B- Les obstacles liés aux enquêtes
judiciaires en Côte d'Ivoire
259. L'appréhension des contenus illicites par les
services d'enquête procède nécessairement d'une
autorisation expresse de l'autorité judiciaire. Internet remet en
question le principe de compétente territoriale des services
d'enquêtes91
260. Art. 60 de Loi n° 2018-975 portant Code de
Procédure pénale « L'officier de police judiciaire agit
soit sur les instructions du procureur de la République, soit d'office.
Lorsqu'il agit d'office, il est tenu d'en informer immédiatement le
procureur de la République. Ces opérations sont effectuées
sous la direction du procureur de la République, la surveillance du
procureur général et le contrôle de la Chambre
91 115 Jean-Wilfrid: Internet et enquête
judiciaire,
www.droit-internet.com.
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d'instruction. » Art. 63 : « Si la nature de
l'infraction est telle que la preuve en puisse être acquise par la saisie
des papiers, documents ou autres objets en la possession des personnes qui
paraissent y avoir participé, ou déterminer des pièces ou
objets relatifs aux faits incriminés, l'officier de police judiciaire
peut se transporter sans désemparer au domicile de ces dernières
pour y procéder à une perquisition dont il dresse
procès-verbal. »»
261. En enquête flagrante, comme en enquête
préliminaire, les pouvoirs coercitifs dont sont investis les services
répressifs leur permettent de requérir toutes personnes
qualifiées s'il y a lieu, afin de procéder à des
constations ou à des examens techniques Art. 64 du CCP : « S'il y a
lieu de procéder à des constatations d'ordre technique ou
scientifique, l'officier de police judiciaire peut avoir recours à toute
personne qualifiée, après en avoir informé le procureur de
la République... ». Pour autant, aucun texte spécifique
n'impose, à ce jour, aux fournisseurs de services Internet de
réelle obligation de coopération avec les services de police.
262. De plus, les réticences culturelles et l'absence
de formation spécifique des services d'enquête contribuent
à limiter l'efficacité des investigations. L'on doit aussi noter
que l'évolution incessante des NTIC constitue une autre
difficulté pour les services d'enquête.
263. Il faut ajouter à ces difficultés que la
traçabilité des paquets d'information sur Internet
relève des techniques criminalistiques complexes, même si des
logiciels performants et onéreux permettent parfois de reconstituer le
cheminement parcouru par les données numériques et donc de
localiser leur source et/ou leur destination. La cryptographie constitue bien
évidemment, elle aussi, un défi pour les services
d'enquêtes, puisque le recours à des moyens de chiffrement lourd
rend très aléatoire la possibilité pour les forces de
l'ordre d'accéder aux données.
264. Les données électroniques ainsi
récoltés doivent être fiables pour pouvoir emporter la
conviction de la juridiction de jugement et fonder une décision de
culpabilité. Sous le régime de l'administration libre de la
preuve en matière pénale, les éléments probants ne
peuvent pas être recueillis d'une manière illégale.
265. Pourtant, l'omniprésence des technologies de
l'information et la communication dans la vie des citoyens oblige les
autorités policières et judiciaires à une radicale
adaptation de leurs méthodes d'investigations et d'instruction
criminelle pour récolter les éléments de preuve, lesquels
sont caractérisés par l'immatérialité et la
volatilité des données ainsi que par l'opacité des
systèmes informatiques.
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266. Les procédures de saisie et de perquisition
prévues dans le monde physiques
seront difficilement adaptables dans le cyberespace. Dans ces
conditions, il devient difficile de réunir tous les
éléments de preuve d'une infraction.92
92 Poulet, Y., La criminalité dans le
cyberespace à l'épreuve du principe de la
régularité des preuves, accessible sur
www.droit.fundp.ac.be/e-justice/documents/projet/20de%20Loi%20214.htm
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