4. L'impact du degré d'ouverture sur la croissance
économique
La plupart des études empiriques utilisaient des
régressions en coupe transversale sur un ensemble de pays durant les
années 70. Les coefficients de corrélation se faisaient soit
entre la croissance des exportations et le PIB, soit entre des indices
représentant l'ouverture ou les politiques commerciales et la croissance
à long terme. Une bonne partie de ces travaux empiriques ont une
relation positive entre l'ouverture et la croissance. La fusion entre la
théorie de la croissance endogène et la nouvelle théorie
du commerce international ont permis par la suite une concentration des travaux
sur les voies d'influence de l'ouverture sur la croissance : la formation du
capital fixe, du capital humain et du savoir.
Des économistes comme Dollar (1992), Barro et
Sala-I-Martin (1995), Sachs et Warner (1995), Edwards (1998) et Greenaway et
al. (1998), en utilisant des régressions en coupe transversale, ont
trouvé que les distorsions dues à l'intervention de l'Etat au
niveau du commerce menaient à de faible taux de croissance. Ben-David
(1993) et Sach et Warner (1995) ont par ailleurs démontré que
dans les économies ouvertes seulement s'observe une convergence
inconditionnelle. Sach et Warner (1995) ont trouvé que les pays avec des
politiques d'ouverture crurent à un rythme de 4,5% par année dans
les années 1970 et 1980 et qu'en revanche, les pays relativement
fermés avaient un taux de croissance de seulement 0,7%. Ils notent
toutefois qu'une relation robuste est difficile à trouver et à
justifier.
Frankel et Romer quant à eux, utilisent une
méthode à variables instrumentales incluant des
caractéristiques géographiques, et confirment que le commerce
international a un impact important et significatif sur la croissance.
Harrison (1996) arrive à des conclusions similaires en
utilisant une variété d'indicateurs d'ouverture. En
procédant à différentes méthodes d'estimations
(coupe transversale, effets fixes, moyenne sur cinq ans, premières
différences), les résultats obtenus suggèrent une relation
positive entre le degré d'ouverture et la croissance. Toutefois, ce ne
sont pas toutes les mesures d'ouverture qui furent significatives,
malgré le fait qu'elles furent pour la plupart de signe positif.
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L'article de Rodriguez et Rodrik (2000) est venu critiquer et
remettre en question les résultats de quatre études importantes.
Les auteurs ont établi que la corrélation positive entre
l'ouverture et la croissance trouvée dans les travaux de Dollar (1992),
Ben-David (1993), Sachs et Warner (1995) et Edward (1998) n'était pas
robuste. Leurs méthodologies furent remises en question, car les
indicateurs de mesure de l'ouverture commerciale pouvaient être
lourdement critiqués et qu'il manquait des variables de contrôle
importantes pouvant avoir un effet déterminant sur la croissance.
Jin (2004) a analysé le co-mouvement entre l'ouverture
et la croissance pour 17 provinces et 3 municipalités chinoises.
L'auteur voulait vérifier si la relation ouverture-croissance
était également valide au niveau provincial, et si on pouvait
déceler une différence entre les provinces côtières
(au nombre de 7) et celles enclavées (au nombre de 13). Il a construit
son modèle sur la fonction de production usuelle, en incluant le
changement technologique, qui dépend lui-même du degré
d'ouverture du pays. Les résultats obtenus sont ceux qui étaient
attendus : l'effet pour les provinces côtières est de signe
positif et significatif pour quatre d'entre elles, et négatif pour la
majorité des provinces enclavées (dont trois d'entre elles ont un
effet négatif et significatif). L'explication qui ressort est que les
provinces sans accès à la mer ne possèdent pas une
économie assez forte pour faire face à la compétition
étrangère, tandis que les provinces côtières sont
déjà des économies orientées vers
l'extérieur, et donc plus compétitives.
En résumé, les travaux empiriques arrivent
à démontrer un impact positif de l'ouverture sur la croissance,
mais leur robustesse est remise en cause. Ils se heurtent à plusieurs
limites économétriques, dont la pertinence du choix de
l'indicateur d'ouverture.
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