4.3. La stratégie de promotion des
énergies renouvelables au Niger
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4.3.1. Analyse du cadre institutionnel de la politique
énergétique du Niger
Le cadre institutionnel est marqué par la
responsabilité Etatique à travers le Ministère de
l'Energie et du Pétrole, le Comité National Multisectoriel de
l'Electricité (CNME), le Comité National de l'Electricité
(CNE), le Centre National de l'Energie Solaire (CNES), La NIGELEC et plusieurs
autres institutions intervenant dans la production de l'énergie
électrique.
Le Ministère de l'énergie fixe les orientations
de la politique sectorielle et exerce la tutelle sur la NIGELEC. Ainsi,
l'article 7 du projet de nouveau code prévoit que le ministère
est chargé notamment de planifier et définir, avec les autres
partenaires, les programmes de développement d'électrification
selon les besoins du pays et prendre part à l'élaboration des
plans généraux de développement économique en ce
qui concerne plus particulièrement les actions relatives à la
politique énergétique. Ce qui permettrait de tenir compte des
priorités des zones à électrifier. C'est ainsi qu'il
veille au développement rationnel de l'offre de l'énergie
électrique pour un approvisionnement sécuritaire du pays tout en
définissant la politique tarifaire dans le sous-secteur de
l'électricité. Ce qui favorisera l'accès d'un grand nombre
de la population à l'électricité et cela à travers
le développement de l'électrification rurale. Ce qui fait du
ministère un véritable organe de décision, de
planification et d'orientation. Ainsi compte tenu du caractère
stratégique du sous-secteur de l'électricité, il est
parfaitement fondé que le ministère puisse avoir ce rôle
central.
Le projet de nouveau code de l'électricité
prévoit la création d'un organe de régulation concernant
le secteur de l'électricité. Cet organe appelé, Commission
de Régulation de l'Energie au Niger qui viendra se substituer à
l'Autorité de Régulation Multisectoriel (ARM) créée
par l'ordonnance 99-044 du 26 octobre 1999 telle que modifié par la loi
n° 2005-31 du 1er décembre 2005 et par l'ordonnance n° 2010-83
du 16 décembre 2010.
Elle est chargée de missions de proposition et de
consultation. Pour cela elle consiste d'abord à soumettre au
gouvernement les propositions et les tarifs fiscaux garantissant
l'équilibre financier du secteur et mettre en oeuvre les
mécanismes de leur révision périodique et assure le
respect de leur application par les opérateurs puis développe le
model de régulation garantissant l'équilibre économique et
financier du sous-secteur de l'électricité. Elle initie les
projets de textes régissant les rapports entre les opérateurs du
sous-secteur de l'électricité, les associations des consommateurs
et les utilisateurs. Elle veille aussi au respect par les opérateurs du
cadre réglementaire régissant le sous-secteur de
l'électricité ainsi que les conventions entre ses operateurs et
l'Etat. Et cela dans le but de permettre l'accès équitable et
transparent des tiers aux réseaux de transport et de distribution, dans
la limite des capacités
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disponibles, suivant des conditions fixées par
décret et de s'assurer de la qualité de desserte, de la
continuité du service public de l'électricité. Elle veille
également au respect des normes et standards applicables à
l'environnement, à la qualité de la vie et aux équipements
de production, de transport et de distribution de quelques sources que ce soit.
En fin, elle veille au respect des accords internationaux ratifiés
relatifs aux échanges transfrontaliers notamment dans le cadre du
marché régional de l'électricité de la CEDEAO pour
une politique d'efficacité énergétique. Cette politique
vise l'utilisation des sources d'énergie variables afin de permettre
l'accès d'un plus grand nombre des populations à
l'électricité et surtout à moindre coût.
Toutefois, cette future autorité de régulation
au demeurant, force est de constater qu'elle dispose de très peu de
pouvoir décisionnaires.
Ainsi pour une meilleure gestion du secteur de
l'électricité, il a été mis en place un
Comité National Multisectoriel Energie (CNME). Ce Comité est le
seul organe où une véritable interaction peut opérer entre
les différentes entités intervenant dans le secteur de
l'électricité et donc une meilleure concertation et un partage de
l'expression des besoins, des contraintes et des projets. Dans ce cadre,
l'institution CNME, par l'arrêté n°078/MME/DERD du 18 Aout
2005 et par l'arrêté n°9/MEP/DGE/DERED du 12 mars 2012,
regroupant notamment les ministères, le conseil de l'environnement pour
un développement durable, les sociétés privées de
l'énergie, les utilisateurs d'énergie ainsi que des organismes
internationaux actifs dans le secteur de l'électricité du Niger
en se référant au PNUD et l'Union Européenne, est un point
très positif. Il sensibilise les acteurs sur l'importance de la
composante énergie sur leur développement; maximise les effets de
la ressource énergétique sur le développement
économique et social. A ce niveau il encourage le développement
des ressources renouvelables afin d'affaiblir l'impact des ressources
énergétique sur la vie socioéconomique. Pour cela, il
cherche à promouvoir les projets énergétiques
multisectoriels dans l'optique d'accroitre l'accès à
l'énergie des équipements sociaux et de développer des
usages productifs pour la création de richesse. Il contribue à la
mise en oeuvre et au suivi des activités du « livre blanc
» de la CEDEAO en matière d'accès aux services
énergétiques.
Ainsi, sans disposer de réels pouvoirs contraignants ou
de décision, la CNME consiste en un organe de facilitation, de
coordination et d'harmonisation.
Toutefois, outre la question institutionnelle, le CNME devra
être d'avantage associé et consulté à toutes les
réflexions en matière énergétique afin d'en faire
un réel organe de facilitation, de coordination et d'harmonisation.
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Par ailleurs, compte tenu du rôle croisant que les
collectivités territoriales dont notamment à Niamey devraient
avoir dans le sous-secteur de l'électricité, il sera pertinent
que la composition du CNME soit revue pour inclure une représentation
des collectivités territoriales.
S'agissant du Comité National de l'Electricité,
il donne son avis sur les dossiers d'extension des réseaux
électriques des villes et communes, la sécurité des
installations électriques intérieures et toutes les questions
relatives à la production, au transport et à la distribution
d'électricité. Cependant, il semble être un organe informel
pour lequel aucun texte fondateur n'a pu être identifié. Il ne
s'agit pas de prévoir l'institution de cette entité par voie
législative. En revanche, un décret d'application du nouveau code
de l'électricité pourrait porter sur cette entité afin
d'organiser son fonctionnement et surtout de délimiter sa mission.
Au titre du dispositif institutionnel, le Niger s'est
doté d'un Centre National de l'Energie Solaire anciennement
appelé Office National de l'Energie Solaire (ONERSOL), qui est un
établissement public à caractère administratif
créé par la loi n° 98-017 du 15 juin 1998. Son statut est
fixé par le décret 99-460 PCRN/MNE du 22 novembre 1999.
Le CNER est chargé de réaliser les études
prospectives et diagnostiques en matière d'utilisation des
énergies renouvelables pour tous les secteurs de l'économie
nationale. Il participe à la formation et à la promotion de la
diffusion des équipements dans le domaine des énergies
renouvelables. Mais cette institution fait face depuis sa mise en place d'un
manque de financement. Ce qui fait que le Niger reste toujours à la
traine par rapport au développement de l'énergie
photovoltaïque.
Concernant la NIGELEC, elle a été
créée le 7 septembre 1968 par l'Etat du Niger pour
succéder à la Société Africaine
d'Electricité (SAFELEC) qui était la société qui
gérait la production et la distribution de l'énergie
électrique dans toute l'Afrique Occidentale Française. Elle
exerce ses activités sous un régime de concession et a pour
mission, la production, l'achat, l'importation, le transport et la distribution
de l'énergie électrique sur tout le territoire de la
République du Niger. Elle est chargée de l'approvisionnement du
pays en énergie électrique conformément aux textes en
vigueur et suivant un traité de concession signé le 03 mars 1993
entre l'Etat et la NIGELEC qui définit les obligations
réciproques des deux parties. Ainsi, l'Etat a la charge de
réaliser tous les investissements d'électrification de nouveaux
centres, et la NIGELEC a pour obligation d'exploiter, d'entretenir et de
renouveler les ouvrages électriques concédés. Mais depuis
quelques décennies, cette société de l'Etat a du mal
à satisfaire de façon continue les besoins en
électricité des populations. En effet, la NIGELEC fait face
à des multiples problèmes qui assaillent son rôle de
prestataire public
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d'électricité. Ces difficultés sont entre
autres, la mauvaise gestion de la société, la dépendance
vis-à-vis du Nigeria, le manque du financement par l'Etat dans le
secteur, la multiplication de la population et l'étendue du pays.
Jusqu'en 2003, la production d'électricité
était un monopole de la NIGELEC. Le code de l'électricité
du 31 janvier 2003 est venu remettre en cause ce monopole en prévoyant
la possibilité, d'une part, d'une production indépendante et,
d'autre part, de l'autoproduction. En effet, la production
d'électricité souffre d'un déficit structurel, que la
NIGELEC ne pourra pas résorber seule. Des lors, il est nécessaire
de permettre à d'autres opérateurs de pouvoir développer
et exploiter des moyens de production électrique. Et cette
possibilité devrait concerner tant des moyens de production thermique
qu'à partir de sources d'énergies renouvelables. Dans ce cadre,
l'Etat peut autoriser le développement d'outils de production
électrique indépendante ou des installations d'autoproduction.
Toutefois, au-delà du principe lui-même,
certaines modalités et dispositions administratives devraient être
revues pour donner sa pleine efficacité à la
libéralisation de la production électrique.
Le traité de concession de 1993 a été
signé dans le cadre juridique établit par l'ordonnance n°
88-064 du 22 décembre 1988, portant sur le code de
l'électricité, sans qu'il soit révisé ou
remplacé lors de prise d'effet du nouveau code de
l'électricité. Dans ce contexte, il existe une incohérence
voire une contradiction entre les dispositions du code de
l'électricité et celle du traité de concession. Ainsi,
alors que le code de l'électricité a libéralisé la
production d'électricité, le traité de concession
considère encore qu'il s'agit d'un monopole légal.
Par ailleurs, il est essentiel que la concession en tant que
mode de gestion indirecte par l'Etat d'un service public puisse permettre
à l'Etat d'atteindre des objectifs, lesquels doivent figurer dans le
traité de concession et de constituer des principes d'orientation pour
le délégataire. Par conséquent, le traité de
concession devrait traduire les orientations de l'Etat. Par exemple en
matière de maitrise de l'énergie ou d'énergie
renouvelables. Dès lors, il est nécessaire qu'un nouveau
traité de concession soit rapidement signé à la suite de
l'adoption du nouveau code de l'électricité.
En outre, l'inadéquation avec le cadre
réglementaire en vigueur, des critiques intrinsèques peuvent
être formulé à l'égard du traité de
concession. Il s'agit de l'absence d'objectifs. En effet, il est patent que le
traité de concession ne contient pas d'objectifs en termes de
qualité, de continuité, d'investissements, branchements, pertes
etc.
Or, quelle que soit l'appellation du document, il est
essentiel que le concédant du service public fixe au
délégataire les objectifs qu'il souhaite atteindre. Ainsi, l'Etat
devrait être en
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mesure, régulièrement ou lors de tout
contrôle, de vérifier si les objectifs sont atteints ou non,
d'identifier les causes et de tirer les conséquences. Ces objectifs
devraient être formulés de manière objective,
précise et mesurable. Il est aussi à noter l'absence de
critère de performance. En effet, la fixation des objectifs
précis pourrait s'accompagner de la fixation de critère de
performance permettant au délégant de vérifier à
différents pas de temps la courbe d'atteinte des objectifs afin de
procéder à des ajustements qui s'avéraient
nécessaires. Cela est d'autant plus le cas que jusque- là, les
concessions sont accordées pour des durées longues (50 ans). Il y
a aussi l'absence de mesures incitatives. C'est ainsi que la fixation des
objectifs et l'établissement de critères de performance
pourraient également s'accompagner de mesures incitatives permettant au
délégant d'inciter le délégataire à
optimiser ses efforts, ses programmes et ses moyens en vue d'une atteinte des
objectifs de manière optimale. Il est également constaté
l'absence de dispositions adéquates en matière de financement des
investissements. Ainsi, lorsqu'un délégant met à la
disposition d'un délégataire des biens qu'il a financé, il
est constant qu'une redevance soit due au délégant. Ces biens
sont en effet, les moyens permettant au délégataire d'assurer les
missions de service public et de se rémunérer à travers le
tarif payé par les clients. Or, aucune redevance n'est prévue. Et
cela, n'est pas favorable à l'autofinancement des activités
relevant du traité de concession et implique un financement des travaux
d'extension sur les ressources de l'Etat.
L'ensemble de ces contraintes et obstacles de nature
institutionnelle et contractuelle appellent donc à une adoption rapide
du nouveau code de l'électricité.
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