Titre III : Les juridictions nationales
Les détracteurs de l'existence d'une juridiction
internationale compétente en droit de l'environnement pourront enfin
avancer l'argument selon lequel les juridictions nationales sont mieux
placées pour juger des affaires environnementales.
Pourtant, les Etats ne s'assurent pas toujours, via leurs
juridictions nationales, que les activités relevant de leur juridiction
ou de leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres
Etats ou à des territoires régis par le droit international.
Chapitre Ier : Les dommages à un territoire
régi par le droit international
Le droit international pose peu de limites à l'exercice
de la compétence civile d'un Etat. En effet, un Etat peut exercer sa
compétence civile sur un litige, dès lors qu'il existe un lien de
nationalité entre une des personnes (physique ou morale) au litige et
l'Etat.
En revanche, la compétence pénale d'un Etat doit
être justifiée par un des cinq fondements de compétence
reconnus par le droit international. En vertu du principe de
territorialité, l'Etat peut exercer sa compétence pénale
sur les personnes privées ayant commis une infraction sur son
territoire. Lorsque l'infraction est commise sur un territoire régi par
le droit international, c'est l'Etat de nationalité qui est
compétent, en vertu du principe de nationalité active. Dans la
mesure où le dommage est causé à un territoire régi
par le droit international, l'Etat compétent ne subit pas le dommage. Il
n'a donc aucun intérêt à exercer sa compétence
pénale à l'encontre de ses nationaux.
Les territoires régis par le droit international,
encore appelés espaces internationalisés, comprennent la haute
mer, la Zone, l'Antarctique et l'espace extra-atmosphérique. La haute
mer recouvre les parties de la mer qui ne sont comprises ni dans la zone
économique exclusive, la mer territoriale ou les eaux intérieures
d'un Etat, ni dans les eaux archipélagiques d'un Etat
archipel107. La Zone désigne les fonds marins et leur
sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale108.
Enfin, l'espace extra-atmosphérique comprend l'espace proprement dit et
l'ensemble des corps célestes109.
107 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article
86.
108 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article
premier.
31
109 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international
public, p 848.
Le bien-fondé d'une juridiction internationale
spécialisée en droit de l'environnement
Certaines entreprises exercent des activités sur le
territoire d'un Etat ou dans ces espaces internationalisés qui causent
un dommage à ces territoires non régis par le droit
international. Ce dommage peut être volontaire ou involontaire. Il peut
également être dû à une faute de l'entreprise (de
négligence ou d'imprudence).
Lorsque le dommage est causé à un territoire
régi par le droit international, le dommage ne touchant pas le
territoire de l'Etat de nationalité de l'entreprise, celui-ci ne va pas
rechercher la responsabilité de l'entreprise. Par ailleurs, même
si le droit international prévoit une obligation coutumière de ne
pas causer de dommage à un territoire régi par le droit
international, les autres Etats n'engagent pas la responsabilité de
l'Etat de nationalité de l'entreprise pour ne pas avoir respecté
son obligation de protéger l'environnement. Ainsi, aucune action ne sera
menée.
7ème
C'est le cas par exemple du rejet de déchets en
haute mer, qui a causé la formation du « continent
». Environ 80 % des déchets provient des sources terrestres,
tandis que le reste provient de bateaux110. Ce n'est que par le
concours de la société civile qu'il est remédié
dans ce cas à la pollution. En outre, le néerlandais Boyan Slat
mène un projet d'élimination de ces déchets appelé
Ocean Cleanup.
Un exemple contraire peut être trouvé dans
l'affaire de la CIJ de la chasse à la baleine dans
l'Antarctique, de 2014, opposant l'Australie au Japon.
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