II. DISCUSSION
Les résultats de notre étude nous montrent que
les défis pour réussir l'intégration des TICE dans la
communauté scolaire sont de trois ordres : structurel,
infrastructurel et de l'ordre de l'acquisition des compétences.
Au niveau structurel, la mise en place en place d'un cadre
légal prévoyant le niveau d'intégration des TIC dans
l'école, les modalités de formation et d'application effective de
cette "TICisation" de la communauté scolaire, et le rôle
précis à jouer par chaque acteur du système
éducatif. Toutefois, cette mise en place de ce cadre légal ne
peut être possible que par une volonté politique manifeste quant
à faire des TIC un outil privilégié dans la gestion
moderne des établissements scolaires de Côte d'Ivoire. Cette
volonté politique est perceptible à travers le "Décret
No 2012-894 du 9 septembre 2012 portant introduction dans
l'enseignement d'une discipline dénommée Technologies de
l'Information et de la Communication, en abrégé TICE, et fixant
les conditions d'accès aux fonctions de professeur de Lycée et
Collège de TICE" et à travers la confection des
"Programmes éducatifs et guides d'exécution" deux ans
plus tard. Cependant, cela est encore insuffisant ne prévoyant pas, de
façon pratique, comment les TIC feront leur entrée dans la vie
scolaire afin de s'y imposer non seulement comme savoir mais surtout comme
savoir-faire.
Ces résultats qui montrent une insuffisance de la
volonté politique convergent avec ceux de H. Elletson et A. Burgess
(2015) qui, mettent par ailleurs l'accent sur le manque de communication entre
gouvernement et établissements scolaires quant aux avantages qu'il y a
à adopter les TICE comme outil d'animation de la communauté
scolaire. Ce manque de communication est perceptible dans les
établissements à travers l'ignorance des personnels quant
à l'utilisation des TIC à des fins pédagogiques et
éducatifs ; car même si plusieurs s'y essaient, ce ne sont
que des initiatives personnelles et ils ne sont pas informés des textes
introduisant les TIC à l'école.
Aussi, le manque, l'insuffisance ou la défaillance du
matériel TIC dans les établissements est indexé par les
personnels comme la cause de la non-pratique des TICE par eux (71,42%). Cela
est d'autant plus réel qu'aucun bureau d'Educateur n'est doté
d'ordinateur au lycée municipal de Brobo par exemple, pas plus que la
salle des professeurs. Pourtant, nous savons que les TICE dont nous parlons
sont du domaine plutôt de la pratique que des théories
pédagogiques et politiques. L'un des défis importants à
relever pour rendre possible l'intégration totale des TICE dans
l'animation de la communauté scolaire, c'est celui de l'acquisition et
de l'approvisionnement des établissements scolaires en matériels
adaptés.
Cela va dans le même sens que les travaux Thibeault
(2015) qui remarque aussi ce manque et cette insuffisance du matériel
TIC ou sa défaillance comme l'un des facteurs ralentissant
l'entrée des TICE dans les écoles de l'espace francophone, selon
une étude réalisée au Viêt Nam, en Moldavie, au
Burkina-Faso et en République Démocratique du Congo.
Cette même étude de Thibeault (2015)
soulève par ailleurs le problème de la formation des personnels
du système éducatif comme un frein à l'intégration
des TICE.
Nous sommes parvenus pareillement à ce résultat,
car 94,44% des personnels, y compris le Chef d'établissement, n'ont
jamais participé à une formation en TIC. Pourtant, ce sont ces
personnels qui doivent rendre effective l'intégration des TICE, et leur
adoption par les élèves et parents d'élèves. Ce que
notre enquête nous a permis de voir et que nous ne trouvons pas chez
Thibeault par contre, c'est que tous les personnels disposent
d'équipements TIC, au moins à titre personnel et les utilisent
donc. Et même, plus de 80% d'entre eux essaient d'en faire un usage
scolaire : préparation des cours pour les enseignants, appels
téléphoniques et envois des SMS aux parents
d'élèves pour les Educateurs.
Tout ce qui précède montre
l'intérêt que les personnels ont pour les TICE. Y manquent
seulement la volonté politique, leur formation pour un usage
professionnel, et les matériels adéquats et suffisants pour
être efficace.
Si cela est fait, nous permettrons ainsi à
l'école ivoirienne de relever le défi d'une
« éducation inclusive et équitable de qualité et
promouvoir des possibilités d'apprentissage tout au long de la vie pour
tous » comme le stipule la Déclaration d'Incheon (2015). Le
faisant, l'on permettra un accès égal au savoir par tous,
l'ouverture sur l'extérieur, des échanges constructifs, et donc
l'innovation qui rendra efficace et performante la formation des citoyens de
demain.
|