Slow media : émergence d'un journalisme narratif sur le web.( Télécharger le fichier original )par Elena JOSET Université Sciences Humaines et Arts Poitiers - Master Information-Communication, Web éditorial 2016 |
2.2- Les Jours et Le Quatre Heures : caractéristiques et revendications des deux pure players2.2.1- Le Quatre Heures : un média de « slow info »Lancé officiellement en septembre 2014, Le Quatre Heures s'articule autour de trois revendications : proposer un journalisme de qualité en s'appuyant sur le reportage, mettre les possibilités du web au service du récit journalistique et se démarquer des autres médias par un temps de l'information long. ? Fondateurs Initialement, Le Quatre Heures a été créé par un groupe d'étudiants du Centre de Formation des Journalistes (C.F.J.) de Paris en 2013 dans le cadre d'un projet pédagogique. Les enseignants du CFJ demandent à leurs étudiants d'imaginer, concevoir puis réaliser le « média de leurs rêves ». Le projet du Quatre Heures s'est concrétisé en quelques mois puis a été mis en ligne de manière temporaire. En décembre 2013, une partie des étudiants du groupe, alors diplômés, se sont réunis pour faire « revivre » leur média en créant une entreprise. La version officielle du Quatre Heures a été lancée en septembre 2014. L'équipe permanente compte six membres, également cofondateurs de l'entreprise : Charles-Henry Groult (directeur de la publication), Amélie Mougey (rédactrice en chef), Laurène Daycard, Romain Jeanticou, Estelle Faure, et Benoît Berthelot (tous les quatre journalistes). ? Un média indépendant et participatif Les contenus du Quatre Heures sont accessibles via un abonnement annuel. Une campagne de préabonnement a été mise en place à partir de mai 2014 pour faire découvrir le média. Estelle Faure, une des cofondatrices, précise que l'équipe n'a pas souhaité avoir recours à une campagne de financement participatif : « [...] nous souhaitions que le public aille directement voir la version pilote du site, qu'il y ait un lien direct avec le média, et une réelle implication de sa part151 ». Le média justifie l'accès payant à ses reportages ainsi : « L'information est partout, gratuitement. C'est celle que l'on ne trouvera pas ailleurs qui se paie152 [...]». Toutefois, sept épisodes sont en accès libre. Les abonnés du Quatre Heures ont également accès au « Salon », une plateforme permettant aux lecteurs de commenter et poser des questions à/aux auteur(s) des reportages. ? Le reportage au service du « slow info » Sur sa page de présentation, Le Quatre Heures insiste sur l'idée d'un rythme de publication plus lent, allant à l'encontre de l'information en continu diffusée par les sites d'information et les réseaux sociaux. Le Quatre Heures se décrit lui-même comme un média de « slow info » et comme « une pause dans l'information continue, pour prendre le temps de la rencontre et de 151 Entretien avec Estelle Faure, 05/05/2016. Voir annexe. 152 Ibid. 37 l'approfondissement.153 » Le pure player propose ainsi un grand reportage tous les premiers mercredis du mois, à 16h. Par ailleurs, Estelle Faure indique que le « slow info » ou Slow media se situe à la fois dans la lecture du contenu journalistique que dans la réalisation du reportage. Pour la cofondatrice du Quatre Heures, « le »Slow media» permet de prendre du recul sur l'actualité et de l'envisager sous d'autres angles que ceux proposés traditionnellement dans les médias 154». Les reportages, appelés « épisodes » sont accessibles depuis la page d'accueil du site et sont classés de manière antichronologique selon des « saisons » (« printemps », « été », « automne », « hiver »). Le terme est polysémique puisqu'il évoque également les « saisons » relatives à une série télévisée, organisée en « épisodes ». On retrouvera cette notion de sérialité chez Les Jours. Décrivant le reportage comme une « forme de journalisme ambitieuse [...] », les fondateurs du Quatre Heures considèrent celui-ci comme relevant d' « un journalisme dans sa forme la plus pure et originelle155 ». En effet, pour Estelle Faure, le reportage est « la base du journalisme, dans la mesure où il nécessite d'aller à la rencontre des gens, de rechercher ses propres sources d'information par rapport au sujet que l'on veut traiter156 ». Le Quatre Heures a ainsi pour objectif de proposer des récits immersifs et de raconter des « histoires originales avec des sujets, des lieux et des personnages souvent en dehors du radar des médias, mais qui révèlent des enjeux bien actuels157 ». Estelle Faure insiste sur cette notion de récit personnel qui est au coeur de la ligne éditoriale du média : « Nous partons du principe que les personnes qui parlent le mieux d'un sujet sont celles qui l'on vécut158 ». ? Le web au service du reportage Le web apparaît pour les fondateurs du Quatre Heures comme un support au service du grand reportage : « La forme au service du fond : grâce à une plateforme innovante, nous voulons optimiser le confort de lecture et l'immersion dans le reportage. Les outils du multimédia sont au service de la narration, pour que rien ne s'interpose entre l'histoire et vous ». ( https://lequatreheures.com/presentation/, consulté le 05/01/2016) Les reportages du Quatre Heures comportent des contenus de natures différentes (texte, son, photo, vidéo, carte, illustration). Pour Estelle Faure, le web et cette pluralité de médias permettent de donner du « relief » au reportage. 153 Le Quatre Heures. Présentation. [En ligne]. [Consulté le 05/01/2016]. Disponible à l'adresse : https://lequatreheures.com/presentation/ 154 Entretien avec Estelle Faure, 05/05/2016. Voir annexe. 155 Le Quatre Heures. Op.cit 156 Entretien avec Estelle Faure. Voir annexe. 157 Le Quatre Heures. Op.cit. 158 Entretien avec Estelle Faure. Voir annexe. 38 ? Organisation professionnelle Composée des six cofondateurs, l'équipe permanente du média travaille également avec des journalistes pigistes. Globalement, tous les membres de l'équipe travaillent sur la dimension éditoriale du média : conférence de rédaction, recherche et choix de nouveaux sujets, secrétariat de rédaction, etc. Chacun s'investit par ailleurs dans un pôle plus spécialisé comme nous l'indique Estelle Faure : « Deux membres de l'équipe permanente sont très impliqués dans la construction multimédia du récit. Une personne se charge de trouver de nouvelles plumes et pigistes. Une autre s'occupe de la communication, des relations presse, des réseaux sociaux et des partenariats. Deux autres personnes sont plus sur la partie «développement de l'entreprise» ». (Entretien avec Estelle Faure, 05/05/2016) L'édition des contenus sur le web est généralement effectuée par de directeur de la publication du Quatre Heures, Charles-Henry Groult, bien que tous les membres de l'équipe soient « théoriquement [...] formé[s] pour mettre en ligne les reportages159». |
|