B/ La marge de manoeuvre de l'aménageur pendant
la durée du contrat
Dans une concession d'aménagement, une partie du risque
financier lié à l'opération est portée par
l'aménageur lui-même. En effet, il est en principe
rémunéré par la commercialisation des terrains
aménagés. La participation du concédant au coût de
l'opération n'est pas érigée en règle au vu de la
formulation même de l'article L. 300-5 du code de l'urbanisme qui impose
des clauses au contrat d'aménagement « lorsque le
concédant décide de participer au coût de
l'opération ». Malgré cela, les participations
publiques, financières ou en nature sont souvent nécessaires pour
la réalisation des équipements publics prévus, et
l'équilibre financier de l'opération40.
38 Article R.* 300-7 du code de l'urbanisme : « Le
concédant choisit le concessionnaire [...] après avoir
engagé librement toute discussion utile avec une ou plusieurs personnes
ayant remis une proposition »
39 Article R. 300-11-3 du code de l'urbanisme
40 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, op. cit., p. 1108.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 21 / 59
Cette responsabilité financière de
l'aménageur dans la concession d'aménagement lui confère
une légitimité pour prendre certaines initiatives pendant la
durée du contrat le liant à l'autorité concédante.
Ainsi, dans l'opération du Technopôle du Madrillet,
l'aménageur a devancé la décision politique d'agir en
faveur de l'environnement. Une démarche environnementale a
été conduite à l'initiative de l'aménageur, puis
validée par les élus. C'est ensuite l'aménageur qui a
organisé la création d'un système de management
environnemental visant la certification ISO 14 001 de ses activités pour
la gestion de l'opération. La SEM s'est assuré les services d'un
consultant, sur le budget de l'opération. La démarche
initiée doit ensuite être validée par le syndicat mixte du
Technopôle du Madrillet (maître d'ouvrage de l'opération),
et la mission de responsable du système de management environnemental
intégrée au bilan de l'opération pour que le maître
d'ouvrage donne à la SEM les moyens des ambitions affichées.
Le concessionnaire doit toutefois agir dans le respect des
clauses de la concession conclue avec le concédant. Si des modifications
doivent être opérées, la « solution » ne pourrait
venir d'un avenant au contrat dans la mesure où les avenants d'un
contrat conclu après mise en concurrence ne sont envisageables que s'ils
ne modifient pas de façon substantielle l'un des éléments
essentiels du contrat. Si les « éléments essentiels »
du contrat sont à apprécier au cas par cas, la
rémunération de l'aménageur doit en faire partie. Ainsi,
un engagement tardif en matière d'environnement, venant se
réaliser pendant la concession d'aménagement ne pourrait se
traduire par un engagement financier supplémentaire de la part du
concédant. Mais on peut aussi imaginer qu'un aménageur souhaite,
pour des raisons tenant de la stratégie commerciale ou du positionnement
de sa société pour des opérations futures, s'investir en
faveur de l'environnement pour l'une ou l'autre de ses opérations, et le
fasse sur ses moyens propres sans requérir d'avenant de la part du
concédant. Ces cas resteront probablement rares, d'autant plus que la
volonté politique et l'implication du concédant constituent un
facteur de réussite d'un projet, en particulier dans sa composante
environnementale. Et ils demeurent soumis au contrôle du concédant
qui peut exiger d'être informé en détail de
l'exécution financière et patrimoniale de la
convention41, en vertu de l'article L. 300-5 du code de l'urbanisme,
en particulier lorsque le concédant participer au coût de
l'opération.
Cette limitation dans la passation des avenants réduit
les marges d'évolutions des nouvelles concessions d'aménagement.
Le programme aura dû être précisément défini
en amont par le concédant42. Les opérations
d'aménagement étant des opérations longues,
s'étendant souvent sur plusieurs années, ceci pourrait
réduire la capacité d'adaptation des opérations au nouveau
contexte local. C'est particulièrement vrai pour les opérations
dont les durées peuvent atteindre plus de vingt ans : les
opérations réalisées sur de vastes territoires, et les
créations de zones d'activités économiques, dont la
réalisation est souvent plus longue que les opérations à
vocation d'habitat. Si des exercices de prospective sont menés lors des
études préalables, des études de marché
liées à ces opération, il demeure indéniable que de
fortes évolutions peuvent se produire sur des périodes de dix ou
vingt ans.
Par exemple, il est imposé par la loi du 3 août
200943 que les bâtiments tertiaires dont les permis de
construire seront déposés à partir du 1er janvier 2011 (et
les bâtiments à usage d'habitation dont les
41 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, op. cit., p. 1111.
22 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
permis de construire seront déposés à
partir du 1er janvier 2012) devront justifier d'une consommation
d'énergie primaire inférieure à la moitié de la
RT2005, c'est-à-dire de respecter la norme Bâtiment Basse
Consommation (BBC). Cette règle s'appliquera aux demandes de permis de
construire déposées pour des terrains situés dans le
périmètre des zones en cours d'aménagement. Celles qui
sauront s'adapter en donnant les moyens d'atteindre plus facilement ces
performances aux bâtiments qui seront construits sur leur
périmètre gagneront un potentiel de commercialisation. En effet,
le seuil de consommation d'énergie primaire sera notamment modulé
en fonction des émissions de gaz à effet de serre
générées par les installations de fourniture
d'énergie. Ainsi, l'utilisation de la géothermie sera avantageuse
par rapport à d'autres types d'énergie. L'application des
prescriptions architecturales de nature à favoriser des bâtiments
économes, ou la création d'un réseau de chaleur
alimenté en énergie renouvelable, la desserte des bâtiments
par le gaz sont autant de moyens de bonifier le calcul de la consommation
d'énergie primaire des bâtiments, en limitant les surcoûts
lors de la construction.
Pour ne pas entraver la possibilité de faire
évoluer l'opération d'aménagement avec le contexte
économique, financier, ou législatif, les termes de la concession
ne doivent pas être trop précis, et peuvent se
référer à des objectifs plutôt qu'à des
moyens.
42 RéseauSCET, Concessions d'aménagement - le
décret [n°2009-889 du 22 juillet 2009 relatif aux concessions
d'aménagement] est paru, Flash du Réseau, n°08/2009 du 30
juillet 2009, p. 5
43 Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation
relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 23 / 59
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