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La constitution tchadienne du 04 mai 2018 et la consolidation de l'état de droit.


par Keumaye Tchiakika
Université de Dschang Cameroun - Master 2 en droit public 2020
  

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Paragraphe 2 : Le rôle du juge judiciaire dans la protection des droits
fondamentaux

Le fondement de la compétence du juge judiciaire est l'article 148133 de la Constitution. La connaissance des litiges nés entre les particuliers et le pouvoir public ne relevait pas toujours de la compétence des juridictions judiciaires. Nonobstant, par exception à ce principe, le juge judiciaire a eu à connaître de tels litiges. Dès lors, sa compétence de connaitre les litiges issus du rapport entre les particuliers et les pouvoirs public est affirmée (A). Les matières originelles relatives à la protection de la liberté individuelle et des autres droits fondamentaux dans les rapports entre les personnes privées (B) relèvent également de la compétence du juge judiciaire.

A - La connaissance des litiges nés du rapport entre les particuliers et les
pouvoirs publics

En droit tchadien, concernant les violations verticales des droits fondamentaux, le juge judiciaire intervient en premier lieu dans la régulation des rapports qui tendent à restreindre la liberté individuelle des citoyens. En France, à ce propos et selon l'article 136 du Code de procédure pénale issu de la loi du 07 février 1933 sur les garanties de la liberté individuelle,

131 Arrêt n°09/CS/CA/SC/2001 du 07 avril 2001 de la Chambre administrative de la Cour Suprême.

132 Article 33 de la Constitution du 04 mai 2018.

133 Article cité ci-dessus.

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« dans tous les cas d'atteinte à la liberté individuelle, le conflit ne peut jamais être élevé par l'autorité administrative et les tribunaux de l'ordre judiciaire sont toujours compétents ». De plus, l'article 66 de la Constitution française du 04 octobre 1958 précise : « nul ne peut être arbitrairement détenu ; l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». A ce niveau, il y a une affirmation du rôle du juge judiciaire dans la protection de cette liberté.

Au Tchad, la liberté individuelle et les droits fondamentaux sont constitutionnellement consacrés et ils ne doivent en aucun cas être restreints, sauf lorsque la loi prévoit expressément cela. Les droits fondamentaux doivent, dans tous les cas, être le principe et la restriction, l'exception selon la formule rappelée par le Commissaire du Gouvernement LAGRANGE134.

Le juge tchadien se montre dès lors implacable dans les cas d'atteintes à la liberté et à la sûreté des individus. Dans les cas de contrôle de privation des libertés d'un suspect en procédure pénale, il peut intervenir au niveau de l'enquête de la police lorsqu'il est saisi des cas d'irrégularités ou d'abus à ce stade de la procédure. Le juge judiciaire peut, par exemple, prendre une ordonnance interdisant à un Officier de Police Judiciaire (OPJ) de procéder à une arrestation sans mandat de justice dans le cadre d'une enquête préliminaire. Il peut aussi interdire à un OPJ de procéder de son propre chef à une garde à vue et à travers ces deux techniques, protéger valablement la liberté individuelle des citoyens.

Le juge judiciaire tchadien ne se contente pas seulement de protéger la liberté individuelle, il peut protéger aussi les autres droits des citoyens135. Les atteintes contre la vie et celles contre l'intégrité physique et morale sont sévèrement réprimées dans l'ordre juridique tchadien et c'est au juge judiciaire qu'il revient de prononcer les sanctions prévues dans les textes en vigueur, notamment le Code pénal tchadien.

Le rôle du juge judiciaire est perceptible encore lorsqu'il intervient pour protéger les droits fondamentaux des citoyens en cas de litige avec l'administration. Cette intervention se fait dans le cas de voie de fait et d'emprises administratives. La voie de fait est un acte où un agissement exécuté par l'administration sans qu'il puisse être rattaché à l'un de ses pouvoirs et constituant une atteinte grave à la liberté fondamentale ou à la propriété privée. Le fondement juridique de la voie de fait est que l'administration, en agissant hors des textes qui régissent ses pouvoirs, ne bénéficie plus de son privilège de juridiction, lequel a été institué

134 CE, 05 Février 1937, BUJADOUX, Rec.153, D. 1939, 3, 19 Concl. LAGRANGE. Cité par DIME LI NLEP Paul, Les garanties des droits fondamentaux au Cameroun, op. cit. p. 98.

135 Ces droits peuvent être le droit à la vie, à l'intégrité physique etc.

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pour répondre à la spécificité de ses pouvoirs136. L'emprise, quant à elle, est le fait pour l'administration de déposséder un particulier d'un bien immobilier, légalement ou illégalement, à titre temporaire ou définitif, à son profit ou au profit d'un tiers137. L'articulation de la compétence du juge judiciaire dans les deux notions permet ainsi de distinguer d'une part que, la constatation et la qualification juridique de la voie de fait est du ressort du juge administratif et d'autre part, la réparation des conséquences imputables à la voie de fait et à l'emprise irrégulière ainsi que les injonctions éventuelles adressées à l'administration ressortissent de la compétence du juge judiciaire.

Le juge judiciaire connaît également des contentieux nés du rapport entre les particuliers.

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