Conclusion
En définitive, il appert que l'idée d'un
humanisme de la diversité qui fait ici l'objet d'analyse est le
résultat d'un ensemble d'interrogations autour de la pluralité
des valeurs ou encore de la diversité qui s'affiche de nos jours comme
le noyau constitutif de la démocratie. Cet humanisme est le prolongement
de la réflexion philosophique telle qu'elle s'est
développée entre libéraux et communautariens. Les
débats entre libéraux et communautariens, symboles de la
dynamique inhérente à la démocratie moderne, vont en effet
permettre à Renaut de concevoir sa troisième voie libérale
comme l'exigence de synthèse entre l'affirmation des particularismes et
la quête de l'universel posé comme un a priori à la
réglementation d'une matière dans l'intérêt
égal de tous. Aux yeux de Renaut, rien n'illustre au mieux cette
réalité complexe que la notion d' « humanisme » et
celle de « diversité », seuls actes intellectuels capables de
comprendre les paradoxes de l'identité démocratique.
Son ouvrage196, adressé aux
sociétés démocratiques, démontre avec l'aide des
arguments éthiques, qu'il est plus commode de recourir à
l'éthique comme médiatrice des tensions démocratiques
plutôt que de traiter de la diversité dans le
195 A. Renaut, Un humanism de la diversité,
op. cit., p. 344.
196 Jl s'agit bien sûr de Un humanisme de la
diversité. Essai sur la décolonisation des identités,
op. cit.
strict champ de la politique. Sous cet angle, son analyse va
au-delà de Taylor et Kymlicka qui, en plaidant pour une prise en compte
institutionnelle des différences culturelles sont restés dans un
contexte purement politique et juridique. À en croire Renaut, seule
l'éthique peut permettre un engagement véritable en faveur de la
promotion de la diversité. Il s'agit donc pour lui, de mettre la
conscience de l'homme au fondement de tout traitement de la diversité.
Comme il a eu l'occasion de le rappeler lui-même :
En tout état de cause et au point où nous en
sommes de cette construction, tenons seulement pour acquis que c'est ultimement
de l'entrecroisement de décisions individuelles de type éthique
que résulte, au-delà du politique et de ses initiatives, une
perception collective de cette diversité197.
En résumant son apport au plan politique, par le
modèle de « justice compensatrice » qui ne passe en rien par
l'établissement des quotas, et au plan éthique par la
nécessité de valeurs collégialement partagées aussi
bien par différents groupes culturels que par les individus, il devient
clair que le penseur du concept de l'« humanisme de la diversité
» défend bien, à nos yeux, non pas seulement un
modèle spécifique à un pays donné, mais un
modèle universalisable, où toutes les sociétés
pluralistes pourraient puiser des ressources nécessaires pour leur
édification. Même si son apport se limite à la
réalité de l'État-nation français, il revient
à chaque chercheur d'y puiser de la matière pour analyser la
réalité politique de son milieu car, comme l'écrivait
Rawls : « Les fins de la philosophie politique dépendent de la
société à laquelle elle s'adresse198
». De la sorte, il nous est loisible d'envisager la portée de cet
humanisme en Afrique noire.
98
197 A. Renaut, Un humanisme de la diversité,
op. cit., p. 429-430.
198 J. Rawls, Justice et démocratie, Paris,
Seuil, 1993, p. 245.
99
|