Conclusion du chapitre 2
L'État de droit est un système institutionnel
dans lequel la puissance publique est soumise au droit. C'est-à-dire que
tous les mandataires politiques sont tenus par le droit qui a été
édicté. Pour ce faire, il faut que le législateur respecte
ce principe en limitant constitutionnellement la puissance publique. Cette
limitation est remarquable à travers le contrôle de
l'Exécutif par le Parlement et la consécration de la
responsabilité des Gouvernant.
Le Gouvernement reste en principe hors de toute atteinte, le
contrôle parlementaire est un contrepoids dans un régime dont la
tendance de la gouvernance est assise sur le respect du droit
édicté par lui-même. Ainsi, la Constitution a prévu
le contrôle de l'Exécutif par la représentation nationale.
Ce contrôle exprime l'idée que le peuple est et demeure le seul
détenteur du pouvoir. C'est donc au nom du peuple que l'AN exerce son
contrôle sur l'action de l'Exécutif. L'objectif visé par le
constituant était de parvenir, au gré des circonstances, à
l'encadrement du pouvoir exécutif si bien que le contrôle
n'aboutit pas à l'engagement de la responsabilité politique du
Gouvernement.
L'encadrement du pouvoir exécutif passe aussi par le
positionnement de l'Exécutif vis-à-vis de sa
responsabilité. L'évolution de la politique de ces
dernières années montre que l'opinion publique demande plus de
transparence dans la gestion des affaires publiques. Les citoyens sont aussi
exigeants sur la moralité et la probité de ceux et celles qui,
dans la mise en oeuvre du système représentatif,
bénéficient de leur confiance pour agir en leur nom. Á
défaut, il faut des coupables et des sanctions. Ainsi, la
responsabilité des membres du Gouvernement est une notion
constitutionnellement claire aujourd'hui. Et si l'effectivité des
règles et mécanismes de leur mise en oeuvre ne sauraient
prêter à interprétation, comme dans les années
antérieures, il reste seulement à s'assurer de leur
efficacité à l'épreuve des réalités de la
vie politique au Tchad.
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CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
La Constitution tchadienne du 04 mai 2018 présente des
avancées considérables dans la préservation de
l'État de droit dans ce pays. Ces avancées sont variables et
présentent un intérêt important dans un contexte où
les pouvoirs publics tentent d'outrepasser leurs limites constitutionnelles. A
cet égard, la Constitution a prévu des garanties des droits
fondamentaux de manière graduelle et a limité la puissance du
pouvoir exécutif.
Afin de répondre aux exigences de l'État de
droit, le constituant tchadien a porté un regard sur la protection des
droits fondamentaux reconnus à la personne humaine. Ainsi, la
Constitution apparait à la fois comme le symbole et l'instrument de
perpétuation de la démocratie et sa suprématie doit
être assurée par le juge constitutionnel. Si les juridictions
constitutionnelles sont l'expression de l'État de droit214,
nous comprenons donc leur rôle dans le contrôle de l'action de
l'Exécutif. Le juge de l'administration joue également un
rôle important dans le contrôle de l'action gouvernementale. Le
juge administratif apparaît comme le juge de l'activité du pouvoir
règlementaire. Le juge judiciaire quant à lui est le gardien des
droits fondamentaux par excellence.
La protection des droits fondamentaux n'apparait pas seulement
à travers la garantie de ceux-ci, mais elle s'observe également
à travers la limitation du pouvoir de l'Exécutif. Il est
indispensable d'éviter que les gouvernants tordent le cou, par leurs
actions, aux libertés contenues dans la Constitution. C'est ainsi que la
Constitution a confié le contrôle de l'Exécutif à
l'AN. Même si les conséquences du contrôle parlementaire sur
l'Exécutif ne sont pas politiquement importantes, la simple institution
de ce contrôle suffit à considérer le pouvoir
Exécutif comme désormais encadré et surveillé dans
son action. En plus, l'aménagement de statut pénal du Chef de
l'État et la responsabilité des membres du Gouvernement est ainsi
présenté à la fois comme une exigence de transparence et
une exigence de justice, malgré sa mise en oeuvre difficile. Une
réforme, qui nécessite une dose de
214 Voir GICQUEL Jean, Droit
constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien, 2002, p. 715
cité par MOYEN Godefroy, « L'exécutf dans le nouveau
constitutionnalisme africain : les cas du Congo, du Benin et du Togo »,
op, cit., p. 55.
courage de la part des autorités, est nécessaire
pour rendre la fonction présidentielle et ministérielle moins
monarchiques, plus transparentes et plus conformes à l'idéal
républicain et aux valeurs démocratiques modernes.
Alors, la Constitution tchadienne de 2018 présente des
avancées visibles mais elle contient également des obstacles
persistants à l'émergence de l'État de droit.
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