4.3. L'ENVIRONNEMENT LINGUISTIQUE
L'écologie linguistique est l'un des facteurs
très important dans la progression et la régression de la
transmission générationnelle des langues. L-J. Calvet affirme que
:
« La langue est au contraire une
propriété collective sur laquelle l'individu n'a ni droits ni
pouvoirs réels et qui, surtout, se valorise d'autant plus qu'elle est
plus utilisée...sur un certain laps de temps, plus une langue sert plus
elle se valorise. Et cette valeur est un des facteurs de choix : un
individu choisira plutôt d'apprendre une langue très parlée
dans le monde que la langue d'une petite tribu indienne d'Amazonie,
une langue qu'il pense pouvoir utiliser sur le
35 Calvet, L.-J., op.cit.p.131.
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marché du travail, une langue qui ajoutera un «
plus » à son curriculum.36 »
Dans la transmission générationnelle des
langues, le nombre de locuteurs d'une langue joue un rôle capital. Si les
locuteurs qui constituent l'écologie externe directe des
langues37 choisissent d'apprendre une langue très
parlée dans le monde en raison de son poids, les parents
à Gamboma cherchent non seulement à apprendre, mais aussi
à transmettre à leurs enfants non pas une langue très
parlée dans le monde mais une langue très parlée dans le
quartier, qu'ils pensent pouvoir assurer une communication avec tous dans le
quartier ou partout ailleurs dans la ville. C'est pourquoi la raison la plus
avancée (28,17%) qui justifie la transmission des langues par ceux-ci
est « parce que c'est la langue parlée dans le quartier.»
À Gamboma, les parents et les enfants sont
exposés aux médias : la radio et la télévision. La
plupart des émissions qu'ils suivent (journal, sport, musique etc.) sont
diffusées en langues véhiculaires. L'exposition à ces
émissions signifie exposition aux langues véhiculaires et
l'exposition aux langues véhiculaires influence la transmission des
langues à leur profit.
4.4. LA LANGUE DES AÏEUX, LANGUE DES PARENTS
Tous les facteurs cités ci-dessus sont à
l'origine de l'augmentation continue de la transmission des langues
véhiculaires et de la régression des langues vernaculaires.
36 Calvet, L.-J., Pour une écologie des
langues du monde, Paris, Plon, 1999, p.12.
37 Mufwene, Salikoko S., Créoles,
écologie sociale, évolution linguistique, Paris, Institut de
la francophonie, L'Harmattan, 2005, p.p.95-97.
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Toutefois, les raisons que les parents avancent pour justifier
la transmission des langues vernaculaires sont : elles sont les langues des
aïeux (26,76%), et des parents (14,08%).
Tous les parents qui ont déclaré transmettre
à leurs enfants une ou des langue(s) vernaculaire(s) disent l'avoir fait
parce que « c'est ou ce sont la ou les langue(s) des aïeux, des
ancêtres ». Leurs ancêtres les ont transmises de
génération en génération jusqu'à la leur et
deviennent par la suite leurs langues. Ainsi, pour « honorer » les
ancêtres et ne pas faire disparaitre leurs langues, ils ont choisi de les
transmettre à leurs enfants espérant que ceux-ci feront la
même chose à leur tour.
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