5.2 Sur la flore vasculaire
L'inventaire des macrophytes dans les milieux humides du Delta
et le lac de Guiers a permis de recenser 151 espèces réparties
dans 47 familles et 105 genres. Dans cette flore les dicotylédones (85
espèces) sont plus importantes en nombre d'espèces que les
monocotylédones (63 espèces).
En absence de données précises à
l'échelle du delta sur la situation avant les barrages, il est
impossible de comparer la flore actuelle avec la période
antérieure. Cependant, certaines tendances peuvent être
envisagées en terme d'évolution de la flore.
Du point de vue du spectre taxonomique, le coefficient
générique, c'est-à-dire le rapport du nombre de genre
au nombre d'espèces est particulièrement élevé ; il
atteint 67 % alors qu'il est de 40 % pour la flore générale du
Sénégal sur la base des données établies par Ba et
Noba (2001). Ce coefficient est de 72 % pour le Sahara; de fortes valeurs de ce
coefficient sont caractéristiques de flores appauvries (Ozenda,
2004).
Le rapport du nombre de familles au nombre d'espèce est
également élevé; il est de 31 % tandis qu'il est de 7 %
seulement pour la flore du Sénégal (Ba et Noba, 2001). De sorte
que la grande majorité des familles dans le delta et le lac de Guiers ne
sont représentées que par un ou deux genres et la plupart des
genres par une ou deux espèces. Comparée, à la flore
vasculaire du Sénégal qui compte 182 familles, 1022 genres et
2499 espèces (Ba et Noba, 2001), la flore vasculaire recensée
dans les milieux humides et aquatiques du delta du fleuve
Sénégal, représente 25,8 % des familles, 9,9 % des genres
et 6 % des espèces répertoriées sur le territoire
sénégalais.
Cette particularité floristique du delta pourrait
être expliquée par la dominance des espèces dans les zones
basses inondables, consécutivement à la mise en place des
barrages, qui sont à l'interface des milieux aquatiques et des milieux
terrestres ainsi qu'à la forte artificialisation liée à la
multiplication des périmètres irrigués et les nombreux
troupeaux de bétails qui parcourent la région tout le long de
l'année. Les activités agricoles et le bétail participent
sans doute à la dissémination des diaspores des macrophytes (par
anthropochorie et zoochorie).
Les hydrophytes stricto sensu
répertoriées sont au nombre de 21 espèces (3
ptéridophytes, 8 dicotylédones et 10 monocotylédones). Le
nombre total des familles est de 15 (3
199
ptéridophytes, 6 dicotylédones et 6
monocotylédones) et celui des genres est de 16 (3 ptéridophytes,
6 dicotylédones et 7 monocotylédones). Les quinze (15) familles
représentent 15 % des taxons recensés.
- Les espèces de plantes aquatiques vasculaires
appartenant à des familles non strictement aquatiques sont au nombre de
66 (24 dicotylédones et 42 monocotylédones). Le total des
familles est de 13 (10 dicotylédones et 3 monocotylédones) et les
genres est de 39 (17 dicotylédones et 22 monocotylédones).
- treize (13) espèces recensées sont
fréquentes dans les zones salées humides avec 4 espèces de
la famille des Chenopodiaceae.
Cinquante-cinq (55) taxons sont des espèces
accidentelles ou ubiquistes de terrains humides faiblement salés ou non.
L'importance de ces taxons dénote d'une forte artificialisation du
milieu avec introduction d'espèces venant d'autres régions avec
le développement des transports et des échanges entre les
régions et les pays.
Quelques 2600 macrophytes d'eau douce ont été
répertoriées dans le Monde (Beisel et Lévêque,
2010). Ils ne représentent qu'entre 1% à 2% du nombre total des
plantes vasculaires connues (Cook, 1990). Les Angiospermes sont dominantes dans
les végétaux aquatiques vasculaires (Dodds, 2002). Dans ce
groupe, les espèces de plantes aquatiques ont été
trouvées dans 396 genres appartenant à 78 familles (Cook, 1990).
Du point de vue des familles, 35 % des monocotylédones ont des
espèces aquatiques tandis qu'il y a seulement 12,1 % chez les
dicotylédones (Waridel, 2003). Les monocotylédones semblent
relativement plus importantes dans les habitats aquatiques que dans les
habitats terrestres (Hutchinson, 1975).
Les hélogéophytes constituent la
moitié des types biologiques (49 %), suivent les
hydrogéophytes (19 %), les hydrophytes nageants (13 %)
et les hélothérophytes (12%). Ces 4 types biologiques
constituent plus de 90 % des formes biologiques des macrophytes aquatiques. Les
hydrohémicryptophytes et les hydrothérophytes
sont les moins représentées dans la flore des milieux
humides et aquatiques.
Compte tenu de la réduction des courants des eaux voire
leur stagnation ainsi que le développement des périmètres
irrigués, il est probable que les hélogéophytes et les
hydrogéophytes continueront à augmenter. De nombreuses Cyperaceae
font partie de ces types, ce qui pourrait poser des problèmes importants
de contrôle des adventices dans les cultures irriguées.
Au plan de la répartition géographique des
taxons, les espèces pantropicales, paléotropicales et
cosmopolites représentent ensemble près de 70 %. Les
espèces ont donc une très large
200
répartition géographique. Cela est en
concordance avec les observations effectuées par de nombreux auteurs
(Fassett, 1956 ; Sculthorpe, 1967 ; Denny, 1985 ; Cook, 1990; Cook, 1996 ;
Raynal-Roques, 1980). Les plantes aquatiques ont souvent une vaste extension
géographique car le milieu aquatique amortit bien des variations
écologiques majeures comme les éléments du climat et de ce
fait sont relativement homogènes (Raynal-Roques, 1980). En effet,
plusieurs espèces de plantes aquatiques sont largement
distribuées à travers le monde et sont relativement bien connues
dans la littérature botanique et écologique. Ces plantes ont
souvent acquis une distribution globale avec l'aide de l'homme (anthropochorie
intentionnelle ou fortuite) à travers les siècles, moteur de
dissémination par excellence de ces plantes. Certaines espèces
sont natives d'Afrique de l'Ouest, d'autres sont allochtones pour la
région. L'origine de beaucoup d'espèces n'est pas encore
clairement établie. Cook (1985) a établi la liste de 26
espèces des milieux aquatiques dont l'origine est inconnue ou douteuse.
Certaines d'entre elles sont observées dans la zone du delta et le lac
de Guiers. Il s'agit de : Ceratophyllum demersum, Eclipta
prostrata, Ipomoea aquatica, Marsilea minuta,
Nymphoides indica, Phragmites australis, Pistia
stratiotes, Bolboschenus maritimus , Vallisneria
aethiopica.
Du point de vue de la typologie, des représentants de
tous les grands groupes et catégories de macrophytes aquatiques
signalés dans plusieurs régions du monde ont été
trouvées dans le Delta et le lac de Guiers, (Aber, 1920 ; Fassett, 1956
; Sculthorpe, 1967; Cook et al., 1974; Denny, 1985; Cook, 1990 ; Cook,
1996 ; Cook, 2004). Les macrophytes fixés émergents sont
nettement dominant dans la végétation rivulaire et des zones
basses marécageuses. La diversité spécifique y est
élevée. Les macrophytes fixés submergés prennent de
plus en plus d'ampleur avec la diminution de la salinité des eaux et le
ralentissement des courants des eaux. Quant au macrophytes libres flottants, le
grand développement des hélophytes freinent souvent leur
extension dans le fleuve et le lac de Guiers.
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