Le droit de veto au conseil de sécurité des nations-unies entre gage juridique d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits.( Télécharger le fichier original )par Xavier MUHUNGA KAFAND Université catholique du Congo (UCC) - Licence en droit 2015 |
CHAPITRE 2. LE CONSEIL DE SÉCURITÉ, ENTRE IMPÉRIALISME NÉO-INSTRUMENTALISTE ET EXPANSIONNISME HÉGÉMONIQUE DES MEMBRES PERMANENTS : LE DROIT DE VETO Â L'AUNE DU BLOCAGE DE L'ISSUE DES CRISES
Le droit international, tel que moulé dans la fabrique institutionnelle des Nations Unies, organise des relations diplomatiques et commerciales entre Etats et où chacun se déploie prioritairement, mais sans trop le crier, à protéger ses citoyens à l'étranger, à assurer sa sécurité intérieure et extérieure, et, partant, à défendre son intérêt national. Dans nombre de comités spéciaux ou organes de la structure onusienne, l'élaboration des règles du droit international a été parfois retardée ou bloquée pendant de nombreuses années, parce qu'un Etat ou un groupe d'Etats considérait que la norme juridique en cours d'élaboration pouvait porter atteinte à ses intérêts nationaux. Et dans si bien des cas, des délégués ont refusé de participer à l'oeuvre de codification et de développement du droit international engagée dans un organe politique de l'ONU, en invoquant, pour tout argument, des instructions qu'ils auraient reçues de leurs capitales. Comme on peut le voir, les Etats se déterminent sur l'échiquier international essentiellement en fonction des facteurs et des considérations de politique nationale. La défense de l'intérêt national demeure l'une des préoccupations majeures des Etats tout au long du processus normatif et du parcours d'adoption des décisions116(*). Par ailleurs, lorsqu'on prend en compte la sensibilité infiniment plus vive des représentants des Etats aux réalités de la solidarité nationale plutôt qu'à celles de la solidarité internationale, l'on peut bien partager l'opinion du Professeur Charles De VISSCHER selon laquelle : « la solidarité internationale est un ordre en puissance dans l'esprit des hommes, elle ne correspond pas à un ordre effectivement étatique »117(*). Cette sensibilité très développée aux réalités de la solidarité nationale émaillée d'un attachement implacable à l'intérêt national est de plus en plus au centre de l'utilisation du veto au Conseil de Sécurité et ne va pas sans retarder la fin de plusieurs crises d'envergure internationale (première section). Une stagnation qui stimule à réfléchir sur la pertinence du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien et sur l'opportunité du maintien en l'état des membres permanents, dans un monde en mutation (deuxième section). SECTION 1. LE DROIT DE VETO AUX TRÉFONDS DES FREINS AU RÈGLEMENT DES CONFLITSAu Conseil de Sécurité, une majorité de neuf voix est requise pour l'adoption d'une résolution. Pour les décisions de procédure, ces neuf voix peuvent émaner de tous les membres, mais, pour toute autre question de fond, notamment celle concernant le maintien de la paix, le vote défavorable d'un seul des membres permanents du Conseil empêche l'adoption de la résolution, même si celle-ci a recueilli neuf votes favorables. Cette possibilité de rejeter une résolution, conférée à chacun des cinq membres permanents du Conseil, leur accorde en fait un droit de veto, dont l'existence même constitue un point de controverse permanent depuis la création de l'ONU. L'utilisation du droit de veto par l'ex-Union soviétique, mais également par la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis ou la Chine nationaliste, provoqua à plusieurs reprises le blocage de l'institution. En 1950, en pleine guerre froide, la volonté de surmonter les conséquences de l'attitude soviétique conduisit à l'adoption de la résolution 377, qui stipule que l'Assemblée générale acquiert une compétence pour assurer le maintien de la paix lorsque l'absence d'unanimité paralyse l'action du Conseil de Sécurité. Depuis lors s'est installée une pratique extra legem d'interprétation subjective et relativiste de la Charte onusienne (paragraphe 1), laquelle pratique se rend, de facto, complice de l'impunité de certains crimes et actes en violation des droits humains perpétrés à la faveur d'un contexte de conflit armé international laissé pour compte (paragraphe 2). Paragraphe 1. La Charte de l'ONU à l'épreuve d'une interprétation extensive aux fins de légitimation de sa transgression: le droit de veto, une arme de protection d'intérêts nationaux de ses titulairesEn principe, le Conseil de Sécurité prend des décisions qui s'imposent à tous118(*), au nom de l'ensemble des Etats membres119(*), pour tout ce qui touche au maintien de la paix et à la sécurité internationale. Mais la capacité de décider du Conseil dépend en réalité de la capacité de ses membres à forger un consensus. Or le droit de veto octroyé aux cinq membres permanents constitue une véritable entrave à la capacité de décision du Conseil, qui se trouve hors d'état d'intervenir dès lors que son action ne conviendrait pas à un membre permanent, quelles que soient par ailleurs les menaces ou les atteintes à la sécurité internationale. Les Etats qui disposent du droit de veto « peuvent donc rester en marge de la Charte et de ce fait, si le Conseil n'a aucun moyen de passer outre le veto d'un de ses membres permanents, à l'inverse ceux-ci peuvent se démarquer de la position commune du Conseil »120(*). Tel a été le cas lorsque les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont décidé d'intervenir en Irak. Il est donc clair que le droit de veto affirme la suprématie de quelques intérêts nationaux sur l'ensemble, dans la mesure où il n'en est pas fait usage pour le bien de la communauté internationale, mais au regard des intérêts de ses détenteurs. L'ONU ne peut donc agir quand les intérêts des grandes puissances sont en jeu, d'où son incapacité à traiter par exemple de la Corée du Nord, d'Israël ou encore de la Tchétchénie. Ce que les Etats consentent à donner à l'ONU est fonction de leur perception de l'utilité de ses actions, et cela est illustré par les moyens militaires mis à la disposition de l'organisation par ses Etats membres. Henry KISSINGER, Secrétaire d'Etat Américain de 1973 à 1977, sous les présidents Richard NIXON et Gerald FORD, disait : « la politique étrangère des Etats-Unis d'Amérique est pragmatique. Elle est dictée par l'intérêt américain »121(*). Ces propos furent corroborés, plusieurs années après, par John KERRY, Secrétaire d'Etat lui aussi, dans l'administration OBAMA, qui, relevant le caractère dynamique et réaliste de la politique étrangère américaine, préconisait d'associer le président Bachar Al-ASSAD dans les négociations pour mettre fin au conflit armé en Syrie122(*). La poursuite de l'intérêt national que Hans MORGENTHAU identifie à l'accumulation de la force reste, d'après les thèses du courant réaliste des Relations internationales, la boussole des décisions, positions, actions et orientations des Etats dans leurs rapports avec d'autres123(*). Dans ce sens, les Etats-Unis par exemple, ayant perçu le manque à gagner en continuant à soutenir en Syrie une guerre qui ne cesse de s'enliser dans le gouffre d'hécatombe et semble profiter au développement des factions terroristes, ont décidé aujourd'hui d'assouplir leur opposition directe et sectaire au régime syrien, en vue de préserver leur intérêt national - notamment en minimisant la part d'aide et de financement allouée aux rebelles - . Ce faisant, les Relations internationales qui sont la mise en action du droit international résident foncièrement dans la recherche de la puissance et la défense de l'intérêt national dans le champ frontal international, rappelle on ne peut plus judicieusement Mario BISTELA124(*). Et pour le courant réaliste-traditionnaliste125(*), l'intérêt national est la variable déterminante d'explication et de prise de décisions en politique étrangère. Cet intérêt national est constitué de la quête effrénée de la puissance, la sécurité, la prospérité et la sauvegarde des valeurs culturelles et morales garantes du prestige et de l'identité nationale d'un Etat126(*). La puissance se réfère ici à la volonté de contrôle d'un acteur sur d'autres, au renforcement de sa capacité d'influence et d'inflexion de leurs actions et décisions127(*). La sécurité, quant à elle, est conçue comme bouclier physique qui garantit l'autonomie d'une volonté, celle gouvernementale, qui permet la recherche d'une identité propre. Cette dernière, note Jean BARRIA, sera principalement d'ordre culturel, religieux ou idéologique au regard de ce que l'environnement local fait valoir128(*). La sécurité au titre de donnée de l'intérêt national vise principalement l'intégrité du territoire national, la stabilité des institutions politiques et la préservation des attributs régaliens de l'Etat. La prospérité recherchée entend, pour sa part, améliorer le niveau de vie social, accroître le capital économique national et développer une politique d'échanges commerciaux profitable à l'Etat considéré. Et la sauvegarde des valeurs morales et culturelles renvoie à la promotion des idéologies, croyances et idéaux qui fondent l'essence et la survie mêmes d'un peuple. La question de l'interprétation de la Charte ne fait pas consensus dans la doctrine. En effet, certains considèrent que les principes qu'elle contient doivent être interprétés de manière évolutive et flexible, qu'une interprétation extensive est nécessaire au regard de l'évolution du contexte international, des nouveaux acteurs et défis du monde contemporain, tandis que d'autres au contraire défendent avec ferveur une interprétation restrictive. Au sujet par exemple de l'interprétation extensive de l'article 51 de la Charte - et donc du principe de la légitime défense - qui a justifié l'action militaire américaine contre l'Afghanistan, déjà dans l'esprit des gouvernants américains, le recours à la légitime défense visait ici, en plus de frapper et de punir les responsables des attentats de New York du 11 septembre 2001, à prévenir d'autres actes du même genre. De même, en ajoutant le terme « préventive » à la légitime défense pour qualifier et justifier la guerre contre l'Irak en mars 2003, les Etats-Unis ont fait d'une notion traditionnellement défensive et exceptionnelle, un concept offensif érigé en règle. C'est essentiellement autour de la qualification d'agression armée, autour de la distinction entre acte illicite de soutien, non constitutif d'une agression armée et un véritable acte d'agression qui permet la mise en oeuvre de la légitime défense, qu'il existe des divergences. En effet, pour les partisans d'une interprétation extensive de la Charte, suivre les dispositions de la Charte dans une acception restreinte, ne permet pas de couvrir les éventuelles agressions par des groupes privés autonomes à l'insu de l'Etat. Dans une telle hypothèse, l'Etat attaqué doit-il subir sans riposte ? Pierre Michel EISEMANN estime que dans la mesure où « l'invocation d'un état de nécessité n'est plus, aujourd'hui, aucunement justificative de l'emploi de la force armée, seul le recours au concept de légitime défense appliqué à des actes n'impliquant pas l'intervention d'un Etat »129(*) pourrait permettre de répondre négativement à cette question. Refuser à un Etat le droit de s'opposer par les armes à une attaque de même nature conduirait, selon lui, à le désarmer et donc à le soumettre à l'agresseur. Les partisans d'une interprétation extensive ont argué du caractère novateur et profondément original des attentats du 11 septembre pour démontrer le caractère lacunaire et inadapté du droit international existant130(*). C'est d'ailleurs sur le fondement de cette lacune qu'ils ont cru pouvoir affirmer la légalité de la guerre antiterroriste. Toutefois, toute inadaptée et lacunaire que puisse être la Charte, rien n'empêche de la modifier par le biais de négociations multilatérales afin de la rendre plus appropriée aux réalités d'aujourd'hui, relève très justement Géraldine LHOMMEAU131(*). Mais entre-temps, le droit existant doit s'appliquer à sa juste valeur pour éviter tout détournement. En effet, comme l'affirment les défenseurs de la Charte, on ne peut combler les lacunes de celle-ci en élargissant l'exception au détriment de la règle, sans en dénaturer l'esprit et l'intention des rédacteurs et sans que cela ne présente un risque d'instrumentalisation des règles internationales au gré des intérêts particuliers. Pour mieux percevoir la pointe de ce vecteur d'interprétation utilitariste de la Charte, nous nous proposons de tenter de cerner l'herméneutique que les Etats-Unis s'en sont faits en rapport aux notions du droit de la légitime défense et du droit de la responsabilité internationale pour engager leur guerre contre le terrorisme en attaquant l'Afghanistan et l'Irak. A propos du droit naturel de la légitime défense, la Charte des Nations Unies a réaffirmé l'illégalité de la guerre en interdisant le recours à la force armée entre Etats132(*) ; Il existe néanmoins une limite à ce principe : la légitime défense133(*). Toutefois, celle-ci reste l'exception à la règle et demeure soumise à conditions. Ces conditions se ramènent principalement à l'établissement sans équivoque d'une agression armée imputée à un Etat et à l'exigence d'une riposte proportionnée et nécessaire. Pourtant, non seulement l'action militaire américaine en Afghanistan ne saurait se fonder parfaitement sur l'argument de légitime défense dans la mesure il est difficile, aujourd'hui encore, de prouver, juridiquement, un lien évident entre le gouvernement afghan de l'époque et le groupe Al Qaida, auteur des bombardements des Twin Towers134(*), pour attester que le second avait agi au nom du premier, mais elle s'illustra également par l'emploi des moyens militaires colossaux, disproportionnés et une campagne de démonstration des forces durant plusieurs années. Et quant à la guerre contre l'Irak, elle pèche sur la fourniture des preuves d'une agression armée préalable des forces régulières irakiennes ou de leurs mercenaires contre les Etats-Unis et ne pourrait être fondée sur l'impératif d'une riposte qui, en droit international public, ne peut viser qu'une agression qui a déjà eu lieu, et non prévenir des agressions futures135(*) qui, par essence, sont éventuelles et donc incertaines. Il s'agit donc dans ces deux cas de figure d'une interprétation abusive de la notion du droit exceptionnel de la légitime défense des Etats. Le droit de la responsabilité internationale souffre, lui aussi, d'une interprétation abusive. Si l'argumentation pour justifier la guerre contre l'Afghanistan ne peut se fonder sur les règles spécifiques définissant l'agression, elle ne peut pas non plus s'appuyer sur les règles plus générales relatives à la responsabilité de l'Etat. Il suffit pour s'en convaincre de se référer à l'interprétation que les Américains en avaient en imputant les actes terroristes commis par un groupe d'individus, personnes physiques de droit privé, à la responsabilité de l'Etat afghan, personne morale de droit public136(*). Les Etats-Unis et les autres grandes puissances agissent généralement sur la scène internationale dans le but de défendre leurs intérêts économiques et géostratégiques personnels, restant persuadés que ce qui est important pour eux l'est aussi pour l'ensemble du monde. En intervenant militairement en Afghanistan, puis en Irak, les Etats-Unis entendaient forcément vendre l'image qu'ils se sont investie depuis l'instauration d'un système international unipolaire d'avoir « la mission sacrée d'assurer le progrès politique, économique et social des populations ». La promotion de leur sécurité nationale l'avait nettement emporté sur la volonté de se montrer respectueux de la légalité internationale. A. La paix et la sécurité internationales sacrifiées par la primauté de l'intérêt sécuritaire national de grandes puissancesFort de leur puissance, les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité parviennent à s'imposer sur la scène internationale et à s'émanciper progressivement de tout formalisme juridique international pour préserver leur propre sécurité. Il s'agit, là encore, d'une sécurité d'exclusion, ne bénéficiant seulement qu'à une puissance ou à une caste réduite au mépris d'autres Etats. Ce désaveu de l'ordre mondial caractérisé par un unilatéralisme137(*) grandissant se double progressivement d'un dessein impérialiste138(*). Les Etats-Unis d'Amérique incarnent une figure paradigmatique à ce sujet. En effet, depuis l'administration CLINTON jusqu'à ce jour, la politique extérieure américaine se traduit par un total mépris pour les règles et les institutions internationales. Les contraintes du Droit international public ne semblent alors s'imposer qu'aux autres Etats et les Etats-Unis, se situant au dessus de toute la communauté internationale, s'estiment fondés à lui imposer certaines lois. La stratégie américaine, basée sur l'élimination de toute menace à la sécurité nationale non forcément à celle mondiale, affiche clairement, dans la continuité de la politique de Bill CLINTON, la volonté de se soustraire du cadre multilatéral contraignant et refuse tout enfermement dans le cadre de la légalité internationale - qui n'offrirait pas des garanties confortables de pleine sécurité des institutions, du territoire et du peuple américains - . Cette politique considère que « la sécurité du pays ne doit dépendre d'aucune contrainte extérieure », comme le rappelait madame Condeleezza RICE, alors secrétaire d'Etat dans l'administration George W. BUSH 2. Il s'agit donc pour les Etats-Unis de restreindre la compétence des Nations Unies à des fonctions subordonnées à leur paix, leur sécurité et leur prospérité nationales. Et Colin POWELL, secrétaire d'Etat américain sous l'administration George W. BUSH 1, déclarait que « les Etats-Unis avaient le droit souverain d'engager une action militaire chaque fois qu'ils seront convaincus d'un danger guettant leur sécurité interne », revendiquant ainsi un pouvoir souverain de recourir à la force, même en solo s'il le faut, pour garantir leur sécurité nationale, et ce au mépris des principes fondamentaux du droit international. Pour s'en convaincre, il nous parait utile d'opérer une rétrospection historique pour se rendre compte des écarts entre la stratégie de la politique extérieure américaine et le droit international, lesquels permettent de constater que depuis les années 1990, les Etats-Unis ne cessent de démanteler l'architecture internationale de sécurité et remettent en question l'ensemble des accords internationaux qui régulaient jusqu'alors la sécurité du globe139(*). En effet, le nombre de traités fondamentaux non ratifié par les Etats-Unis est à la fois impressionnant et significatif. A titre d'exemple, on peut citer le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 ; les Protocoles additionnels aux conventions de Genève de 1949, respectivement relatifs à la protection des victimes des conflits armés internationaux et à la protection des victimes des conflits armés non internationaux ; la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 ; la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant de 1989 ; le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques en 1997 ; le Statut de la Cour Pénale internationale en 2002, etc. Dans le domaine des armes conventionnelles, les Etats-Unis et la Chine ont refusé de ratifier la Convention d'Ottawa de 1997 sur les mines antipersonnel dans le but de protéger leurs forces stationnées sur la ligne militarisée entre les deux Corées et de préserver l'exploration des mines mixtes. Ce tableau et la preuve éloquente de l'instrumentalisation du droit international, dans une tendance de « double jeu » qui consiste à y recourir dans la mesure où il pourrait caresser dans le sens du poil l'intérêt national de la puissance étatique considérée et à s'en détourner lorsqu'il parait un facteur contre-productif au regard de cette finalité. Ainsi, les grandes puissances mondiales, titulaires du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien, n'hésitent pas à faire usage de ce droit contre tout projet ou toute proposition de résolution visant à régler un conflit armé donné, au moyen d'une intervention des casques bleus140(*), lorsqu'elles redoutent qu'une telle intervention ou que pareil règlement dudit conflit considéré dans toutes ses particularités mettrait gravement en péril leurs intérêts économiques et sécuritaires. Dès lors, ce droit est, dans le rythme de son exercice, réduit au rôle très peu élogieux d' « instrument d'hégémonie expansionniste et de prosélytisme de saucissons »141(*). * 116 CARREAU, D., Droit international, Paris, Pedone, , 1988, p.464. * 117 De VISSCHER, C., Théories et réalités en droit international public, Paris, Pedone, 1985, pp. 56-43. * 118 Article 24, alinéa 1 de la Charte des Nations Unies. * 119 Idem. * 120 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op.cit., pp. 195-197. * 121 KISSINGER, H., La nouvelle puissance américaine, Paris, Fayard, 2003, p. 34. * 122 John KERRY fit cette déclaration le 14 mars 2015, suscitant un tollé général de plusieurs pays occidentaux dont la France et la Grande Bretagne. * 123 KISSINGER, H., op.cit., p. 43. * 124 BISTELA, M., Théories des relations internationales, Paris, Ed. Science politique, 1995, pp 43-50. * 125 Les thèses du courant réaliste-traditionnaliste relatives à la compréhension de la prise de décisions en relations internationales s'opposent à celles du courant scientifique. Celui-ci focalise l'éventail de ses pistes explicatives des décisions en politique étrangère sur la rationalité, l'environnement sociologique, le schème cognitif, la configuration de l'institution gouvernementale et tant d'autres facteurs intuitu personae du décideur. * 126 BARRIA, J., Théories des relations internationales, Paris, Editions Science politique, 2002, pp. 17-21. * 127 BARRIA, J., Théories des relations internationales, op.cit., pp. 17-21. * 128 Idem. * 129 EISEMANN, P.M., « Attaques du 11 septembre et exercice d'un droit naturel de légitime défense » in Actualité et droit international, janvier 2002, pp. 239/248. * 130 BANNALIER, K., CORTEN, O., CHRISTAKIS, T., DELCOURT, B., Le droit international face au terrorisme, Cedin Paris I, cahiers internationaux n°17, Pedone, 2002, pp. 45-52. * 131 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op.cit., p. 73. * 132 Article 2, paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies. * 133 Article 51 de la Charte des Nations Unies. * 134 Le 11 septembre 2001, deux avions civils détournés percutent chacun des deux plus haut gratte-ciel de l'île de Manhattan (à New York), les tours jumelles (Twin Towers) du World Trade Center. Affaiblie par la violence de l'impact et par la propagation du feu, la tour Sud s'effondre 56 minutes après la collision, emportant avec elle ses occupants ; la tour Nord résiste 1 h 42' avant de s'effondrer elle aussi. Au total, près de 3 000 personnes (employés, visiteurs, secouristes et passagers des vols) disparaissent avec les tours jumelles du World Trade Center. * 135 L'offensive militaire contre l'Irak, ayant été motivée par la thèse d'une guerre préventive, reste incompatible avec tout argument valable d'une riposte dans le cadre de la légitime défense. * 136 DUPUY, P.M., « 40 ans de codification de droit de la responsabilité internationale des Etats, un bilan », in RGDIP, 2003-2, pp. 7-8. * 137 L'unilatéralisme en droit international se caractérise par un mépris du droit et des institutions internationales et se fonde sur le primat du droit interne sur le droit international dont le triomphe représente le multilatéralisme. * 138 GREENPEACE, « Le droit international et la guerre contre l'Irak », http://greenpeace.org//, le 20 avril 2003 à 08h 10'. * 139 KISSINGER, H., La nouvelle puissance américaine, op.cit., pp. 45-48. * 140 C'est-à-dire en application des dispositions du Chapitre VII de la Charte. * 141 LAGHMANI, S., « Du droit international au droit impérial ? Réflexions sur la guerre contre l'Irak », in Actualité et droit international, avril 2003, p. 6. |
|