Slow media : émergence d'un journalisme narratif sur le web.( Télécharger le fichier original )par Elena JOSET Université Sciences Humaines et Arts Poitiers - Master Information-Communication, Web éditorial 2016 |
3.2- L'apport du web dans la narration : la recherche d'une nouvelle expérience de lecture3.2.1- La réappropriation des codes de la presse papier sur le webSi notre grille d'analyse révèle que Le Quatre Heures et Les Jours ne procèdent pas aux mêmes choix graphiques, il n'en reste pas moins que les interfaces de chacun présentent des caractéristiques similaires en matière de design éditorial. En effet, on note que les deux pure players se réapproprient les codes de la presse papier sur le support web. En témoigne le choix des typographies à empattements utilisées traditionnellement sur support papier. En effet, sur le web, la majorité des quotidiens bi-médias (Ouest-France, Le Parisien, Le Monde, Les Échos, L'Humanité, Le Figaro, L'Équipe) utilisent des typographies sans empattement dans le corps de texte. L'Humanité, Le Parisien, Les Échos et Le Monde convoquent une typographie avec empattement seulement pour la titraille des articles (titres, intertitres, mise en exergue). Seuls Libération et La Croix utilisent sur l'ensemble des contenus une typographie avec empattement. À ce titre, on remarque que si les quotidiens issus du support papier utilisent une typographie sans empattement sur le web, les pure players, eux, font appel dans de nombreux cas à une police avec empattement, et ce, sur l'ensemble de leurs contenus (corps de texte et titraille). C'est le cas notamment de Médiapart, Slate, Le Huffington Post, L'Imprévu, Ulyces, StreetPress, ou encore Le Zéphyr. De la même manière que Les Jours ou le Quatre Heures, il semblerait donc que les médias qui naissent sur le web s'approprient les codes graphiques de la presse écrite. Jeu sur la taille, la graisse et même la couleur pour Les Jours, les typographies utilisées au sein des deux reportages ont fait indéniablement l'objet de choix répondant à une recherche esthétique, lesquels participent à l'identité visuelle de chacun des médias. Raphaël Garrigos, co-fondateur des Jours, ajoute à propos des choix graphiques du média : « [...] On voulait d'emblée récupérer les codes de la presse papier avec une typographie très soignée, la présence d'une lettrine, d'exergues et de citations. On souhaitait également accorder une large place à la photographie, proposer une lecture « zen » et en même temps enrichie ». (Entretien avec Raphaël Garrigos, le 06/05/2016) La « lecture zen » à laquelle Raphaël Garrigos fait référence à un webdesign éditorial minimaliste : interface à fond blanc, marges vierges de part et d'autre du texte centré au milieu de la page (pas de sidebar), absence de toute surcharge visuelle et de publicité, paragraphes aérés, etc. Alors qu'il présente sa nouvelle version pour abonnés en avril 2013, le journal Le Monde est l'un des premiers médias à avoir proposé un tel dispositif visant à rendre plus confortable la lecture185. Au clic 185 FRANCK, Cyrille. Le Monde se lance à la conquête de nouveaux abonnés et des nouveaux usages. Médiaculture.fr. [En ligne]. 4 avril 2013. [Consulté le 06/05/2016]. Disponible à l'adresse : http://www.mediaculture.fr/2013/04/04/le-monde-se-lance-a-la-conquete-de-nouveaux-abonnes-nouveaux-usages/ 62 sur un bouton, l'abonné accède au même contenu dans une nouvelle fenêtre, de type « pop-up ». L'internaute peut alors se plonger dans la lecture de l'article sans qu'aucun bruit visuel ne perturbe la lisibilité du contenu. L'internaute quitte donc une interface de flux pour un espace épuré l'encourageant à lire l'article jusqu'à la fin. On remarque que Le Quatre Heures et Les Jours utilisent ce type de webdesign épuré dont le principal objectif est de participer au confort de lecture de l'internaute. Les paragraphes sont aérés, les différents éléments relevant de la titraille sont espacés les uns des autres par des marges importantes. Par ailleurs, si le menu au sein du Quatre Heures reste fixe à gauche de l'écran, celui des Jours n'est jamais visible sur l'ensemble du site. En effet, celui-ci est « dissimulé » derrière un pictogramme. Aussi appelé « menu burger » ce dispositif s'est démocratisé avec le développement du design pour support mobile. Alors que le mobile présente une résolution réduite et restreinte, le « menu burger » permet de gagner de la place en cachant un menu composé de nombreux éléments. Estelle Faure, co-fondatrice du Quatre Heures, nous donne des précisions sur le choix d'un menu fixe et non d'un « menu burger » : « On voulait que les éléments ne soient pas invasifs, qui ne perturbent pas la lecture, tout en restant compréhensibles pour le lecteur. On s'est par exemple longtemps interrogés sur la présence d'un menu burger, afin de privilégier l'immersion, mais on a trouvé que ce n'était pas compréhensible pour le lecteur, surtout s'il arrive la première fois sur le site. On a voulu garder des repères que les internautes connaissent bien et ne pas être trop dans l'innovation ». (Entretien avec Estelle Faure, 05/05/2016) Confort de lecture, réappropriation des codes de la presse écrite, mise en valeur du récit, il semble que l'enjeu : l'enjeu pour des pure players tels que Le Quatre Heures et Les Jours en matière de webdesign, réside dans la recherche d'interface innovante mais respectant les repères traditionnels de la navigation d'un internaute sur le web. |
|