CONCLUSION
En définitive, quel que soit leur support normatif,
constitutionnel ou conventionnel, les droits fondamentaux, en tant
qu'instrument juridique, deviennent opératoires, dans l'ensemble du
champ juridique152. Quelle que soit leur nature, unilatérale
ou conventionnelle, réglementaire ou individuelle, les actes juridiques,
lorsqu'ils portent atteinte aux droits fondamentaux, doivent être soumis
à un contrôle standardisé tenant compte de la
prééminence de ce bloc de fondamentalité. Telles
constituent en amont les raisons de protection des droits fondamentaux en droit
positif congolais, en l'occurrence le droit d'investissement privé
fondé sur le principe de la liberté d'entreprendre (qui consiste
en un libre exercice du commerce et d'industrie), étant principalement
d'éviter l'arbitraire du pouvoir public. Ce droit d'investissement
privé, se trouve prévu à l'article 34 de la constitution
de 2006, dont nous n'ignorons pas une forme de garantie quant à son
exercice et sa défense. Celle-ci, résulte de la
possibilité de saisir un juge apte à connaître et à
trancher d'un contentieux ou d'un litige relatif à l'exercice du droit
considéré. Non plus personne n'ignore, le lien qui existe entre
l'idée de garantie des droits, l'effectivité de la garantie et
l'existence d'une sanction. Ce type de garantie, est indéniable à
tout sujet de droit national ou étranger soit-il, dispose d'un certain
nombre des garanties, notamment les garanties juridictionnelles pour le
rétablissement de sa personne dans ses droits, chaque fois qu'il est
arbitrairement indexé.
La portée de garanties judiciaires à l'exercice
du droit d'investissement privé comme pour tout autre droit fondamental,
serait d'annuler les actes des pouvoirs publics dont le ministère
public. Lesquels, comportent des mesures arbitraires entreprises à
l'égard de l'entrepreneur par voie de fait. Par exemple, le fait de
poursuivre une personne morale dont la Société Kivu market pour
les faits pénaux reprochés à son gérant, auteur
d'infraction politique à la hauteur d'atteinte à la sureté
intérieure de l'Etat congolais, visiblement rien n'en justifie. Car,
partant de la théorie des actes détachables, nous sommes parvenus
à démontrer que même si le gérant d'une entreprise,
la représente et par voie de conséquences l'engage, cela ne
pouvait être valable qu'en matière des crimes économiques
comme l'orchestre d'évasion fiscale, blanchement des capitaux,.....
C'est-à-dire en matière d'opérations qui procurent du gain
à la Société. C'est pourquoi, comme ici, il est question
d'une infraction politique, une nette distinction entre la personne du
gérant BILAL EL BAKRI et l'entreprise Kivu market Sprl, devrait
être faite. Parce que les activités commerciales de la
Société et la consommation
152 B. Mathieu et M. Verpeaux, Avant-propos,
in La constitutionnalisation des branches du droit, Congrès de
l'AFC, Dijon, 14/16-6-1996, éd. Economica, 1998, p 7.
47
de cette infraction politique par son gérant, n'ont
aucun lien de rapprochement, encore que dans l'esprit de constituant, la
garantie judiciaire concerne essentiellement le procès pénal
juste et équitable, dans lequel le principe de l'individualité de
la responsabilité pénale jouerait si jamais le cas serait soumis
au juge.
Néanmoins, Cette garantie peut connaitre des limites et
elle n'inclut pas de pouvoirs plus larges pour le juge judicaire, notamment
vis-à-vis des atteintes à l'exercice de certains droits et
libertés fondamentaux dont le droit d'investissement privé pour
Kivu market S.p.r.l et son droit au juge. Certains droits et libertés
fondamentaux sont mieux protégés que d'autres. Les atteintes
portées aux droits et libertés économiques comme le droit
d'investissement privé, par exemple, sont plus largement admises que les
restrictions apportées à d'autres qui sont repris dans les
dispositions de l'article 61 de la constitution congolaise. Nous sommes partis
de l'interprétation de cet article, pour affirmer que le droit
d'investissement privé, même s'il est fondé sur la
liberté d'entreprendre, il est un droit fondamental non absolu
c'est-à-dire qu'il n'est point intangible, en dépit du fait que
sa justiciabilité reste valable. Mais même si le RMP 05054 pris
par le Parquet général sur base de R.I n° 01591,
était entaché d'irrégularité à l'endroit de
la Société Kivu market, le juge peut se refuser de
contrôler ces actes, dont les conséquences en matière des
droits et libertés, ne sont pourtant pas nulles. Les actes en question,
revêtent un caractère politique et sont qualifiés par la
jurisprudence concordante, de mesures d'ordre intérieur fondés
sur la raison d'Etat dont la justification, qui consiste dans le mobil
politique du Gouvernement congolais et leur atteinte portée au droit
d'investissement privé concrètement s'imposait pour garantir le
but de rétablir l'ordre public et l'autorité de l'Etat .
C'est en foi de ce qui précède que nous dirons,
en plus du fait qu'il convient de s'assurer du caractère indispensable
de l'atteinte édictée, notamment en ce qui concerne son ampleur.
Le fondement d'attenter à l'exercice du droit d'investissement
privé à Goma, bien que fondé sur le principe de la
liberté d'entreprendre soit-il, via les deux actes ci-haut cités,
serait donc la nécessité de sauvegarder l'ordre public et d'en
rétablir dans toutes ses dimensions, sur le territoire national de la
République, dans le but d'y exercer l'autorité de l'Etat de
manière effective. Parce que ces actes qui minent les libertés
sont a priori suspects, ils doivent tout d'abord reposer sur une
justification louable et sincère, propre à excuser leur
déviance. L'intérêt mis en avant pour exonérer
l'atteinte au droit d'investissement privé pour la Société
Kivu market s'avérait légitime, dès lors qu'elle
consistait en rétablissement de
48
l'ordre public encore que les droits et libertés
fondamentaux ne sont pas plus absolus que l'ordre public.
Mais à notre juste valeur, pensons qu'il serait
judicieux que le législateur congolais puisse opérer la
conciliation nécessaire entre le respect des droits et libertés
fondamentaux dont le droit d'investissement et la sauvegarde de l'ordre public
sans lequel l'exercice des libertés ne saurait être assuré
dans le cadre de l'évolution du droit positif congolais. Parce qu'en
toute société, il est toujours soutenu que le fait
précède le droit, et qu'au temps de la 3ème
République Congolaise, nous recourons au précédent
franco-italien pour justifier les atteintes à l'exercice des droits et
libertés fondamentaux, il importe de rappeler que nous le citons
à titre d'un principe général de droit. Mais compte tenu
de la complexité de la question (désormais il est
découvert que les investisseurs à cause des appétits
commerciaux, ils soutiennent des rébellions), il serait de loin non
négligeable pour le législateur de cristalliser la raison d'Etat,
en un texte de loi qui catalyserait l'intervention d'actes de gouvernement
à la restriction de l'exercice des droits fondamentaux comme le droit
sous examen, avec pour finalité, la prévention, comme c'est le
cas en droit français.
49
|
|