. Si nous
établissons le lien avec les différents concepts qui ont
été présentés dans une première partie, nous
attendions la notion de transversalité. Or cette notion n'est pas
évidente pour l'ensemble des professionnels puisque seul trois d'entre
eux l'ont soulevée. Par contre la majorité d'entre eux
évoque les notions d'expertises et de compétences. Pouvons-nous
alors dire, d'après ces réponses, que pour les professionnels
interrogés, la mission principale d'une équipe mobile est
l'apport d'une expertise et/ou compétence dans un domaine particulier au
profit d'une équipe soignante, d'un patient et même de l'entourage
? Cette interrogation renvoie à nos concepts développés
précédemment puisqu'elle correspond aux objectifs des
équipes mobiles de soins palliatifs présentés en
première partie.
Quand nous avons demandé aux personnes
rencontrées de nous citer les équipes mobiles présentes
sur le centre hospitalier et/ou le territoire la majorité des
réponses ont été l'équipe de soins palliatifs et
l'unité mobile de gériatrie. Il est alors intéressant de
faire le parallèle avec le diagnostic de territoire qui a
été présenté dans la première partie de ce
travail. En effet, le territoire se compose d'une majorité de personne
âgée et la densité de médecin
généraliste pour 10 000 habitants est relativement faible.
Peut-on dire alors que la connaissance voir le recours à ce type
d'équipe mobile est lié à la spécificité du
territoire ? Cette question met en avant un second élément tout
aussi important. Ainsi, les professionnels issus du centre hospitalier ont tous
cités ces 2 types d'équipe mobile. Cependant, le pilote MAIA mais
aussi la directrice des soins ont cités comme équipe mobile la
MAIA, mais aussi tous les services d'aide et de soins à domicile,
représentés dans le graphique par « autres ».
Ces réponses ne traduisent-elles pas un cloisonnement
entre les professionnels des établissements de santé et les
acteurs de la ville ? Ne mettent-elles pas en avant le manque de connaissance
des organisations selon si nous exerçons dans le sanitaire, le social ou
le médico-social ?
39
Si nous devions synthétiser cette première
dimension nous pourrions dire que les notions essentielles pour définir
l'équipe sont connues, ainsi que l'objectif principal d'une
équipe mobile. Cependant la notion de transversalité qui
d'après notre cadre conceptuel, caractérise une équipe
mobile n'a été évoquée uniquement que par 3
professionnels. Enfin, les équipes mobiles citées par les
professionnels semblent en adéquation d'une part avec le diagnostic de
territoire mais dépendent aussi d'autre part, du lieu d'exercice du
professionnel.
Afin de compléter cette analyse nous allons aborder
à présent la seconde dimension qui est la coordination.
4.2.1.2. Dimension 2 : la
coordination
? Indicateur 1 : la définition de la coordination
La coordination a été définie par
l'ensemble des professionnels interrogés comme « l'action de
créer du lien entre les différents acteurs qui interviennent dans
une prise en charge ». Cette notion a été identique chez les
professionnels hospitaliers comme chez les professionnels des structures extra
hospitalières.
? Indicateur 2 : les enjeux et les freins de la coordination
Les enjeux de la coordination
Satisfaction des professionnels Besoin de santé publique
Continuité des soins Prise en charge efficiente
|
|
0 1 2 3 4 5 6 7
Les éléments recueillis dans le cadre de cet
indicateur se présentent comme suit :
Les freins de la coordination
Manque d'outils
Manque de connaissance
Contraintes
économiques/géographiques
Volonté politique
Personne dépendante
Absence de coordination
|
|
0 1 2 3 4 5 6 7 8
40
A la lecture de ces graphiques nous nous rendons compte que la
majorité des professionnels rencontrés s'accordent à dire
que les enjeux majeurs de la coordination sont d'une part la continuité
des soins d'un patient et d'autre part sa prise en charge efficiente.
Le besoin de santé publique a été
abordé par le cadre Co-gestionnaire 1 et repris par la direction des
soins qui a mis en avant, également, la satisfaction des
professionnels.
Il en est de même pour les freins, puisqu'en effet la
majorité des professionnels met en avant la notion de « personne
dépendante » mais aussi « l'absence de coordination » au
sein d'une structure ou d'une organisation. Le troisième
élément important soulevé comme étant un frein de
la part des professionnels est « la volonté politique ».
Les notions de contraintes économiques et
budgétaires ont également été abordés par la
direction des soins et la faisant fonction cadre de santé qui met aussi
en avant le manque de connaissances de l'ensemble des acteurs de terrain.
41
Avant de clôturer cette dimension, nous allons traiter le
dernier indicateur. ? Indicateur 3 : les personnes ressources
de la coordination
Cet indicateur aborde la connaissance des organisations et des
structures ressources de la coordination sur l'établissement de
santé et le territoire, et les réponses recueillies lors de
l'enquête de terrain sont les suivantes :
Les personnes ressources de la coordination sur
le terrioire et le CH en fonction des professionnels rencontrés
CLIC
Réseau de santé
CTS MAIA
Assistante sociale
GHT
Projet d'établissement Cadre de santé
Absence de personne ressource
Équipes mobiles
|
|
0 1 2 3 4 5 6
DSSI
Cco1
Cco2 CDS 1 CDS 2 Ffcds Pilote IDEC
Ainsi, pour la majorité des cadres de santé, des
cadres Co-gestionnaire mais aussi pour la pilote MATA et l'TDEC du
réseau, la personne ressource au sein de la structure est le cadre de
santé.
Les équipes mobiles sont citées majoritairement
par les professionnels de la structure tandis que les assistantes sociales par
les professionnels extérieurs.
Le projet d'établissement et le GHT sont mis en avant
uniquement par la direction des soins.
Enfin deux cadres de santé ont mis en avant l'absence
de personnes ressources au sein de la structure.
? Analyse commentée de la dimension
2
La notion de coordination est intégrée chez
l'ensemble des professionnels interrogés et les enjeux majeurs retenus
par ces derniers, qu'ils exercent dans un
42
établissement de santé ou non, sont la prise en
charge efficiente du patient et la continuité des soins.
La majorité d'entre eux évoque la notion de
« personne dépendante » comme étant un frein à
cette coordination. Cette donnée suppose alors que la coordination,
d'après ces professionnels, est dépendante de la volonté
de la personne qui est en charge du patient ou de sa prise en charge. Elle
suppose également une absence de relai en cas d'indisponibilité
du professionnel référent. D'autre part certains d'entre eux
évoquent l'absence des pouvoirs publics sur la mise en place de cette
coordination. Ces éléments pourraient laisser penser que la
coordination est en effet, défendue et encouragée par les
pouvoirs publics, par les textes de loi, décrets et divers plans
santé mais que la réalité du terrain est tout autre.
Quand nous interrogeons les professionnels sur les personnes
ressources de cette coordination nous nous rendons compte que la
majorité des professionnels citent des organisations internes à
la structure. Très peu d'entre eux ont été en
capacité de nommer des structures extra hospitalières. Cet
élément est en mettre en lien avec la notion de manque de
connaissance des professionnels reconnue comme étant un frein pour
certains d'entre eux.
Cependant, les professionnels extra hospitaliers mettent en
avant le rôle de l'assistante sociale comme ressource dans la
coordination au sein d'un établissement de santé mais
également le rôle du cadre de santé.
Pouvons-nous alors supposer que les professionnels extra
hospitaliers identifient plus facilement la personne ressource au sein de la
structure ? Ces données ne viennent-elles pas alimenter la notion de
cloisonnement si prégnante entre les différents secteurs et modes
d'exercice ? Ne nous fait-elle pas sous-entendre que l'organisation en silo est
toujours bien présente ?
Une équipe dédiée à la
coordination au sein d'un établissement ne pourrait-elle pas amorcer la
fin de ce cloisonnement ? Ne pourrions-nous pas identifier mais aussi
communiquer sur l'existence de personnes ressources au sein d'une structure
mais aussi d'un territoire ? Ce dernier questionnement est en mettre en lien
avec les réponses apportées par la direction des soins. En effet,
cette dernière met en avant des organisations extra hospitalières
mais aussi le projet d'établissement et le GHT. Ces notions n'ont jamais
été évoquées par les cadres de santé et les
cadres Co gestionnaire de pôle.
43
Pouvons-nous alors supposer comme pour les pouvoirs publics
que la coordination est soutenue en théorie par le projet
d'établissement et du GHT mais que la réalité du terrain
est tout autre ?
? Synthèse du premier objet de
recherche
Les notions principales relatives à l'équipe
sont évoquées par l'ensemble des professionnels qui mettent
également en avant les compétences et expertises
spécifiques des équipes mobiles.
Après avoir donné une définition
personnelle de la coordination, l'ensemble des professionnels identifie comme
enjeu majeur à la coordination la prise en charge efficiente du patient
et cite majoritairement comme personne ressource le cadre de santé.
Cependant le principal frein mis en avant comme étant
la notion de « personne dépendante » peut paraître
surprenant quand le parallèle est fait d'une part avec notre contexte
général et les réponses apportées par la direction
des soins d'autre part.
En effet, le premier met en avant au niveau national un cadre
législatif propice au développement de la coordination, mais
également au niveau local avec les axes majeurs du GHT. Cependant seules
les réponses de la direction des soins sont en adéquation avec
ces éléments. En effet, le GHT ou encore le projet
d'établissement n'ont pas été identifiés par les
professionnels de terrain ou encore les cadres co gestionnaires.
Pour conclure, nous pourrions dire que cet objet de recherche
met en avant le cloisonnement toujours omniprésent entre les acteurs
hospitaliers et extra hospitaliers et qu'il laisse entrevoir un défaut
d'information descendante, pouvant s'apparenter à une organisation en
silo, entre les instances stratégiques et opérationnelles.
Afin de compléter ces données et cette analyse
nous allons à présent aborder le second objet de recherche qui
est : « le lien avec les organisations de premier recours ».
44
4.2.2. Deuxième objet de recherche : lien avec les
organisations du premier recours
Cet objet de recherche aborde deux dimensions : l'organisation du
premier recours et le lien.
4.2.2.1. Dimension 1 : organisation du premier
recours ? Indicateur 1 : définition du premier recours
Nous avons voulu savoir dans un premier temps si les
professionnels rencontrés pouvaient définir la notion de premier
recours. La moitié d'entre eux n'ont pas pu la définir et la
direction des soins la définit comme étant « le secteur
libéral ». Enfin trois professionnels la définissent comme
étant « la seule ressource disponible lors d'un maintien, d'une
situation ou encore d'un retour à domicile difficile ».
? Indicateur 2 : les professionnels du premier recours
Afin de compléter leur définition, nous leur
avons demandé d'illustrer leur réponse en citant les
professionnels qui composent ce premier recours. Les réponses sont
regroupées dans le graphique suivant :
Les professionnels du premier
recours
Professions libérales Structure de prévention
SSR
Ortophoniste Assistante de vie Pharmacien
Kiné IDEL
Médecin traitant
|
|
0 1 2 3 4 5 6 7 8
La majorité des professionnels identifie le
médecin traitant et l'infirmière libérale comme
étant des professionnels du premier recours. La direction des soins
rajoute à ces professionnels les structures de prévention.
Seule l'IDEC considère le pharmacien comme un
professionnel du premier recours.
45
Le kiné est cité par deux cadres de santé et
le SSR par une seule.
L'assistante de vie et l'orthophoniste sont cités par
un cadre Co gestionnaire, et le pilote MATA considère que les
professionnels du premier recours sont l'ensemble des professions
libérales.
? Indicateur 3 : les enjeux du premier recours
Nous avons voulu savoir par cet indicateur, le regard que
portaient les professionnels interrogés sur le rôle des
professionnels du premier recours.
Ainsi nous leur avons demandé quels étaient les
enjeux des professionnels du premier recours sur notre territoire ?
Les réponses ont été différentes
pour l'ensemble des professionnels. En effet, pour le cadre Co-gestionnaire 1
l'enjeu du premier recours est « la détection d'une
problématique », « l'orientation du patient » et «
la gestion des flux ». Nous retrouvons ces deux dernières notions
dans les réponses du cadre de santé 2.
Le maintien et/ou le retour à domicile est
évoqué par un seul professionnel qui est le cadre de santé
1.
La disponibilité est mise en avant par le cadre de
santé 2 tandis que le cadre Co- gestionnaire 2 aborde « la
satisfaction de la patientèle ».
Enfin, les enjeux de veille sanitaire et « de
réponses au besoin d'un territoire » ont été
évoqués par la direction des soins et le pilote MAIA.
46
? Indicateur 4 : l'organisation des professionnels du premier
recours
Nous avons voulu savoir avec cet indicateur si les
professionnels interrogés avaient la connaissance des organisations du
premier recours. Les résultats sont présentés dans le
graphique ci-dessous. Moins de la moitié d'entre eux (3/8) sont en
capacité de citer les organisations type CPTS et MSP qui sont les
organisations majeures du premier recours. Il s'agit de la pilote MAIA, de
l'IDEC et de la faisant fonction cadre de santé.
L'organisation des professionnels du
premier
recours
MSP CPTS
Prestataires
SAD
Communauté de communes
Association de patient

? Analyse commentée de la dimension 1
Cette dimension met en avant l'impossibilité pour les
professionnels de définir la notion de premier recours. Par contre, les
professionnels qui le composent sont connus de tous. Il semblerait toutefois
qu'une confusion existe entre les professionnels du premier recours et les
professionnels libéraux.
Quand nous évoquons les enjeux de ces professionnels
nous avons eu autant de réponses que de personnes interrogées.
Ces dernières sont toutes recevables mais nous nous rendons compte que
seules, la direction des soins et le pilote MAIA apportent une réponse
à l'échelle d'un territoire, d'un besoin d'une population.
Il en est de même pour l'organisation du premier
recours. En effet, trois professionnels sur huit ont cités les CPTS et
les MSP et sur ces trois professionnels,
47
deux sont issus de l'extra hospitalier. Nous pouvons alors
dire que les professionnels de la structure ont une méconnaissance des
organisations extra hospitalières.
Ces réponses ne marquent elles pas une fois de plus le
cloisonnement existant entre les deux secteurs d'activité ? Est ce
qu'elles ne sous entendent pas également un manque de communication ou
de relai au sein de la structure alors que cette même structure
défend un projet d'établissement et de GHT en faveur d'un
décloisonnement? Les professionnels de la structure sont-ils
suffisamment informés sur les organisations extérieures à
la structure ? Existe-t-il un relai capable de transmettre ce type
d'information ? Une place suffisamment conséquente est-elle
laissée aux professionnels du premier recours au sein de la structure
hospitalière ?
Afin de compléter l'ensemble de ces données nous
allons aborder la dernière dimension de cet objet de recherche.
4.2.2.2. Dimension 2 : le lien
Nous avons voulu au travers cette dimension aborder les
notions de lien mais aussi d'interaction entre les différents
professionnels.
? Indicateur 1 : définition du lien

réseau de professionnels
12%
articulation de professionnels
13%
Définition du lien
travailler ensemble
75%
Nous avons voulu savoir comment était perçue
cette notion par les professionnels. Ainsi nous leur avons demandé de la
définir.
48
Nous nous rendons compte à la lecture de ces
résultats que la majorité des professionnels définissent
le lien comme « le travailler ensemble ».
Le cadre de santé 2 le définit comme « une
articulation de professionnels autour d'un patient » tandis qu'un autre
évoque « un réseau de professionnels au profit d'une prise
en charge ».
Afin de comprendre ce qui se joue derrière cette notion de
lien nous avons voulu aborder la notion d'interaction entre les
différents professionnels et structures. C'est notre dernier
indicateur.
? Indicateur 2 : les interactions
Dans ce dernier indicateur nous avons voulu savoir si les
établissements de santé et les professionnels du premier recours
interagissaient ensemble, mais également si cette collaboration
était soutenue.
Les réponses obtenues sont les suivantes :
Interaction entre la structure et les professionnels
du premier recours

Absence de
soutien
36%
Absence de lien
36%
Perso- dépendante
28%
Un tiers des professionnels interrogés mettent en avant
l'absence de lien entre les acteurs intra et extra hospitaliers, un autre tiers
souligne que ce lien est perso-dépendant et évoque même la
notion de copinage. Enfin un dernier tiers évoque l'absence de soutien
dans le développement de ce lien de la part de la structure mais aussi
de la part des organisations et des professionnels du premier recours.
49
? Analyse commentée de la dimension
2
La majorité des professionnels a défini le lien
comme « le travailler ensemble » et aucun d'entre eux n'a
évoqué le lien d'appartenance. Cet élément est
important et pourrait présager une volonté des professionnels de
l'ensemble des secteurs à travailler ensemble, à se
coordonner.
Quand nous abordons la notion d'interaction entre les acteurs
intra et extra hospitaliers les réponses sont tout autre. En effet, nous
nous rendons compte que cette interaction est dépendante, tout comme la
coordination, du professionnel qui la conduit et qu'elle n'est soutenue par
aucun secteur d'activité. Ce constat est surprenant quand nous nous
référons une nouvelle fois au cadre législatif mais
également au projet d'établissement et de GHT de
l'établissement support.
Il vient alors démontrer, une fois de plus, que le
décloisonnement des acteurs est soutenu en théorie mais qu'en
pratique c'est tout autre.
Que faudrait-il alors pour mettre en pratique les injonctions
législatives ?
L'envie des professionnels n'est à priori plus à
démontrer, est ce alors un problème de moyens humains,
financiers, politiques ? Les gouvernances sont-elles trop rigides pour
favoriser ce travailler ensemble tant défendu ? Faut-il inventer un
nouveau mode d'exercice pour que soit construit ce lien si précieux ?
? Synthèse du deuxième objet de
recherche
La définition du premier recours n'est pas connue des
professionnels qui sont en mesure cependant d'en identifier les acteurs.
Les organisations du premier recours restent centrées
sur le binôme infirmier libéral et médecin traitant et
aucune organisation d'appui à la coordination n'a été
citée. Pourtant nous avons vu lors de notre contexte
général que le territoire en est bien pourvu. Ce contexte
général nous a permis également d'appréhender la
politique de l'établissement sanitaire de référence du
territoire qui défend entre autre une politique de
décloisonnement des acteurs pourtant absente quand nous interrogeons le
terrain. Le manque de communication est l'une des clés pouvant expliquer
cette méconnaissance des acteurs entre eux mais pas seulement.
En effet, l'enquête met en avant l'absence de soutien de
la structure dans les interactions et les relations entre les professionnels en
intra et extra hospitaliers.
50
Elle met également en avant, pour la seconde fois, que
cette interaction quand elle existe, est perso-dépendante. Cet
élément pourrait sous-entendre qu'elle n'est effectivement pas
formalisée au sein de la structure d'une part et d'autre part qu'une
organisation en silo semble perdurer.
L'absence d'information, de communication, sur les
organisations d'un territoire mais également le manque de soutien et
l'absence de lien entre l'ensemble des acteurs sont les éléments
forts de ce deuxième objet de recherche et pourraient constituer la
synthèse de ce dernier.
4.3. La synthèse de l'analyse des
résultats
L'ensemble des professionnels interrogés s'accorde
à dire qu'un des enjeux majeurs de la coordination est la prise en
charge ou l'accompagnement du patient et de sa famille. Cette notion est
identique pour les acteurs intra hospitaliers comme pour les acteurs extra
hospitaliers. Ce point commun n'est pas le seul puisque quand nous abordons la
notion de lien la majorité d'entre eux évoque « le
travailler ensemble ».
Ces deux éléments laissent penser que les
professionnels quelque soit leur mode d'exercice souhaitent travailler
ensemble. L'envie est donc présente mais le mettre en pratique semble
être plus délicat. Pourquoi ? Les organisations actuelles ne
permettent pas ce « travailler ensemble » ou est-ce une
problématique plus individualiste ?
En effet, la notion de « perso-dépendant »
revient à plusieurs reprises dans l'enquête. Tout d'abord quand
nous interrogeons sur la personne ressource de la coordination au sein de la
structure puis quand nous abordons la notion d'interaction des acteurs. Cette
notion sous-entend-elle alors que les personnes travaillent ensemble uniquement
si elles en ont envie ? L'enjeu tant reconnu de l'efficience de la prise en
charge serait-il dépendant de l'envie du professionnel à
collaborer ou non ?
Les équipes mobiles sont reconnues par la
majorité des acteurs interrogés pour apporter une expertise et/ou
des compétences spécifiques essentielles dans une prise en charge
mais aussi dans la création de lien entre les professionnels, le patient
et l'entourage. Ces éléments sont importants quand nous faisons
le lien entre les résultats de cette enquête et notre
hypothèse de départ.
51
En effet, l'hypothèse met en avant la
possibilité de créer du lien avec les professionnels du premier
recours par une équipe mobile hospitalière.
Pouvons-nous dire, au regard de l'ensemble de ces
éléments, que notre hypothèse est validée ?
Pouvons-nous supposer qu'une équipe mobile
dédiée à la coordination faciliterait la communication
à l'intérieur mais aussi à l'extérieur de la
structure sur les organisations existantes ? Serait-elle adaptée pour le
soutien des professionnels de terrain dans la prise en charge d'une situation
nécessitant une coordination ? Pourrait-elle relayer et défendre
la politique d'établissement sur le terrain ? Arriverait-elle à
gommer la notion « perso-dépendant », tant de fois mise en
avant dans l'enquête ?
52
5. Les pistes de réflexion
Les résultats et l'analyse de l'enquête semblent
confirmer notre hypothèse de départ.
En effet, notre enquête met en avant les
difficultés des professionnels à se coordonner autour d'une prise
en charge pour des raisons organisationnelles ou par manque d'information et de
communication. Elle suppose également l'absence de relai des politiques
nationales et locales auprès des professionnels de terrain.
La création d'une équipe dédiée
à la coordination semble donc être adaptée au regard de
l'ensemble de ces éléments. Notre hypothèse peut donc
être confirmée.
Pourtant quand nous l'avons construite, nous avions mis en
avant que les enjeux de pouvoir seraient absorbés par cette même
équipe au profit de la transversalité et du lien qui serait
créé. Nous avons vu avec notre enquête de terrain et son
analyse que la notion de transversalité n'est pas si évidente
pour les professionnels. Le risque est alors, que les enjeux de pouvoir
perdurent.
Ne serait-il pas intéressant d'approfondir notre
hypothèse en évoquant cette notion de pouvoir ? Les enjeux de
pouvoir ne sont-ils pas finalement la problématique majeure à la
mise en place d'une coordination efficiente ?
Le pouvoir est sous-entendu dans les résultats et
l'analyse de l'enquête, cependant nous pouvons facilement déduire
qu'il est le principal obstacle. En effet, nous l'avons évoqué
tout au long de ce travail, la coordination profite d'un cadre
législatif « favorable » à sa mise en place, le projet
d'établissement « soutient » son développement et les
professionnels de santé s'accordent à dire qu'elle est
indispensable, cependant elle reste « perso-dépendante ». Elle
dépend de la volonté d'une seule personne. Un individu, un
professionnel a le pouvoir ou non de mener à bien un projet
coordonné.
En 1977, CROZIER et FRIEDBERG définissent le pouvoir
comme étant : « la capacité pour certains individus ou
groupe d'agir sur d'autres individus ou groupe ».
Pouvons-nous en déduire que le professionnel en charge
de la coordination d'une situation va exercer son pouvoir sur les
professionnels avec lesquels il va interagir ? Pouvons-nous dire que la
coordination reste perso-dépendante parce que ce même
professionnel ne veut pas prendre le risque de perdre le pouvoir qu'il
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pourrait exercer sur les autres professionnels ? Sur son champ
d'action ? Sur son territoire ?
Pouvons-nous évoquer la peur de perdre le pouvoir
exercé sur le patient, la personne accompagnée ?
Ces interrogations sont surprenantes et peuvent paraître
individualistes quand elles sont ramenées dans les secteurs sanitaires,
sociaux et médico-sociaux. Pourtant elles pourraient constituer une
piste réflexive dans l'approche de la coordination.
Comment faire disparaître les enjeux de pouvoir lors de
la mise en place d'un projet coordonné ?
Pour CROZIER, il n'y a pas d'organisation sans pouvoir et tout
pouvoir suppose une organisation. Il est donc impossible, d'après cet
auteur, d'organiser une démarche de coordination avec différents
professionnels sans un enjeu de pouvoir quelconque. La relation de pouvoir va
être induite dès lors que l'équipe en charge de la
coordination de la situation va être constituée. Le pouvoir
devient alors une évidence dans la relation entre professionnels.
Ces références mettent en avant le fait que le
pouvoir est finalement un mode de relation et non pas un statut ou un adjectif.
Ainsi, il ne peut se développer uniquement lors d'échange entre
deux professionnels ou groupe de professionnels. Nous ne pouvons donc pas
aborder la coordination d'une situation ou d'un groupe de professionnels sans
prendre en compte cette notion de pouvoir. Chaque individu va exercer son
pouvoir sur l'autre afin d'arriver à un but précis.
Quand nous reprenons la définition de la coordination
donnée par l'HAS ou encore la DGOS, ces deux entités reprennent
des notions comme « action conjointe des professionnels de santé et
des structures de soins » « réduire les cloisonnements
existants » ou encore « mobilisation des acteurs et ressources
nécessaires à la prise en charge ». Elles font toutes deux
références, à la notion d'équipe mais aucune
n'aborde la notion sous-jacente du pouvoir au sein même de cette
équipe. Ainsi quand nous avons développé le concept
d'équipe nous avons mis en avant, et cet élément rejoint
les propos de CROZIER et FRIEDBERG, qu'il ne pouvait pas y avoir « une
coordination de travail sans un responsable désigné ».
Ne sommes-nous pas en train de légitimer le rôle
du coordonnateur ?
En effet, nous ne l'avons pas développé dans
notre travail de recherche mais nous savons que le coordonnateur, «
à partir d'un projet de soins, participe à l'élaboration
du parcours de soins de la personne.
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Il garantit sa mise en oeuvre dans le respect de
l'éthique et des règles de déontologie. Interlocuteur
privilégié, il assure le suivi et la continuité des soins
entre la structure d'hospitalisation et le domicile et/ou d'autres structures
». Ses missions vont alors être la constitution d'une équipe
transversale autour d'un projet coordonné, la réalisation d'une
étude de contexte, l'animation et la coordination de l'équipe et
enfin la communication. Ne définit-il pas le cadre d'une équipe
pluridisciplinaire en charge d'une coordination ? N'est-il pas alors la
personne ressource capable de limiter les enjeux de pouvoir des professionnels
constituant l'équipe de coordination ?
A la lecture de ces nouveaux éléments, le
rôle du coordonnateur semble être une réponse dans la mise
en place d'un projet coordonné. Pourtant plusieurs interrogations
apparaissent. En effet, comment et par qui ce coordonnateur est -il
désigné ? Est-il différent en fonction des situations ? De
quel secteur (sanitaire, social, médico-social) doit-il être issu
? De quel type d'exercice doit-il dépendre ? Comment peut-il
défendre sa légitimité au sein d'une équipe
pluridisciplinaire ? Quels moyens sont mis à sa disposition pour mener
à bien un projet coordonné ? Est-il soutenu et reconnu par un
cadre législatif ? Par ses pairs ? Par les structures ? Par le
territoire ?
Il semblerait, une fois de plus, que le rôle du
coordonnateur se dessine d'abord dans les organisations du premier recours. En
effet, il devient indispensable au sein d'une MSP, l'organisation d'une CPTS
est soumise à son existence et les réseaux usent depuis leur
création d'infirmier coordonnateur. Par contre, au sein d'une structure
sanitaire, le coordonnateur tel que précédemment défini
n'existe pas encore. Il existe le coordonnateur des soins qui n'est autre que
la direction des soins mais nous sommes à un niveau stratégique
au sein de l'organisation. Pour l'instant, le coordonnateur au niveau
opérationnel n'est pas identifié.
Devons-nous supposer, que les coordonnateurs des MSP ou des
CPTS vont devenir les personnes ressources pour établir le lien entre la
ville et l'hôpital ? Vont-ils être sollicités pour
accompagner une démarche coordonnée lors de la prise en charge
d'un patient ? Il semblerait que oui dans un accompagnement à domicile
mais qu'en est-il lors d'une prise en charge en structure ?
Ces derniers questionnements viennent alimenter le
cloisonnement existant entre les organisations du premier recours et les
structures qui est à la fois maintenu et dénoncé par un
cadre législatif.
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