2. Une européanisation limitée du
contrôle des exportations d'armement
L'européanisation de l'exportation de matériels
produits en commun se heurte à la diversité des profils des Etats
membres, en termes de composition de BITD et de divergences de politique
étrangère. Le cadre européen était en effet
perçu comme trop inertiel par rapport aux contraintes liées
à la circulation de composants entre les Etats producteurs et au besoin
de s'accorder sur des pratiques d'exportation unifiées vers les Etats
tiers.
65 Conseil de l'UE (2009), Guide d'utilisation de
la Position Commune 2008/944/PESC du Conseil définissant des
règles communes régissant le contrôle des exportations de
technologie et d'équipements militaires, PESC 545/COARM 25.
66 Point 10 du Code de Conduite
67 Art 346 du TFUE « Tout État
membre peut prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la
protection des intérêts essentiels de sa sécurité et
qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions
et de matériel de guerre ; ces mesures ne doivent pas altérer les
conditions de la concurrence dans le marché commun en ce qui concerne
les produits non destinés à des fins spécifiquement
militaires ».
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Yann WENDEL
L'absence de PESC, jusqu'au TFUE68, a
encouragé la mise en place de groupes ad hoc, encadrés
par l'accord de la LoI69 signé en 2000 à Farnborough
par la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Suède et le
Royaume-Uni, qui sont des pays ayant une BITD sensiblement similaire et qui
composent près de 90% de l'industrie de défense
européenne. La LoI a permis de souscrire à des
coopérations ad hoc entre gouvernements, en fonction de chaque
programme, pour structurer l'industrie européenne de défense.
S'en est suivi la mise en place d'une licence globale de projet,
destinée à faciliter les transferts entre pays de la LoI
participant à un projet commun. Ce cadre contraignant, mais auquel les
pays participent sur une base volontaire, a permis une intégration plus
forte dans le secteur des armements.
Ainsi, la LoI se déroule dans une logique de
simplification pragmatique plutôt que de discussions théoriques,
chaque Etat demeurant souverain dans le contrôle de ses exportations. Ce
cadre de travail part du principe que les entreprises peuvent coopérer
entre elles, mais que la politique étrangère de chaque Etat
membre doit prévaloir. Il n'y a donc pas de recherche de politique
commune dans ce cadre, mais plutôt une logique de praticité.
La LoI prévoit par exemple l'établissement de listes
communes d'exportation qui varient en fonction du programme associé, et
qui sont constituées en amont après consultation entre tous les
Etats concernés, qui décident ensuite de la juridiction nationale
qui s'applique pour le programme. Leur objectif n'est donc pas de
déterminer la doctrine d'exportation des Etats membres, mais de fournir
un cadre de travail assoupli respectant les prérogatives nationales en
termes d'exportation.
Actuellement, la LoI est une organisation assez peu dynamique
en termes de réglementation, par opposition au cadre européen
très actif dans l'harmonisation des contrôles avec le rôle
prépondérant de la Commission Européenne. La coexistence
entre les initiatives intergouvernementales de la LoI et le droit
européen a toutefois l'avantage de fournir un forum pour les pays
européens souhaitant davantage d'harmonisation au niveau
intracommunautaire70. Pour la suite, les problématiques de
contrôle au niveau européen pourraient d'ailleurs être
abordées en prenant les pays de la LoI comme base de
référence dans la mesure où ce sont les premiers
concernés par les conséquences de ces politiques, en y incluant
progressivement les autres Etats membres en fonction de la maturité de
leur industrie.
68 Traité sur le Fonctionnement de l'Union
Européenne - Traité de Lisbonne, 2007.
69 Letter of Intent
70 Document de travail des services de la
Commission accompagnant la Proposition de directive du Parlement et du Conseil
simplifiant les conditions des transferts de produits liés à la
défense dans la Communauté - Résumé de l'analyse
d'impact {COM(2007) 765 final} {SEC(2007) 1593} /* SEC/2007/1594 final
*/
Yann WENDEL
L'élargissement progressif de l'enceinte de la LoI
à des pays volontaires et disposant d'un outil industriel adapté
permettrait d'établir petit à petit un cercle de confiance entre
les pays de la BITDE71, afin d'atteindre une véritable
intégration industrielle.
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71 Base Industrielle et Technologique de
Défense Européenne.
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