1.2 Un intérêt grandissant pour Ce design
depuis Ces années 1980
L'Etat s'est beaucoup investi pour soutenir et promouvoir le
design français contemporain. Claire Fayolle a réalisé un
état des lieux du design français contemporain. D'après
elle, « au cours de ces vingt dernières années, le
design a suscité un intérêt général touchant
aussi bien sa médiatisation, son enseignement que son
développement ».
Dans les années 1980, de nombreuses entités ont vu
le jour comme :
- La Délégation aux arts plastiques (1982)
rattachée au Ministère de la Culture qui définit et met en
oeuvre la politique de l'Etat dans le domaine de la création (aide,
diffusion, enseignement)
- L'Ecole nationale supérieure de création
industrielle (1982)
- Un département « Design » à l'Ecole des
Beaux-Arts (1980).
Durant la même époque, les musées
s'intéressent également au design :
- Le centre de création industrielle au Centre Pompidou
organise des expositions importantes dont « Nouvelles tendances »
(1987), « Design français 1960-1990 : trois décennies »
(1988)
- Le musée des Arts décoratifs de Paris inaugure
en 1985 de nouvelles salles dédiées uniquement à la
création moderne et contemporaine.
- De nombreuses galeries dédiées au design
apparaissent à Paris.
En 1979, le comité de développement des
industries françaises de l'ameublement crée, avec le soutien du
ministère de l'Industrie, l'association VIA : Valorisation pour
l'Innovation dans
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l'Ameublement. Cette dernière consiste à
valoriser et promouvoir la création française dans le secteur de
l'ameublement, en France et à l'étranger. Cette
association finance également des prototypes exposés lors de
divers évènements comme les salons du meuble de Paris et Milan...
Une autre aide est créée par Claude Levy-Soussan en 1983, la
Bourse Agora, qui soutient les projets de jeunes talents (moins de 35 ans).
S'ajoutent à cela la première quadriennale internationale du
design en 1986, à Lyon et dans sa région.
La Presse s'intéresse également au design :
Pascaline Cuvelier et sa célèbre chronique « Glose de
styles » dans Libération ; Chantal Hamaide lance le premier
magazine français « Intramuros » spécialisé dans
le design...
Tous ces exemples montrent que le design devient de plus en
plus visible à partir des années 1980 :
délégations, écoles, musées et galeries d'art,
associations, événements, presse... Néanmoins, le design
reste à cette époque encore oublié par beaucoup de
domaines. Malgré toutes les initiatives positives en faveur du design,
il reste essentiellement « un secteur parmi d'autres, celui du
mobilier et plus largement des accessoires et objets pour la maison
».5 L'industrie française du meuble, mise à
part quelques exceptions comme Roset (Ligne Roset et Cinna), ne s'est
paradoxalement jamais lancée avec dévotion dans la
création contemporaine. Il en est de même pour les médias
qui ne valorisent pas le design : design industriel, packaging, identité
visuelle, architecture commerciale, etc.
Les agences de design sont des « acteurs pourtant
essentiels ». En France, cette époque, il y a deux types
d'agences : les petites agences de moins de 10 salariés, et les grandes
structures, plus rares, comme Dragon Rouge (170 personnes en France) ou
Carré Noir (110 personnes en France).
5 Vial Stéphane, Court traité du
design, Paris, Presses Universitaires de France « Quadrige »,
2010, 124 pages.
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Les années 1990 sont le début d'un profond
changement, où à cette période, deux manifestations
majeures lui sont consacrées :
- « Caravelles 2 », quadriennale
internationale de design (Lyon, 1991)
- « Design, miroir du siècle » (Grand
Palais, 1993)
La naissance de la collection de design du MNAM-CCI (1992)
fait également partie de cette dynamique. Concernant la politique
design, en 1994, l'APCI met en place l'Observateur du design en 1999 pour
repérer les réalisations innovantes grâce au design et leur
décerner le Label de l'Observateur du design (Agence pour la Promotion
de la Création Industrielle).
Côté musées, une situation paradoxale a
peu à peu vu le jour : les trois principales collections muséales
de design françaises, celles du Centre Pompidou, du musée des
Arts décoratifs de Paris et du musée d'Art moderne de
Saint-Etienne n'offrent guère de visibilité : la première
en raison d'un accrochage restreint, la deuxième pour cause de travaux
de rénovation, la troisième en raison d'une présentation
épisodique. Et les grandes expositions manquent à l'appel.
En parallèle à cet engouement des musées
pour le design, de nombreux musées provinciaux ont montré leur
intérêt pour le design contemporain (dans leur présentation
notamment, souvent grâce à des dépôts du FNAC). Le
design émerge non seulement à Paris mais également dans
les provinces.
Lors des années 1990, le « design
intégré » émerge dans les entreprises : « il
ne concerne plus seulement les grands groupes industriels mais aussi les
PME-PMI tels les équipementiers automobiles - Valeo, Faurecia,
Trèves... ou le monde de la distribution... »
(Pijaudier-Cabot, 2002). Dans les grandes entreprises, les designers sont de
plus en plus reconnus comme étant importants. On assiste à de
nombreux regroupements des équipes de design intégré,
comme par exemple Renault ou Salomon, qui ont créé un
bâtiment autonome de design, ou Décathlon qui instaure un
département de « design avancé ». Durant cette
période, le secteur automobile est un « leader incontournable
en matière de design intégré ». Les designers
sont désormais « appelés à
réfléchir à l'avenir des grandes entreprises, à
l'innovation ». L'avancée du design en entreprise est
également marquée par la multiplication des concours
auprès des étudiants et des professionnels.
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Les années 2000 sont caractérisées par un
renouveau du vivier créatif. Au début des années
2000, « seul le travail de Philippe Starck, grand
marketeur de sa propre image, semble
retenir les attentions ». C'est également
l'époque où de nouveaux designers se font
connaître : Biecher, Bouroullec, Crasset, Jouin, Colucci,
Ryant, Massaud. On assiste
notamment grâce à de nouvelles initiatives comme
:
- Le Salon du Meuble de Paris qui mise sur le contemporain
dès 1996,
- La création d'un parcours design,
- L'événement Designer's Days
- L'apparition de showroom de grands fabricants italiens comme
Kartell,
- La Biennale Internationale du Design de Saint-Etienne,
- L'apparition de nouvelles galeries...
Les designers français sont de plus en plus
présents sur la scène internationale, d'où une belle
présence au salon international du Meuble de Milan.
Cependant, tout cela reste, dans une certaine mesure, de
la poudre aux yeux : car, en dépit des efforts déployés
par les pouvoirs publics et les énergies individuelles, le design
demeure un secteur d'activité encore méconnu du grand public.
(Fayolle, 2002)
Cette illusion comme quoi le design est encore ignoré
du grand public aurait deux raisons principales : l'une est liée au fait
que « le design englobe un grand nombre de pratiques et de
métiers différents -graphisme, design de produits, design
textile, packaging, dont n'est valorisé qu'un petit secteur, celui du
meuble et des objets du quotidien », l'autre est que « son
omniprésence le rend plus flou, plus difficile à (dis) cerner
».
Ainsi, le design a suscité un intérêt
grandissant depuis les années 80. D'ailleurs, cela n'est pas un hasard
si le design est reconnu par l'Unesco comme un patrimoine à part
entière en 2004. « Quel est l'intérêt de ce
réseau Unesco des villes créatives ? Pourquoi les villes
s'intéressent-elles au design ? Comment le design grandit-il dans une
ville ? », sont des questions auxquelles nous allons tenter de
répondre.
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