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L' apport de l'arbitrage à  la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA


par BIKOI Jacques delor
Université de Yaoundé 2 - Master professionnel en Droit privé/option Droit, pratiques juridiques et judiciaires  2016
  

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Section 1 : Les difficultés ante sententiam

Les difficultés ante sententiam sont celles qui interviennent antérieurement à la sentence arbitrale. Il s'agit non seulement de celles qui tiennent à la mise en oeuvre des procédures arbitrales (Paragraphe 1), mais aussi aux obstacles à la sécurité des parties lors du déroulement desdites procédures (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les difficultés tenant à la mise en oeuvre des procédures

arbitrales

La mise en oeuvre des procédures arbitrales dans l'espace OHADA peut faire face à des complications en raison soit de l'importance économique de cette justice (A), soit en raison de l'attitude du juge étatique vis-à-vis de l'arbitrage (B).

A. L'importance économique de l'arbitrage

Parler de l'importance économique de l'arbitrage ne renvoie pas à sa nécessité du point de vue économique, mais plutôt à son coût très élevé. Les échanges que nous avons eu avec certains juristes d'entreprise au Cameroun355 révèlent que l'un des griefs les plus

354Nous tenons à préciser que notre réflexion porte essentiellement sur l'arbitrage en droit des affaires. Elle n'a donc pas vocation à s'étendre aux arbitrages civils.

355 Dans le cadre de notre stage dans la société de distribution de l'énergie électrique au Cameroun (ENEO Cameroon SA), nous avons eu quelques échanges avec le directeur adjoint du contentieux de ladite entreprise qui nous a révélé que l'arbitrage ne passe pas en priorité dans leur stratégie contentieuse compte tenu de son coût

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reprochés à l'arbitrage en zone OHADA est celui de son coût qui le rend inaccessible à tous opérateurs économiques. À titre d'exemple, Maitre Marie-Andrée NGWE356 rapporte que devant la Cour d'arbitrage du GICAM, un tiers environ des procédures sont classées faute de paiement de la provision, ou du fait de l'impécuniosité des plaideurs.

Dans les arbitrages ad hoc, la pratique révèle que les arbitres désignés par les parties ont tendance à réclamer des montants parfois exorbitants à titre d'honoraire. Dans l'arbitrage CCJA, on peut également constater que les prévisions du législateur africain concernant les frais administratifs et les honoraires des arbitres n'ont pas tenu compte de la situation des petites et des très petites entreprises, alors même que dans la plupart des États parties, ce sont elles qui constituent le socle de l'économie. Dès lors, ne pouvant financer des procédures arbitrales, plusieurs entreprises ont tendance à qualifier l'arbitrage de « justice des riches » et de ce fait refusent de conclure des conventions d'arbitrage. C'est dire que le coût de l'arbitrage constitue, un obstacle à la mise en oeuvre des procédures arbitrales dans l'espace OHADA. Cette situation n'est pas à applaudir dans la mesure où dans l'esprit du législateur africain, l'arbitrage de l'OHADA n'a pas été conçu pour sécuriser uniquement les grandes entreprises et les multinationales mais pour que tous les opérateurs du commerce puissent bénéficier des avantages de cette justice. Il est donc nécessaire que l'OHADA se penche sur cette question afin réduire la méfiance exprimée par les acteurs économique à l'égard de cette justice. En outre, il a été à juste titre proposé que la CCJA développe des audiences foraines ou des antennes régionales afin de limiter les coûts des procédures pour les parties ne résidant pas en Côte d'ivoire357. À notre avis, à cette mesure proposée, il faudrait ajouter la consécration et l'encadrement du tiers financement358 qui, serait certainement une aubaine.

En effet, le tiers financement est un procédé par lequel une personne étrangère à un litige, prend en charge tout ou partie du financement d'une procédure juridictionnelle, moyennant un pourcentage sur le montant de la condamnation définitive. Dès lors, la rémunération du tiers financeur est conditionnée par l'issue favorable du procès pour la partie

très élevé, qui ajouté aux honoraires d'avocat constitue une charge financière énorme, si l'on prend en compte le volume de leur contentieux. Aussi préfèrent-ils se contenter de recourir à la justice de l'Etat en cas d'échec des voies amiables. Dès lors si une aussi grande entreprise décrie le coût de l'arbitrage en zone OHADA, que dire des PME et des TPE ?

356 Op.cit., p.1024.

357 Ibid.

358 Sur le tiers financement V. S. PATTON BOGGS, « Le financement de l'arbitrage par un tiers en France », La revue, Publier dans Arbitrage-Médiation, 21 Mars 2013, à retrouver sur www.larevue.squirepattonboggs.com, consulté le 13 Août 2019 à 19H28.

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financée. Il s'agit d'une méthode de financement capable en notre sens de résoudre le problème de l'impossibilité d'accès à l'arbitrage OHADA du fait de l'impécuniosité. Voilà pourquoi nous suggérons que les législations internes de l'espace communautaire s'approprient ce mode de financement des procédures juridictionnelles en la consacrant et en l'encadrant afin d'éviter d'éventuels abus.

B. L'attitude de certains juges étatiques

Si certains acteurs économiques acceptent parfois de conclure des conventions d'arbitrage, c'est tout simplement parce qu'ils font confiance à cette justice qui leurs garantit plus de sécurité que celle de l'État. Seulement, il arrive que leur désir se heurte à l'attitude de certains juges étatiques réfractaires vis-à-vis de l'arbitrage. C'est le cas notamment lorsque ces derniers violent le principe compétence-compétence pour se déclarer compétent au mépris des conventions d'arbitrage.

Comme nous l'avons déjà indiqué, l'effet négatif du principe compétence-compétence emporte que, sauf cas de nullité où d'inapplicabilité manifeste de la convention d'arbitrage, le juge étatique saisi doit se déclarer incompétent si une partie le demande in limine litis. Or dans la pratique, il arrive que certains juges malgré l'exception d'incompétence soulevée par un plaideur méprisent la convention d'arbitrage et statuent sur le fond de la demande, alors même que ladite convention est valable. Ce fut par exemple le cas dans l'affaire société CELTEL contre Société Générale d'électricité ferroviaire du Congo (SOGEFCO) SA 359précédemment cité où en l'espèce, une juridiction d'instance c'était curieusement déclarée compétente pour connaitre d'un litige contractuel faisant l'objet d'une convention d'arbitrage, décision que la Cour d'appel de Pointe-Noire avait sagement infirmée, renvoyant ainsi les parties à la procédure arbitrale. Cette situation s'était également produite dans les affaires SOW YERIM ABIB contre SOULEYMAN AKA360 et Monsieur DAME SARR contre Mutuelle d'assurances des taxis compteurs d'Abidjan (MACTA)361. Dans ces deux espèces, la CCJA avait dû se prononcer en déclarant l'incompétence des juridictions d'instance. Une telle

359 Cour d'Appel de Pointe-Noire, Arrêt no046 du 07 Novembre 2008, Société CELTEL c/Société Générale d'électricité ferroviaire du Congo (SOGEFCO) SA, op.cit.

360 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA), Arrêt no 020/ 2008 du 24 Avril 2008, SOW YERIM Abib c/ SOULEMANE AKA et KOFFI SAHOUO Cédric, Actualités juridiques n o 63, p.147, note François KOMOIN, Ohadata J- 09-300.

361 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA), Première Chambre, Arrêt no 43 du 17 Avril 2008, affaire Monsieur DAME SARR c/ Mutuelle d'assurances des taxis compteurs d'Abidjan (MACTA), Le Juris Ohada, no 4/ 2008, p.46, Actualités juridiques n o 63, p.135, note AKO Eloi, Ohadata J-09-81.

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hostilité affichée à l'égard de l'arbitrage ne peut que renforcer la méfiance déjà existante chez plusieurs investisseurs nationaux et étrangers. Heureusement plusieurs Cours d'appel ainsi que la CCJA n'hésitent pas à annuler les décisions d'instances rendues en violation du principe compétence-compétence.

À notre avis, l'attitude que nous décrions trouve ses origines dans la faible culture de l'arbitrage observée jusqu'à ce jour dans les États africains. En effet, plusieurs acteurs du monde judiciaire ne disposent pas d'une bonne connaissance de la pratique arbitrale. On observe encore et de façon regrettable que le droit de l'arbitrage constitue dans certaines facultés de droit une matière facultative ce qui est pire quand il s'agit de la filière Droit privé362. S'agissant des magistrats et des avocats363, plusieurs d'entre eux se font remarquer par leur absence lors des colloques et séminaires de formation sur l'arbitrage. Il est donc urgent d'intensifier la vulgarisation de ce mode de règlement des litiges, de classer le droit de l'arbitrage au rang des matières fondamentales dans la filière droit privé et complémentaire en droit public, d'organiser des procès fictifs mettant en jeu le contentieux arbitral. Nous recommandons également aux différents ministères de la justice des États parties à l'OHADA d'organiser des séminaires sur l'arbitrage de l'organisation, financés par l'État et auxquels la présence de tous les magistrats serait obligatoire. Ces différentes propositions permettront sans doute aux juges et futures juges étatiques de parfaire leurs connaissances de la pratique arbitrale.

Il ressort de ce qui précède que le coût de l'arbitrage en zone OHADA et la tendance hostile de certains juges étatiques qui violent le principe compétence-compétence constituent des obstacles pratiques à la mise en oeuvre des procédures arbitrales. Ces obstacles compromettent la sécurité judiciaire recherchée par les acteurs économiques et par ricochet décrédibilise le système d'arbitrage communautaire. Dans un tel contexte, seul l'adoption des mesures fortes tels celles que nous proposons pourront permettre un meilleur accès à cette justice. Cependant, une fois la procédure arbitrale mise en oeuvre, son déroulement peut également faire face à certaines difficultés pratiques non négligeables susceptibles d'entraver la sécurité des parties.

362 C'est notamment le cas à l'Université de Yaoundé 2, Année académique 2015/ 2016 jusqu'à ce jour.

363 Lors de nos recherches de stage académique, nous avons transmis notre candidature à un cabinet d'avocat au Tchad qui compte tenu de notre sujet de recherche l'a rejeté motif, pris de ce qu'ils n'ont aucune connaissance de l'arbitrage en général et celui de l'OHADA en particulier. Aussi, il ne pouvait m'être d'aucune utilité d'effectuer un stage chez eux.

Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 101

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Paragraphe 2 : Les entraves à la sécurité des parties lors du déroulement de la procédure arbitrale

Plusieurs facteurs peuvent compromettre la sécurité des parties lors du déroulement de l'instance arbitrale. Parmi ceux-ci, on peut citer l'absence d'éthique chez l'arbitre (A) où même encore chez les parties qui contribuent de la sorte à l'inefficacité de la procédure (B).

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand