Annexe 3. Restranscription de l'entretien 2
« Hop, alors du coup ma première question donc
c'est une question un peu pour te découvrir, est-ce que tu peux me
parler de ton parcours professionnel donc l'année d'obtention de ton
diplôme, l'ancienneté dans le service, et si tu as fait des
formations complémentaires »
- « Alors.. Moi j'ai commencé à travailler
en psychiatrie j'avais une vingtaine d'année, j'en ai 52 aujourd'hui,
j'ai commencé en tant qu'aide-soignante voilà en service
d'hospitalisation. J'ai eu la chance de faire l'école
d'infirmière qui m'a permis de travailler aujourd'hui et j'ai eu une
grande expérience dans un centre d'accueil de crise sur Paris, ensuite
en 2008 je suis arrivée dans la région à côté
de Caen, à Lisieux aux urgences psy. Après j'ai travaillé
dans une centre d'hébergement thérapeutique pour les ados et en
2017, en unité de moyen/long séjour sur l'hôpital et depuis
peu je suis dans une équipe mobile du même pôle,
voilà donc depuis 1988 je beigne dans la psychiatrie. » (Nous
rions)
- « Parfait.. »
- « Et ! J'oublie de dire que ma formation essentielle
c'est toute ma période où j'ai travaillé au centre
d'accueil où j'ai commencé très jeune, où j'ai
grandi avec mes pères et mes mères de la psychiatrie, la zone
comment dire de la psychothérapie institutionnelle et en même
temps ce qui m'a beaucoup beaucoup forgé c'est que j'ai eu l'occasion de
travailler sur le domaine de la précarité avec des gens à
la rue sur Paris. Et ça une fois qu'on à travailler avec eux,
enfin avec eux en tout cas autour des gens qui s'occupe d'eux et autour d'eux,
après on peut travailler n'importe où »
- « Ok, c'est très intéressant ! »
- « Oui c'est important ! »
- « Donc ensuite, nous allons parler un peu de la
schizophrénie, donc ma question c'est quels mots tu pourrais choisir
pour expliquer la schizophrénie ? Sans la définir mais
voilà si je te dis schizophrénie, est ce qu'il y a un mot ou des
mots en particulier qui te viennent à l'esprit ? »
- « Bah alors schizophrénie, je dirais
dissociation, souffrance, difficultés voilà.. Grande souffrance
et grandes difficultés »
- « Ok parfait et euh du coup en quoi la
schizophrénie pour toi, c'est une maladie chronique ? »
- « euh... chronique dans le sens où la maladie
est longue et que malheureusement je ne pense pas qu'elle puisse se
guérir au sens propre du mot guérir, elle peut se stabiliser
à un moment donné dans la vie, revenir, repartir, revenir,
repartir. Tout dépend du suivi, tout dépend des rencontres
thérapeutique que la personne euh.. Rencontre. »
- J'acquiesce puis je continue: « ok, donc ensuite je
parlerai de la qualité de vie d'un patient schizophrène donc ma
première question c'est quelles idées tu te fais de la
qualité de vie ? Mais en général ? » Je sens qu'elle
hésite, je rajoute donc : « Je sais que c'est vaste, mais tu peux
me dire des termes, des mots, des représentations »
- « Qualité de vie chez eux ou partout ? »
- « Oui, pour toi ! Qu'est que la qualité de vie pour
toi ? »
- « Bah si je fais par rapport aux patients
schizophrènes déjà, le premier truc qui me vient à
l'esprit c'est qu'ils puissent vivre avec ses symptômes, qu'il soit
délirant ou pas délirant, qu'il puisse avoir une vie euh.. une
vie.. alors voilà harmonieuse même si pour moi des fois ça
peut ne pas l'être.. Je sais pas si tu comprends ? c'est à dire
des fois voilà.. tu peux voir des choses qui te stupéfait mais
enfaite il faut savoir que dans la dysharmonie, dans ton regard dysharmonique,
la personne peut être en harmonie quand même. Alors
évidemment ce sera pas tes codes, la personne qui va pas se laver, elle
va pas se laver tous les jours un exemple hein.. Y'en a plein d'autre mais elle
va pas se laver tous les jours bah voilà toi tu te laves tous les jours
par exemple et bah c'est pas parce que lui non qu'il est forcément mal
quoi, c'est parce que c'est une partie de son équilibre psychique.
»
- « Oui je vois, peut être que pour lui tout va bien
»
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 61
- « Oui voilà et qu'il faut pas toucher à
ça. Chez le schizophrène par exemple, puisqu'ils ont besoin
d'avoir cette « saleté » entre guillemet pour se
protéger voilà. Et puis bah il faut pouvoir vivre avec les
symptômes et pouvoir garder les liens avec la famille et les amis, garder
les liens parce que ça c'est compliqué chez les patients
schizophrène »
- « Et toi, du coup ta qualité de vie à toi
? »
- « Bah pouvoir vivre avec moi, avec mes
difficultés avec moi-même, voilà pareil que le
schizophrène sauf que je le suis pas ! Pas encore ! (Nous rions)
»
- « Du coup ma prochaine question c'est donc selon toi en
quoi la schizophrénie impact-elle sur la qualité de vie du
patient ? En quoi la maladie, ses symptômes vont impacter dessus ?
»
- « Bah à partir de moment où la maladie
commence à handicaper son quotidien quoi, quand la personne ne peut plus
rien faire, ne peut plus être avec l'autre euh.. ne peut plus être
avec lui-même déjà ou elle-même et euh.. l'isolement,
la rupture de lien, c'est ça qui est horrible pour certains
schizophrène pas tous mais pour la plupart quand même c'est
l'isolement et la rupture de lien. »
- J'acquiesce puis je continue : « Alors, la suite, par
rapport à la relation de soin infirmier, donc là j'ai plusieurs
questions et la premier c'est selon toi quelle place à la relation de
soin dans la prise en charge avec un patient schizophrène ? »
- « Alors moi où est ce que je la met bah
ça dépend des situations, euh.. avec le schizophrène de
par mon expérience je me sers du tiers, des fois je fais pas avec la
personne elle-même, parce que c'est trop compliqué donc du coup je
me sers de chose aux alentours comme par exemple ce matin tous les mois
j'accompagne une dame schizophrène faire ses courses et j'accepte
d'aller à l'endroit où elle m'emmène, elle est très
persécuté et j'accepte de faire des kilomètres alors
qu'elle a des magasins près de chez elle. Le tiers c'est d'accepter que
c'est stupide d'aller aussi loin faire des courses mais je respecte son univers
parce que c'est comme ça. Donc moi mes accompagnements je les fais pas
forcément, avec elle surtout, avec des entretiens cliniques parce que je
pense que c'est pas nécessaire par contre je me sers de ce qui est du
tiers comme d'aller faire les courses avec elle ça, ça fait lien.
C'est ça qui me permet d'être en lien avec elle, c'est pas
forcément la discussion c'est ça que je veux dire, j'ai une autre
patiente je vais laver son linge au lavomatique avec elle et pourtant elle peut
le faire seul mais vu que le lien est difficile et bah je fais avec autre
chose. Faire du tiers enfin prendre du tiers ça peut être
n'importe quoi. Alors je ne sais pas si tu comprends le tiers ? Enfin c'est
puisque je ne peux pas avoir un lien direct, que ce n'est pas possible je mets
un lien indirect pour aller vers elle »
- « -Et c'est comme ça que tu crées le
lien, la relation de soin ? »
- « Oui ou même d'être à
côté ça peut être aidant et sans jugement surtout
mais la relation de soins en psychiatrie c'est essentielle, je la place quand
même au centre et c'est être là, être dans l'empathie,
c'est pas la même que quand tu es en diabétologie, pour expliquer
à quelqu'un qui va avoir des insulines.. c'est un exemple palpable hein
ou même en orthopédie la personne qui se casse la hanche toi en
tant qu'infirmière tu vas avoir une relation d'aide mais ça va
pas être la même enfin tu vas éduquer, enfin tu vas
être dans l'empathie par rapport à la douleur tu vas te soucier de
lui mais c'est une relation plus courte, c'est une relation de soin mais dans
le sens plus technique c'est une relation qui découle du soin technique
je sais pas si tu vois.. »
- « Si je comprends et du coup par quel moyen tu la fait
vivre cette relation ? Comme tu m'expliquais un peu déjà..
»
- « Bah oui ça dépend ça peut
être aller chez la personne ça peut être.. enfin je parle
par rapport à l'équipe mobile mais en moyen long séjour je
vais mettre en place des choses pour que ce soit plus vivant pour eux, je vais
essayer de ramener un peu de punch (elle claque des doigts), mettre en place
des activités qui les stimule voilà je pense que c'est comme
ça que je l'a fait vivre »
- « Donc j'avais mis, qu'est-ce qui favorise selon toi la
relation de soin avec un patient ? »
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 62
- « Et bah l'empathie, d'être convaincu en ce que
tu fais sans porter de médaille tu vois parce que des fois moi je suis
convaincu que si je vais faire ça bah j'aime pas trop le mot convaincu..
tout en gardant.. faut être humble, dans l'humilité et aussi par
exemple si tu rentres chez un patient et que tu cries « oh bah c'est sale
chez vous la » tu vas pas favoriser la relation, il faut s'adapter au
patient, à sa façon d'être, son univers. »
- « Oui il faut de la tolérance ? »
- « De la tolérance oui voilà et de
l'humilité moi je m'en fou si c'est sale chez lui je rentre dans son
univers à lui donc favoriser c'est respecter aussi, c'est le fait que je
l'aide et que ça lui apporte quand je repars, il faut qu'il est envie de
me revoir.. alors toutes les infirmières de pense pas comme moi..
»
- « Mais c'est le but des entretiens ça me permet
de voir différent point de vue et chacun est différent »
- « Oui parce que d'autre vont favoriser ça et
après elle pourra être en lien enfin voilà. Et la
subjectivité et ce que tu es, être authentique et soi-même
favorise la relation. »
- « D'accord donc ensuite.. oui, qu'est-ce que tu
rencontres comme difficulté dans la relation de soin avec les
schizophrénie ?
- « Alors avec certains patient qui peuvent être
tellement mal.. le faite qu'il soit pas accessible. Des gens qui sont
très en crise, qui sont très très très
délirant c'est pas facile quoi d'établir une relation. Ca nous
arrive après on sait faire ce qu'on a appris mais quand même euh..
aussi moi si je vais chez quelqu'un que je ne connais pas ça m'est
arrivé ici et de sentir que la personne était complètement
parasité et que je ne le connaissais pas et du fait que je ne le
connaissais pas bah j'étais pas à l'aise voilà donc le
fait de ne pas connaître la personne et d'avoir un patient très
délirant ça peut être une difficulté et c'est pour
ça l'humilité elle est là aussi c'est pas parce que j'ai
bossé 30 ans que je sais tout faire. Voila moi quand je rencontre
quelqu'un y'a un temps d'adaptation, voilà je peux être
gêné par la non accessibilité de la personne, pour un
premier contact en tout cas après quand tu connais bien la personne et
qu'elle est fermé c'est différent. »
- « Et du coup face à ses difficultés que
tu me parle là qu'est-ce que toi tu vas mettre en place, sur quoi tu vas
d'appuyer? »
- « Bah déjà j'en parle à mes
collègues, je transmet à mes collègues. J'ai toujours
bossé en individuel mais grâce au collectif. Tu vois je fais toute
seule j'ai ma pensée j'ai mes idées mais par exemple quand je
rencontre des difficultés avec un patient je me réfère
à l'équipe. Après, par exemple quand j'ai rencontré
mon patient là à 12h je savais pas ce que j'allais lui dire parce
que je savais pas comment il était, je l'avais jamais vu et j'ai pas
besoin d'appeler mes collègues pour leur dire bah tiens qu'est ce qui
faut que je lui dise mais je me sers du collectif dans le sens où
après je retransmets mes informations, mon ressenti, mon vécu et
on discute avec l'équipe pour faire le point. Donc tu vois après
avoir vu un patient, je ramène l'information à l'équipe
pluridisciplinaire, je ramène au collectif pour partager et pour avancer
et faire une bonne prise en charge »
- « Et ce travail en équipe il va jouer quel
rôle dans la prise en charge du patient schizophrène surtout ?
- « Bah déjà il va me permettre de
continuer, d'avancer avec le patient et le fait de transmettre les informations
entre nous, ça va permettre une prise en charge adaptée. Notre
travail relationnel en grande partie c'est pas vraiment concret au final il
n'est pas palpable donc la transmission ça le rend palpable. Le fait de
faire des transmissions écrites, de raconter à mes
collègues c'est une façon de réfléchir ensemble
à la prise en charge, que ce soit concret. Quand on fait des
activités avec les patients, qu'on discute et qu'on parle de leur
difficulté bah après j'espère que ce qu'on met en place en
équipe bah ça permet d'établir la confiance, de
créer un lien et de la confiance avec le patient. Et aussi si je vois
que j'ai des difficultés avec le patient, que je sens que je ne peux pas
suivre cette personne et ça peut arriver de dire à sa
collègue « oulala j'aimerai bien que tu prennes en charge ce
patient parce qu'avec moi ça le fait pas du tout, je le sens pas, je
vais pas être thérapeutique » tu vois ? et du coup moi je
passe la main facilement quand j'estime que c'est nécessaire, je
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 63
m'acharne pas. Je vais voir mon collègue par exemple et
je vais lui dire tiens Monsieur R là je préférerais que tu
aille le voir en tant que mec parce que pour ce problème là je me
sentais pas à l'aise en tant que fille et je sentais que je n'allais pas
être aidante pour lui tu vois? Voilà.. Et puis il faut retenir en
psychiatrie, que c'est important de pouvoir dire à l'autre bah
écoute je sais pas, des fois tu sais pas mais c'est bien de le dire
parce que le but c'est pas de mal faire les choses, c'est pas faire les choses
pour se prouver qu'on sait tout. C'est bien de le dire quand on est dans
l'impasse, qu'on sait pas, c'est pas une tare. Aujourd'hui on veut tout savoir
et des fois quand je dis que je ne sais pas, ça choque alors que c'est
normal et important et je pense au patient avant tout. Des fois c'est
perçu comme de la nonchalance alors que non, et puis des fois je vais
dire je sais pas et ma collègue après va me dire qu'elle non plus
donc il faut savoir le dire dans une équipe pour pouvoir avancer dans la
prise en charge avec les patients, pour leur bien quoi. Et puis au final, on se
serre les coudes dans une équipe, même quand ça va pas bah
ça a un côté rassurant d'être plusieurs.
- « Oui ça c'est vrai ! »
- « Et je voulais rajouter aussi que par rapport au
patient schizophrène l'équipe peut être
bénéfique ou non pour lui suivant les situations, des fois c'est
mieux que ce soit restreint c'est mieux qu'il y est qu'une seule personne et
des fois bah c'est mieux d'être plusieurs pour qu'il y ait du relais, des
fois parce que c'est lourd, ça dépend, soit parce que la
communication est difficile c'est dur et par exemple avec monsieur T un patient
schizophrène dont je m'occupe, il vaut mieux être une seule
personne, pareil avec une autre patient il vaut mieux être toute seule
mais avec Madame V par exemple bah elle s'est bien qu'on soit plusieurs.
Voilà y'a rien de défini mais des fois y'a des situations
où c'est bien que ça se dilue pour la personne et la distance
elle est là aussi c'est une façon de mettre une distance ou au
contraire il vaut mieux être proche comme Monsieur T, en ce moment je
suis proche de lui parce que c'est nécessaire tu vois ? »
J'acquiesce puis elle continue : « mais à un moment donner hop
quand je vais sentir que ça voilà bah je vais me retirer (elle
recule sur sa chaise et s'éloigne de la table pour m'illustrer la
distance) »
- « Et bien justement par rapport à cette juste
distance, qu'est-ce que c'est pour toi la juste distance ? »
- « Bah c'est au fur et à mesure de ton
expérience et de la chronolo.. enfin comment je pourrais dire.. du
timing. C'est à dire qu'il faut du temps quand même pour rentrer
en relation, c'est une fois que tu es entrée en relation avec le
patient, où tu sens qu'il y a quelque chose qui s'est créé
avec le patient bah c'est toi qui va sentir et savoir si il faut que tu sois
proche ou loin. A un moment donné il faut savoir se retirer et prendre
du recul. Tu sais bien que le schizophrène il est dans sa bulle, y'a des
patients qui veulent bien qu'on les touche et d'autres qui veulent pas, donc
y'a 15 000 façon de faire. Après la distance voilà il faut
savoir être la et il faut savoir ne pas être là aussi,
déjà pour pas que le patient soit persécuté par
exemple. Et puis des fois chez certains schizophrènes y'a cette notion
de clivage, et si tu connais pas ça bah des fois tu vas être le
mauvais objet mais faut.. comment dire.. c'est pas grave quoi, il faut pas te
dire « oh bah moi ce patient là il m'aime plus il veut plus,
pourquoi avec toi il veut bien et pas moi » c'est nécessaire, une
fois si tu es le mauvais objet enfin par rapport à mon expérience
il faut faire avec ça, si la personne ne veut plus me voir pour x
raisons je ne vais pas être blesser, je vais essayer de le comprendre
mais pas d'aller lui demander pourquoi mon collègue et pas moi. Je
respecte son choix. Donc c'est ça aussi la distance quand tu sens que
y'a un clivage faut pas aller au charbon quoi ! »
- « Oui d'accord je vois et donc en quoi la juste
distance peut-elle être déterminante dans la prise en charge du
patient schizophrène ? Là c'est plutôt ce qui va être
bénéfique et au contraire ce qui ne le sera pas dans cette juste
distance, point positif et point négatif de la juste distance dans la
prise en charge.. »
- « Qu'est ce qui est déterminant.. bah.. par
exemple quand on est très inquiet pour un patient, quand y'a une notion
de passage à l'acte bah on a envie d'être proche quoi
après..
DESPREZ Chloé | Travail de Fin d'Etudes IFSI de
Lisieux | Mai 2019 64
après euh.. enfin c'est ce que je disais tout à
l'heure plus tu vas savoir quand il faut être distant avec le patient bah
plus ça va être bénéfique pour lui. Si tu arrives et
que tu es proche alors qu'il faut que tu sois distante bah ça va
être enfermant pour le patient, tu seras pas en train de l'aider. Imagine
toi tu es dans ta bulle t'a envie d'être toute seule, tu bouquines par
exemple tu as besoin de ça et moi j'arrive je parle avec toi, je te pose
des questions enfin je veux dire, ça va te déranger, faut faire
attention à pas être intrusif ! voilà donc le but c'est que
le patient se sente bien quelque soit cette distance qu'on a pu mettre avec la
personne, alors des fois on sait pas des fois on se trompe, des fois je me suis
approché alors qu'il fallait que je recule ou des fois je me suis
reculé alors que c'était pas nécessaire enfin tu vois
c'est une chose compliqué, l'être humain est compliqué y'a
pas vraiment de recette on s'adapte ! »
- « Oui ! Mais c'est pour ça qu'on aime la
psychiatrie » dis-je en rigolant
- « Mais oui c'est ça ! « (nous rions) «
Et pour finir malgré cette distance qui est parfois
nécessaire, il faut que le patient se sente bien et
qu'il se sente bien quand on est proche aussi. Il faut respecter l'univers du
schizophrène enfin j'aime pas dire ça mais oui respecter son
univers à lui, ne pas être trop intrusif parce que être
intrusif c'est casser sa bulle, c'est rentrer dans son monde. Et au contraire
ne pas être trop distant non plus des fois non plus parce qu'il va avoir
besoin de nous. Et puis tu vois y'a des patients pour lesquelles faut pas trop
être proche parce qu'on rentre dans leur bulle et eux ils nous
incorporent à leur délire donc faut savoir se protéger
aussi en tant que soignant tu vois ? Moi ça m'est arrivé de me
dire oula il m'incorpore à son délire la donc j'ai pris les
distances nécessaires, à un moment donné je lui ai
même dis je suis pas une amie et on sentait qu'il voulait m'accaparer
pour lui tout seul. Je lui ai dit que j'étais là pour lui, que
j'étais soignante et j'ai mis une réelle distance »
- « Et ça a marché ? »
- « Ouais ouais ça a marché, donc c'est
soit toi qui décide à quel moment il faut être distant
parce que ça va pas être bon si tu rentres dans le délire
du patient et qu'il t'accapare, si tu fais partie de sa continuité c'est
pas bon du tout »
- « Oui ça va pas l'aider ! »
- « Non du tout ! »
- « Ca marche je vois, et du coup j'ai une
dernière petite question, c'est qu'est ce qui n'a pas été
abordé la pendant notre discussion et que toi tu aimerais partager ?
»
- « Par rapport à la schizophrénie bah je
pense pas que tu vas pas en parler dans ton mémoire mais la psychiatrie
se casse la figure quand même et je trouve que le schizophrène est
moins bien pris en charge qu'avant quoi. On donne peu de moyen. Après
voilà ça m'empêche pas de croire en ce que je fais
»
- « Bah c'est important ça ! »
- « Bah oui mais sinon autrement voilà »
- « Et bah merci beaucoup c'était très
intéressant, je pense qu'on a répondu à tout. Je te
remercie ! »
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