Section 2 : Une liberté limitée en
matière de sûretés réelles
Contrairement aux sûretés personnelles , la
liberté contractuelle se trouve assez limitée lorsqu'on est en
présence d'une sûreté réelle et la limitation de
cette liberté a pour corollaire l'amoindrissement du pouvoir
d'appréciation des parties dans le choix des sûretés
réelles qui sont calquées sur la nature du bien ( sous-section 1)
ne laissant ainsi la possibilité aux parties que de choisir parmi les
sûretés consacrées et régies par l'AUS pour la
garantie de leurs obligations( sous-section 2).
Sous-section 1 : La restriction du pouvoir des parties dans
le choix des sûretés réelles
La liberté des parties dans le choix des
sûretés réelles est très limitée et cette
restriction trouve ses fondements dans le fait que les sûretés
réelles font partie des catégories rigides des
sûretés et donc non extensibles par les parties (paragraphe 1)
mais aussi et surtout parce que les sûretés réelles sont
calquées sur la nature des biens (paragraphe 2).
35KALIEU ELONGO (Y.) Cours de droit des
sûretés OHADA, Dschang, Cameroun2016
MAVY CHRISTOPHE LEONEL. A 16
Paragraphe 1 : La rigidité du régime des
sûretés réelles
L'AUS donne la possibilité aux parties
c'est-à-dire les créanciers et leurs débiteurs de choisir
une sûreté réelle qui correspond le mieux à leurs
intérêts respectifs autrement dit aux intérêts du
créancier et à la composition du patrimoine du débiteur.
Cependant, on ne peut constituer ou utiliser des sûretés
réelles autres que celles prévues par la loi36. Les
parties ne peuvent donc créer des sûretés réelles
nouvelles ; seule la loi peut le faire. Cela s'explique par le fait que les
sûretés que les sûretés réelles font parties
des catégories rigides de sûretés 37 qui ne sont
pas extensibles par les parties.38 Le législateur OHADA a
endurcit la législation applicable en matière de
sûreté réelle contrairement à celles des
sûretés personnelles où il y est allé de main morte
; les sûretés réelles n'ont pas eu droit au même
traitement.
En effet, selon l'al 2 de l'article 4 de l'AUS : « Sauf
disposition contraire du présent Acte uniforme, les seules
sûretés réelles valablement constituées sont celles
qui sont régies par cet Acte. Elles consistent soit dans le droit du
créancier de se faire payer par préférence sur le prix de
réalisation d'un bien affecté à la garantie de
l'obligation de son débiteur, soit dans le droit de recouvrer la libre
disposition d'un bien dont il est propriétaire à titre de
garantie de cette obligation. » ; l'utilisation de l'expression : «
sauf disposition contraire du présent acte uniforme » vient
renforcer cette idée selon laquelle le législateur n'a pas voulu
laisser planer l'ombre d'aucun doute quant à l'existence même des
sûretés réelles prévues par la loi communautaire.
Ainsi, les seules sûretés réelles qui existent dans
l'espace OHADA sont celles prévues par l'AUS, ce qui signifie a
contrario que toute sûreté réelle non régie par
cette loi est nulle et d'une nullité absolue. Cette position est une
position admirable surtout si l'on voit l'objectif que s'est fixé
l'OHADA à savoir celui d'harmoniser les législations des Etats
membres39, et on ne peut rapprocher ces législations que si
l'on s'entend sur les règles qui sont établies et que si chacun
des Etats membres veille au respect de ces règles et ces règles
devraient être surtout uniformisées et assez claires pour
éviter toute incompréhension mais aussi être facilement
applicables. Mais justement, la fermeté du législateur OHADA dans
la rédaction de l'al 2 de l'article 4 a le mérite de conforter
cette position ainsi que de veiller aux respects de ces règles dans la
mesure où elle évite aux parties de trainer dans le choix d'une
sûreté pour garantir le respect de leurs obligations : elles
seraient à ce titre plus enclines à
36 L'acte uniforme portant organisation des
sûretés
37 Il en est ainsi des droits réels et des infractions
pénales
38 ISSA SAYEGH (J), La liberté contractuelle dans le
droit des sûretés OHADA, Recueil Penant, N°851
(Avril - Juin 2005)
39 ISSA SAYEGH(J), Quelques aspects techniques de
l'intégration juridique : l'exemple des actes uniformes de l'OHADA,
revue de droit uniforme,1999
MAVY CHRISTOPHE LEONEL. A 17
choisir ipso facto une sûreté prévue par
l'AUS au lieu de se lancer dans une aventure qui ne leur apporterait que
malheur en tentant d'en trouver d'autres.
Par ailleurs, le climat des affaires s'en trouverait
préservé au niveau communautaire en ce sens qu'il n'y aurait pas
de proliférations des sûretés réelles et donc pas de
fuites de législations en la matière mais aussi pas de
télescopages ni de conflits de législations car l'on se
contenterait du déjà là et le recours à d'autre
législation serait sanctionné sans sommation car l'AUS est clair
: les seules sûretés réelles valables dans l'espace OHADA
sont celles prévues et consacrées dans ses dispositions . Il faut
souligner en passant que cette position est d'autant plus confortée car
ces sûretés réelles sont calquées sur la nature des
biens.
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