2. La participation aux échéances
électorales.
L'identification des électeurs consiste à
vérifier l'éligibilité des électeurs potentiels et
à inscrire leurs noms et autres renseignements justificatifs sur une
liste électorale. Le processus doit être juste, exhaustif et
inclusif. Cette opération nécessite que l'on adopte des mesures
efficaces pour que les électeurs potentiels connaissent le processus
d'inscription et aient la possibilité de l'utiliser. Par exemple, on
procède à des campagnes d'éducation électorale qui
soulignent l'importance de l'inscription, expliquent les responsabilités
de l'électeur et fournissent des renseignements sur la façon de
s'inscrire. Cependant, l'inscription sur les listes électorales, comme
nous
140
l'avons souligné est conditionnée par la
possession d'une carte nationale d'identité qui atteste que la personne
à inscrire est de nationalité camerounaise. En effet, dans les
années 1990, l'Adamaoua enregistrait un nombre faible des citoyens
inscrits sur les listes électorales. L'une des principales causes de
cette situation fut le défaut de carte nationale d'identité. A
cet effet, monsieur Ngozo Jean déclare que : « Notre
principal problème fut le défaut de carte nationale
d'identité et particulièrement dans les zones rurales et pour
ceux qui en ont, elles ne sont plus valides. D'ailleurs, certains citoyens ne
possédaient même de carte.»14
L'on comprend alors que le défaut de carte est
préjudiciable aux inscriptions sur les listes électorales,
puisque certains citoyens de zones rurales malgré leur volonté,
ne peuvent s'inscrire. Ce défaut de cartes est parfois lié
à celui du défaut d'actes de naissance étant donné
que, dans les zones rurales certains citoyens n'ont pas d'actes de naissance
surtout ceux qui ne sont pas nés dans les centres de santé. Cette
situation fut observée dans la Région de l'Adamaoua. Or, on ne
peut se faire établir de cartes sans actes de naissances. En
réalité, le coût élevé de la carte
d'identité ne les mettait pas à la portée de toutes les
bourses (5000F.cfa et parfois plus). De même, l'éloignement des
lieux d'identification constituait un autre obstacle majeur aux inscriptions.
C'est par exemple le cas dans la localité de Belel où les
citoyens sont obligés de parcourir des kilomètres après
avoir déboursé 2000F.cfa pour le transport seulement lorsque la
route est praticable avec le risque de ne jamais entrer en possession de ladite
carte. Par ailleurs, on ne s'inscrivait pas officiellement avec le
récépissé de la carte sauf si on y joignait son acte de
naissance15. En conséquence, l'obstacle majeur aux
inscriptions sur les listes électorales résidait dont au niveau
de l'obtention de la carte nationale d'identité. C'est ce que confirme
d'ailleurs monsieur Ngozo Jean, lorsqu'il déclare que « le
potentiel électoral est en principe les jeunes en âge de voter et
les femmes, mais malheureusement, ils étaient peu à s'inscrire
justement parce qu'ils ne possédaient pas de cartes nationales
d'identité16 ».Ainsi, pour
remédier à cette situation, à partir de 2002, les
opérations foraines d'établissements des cartes nationales
d'identité à l'approche des échéances
électorales furent organisées sur l'ensemble du territoire
national. Cette politique a trouvé un écho fort dans la
Région de l'Adamaoua. C'est dans cette optique
14 Entretien avec Ngozo Jean, ex-maire de la ville de Tibati,
Tibati, 07 juin 2014.
15 Entretien avec Dadjé Jacques, responsable ELECAM,
Tibati, 08 juin 2014. 16Entretien avec Ngozo Jean, ex-maire de la
ville de Tibati, Tibati, 07 juin 2014.
141
que des milliers des cartes nationales d'identité ont
été établies aux citoyens dans cette région pour
permettre à ceux-ci de voter. Le déploiement des postes
d'identification accompagnés par la défunte ONEL et aujourd'hui
ELECAM dans les zones rurales a permis d'avoir un nombre important des inscrits
sur les listes électorales. Des inscriptions massives sur les listes
électorales dans l'Adamaoua s'est fait de manière progressive
suivant l'allégement des conditions d'établissement des cartes
nationales d'identité au Cameroun. Le tableau suivant met en exergue
l'évolution des inscriptions sur les listes électorales dans la
région de l'Adamaoua.
Tableau 7: l'évolution des inscriptions
sur les listes électorales région de l'Adamaoua de 2007 au 10
juin 2011.
Région
|
Population totale
|
Population électorale
|
Inscrits en 2007
|
Électeurs à inscrire
|
Électeurs inscrits depuis Aout 2010
|
Nombre total
d'inscrits
de 2007
au 10
juin 2011.
|
Adamaoua
|
1015622
|
457029
|
262180
|
194849
|
136485
|
398665
|
Source :
www.Elecam.Cm.
À la suite de ce tableau, il faut noter que, dans le
but était de remédier aux difficultés qu'éprouvent
les citoyens des zones rurales de l'Adamaoua, les autorités des villes
de Meiganga, Ngaoundéré, de Banyo, de Tibati et de Tignère
se sont vues obligées de prendre des mesures parallèles pour
décanter le flux des demandeurs dans les postes d'identification. Ainsi,
les personnels judiciaires sur le ont été envoyés sur les
terrains pour effectuer des jugements supplétifs aux habitants n'ayant
pas d'actes de naissance.
L'opération des « audiences foraines » a
permis à une fraction de la population d'obtenir des actes de naissance
et par le fait même, de se faire établir sur place, des cartes
nationales d'identité grâce à un poste d'identification
provisoire, mis en place
142
dans chaque localité par les équipes
d'identification mobiles. Une initiative entreprise pendant des semaines avec
pour corollaire, l'accroissement du nombre des inscrits sur les listes
électorales. L'absence d'un poste d'identification est un coup dur
vécu non seulement par la population de ces localités, mais aussi
les responsables administratifs qui veulent produire des résultats
probants à la veille des échéances électorales. En
conséquence, on peut constater que depuis le décret ordonnant
l'établissement gratuit des cartes d'identité, les commissariats
de la Région de l'Adamaoua ne se désemplissent pas de monde.
L'argumentaire de son coût élevé comme cause importante de
la non-possession prend donc tout son sens, étant donné que,
même avant la gratuité de la carte nationale d'identité,
plusieurs responsables du parti au pouvoir organisaient déjà les
campagnes d'établissement de celle-ci dans plusieurs localités du
pays. Ce qui avait permis l'établissement de milliers de cartes
nationales à de nombreux citoyens. C'est ainsi, que dans la
région de l'Adamaoua, les leaders politiques responsables du
comité du RDPC chargés des inscriptions sur les listes
électorales dans la Vina ont établi 3000 cartes nationales
d'identité afin de permettre aux citoyens de s'inscrire sur les listes
électorales17. Il est donc clair que toutes les actions qui
ont été entreprises, furent au profit de la carte nationale
d'identité. Ces différentes mesures ont pour objectif de
favoriser les inscriptions sur les listes, ce qui semble porter des
résultats. Cette quête effrénée aux potentiels
électeurs n'est pas neutre car, elle vise à faire participer un
maximum de citoyens aux élections, avec pour objectif la
légitimation de l'élu.
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