Les techniques non-juridictionnelles de protection internationale des droits de l'homme. Les rapports des états africains devant les comités de droits de l'homme des Nations Unies. à‰tude et perspectives.( Télécharger le fichier original )par Désiré AHANHANZO Université de Nantes. Université Paris II Panthéon Assas. - Diplôme inter-universitaire de Troisième Cycle "Les droits fondamentaux" 2004 |
II. Les Etats africains devant les Comités de l'ONU: les Grands Problèmes de la Procédure des Rapports et les Solutions et réformes à Court, Moyen et Long TermesA. Analyse de la situation des Etats africains par rapport à l'Obligation de Rapports devantles Organes Conventionnels de l'ONU 1. Retard et Non-Présentation de RapportsLa présentation Comité par Comité sur l'état des rapports par les Etats africains devant les Organes des Nations Unies créés en vertu des sept instruments de base de droits de l'homme révèle non seulement, toute proportion gardée pour la Convention sur les Droits des Travailleurs Migrants, une irrégularité et un retard chroniques dans la présentation des rapports au sept organes étudiés, mais encore, dans bien des cas, une absence totale de présentation des rapports par certains Etats africains. Si ces trois phénomènes concernent l'ensemble des Etats membres de l'ONU y compris du bloc occidental, ils se posent de façon endémique quant à ce qui concerne l'Afrique. Pour l'ensemble des Etats membres de l'ONU parties au sept instruments de base des droits de l'homme, au 31 Janvier 2004, 185 rapports initiaux qui auraient du être présentés en vertu des différents instruments conventionnels étaient en retard dont 114 depuis plus de cinq ans. En outre, 660 rapports périodiques étaient en retard6(*)2. Sur ce total et dans le cadre spécifique qui nous concerne, les Etats africains parties aux différents traités cumulent un retard de 114 Rapports Initiaux et de 373 Rapports Périodiques ! Ces nombres faramineux de rapports en retard, se décomposent, au niveau de chaque organe conventionnel, comme suit:
Ainsi, pour chaque organe conventionnel, les Etats africains suivants n'ont encore présenté aucun rapport: CESCR Angola, Burkina Faso, Burundi, Cape-Vert, Côte d'Ivoire, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée Equatoriale, Kenya, Lesotho, Malawi, Mali, Namibie, Niger, Ouganda, République Centrafricaine, République du Congo, Seychelles, Sierra Léone, Somalie, Zambie CCPR Afrique du Sud, Angola, Botswana, Burkina Faso, Cape Vert, Côte d'Ivoire, Djibouti, Guinée Equatoriale, Erythrée, Ethiopie, Ghana, Malawi, Mozambique, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Tchad CERD Liberia, Congo, Malawi CEDAW Botswana, Cape Vert, Comores, Côte d'Ivoire, Djibouti, Guinée-Bissau, Lesotho, Liberia, Mauritanie, Mozambique, Niger, République Centrafricaine, Sao Tome et Principe, Seychelles, Sierra Leone, Tchad CAT Afrique du Sud, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cape Vert, Côte d'Ivoire, Ethiopie, Gabon, Ghana, Guiné, Guinée Equatoriale, Kenya, Lesotho, Malawi, Mali, Mozambique, Niger, Nigeria, République Démocratique du Congo, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Tchad, Togo CRC Angola, Congo, Liberia, Sao Tome et Principe, Swaziland CMW Burkina Faso, Cape Vert, Egypte, Ghana, Guinée, Mali, Maroc, Ouganda, Sénégal, Seychelles. Ce qui précède met clairement en évidence que l'Afrique du Sud, l'Egypte, le Maroc, la Namibie, le Nigeria, le Sénégal, le Togo, la Zambie, doivent encore leur rapport initial à l'un des sept Comités; le Burundi, l'Erythrée, le Gabon, Kenya, l'Ouganda, la République Centrafricaine, Sao Tome et Principe à au moins à deux Comités; l'Angola, le Burkina Faso, Congo, Djibouti, l'Ethiopie, la Guinée, la Guinée Equatoriale, Lesotho, Liberia, le Mali, le Niger, la Somalie, le Tchad à au moins trois Comités. Mais, fait plus saississant et plus grave, la Côte d'Ivoire, le Ghana, le Malawi, la Sierra Leone doivent leur rapport initial à quatre Comités et le Cape Vert, et les Seychelles à cinq Comités ! D'autre part, le tableau de la situation des rapports des Etats africains établi au niveau du Comité pour les Droits de l'Enfant révèle que l'enthousiasme et la bonne volonté des Etats africains au moment de la ratification de la Convention relative aux Droits de l'Enfant ainsi que l'universalisme des valeurs humaines surtout au niveau de ce groupe vulnérable que constituent les enfants qu'a symbolisé cette ratification se sont quelque peu effrités. En effet, hormis la Somalie, tous les Etats africains ont ratifié la Convention relative aux Droits des Enfants et comme le révèle le sous-tableau de la décomposition du nombre de rapports dûs par Comité, 47 pays ont déjà soumis leurs rapports initiaux. Or, sur ces 47 Etats, 38 doivent encore leur deuxième rapport périodique, ce qui nuit au travail des comités et ne leur permet pas de suivre les progrès réalisés et de faire leurs recommendations pour pallier les difficultés qui entraveraient une application effective de la Convention dans leurs pays respectifs. De même, la situation présentée au niveau du Comité pour l'Elimination de la Discrimination Raciale démontre que onze (11) Etats africains parties à la Convention sur l'Elimination de toutes les formes de Discrimination Raciale doivent des rapports depuis au moins dix (10) ans. L'exemple de la Gambie, pour ne citer que celui-là dont le deuxième rapport périodique est attendu depuis 22 ans et qui, entre 1982 et 2004, doit treize (13) rapports périodiques au CERD, reste interpellant et constitue une pierre d'achoppement à la continuité du dialogue franc, ouvert et constructif auquel la soumission de leur rapport initial a servi de balise et qui devrait permettre une bonne application de la Convention dans l'Etat gambien. Inutile de préciser que le même Etat gambien doit aussi son deuxième rapport périodique au Comité des Droits de l'Homme depuis presque 20 ans et que le Mali connaît une situation similaire! (A/58/40 Vol. I, §71). Pourtant, par la voix de Mme. Joyce KAFANABO de la République-Unie de Tanzanie, les africains reconnaissent, ainsi que le stipule la Recommandation Générale No VI du CERD concernant la non-présentation de rapports (deuxième considérant), que la ratification et la mise en oeuvre dans la législation nationale des textes des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme n'était pas suffisante. Il fallait en outre assurer que les Etats parties créent un cadre institutionnel à même de favoriser l'application des dispositions. Son pays, at-elle, déclaré, met tout en oeuvre, notamment par des programmes de formation, pour développer les ressources humaines nécessaires afin de répondre à ses obligations de présenter des rapports au titre des traités auquels il est partie6(*)3. Les Etats africains qui n'ont pas encore présenté leurs rapports ou dont la situation est très critique violent expressément les dispostions conventionnelles. Or, rien sur le plan des textes ne permet d'envisager des mesures contraignantes pour remédier à la situation. Le seul pouvoir de sanction dont disposent les comités, comme nous le verrons, est celui de la publicité, une sanction diffuse. Ces efforts évoqués par la Déléguée tanzanienne qui devraient inspirer les autres Etats pour aller dans la même direction, n'ont malheureusement pas suffi pour permettre à la République-Unie de tanzanie d'honorer ses engagements vis-à-vis du Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels. Depuis l'acceptation par celle-ci le 11 Septembre 1976 de cet instrument, elle n'a toujours pas encore soumis son rapport initial dû depuis le 11 Septembre 1978 au Comité chargé de superviser ce Pacte (presque 27 ans de retard). Les bonnes intentions et les promesses pour faire des droits de l'homme une réalité en Afrique sont nombreuses, mais les faits les démentent. Le peuple algérien a déclaré son appui à la consolidation de la démocratie, des droits de l'homme et du pluralisme et a, après l'indépendance, déterminé que la création d'un état de droit et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales étaient des objectifs prioritaires. La volonté inébranlable des autorités algériennes d'instaurer une culture des droits de l'homme dans la vie quotidienne de la nation est attestée par leur adhésion aux conventions internationales des droits de l'homme, par leur acceptation des mécanismes de contrôle envisagés dans ces conventions, par la création d'agences de protection des droits de l'homme, la mise en place d'élections démocratiques pour toutes les institutions (...). L'Algérie a présenté régulièrement et dans les délais, ses rapports aux divers comités et entend poursuivre sa coopération et son dialogue avec ces comités ainsi qu'avec d'autres mécanismes onusiens. Telle était, en partie, la déclaration liminaire faite par M. BAALI, délégué algérien à la 41è séance de la Troisième Commission de l'Assemblée Générale à New York, le lundi 30 Octobre 20006(*)4. Pourtant, si l'Algérie est parfaitement à jour avec le Comité des Droits de l'Enfant, ses troisièmes (3è) rapports périodiques au Comité contre la Torture et au Comité des Droits de l'Homme étaient attendus respectivement depuis le 11 Octobre 1998 (sept ans de retard !) et depuis le 1er Juin 2000. Ces nombreuses observations et/ou conclusions finales auxquelles aboutit l'examen des rapports par les divers comités et qui identifient et mettent en exergue les aspects positifs et négatifs présentent, pour les Etats africains, l'intérêt de les aider à identifier eux-mêmes les problèmes qui se posent au niveau national dans la mise en oeuvre des instruments et celui de les faire bénéficier du soutien et de l'expérience d'un collège d'experts pour remédier aux difficultés afin d'assuer une bonne application des instruments pour le plus grand bénéfice de tous les citoyens africains. "En plus du fait de rater l'occasion de procéder à cet exercice d'introspection, et donc de ne pas bénéficier d'une assistance, la non-présentation d'un rapport a l'inconvénient suprême pour un Gouvernement de faire planer à son sujet une certaine présomption de culpabilité"6(*)5. Pour sortir des feux de projecteurs, les Etats africains doivent s'acquitter de leur obligation conventionnelle de rapport induite par leur acceptation et leur adhésion libres aux différents instruments. Pour que les comités de surveillance puissent relever le défi que constitue cette gangrène, il est impératif de connaître les raisons et les causes fondamentales à son origine. * 62 Voir E/CN.4/2004/98, §10, p. 4. Voir aussi "Moniteur des Droits de l'Homme", No 62/2004, p. 253) * 63 Voir Communiqué de Presse AG/SHC/3791, Troisième Commission, 23è Séance matin. Pour la Recommandation Générale No VI du CERD, voir HRI/GEN/1/Rev.5, p. 184 * 64 Assemblée Générale, Cinquante-cinquième Session - Documents officiels (A/C.3/55/SR.41), p. 3, §4-5 * 65 Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.- Séminaire sur le rapport périodique prévu par l'Article 62 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (Tunis, 24-27 Mai 1994): rapport final.- Banjul: CADHP, [1994], p. 5 in fine |
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