Les instruments du Copax face au enjeux sécuritaires en Afrique centrale( Télécharger le fichier original )par Cyr Revelli MBA ABESSOLO Université Omar Bongo - Master recherche en Géographie 2014 |
II. Vers une reforme et une redynamisation du COPAXLes reformes du COPAX que nous venons d'énoncer apparaissent insuffisantes, il est important de mettre un accent particulier sur les mécanismes sous-régionaux de paix et de sécurité afin que ceux-ci fonctionnent et remplissent leurs missions. II.1. La nécessité d'une redéfinition des instruments du COPAXLa réforme du COPAX nécessite une redéfinition de ces instruments de mise en oeuvre et par conséquent une nouvelle architecture du COPAX. II.1.1. Proposition d'une nouvelle architecture du COPAX Le COPAX a été mis en place dans un contexte où l'Afrique centrale était une poudrière. Il semble, selon l'ossature de cet organe de concertation politico-sécuritaire, que depuis les prémices de la coopération régionale, les régimes d'Afrique centrale ont préféré traiter l'insécurité comme un problème militaire plutôt que comme un problème de gouvernance qui sous-tend l'insécurité. La CEEAC a alors hérité d'une approche militaire et réactive plutôt que politique et préventive. Ayant compris que le plus important n'étant plus de prendre des mesure curatives, la CEEAC a désormais mis l'accent sur le préventif. C'est ainsi qu'en dehors des instruments traditionnels que sont le MARAC et la FOMAC, d'autres innovations ont été apportées dans l'architecture de paix et de sécurité de l'Afrique centrale à savoir : la Direction de la sécurité humaine, la Direction des affaires politique et diplomatiques. Ces directions dans leurs missions et leur composition sont en adéquation avec les différents défis sécuritaires auxquels l'Afrique centrale dans sa conception ceeacienne doit faire face. Pour notre part, nous pensons que ces apports ne doivent pas être en marge du protocole du COPAX, qui est la pierre angulaire des mécanismes de paix et de sécurité en Afrique centrale. C'est la raison pour laquelle une révision des textes du COPAX et une modification de son architecture s'avèrent nécessaires. Ainsi, Le COPAX ne disposerait plus de deux instruments mais de quatre instruments de mise en oeuvre : le MARAC, EMR/FOMAC, la Direction des Affaires politiques et diplomatiques (DAPD) et la Direction de la sécurité humaine (DSH). Les quatre instances dont les rôles et les pouvoir sont définis dans les articles 7 à 19 du protocole, ne devraient subir d'aucune modification, il s'agit de la Conférence des Chefs d'Etat, le Conseil des ministres, la Commission de sécurité et de Défense et le Secrétariat Général, auxquels s'ajoutera le Comité des ambassadeurs. Celui-ci a été crée en octobre 2009 par les chefs d'Etat dans le but d'accélérer la discussion des problèmes sécuritaires au niveau politique et accroître la communication à la fois entre les gouvernements et entre ces derniers et la CEEAC. Le Secrétariat général de la CEEAC est l'instance de gestion permanente du COPAX. Le Secrétariat du COPAX devrait être assuré par le Secrétaire général adjoint chargé des questions de sécurité et de paix (SGA/DIHPSS). En outre, il faudrait favoriser la participation des Sociétés civiles et organiser des campagnes de communication conjointes entre le Secrétariat général de la CEEAC et les autorités nationales à destination du grand public pour expliquer le rôle et l'intérêt de la CEEAC dans la sous-région. En d'autres termes, les Etats membres devraient prendre la décision d'ouvrir l'organisation à la Société civile. Une meilleure participation de cette dernière devrait accroître la légitimité et la visibilité de l'institution. Plus le rôle de la Communauté sera compris et assimilé au sein de son espace, plus elle bénéficiera d'un soutien réel dans les pays concernés. Actuellement, elle reste largement une affaire de chefs d'Etat sans l'implication d'autres acteurs nationaux (parlementaires, corporations professionnelles, etc.) puisque jusqu'à présent, les politiques communautaires n'ont pas fait l'objet de référendums ou de débats publics susceptibles de mieux définir les priorités de chaque pays. Les organisations de la société civile doivent mener des activités visant à promouvoir des processus électoraux et de gouvernance crédibles et transparents, notamment à travers la sensibilisation, les ateliers de formation à l'intention des partis politiques, des organes de gestion électorale, des médias, des services de sécurité, des moniteurs et observateurs électoraux. Aussi doivent-elles apporter une assistance aux Etats membres en vue de mettre en place des mécanismes visant à renforcer les capacités des médias, des services de sécurité et du système judiciaire dans le but d'assurer efficacement le contrôle électoral, la sécurité et l'arbitrage. Figure 9 : Proposition d'une nouvelle architecture du COPAX Conférence des chefs d'Etats Commission de Défense et de Sécurité Comité des Ambassadeurs Conseil des Ministres
Pacte d'assistance mutuelle Secrétariat Général de la CEEAC
Pacte de non agression Organisation de la société civile Programme Frontière COPAX Secrétariat SGA / DIHPSS Convention de Kinshasa Direction de la sécurité humaine EMR / FOMAC Direction des Affaires Politiques et Diplomatiques M A R A C Module interarmées Module Police Module Gendarmerie Module civil Service Justice et Droits de l'Homme Service de lutte contre la criminalité Service de libre circulation des personnes Diplomatie préventive Unité de médiation Zone d'observation et de surveillance de la sous-région Centre d'observation et de surveillance Election et Bonne Gouvernance Légende
Instances du COPAX Secrétariat du COPAX Organisation de la société civile Textes normatifs de base Instruments du COPAX
Réalisation : Cyr Revelli MBA ABESSOLO , 2013 II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques et diplomatiques Le MARAC aujourd'hui est couplé à la Direction des Affaires politiques et Diplomatiques. La CEEAC devrait donc les rendre autonomes. Le MARAC est une structure dont le fonctionnement est complexe et demande d'être juste renforcer en matériel et en ressources humaines. II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques et diplomatiques L'objet du MARAC est l'alerte rapide que l'on peut mieux cerner à partir des travaux de l'Institut italien des Affaires Internationales «Early Warning and Conflict Prevention in the Euro-Med Area. A Research Report »143(*), ou des travaux de FEWER Pour qui l'alerte rapide est « la collecte et l'analyse systématique des informations provenant des zones de crise afin : (1) d'anticiper l'escalade des conflits violents ; (2) de développer une réponse stratégique à ces crises et (3) de présenter des options aux acteurs clés (nationaux, régionaux et internationaux) aux fins de prise de décision et d'action préventive. »144(*) A suivre cet organisme l'alerte rapide suppose tout un dispositif qui doit en principe fonctionner de manière autonome. Au niveau de l'ONU par exemple, au sein du Secrétariat, c'est le Département des Affaires Politiques qui est chargé d'identifier « les zones de crises éventuelles et d'alerter le Secrétaire Général sur les évolutions et les situations affectant la paix et la sécurité ». En 1998, au sein de ce département a été créé une équipe de prévention qui chaque mois étudie des cas choisis pour lesquels des mesures préventives seraient nécessaires à prendre. Les six divisions régionales qui composent le département fournissent chacune des «prevention papers », avec des cas à étudier. Il y a donc une sorte de « dispersion des responsabilités » entre les différentes structures onusiennes en ce qui concerne la veille et l'alerte145(*). Afin de mettre fin à la dispersion des responsabilités, certains ont proposé la création d'un seul organe responsable de la veille et de l'alerte146(*). La responsabilité de cet organe serait engagée aussi bien en cas de non vigilance qu'en cas de fausse alerte, mais tiendrait compte de la difficulté de la tâche. Ce Rapport, commandé par les Nations Unies et publié en 2000, met l'accent sur le renforcement des moyens des Nations Unies pour assurer sa mission. Entre autres, il propose la création d'un système centralisé d'alerte et d'information. On peut y lire : « Le Secrétaire général devrait créer un organe, dénommé ci-après le Secrétariat à l'information et à l'analyse stratégique (S.I.A.S.), pour répondre aux besoins des membres du Comité exécutif pour la paix et la sécurité en matière d'analyse et d'information; le SIAS serait administré conjointement par le Département des affaires politiques et le Département des opérations de maintien de la paix, auxquels il rendrait compte »147(*) A la suite du Rapport Brahimi, les organes de l'O.N.U. ont commencé leurs réformes. Pour nombres de spécialistes, l'organe en charge du système d'alerte ne doit pas avoir en même temps l'obligation de proposer des options d'intervention, mais seulement la faculté de le faire148(*). De cette façon, le système d'alerte s'assure une meilleure rapidité tout en gardant la possibilité de fournir des propositions pour la prévention des conflits tout au long du processus. Cela s'observe par exemple au niveau de la méthodologie adoptée par CEWARN (Mécanisme d'alerte rapide et de réaction aux conflits) de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Celle-ci implique la collecte d'informations, l'analyse, la formulation des meilleures/pires/plus vraisemblables scenarii et moyens d'action, et la communication de ces données aux décideurs149(*). Ces dispositions peuvent servir à revisiter le fonctionnement du MARAC devrait privilégier une collaboration effective avec le Département des Affaires Politiques et Diplomatiques et la Direction de la Sécurité Humaine en tant que de besoin, dans l'analyse des données et la préparation des rapports et compte-rendu destinés aux décideurs. Le MARAC doit assurer la coordination de la circulation de l'information sur les crises auxquelles sont confrontées les missions de la CEEAC sur le terrain. II.1.2.2. Direction des affaires politiques et diplomatiques C'est cette direction qui a la charge de la diplomatie préventive et de la médiation au sein de la sous-région. C'est dire l'importance de cette structure car la diplomatie préventive doit apaiser les tensions et assurer la résolution pacifique des conflits au sein et entre les Etats membres, à travers les bons offices, la médiation, la conciliation et la facilitation sur la base du dialogue, de la négociation et de l'arbitrage. Généralement appliquée face à une crise imminente, la diplomatie préventive doit également s'appliquer dans la gestion, la résolution des conflits et les phases du conflit concernant l'édification de la paix150(*). Cette édification de la paix, par ailleurs, décrit le développement des capacités institutionnelles nécessaires aux multiples acteurs pour la conception, la mise en oeuvre et le contrôle des initiatives visant à vérifier la détérioration des conditions sociales et économiques pendant les hostilités, et le renforcement de la paix dans les pays post-conflit sur une longue période en vue de prévenir une rechute dans un conflit violent151(*). La diplomatie préventive correspond donc à des actions à court terme, cherchant à exercer une influence sur les acteurs potentiels d'un conflit à la veille de son déclenchement152(*). A ce titre, cette direction elle aussi doit être une direction à part entière et non un service. La Direction d'actions Politiques et Diplomatiques doit avoir un service en charge de la diplomatie préventive, une unité médiation et un service d'élection et bonne gouvernance que l'on doit détacher de la Direction de la Sécurité Humaine. Les problèmes de gouvernance et d'élections sont pour une grande part responsables des conflits et des crises en Afrique centrale. Cette direction à travers ses missions de prévention et de médiation, doit pouvoir envoyer des observateurs pendant les périodes électorale et post-électorale qui sont des moments cruciaux pour la paix et stabilité dans les pays de la sous-région. Jumeler les deux structures n'est pas une solution car cela matérialise une fois de plus le manque de volonté de la CEEAC à pouvoir recruter des cadres compétents pour mieux faire fonctionner ces deux structures. * 143 Voir l'Organisation Internationale de la Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte : Contribution à une Comparaison Internationale, Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut Catholique de Paris * 144 FEWER 1999. Conflict and Peace Analysis and Response Manual. 2nd ed., London: FEWER Secretariat. * 145 Organisation Internationale de la Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte : Contribution à une Comparaison Internationale, Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut Catholique de Paris * 146 Ibid. * 147Ibid. * 148 Ibid. * 149 Union Africaine: Système continental d'alerte rapide (SCAR), Manuel du SCAR, 5 mai 2008, p.8. * 150 Cadre de prévention des conflits de la CEDEAO, p.35. * 151Ibid. * 152 M. Bertrand. 1997 Vers une stratégie de prévention des conflits ? In: Politique étrangère, N°1-62e année, pp. 111-123. |
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