PREMIÈRE PARTIE
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LA COOPÉRATION INTERNATIONALE BASÉE SUR
DES NORMES
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L'assise territoriale des groupes extrémistes dans les
espaces difficilement gouvernables comme celui du sahel74 a
affecté par voie de conséquence la stabilité de la
région ouest-africaine. Une zone qui est marquée d'une
étiquette favorable aux crises et vouée à tous les
dangers75. Pour ce faire, les États ouest-africains se sont
engagés dans des actions comme la plupart des États d'autres
régions à faire échec à l'expansion de la menace
terroriste. C'est pourquoi le Droit International offre deux moyens aux
États contre toute menace à la stabilité internationale :
l'action individuelle et l'action encadrée par la coopération
internationale76. La coopération internationale s'inscrit
dans le respect des valeurs humaines et de l'ordre public international comme
interne. Ainsi, remédier à ce palliatif passe par la
collaboration des acteurs internationaux sous une double ancre de
visibilités du Droit International et du Droit national en vue de
consacrer une primauté du droit.
Alors, la coopération internationale basée sur
les normes implique de connaitre de connaitre pour la communauté
internationale des États, les obligations issues des instruments
juridiques de lutte contre le terrorisme. Elle permet sous l'égide du
droit, de justifier l'action commune en passant en revue le cadre juridique de
la coopération internationale (Chapitre 1) et fait état des
initiatives de mises en oeuvre prises par les États ouest-africain
(Chapitre 2).
74 KENNEDY-BOUDALI (L.), Examining U.S.
Counterterrorism Priorities and Strategy Across Africa'sSahel Region,
Testimony presented before the Senate Foreign Relations Committee, Subcommittee
on African Affairs on November 17, 2009, p.1.
75 DECAUX (E.) et DE FROUVILE (O.), Droit
international public, op.cit., p. 16.
76 Cf. MARTIN (J-C.), « Le terrorisme »
in ASCENSIO H., DECAUX E. et PELET A., Droit international
pénal, Paris, Editions Pedone, 2e édition
révisée, 2012, p. 279.
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CHAPITRE 1 : LE CADRE JURIDIQUE DE LA COOPÉRATION
INTERNATIONALE EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME
Le cadre juridique situe les bases d'instruments de lutte
contre le terrorisme et justifie la promotion de la coopération en tant
qu'outils d'actions légales. Ce cadre permet aux acteurs de la lutte
(États et organisations internationales) en tant que parties
décideurs de se conformer aux textes juridiques. Telle est
l'utilité d'un regard sur les fondements juridiques de la
coopération internationale (Section 1). Un nombre d'obligations a
été pris pour engager les États à l'harmonisation
de l'action internationale en vue de pouvoir contenir le
phénomène. C'est dans un souci de coordination que ces normes
sont contenues dans les instruments juridiques. Lesquelles s'inscrivent en
proportion à la nature transversale du phénomène. Ce qui a
poussé la coopération internationale vers une multi
dimensionnalité (Section 2).
Section 1 : Les fondements juridiques de la
coopération internationale en matière de lutte contre le
terrorisme
L'idée d'une organisation de la coopération
internationale passe sous l'égide de la conditionnalité
juridique. Alors, avoir connaissance de l'assise juridique constitue une ligne
pour les acteurs, à ne pas ignorer leurs obligations juridiques
antérieurement consenties et celles librement adhérées
dans la lutte contre le terrorisme. Cela parait comme un moyen d'affirmer
à titre légale leurs actions communes. Les fondements juridiques
de la coopération internationale ont une origine à la fois
conventionnelle (§1) et dérivée (§2)77.
Paragraphe 1 : Une coopération basée sur des
sources conventionnelles
En Droit international, la convention renvoie à un
concours de volonté commune. La convention a plusieurs
dénominations comme le traité dans l'ordre international. La
convention ou le traité crée des engagements juridiques à
la charge des parties. En égard à la commission des actes de
terrorisme en tout temps, les motivations juridiques pour coopérer
dépendent d'une différence de périodes. Il peut s'agir
d'une coopération en période de paix (A) ou en période de
conflits armés (B).
77 Voir DUPUY (P.), L'unité de l'ordre
juridique international, Cours général de droit
international public (2000), Vol. 297, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff
Publishers, 2002, p. 152. Le droit dérivé désigne le droit
créé par les organisations internationales par la production
d'actes normatifs internes et est tributaire de leur droit primaire contenu
dans leurs actes constitutifs.
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A- La coopération en temps de paix
L'origine conventionnelle de la coopération
internationale en période de paix est inscrite dans les textes
internationaux auxquels les États ont adhéré et dans les
instruments juridiques internationaux de lutte contre le terrorisme.
Les conférences internationales au sein des
organisations ont développé contre le terrorisme en temps de paix
des réactions juridiques aux manifestations diversifiées du
phénomène. Le fondement d'un tel effort a été fait
de façon implicite et explicite. De prime abord, eu égard
à la qualification d'actes terroristes, on identifie deux (2) formes de
coopérations énoncées dans la convention de Tokyo de 1963.
Celle-ci formule tacitement en ses articles 13 et 14, les modalités de
coopération en matière pénale et
policière78. Ce défaut de clarté des
rédacteurs sera résolu dans la convention internationale contre
la prise d'otages (17 décembre 1979) qui prescrit aux parties :
« la nécessité urgente de développer une
coopération internationale entre les États en ce qui concerne
l'élaboration et l'adoption de mesures efficaces destinées
à prévenir, réprimer et punir tous les actes de prises
d'otages en tant que manifestations du terrorisme
international79».
Cette répercussion constante de la menace a fait
écho dans la rédaction des instruments juridiques africains. Les
tous premiers voeux des axes de la coopération interafricaine sont
lancés par l'OUA notamment dans la convention d'Alger sur la
prévention et la lutte contre le terrorisme80. D'ailleurs,
cela a été une des raisons pour lesquelles l'UA a affirmé
sa volonté de promouvoir la coopération81 au corolaire
du principe du respect de la dignité humaine et à
78 Elle est considérée comme le
premier traité international contre le terrorisme aux regards de la
qualification acte terroriste (OACI), entrée en vigueur le 4
décembre 1979 : c'est la convention relative aux infractions et à
certains autres actes survenant à bord des aéronefs. Elle a
été signée le 14 septembre 1963 à Tokyo. Les
modalités de coopérations judiciaire et policière sont
ainsi révélées dans le titre « pouvoirs et
obligations des États » notamment aux articles 13 et 14. En effet,
la Nationalité de l'auteur et les circonstances de commission du fait
allégué déterminent le début de coopération.
Elles précisent les dispositions à prendre pour le
débarquement, la remise, la détention du présumé
terroristes ainsi que l'échange de conclusions de l'enquête
préliminaire en vue d'établir les faits ou l'extradition de
l'auteur présumé de l'infraction terroriste.
79 Convention des Nations Unies de 1979,
préambule, 5e considérant. Cette inscription explicite de la
coopération internationale, comme une arme redoutable de la lutte contre
le terrorisme, sera adoptée par les traités conclus
ultérieurement qui vont en modifier la formulation pour l'adapter au
contexte des infractions qu'ils prévoient. (Convention des Nations Unies
de 1997 pour la répression des attentats terroristes à
l'explosif, préambule, 9e considérant. Convention des Nations
Unies de 1999 pour la répression du financement du terrorisme,
préambule, 10e considérant. Convention des Nations Unies de 2005
pour la répression des actes de terrorisme nucléaire,
préambule, 12e considérant).
80 Au préambule du 6eme et 8eme
considérant de la Convention de l'OUA, 1999. Elle prévoit des
axes de la coopération interrégionale contre le terrorisme tenant
notamment à la compétence des États parties (Partie III),
à l'extradition (Partie IV) et à l'entraide judiciaire (Partie
V).
81 L'Acte constitutif de l'Union Africaine en son
article 3(k et n)
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condamner tous les actes de terrorisme82. De cette
affirmation, les États africains vont adapter et renforcer leur
dispositif 83 dans le but d'« assurer la participation
active, la coopération et la coordination de l'Afrique avec la
communauté internationale dans sa détermination à
combattre et éradiquer le terrorisme ». L'effet novateur de
son dispositif est la mise en place d'un cadre institutionnel suivi de mesures
adoptées à cette fin.
Si un fait social est défini et incriminé par
une convention, on ne peut que se demander à quand s'appliquent les
textes en la matière84. En effet, dans le cadre de la lutte
contre le terrorisme, c'est la technique d'exclusion qui est fréquemment
utilisée par les conventions internationales85. Alors,
s'agit-il de déclarer leur inapplicabilité aux infractions
qu'elles prévoient lorsque celles-ci sont commises en période de
conflits armés ? Une réponse négative semble s'incruster
au travers de l'article 19 (2) de la convention internationale pour la
répression des attentats terroriste à l'explosif de 1997, qui
dispose que : «... ne s'applique pas aux activités des forces
armées en période de conflits armés ». Cette
logique apparait également dans la convention contre la prise d'otages
de 1979 qui exclut de son champ d'application les prises d'otages commises lors
des conflits armés. C'est dire que l'applicabilité de certains
actes de terrorisme commis en tant de paix se trouve applicable au cas par cas
en période de conflits armés puisque ces actes sont
déjà couverts par le Droit International Humanitaire (DIH).
Cependant, à l'exception de ce principe d'exclusion en
temps de paix, est applicable en période de conflits armé ceux
qui couvrent : « tout autre acte destiné à tuer ou
blesser...tout autre personne qui ne participe pas ou plus aux
hostilités dans une situation de conflits armé86
». Le droit dans une situation de paix s'efface alors en
période de conflits armés.
82 Protocole additionnel à la Convention de
l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme signe le 8
juillet 2004. En lecture du considérant n° 6 « de
respecter le caractère sacro-saint de la vie humaine et condamnation et
rejet de l'impunité des assassinats politiques des actes de terrorisme
et des activités subversives ».
83 Protocole additionnel à la Convention de
l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme
84 SASSOLI(M.), « La définition du
terrorisme et le droit international humanitaire », RQDI, 2007,
p. 32
85D'autres dispositions aussi vont dans ce sens
telles que Convention de 2005 pour la répression des actes de terrorisme
nucléaire, en son article 2(1) b (iii) et art.4(2). Convention de l'OUA
de 1999, article 3 et 21. Elles excluent de leur champ d'application une
catégorie de conflit armé, soit de mouvements de
libération nationale et de résistance contre l'occupation
étrangère. Et cette exclusion ne vaut cependant que pour les
actes commis ceux qui sont du « bon » côté dans le
conflit.
86 Convention internationale pour la
répression du financement du terrorisme du 9 décembre 1999,2174,
R.T.N.U. 229, art.2(1) b. c'est dire que lors d'un CA, seulement les actes
commis contre les civils tomberont sous le coup de cette convention.
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