Section 2 : La transparence, le nouveau credo de la
gestion financière
publique
La transparence n'a pas toujours été reconnue
comme une priorité et comme un facteur essentiel, structurant des
réformes financières retenues dans le cadre de l'APD. Les
Partenaires européens, et les institutions financières avaient la
culture de la confidentialité51 de leurs rapports avec la
Côte d'Ivoire et les autres pays en
51BOULEY (D), « Les standards
internationaux de la bonne gouvernance selon le Fonds Monétaire
International », in La bonne gouvernance des finances publiques dans
le monde (actes de la IVe Université de printemps de Finances Publiques
organisée par la FONDAFIP), LGDJ, 2009, p. 17.
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développement. Cette situation a changé en fin
de siècle dernier sous l'effet conjugué d'une meilleure
reconnaissance du rôle de la société civile dans les
réformes économiques52 et la médiatisation des
crises financières mondiales53. La sensibilisation de
l'opinion publique sur les différentes politiques économiques et
financières a été l'un des facteurs du
développement de la transparence en matière de finances
publiques. Ce phénomène tend à se formaliser. Et de plus
en plus l'UE exige comme préalable à l'octroi de son aide, la
définition des procédures de gestion transparentes
(paragraphe 1), aisément applicables et permettant la
décentralisation des tâches et des responsabilités vers les
acteurs de terrain (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La fiabilité du système de
gestion des finances publiques
La bonne gestion des affaires publiques, qui constitue un
« élément fondamental »54 de l'Accord de
Cotonou se définit comme la gestion transparente et responsable des
ressources humaines, naturelles, économiques et financières en
vue du développement équitable et durable. Elle implique des
procédures de prise de décision claires au niveau des pouvoirs
publics (A), des institutions transparentes et soumises
à l'obligation de rendre compte, la primauté du droit dans la
gestion et la répartition des ressources (B).
52 Cf. Pour l'émergence du
rôle de la société civile, in La gouvernance du FMI, VAN
HOUTEN (L), 2002, publication FMI.
53 Crise et dévaluation du franc CFA (1994),
Mexique (1994-1995), crise Asiatique (Indonésie, Corée du sud,
Malaisie, Thaïlande, Philippines) 1998 ; crise Brésilienne (1998),
crise Argentine (2001) etc.
54 La notion d'élément fondamental
permet d'atténuer ou de limiter le risque de sanctions. In FRISCH (D),
op.cit. p. 33.
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A) : La définition claire des attributions et
responsabilités
En matière de transparence, il n'existe pas de normes
universelles applicables de manière formelle à tous les pays. La
multitude d'expériences et la diversité des particularités
institutionnelles rendent difficile, voire même impossible,
l'établissement et l'observance de telles normes. Cependant, il existe
un ensemble de bonnes pratiques élaborées par des organisations
internationales, dont s'inspirent les pays afin de renforcer la transparence de
leurs finances publiques. La référence la plus notoire dans ce
domaine est le code de bonnes pratiques en matière de transparence des
finances publiques du FMI publié en 2007.
Le conseil des ministres de l'Union Economique et
Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) en vertu de l'article 6755
du traité constitutif de l'organisation a édicté la
Directive n°01/2009/CM/UEMOA portant code de transparence dans la gestion
des finances publiques au sein de l'UEMOA qui reprend à son compte les
pratiques promu par le FMI, mais pas seulement.
Ces principes et obligations sont relatifs à plusieurs
aspects de la gestion des finances publiques, et ils postulent avant tout que
la gestion des finances publiques s'inscrive dans un cadre légal. Le
secteur de l'administration publique doit être distinct du reste du
secteur parapublic et du reste de l'économie, et la répartition
des attributions au sein du secteur public en matière de décision
et de gestion doit être claire et rendue publique56. La
gestion des finances publiques doit s'inscrire dans un cadre juridique,
réglementaire et administratif clair et ouvert.
55 Article 67 :1) L'Union harmonise les
législations et les procédures budgétaires, afin d'assurer
notamment la synchronisation de ces dernières avec la procédure
de surveillance multilatérale de l'Union. Se faisant, elle assure
l'harmonisation des lois de Finances et des comptabilités publiques, en
particulier des comptabilités générales et des plans
comptables publics. Elle assure aussi l'harmonisation des comptabilités
nationales et des données nécessaires à l'exercice de la
surveillance multilatérale, en procédant en particulier à
l'uniformisation du champ des opérations du secteur public et des
tableaux des opérations financières de l'Etat.2) Le Conseil
adopte à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres les
règlements et les directives nécessaires à la mise en
oeuvre des actions visées dans le présent article.
56 Cf. principe 2.2 du code de transparence
dans la gestion des finances publiques au sein de l'UEMOA.
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La réception dans l'ordre juridique interne de cette
directive s'est effectuée par le biais de la Loi organique
n°2014-337 du 05 juin 2014 portant Code de transparence dans la gestion
des Finances Publiques. Au travers de cette loi le législateur a pris le
soin de préciser l'étendue du secteur des administrations
publiques,57 avant de définir un cadre juridique devant
gouverner l'action des autorités politiques et administratives.
Cette réforme de la gestion des finances publiques, qui
a été appuyée par l'UE58 et bien d'autres
partenaires extérieures a ceci de novateur de poser un cadre juridique
à la transparence et d'accorder une plus grande responsabilité
aux pouvoirs législatif et judiciaire. En cela, elle donne une plus
grande lisibilité aux processus de gestion des affaires publiques et
accroit par la même la crédibilité des acteurs publics.
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