1.1.5.5 L'ENTREE DE L'AGRICULTURE DANS LES NEGOCIATIONS
DU GATT (ACCORD GENERAL SUR LES TARIFS DOUANIERS ET LE
COMMERCE)
Au milieu des années 80, les grandes entreprises
agroalimentaires américaines, comme Cargill, et des responsables
politiques, comme Ronald Reagan, sont à la pointe de l'offensive pour
faire entrer l'agriculture dans les négociations du GATT, à
l'occasion du lancement de l'Uruguay Round en 1986. L'objectif affiché
est de favoriser les échanges alimentaires au niveau international en
diminuant les barrières tarifaires. Le but ultime étant la
suppression des subventions aux exportations dans un délai de dix ans.
C'est alors la promotion du « libre marché ». Les responsables
politiques américains répètent à loisir ce slogan
dans toutes les instances internationales et dans les médias. Ils
développent un argumentaire simple, efficace, qui fait forte impression.
Mais appliquent-
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ils le libre-échangisme à leurs propres produits
agricoles ? Cela, en vérité, est une toute autre histoire. En
effet, les Etats-Unis ont mis au point un système de soutien direct pour
leurs agriculteurs. Ce système est compatible avec la définition,
arrêtée par le GATT, de « subvention ne créant pas
de perturbation sur les marchés ». Ce sont bien entendu les
États-Unis qui ont défini et fait adopter cette notion par les
instances du GATT. Les aides directes données aux agriculteurs,
indépendamment de leur volume de production, sont classées dans
cette catégorie.
Exporter sur la base d'un prix interne, même
inférieur au coût de production est compatible avec les
règles du GATT. (Joseph Rocher). Cela permet aux Etats-Unis d'avoir
ainsi un prix interne faible et de pouvoir se protéger des importations
sur leur territoire, de pouvoir aussi exporter « sans subvention »
à l'exportation (le prix pratiqué sur le marché de
consommation intérieur étant proche du prix du marché
mondial). Des années sont nécessaires pour que les autres
négociateurs et une partie de la société civile
comprennent la supercherie. L'Europe se plie aux nouvelles règles et
adopte, progressivement au cours des années 90, un système
similaire lui permettant de continuer de subventionner indirectement une partie
des produits mis sur le marché mondial.
En fait, ce sont les pays en développement (Afrique
surtout, certains pays d'Asie, d'Amérique latine) qui diminuent leurs
droits de douane, et qui importent de plus en plus de blé, de maïs,
de riz, de produits laitiers, de viande venant de pays à agricultures
subventionnées ou de pays en transition économique
(Brésil, Thaïlande, Argentine, Urugua). D'une manière
générale, les Pays en Voie de Développement (PVD) ne
peuvent guère profiter des la libéralisation partielle des
marchés du Nord : ils n'arrivent pas à satisfaire les normes
techniques et sanitaires imposées par les Pays Développés.
A l'inverse, à l'heure des accidents sanitaires, les consommateurs des
classes favorisées de PVD ou pays en transition marquent une nette
préférence pour les produits alimentaires originaires des Pays
Développés.
La mondialisation n'a pas eu pour seul effet l'ouverture des
marchés à l'international. Elle a également
concentré le secteur de l'industrie agroalimentaire à la
tête duquel nous retrouvons un petit nombre de leaders qui font
l'essentiel de ce marché.
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