Section 3 : La notion de l'étude d'impact
L'étude d'impact est assurément l'institution la
plus spécifique et sans doute aussi la plus originale du droit de
l'environnement. Elle est au coeur du développement durable.
En première approximation, l'étude d'impact
s'entend comme étant « une procédure d'évaluation
d'un projet ou d'un activité ».50
Une telle évaluation peut avoir lieu avant ou
après la réalisation l'ouvrage ou l'exécution de
l'activité. A vrai dire, seule l'évaluation a priori correspond
à une démarche environnementale conséquente : elle traduit
aujourd'hui l'intégration dans la politique environnementale de
l'idée très actuelle du développement durable.
Dans une perspective environnementaliste conséquente,
conclut Maurice Kamto, « l'étude d'impact s'entend donc
automatiquement d'une évaluation a priori, et sa fonction est d'aider
les décideurs
§1 : Le champ d'application de l'étude
d'impact
publics ou privés à intégrer
l'environnement dans leur stratégie d'action afin d'éviter que
les travaux ou ouvrages ne dégradent irrémédiablement
l'environnement».51
L'étude d'impact apparait en 1969 en Amérique du
Nord sous l'appellation d' « impact assessment». Elle s'est
intégrée ensuite peu à peu dans le droit de
l'environnement des pays développés, avant de se
généraliser progressivement à partir des années
1980 en s'insérant dans les législations des pays en
développement, mais aussi dans les instruments du droit
international52.
Dans la Déclaration du Millénaire pour le
développement adoptée par l'Assemblée
générale des Nations Unies, la communauté internationale a
pris l'engagement de « faire preuve de prudence dans
50 KAMTO, M., Droit de l'environnement en
Afrique, Vanves, EDICEF/AUPELF, 1996, p.1231
51 KAMTO,op.cit.,p.95
52 KAMTO,M.,op.cit.,p.96
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la gestion de toutes les espèces vivantes et de toutes
ressources naturelles, conformément aux préceptes de
développement durable »53.
La référence faite par les Nations Unies au
concept de développement durable illustre cette volonté des
décideurs d'exploiter rationnellement les richesses qu'englobe la terre
en tenant compte, en particulier, de la nécessité d'assurer aux
générations futures, les mêmes conditions
économiques, sociales et environnementales que les
générations actuelles bénéficient
aujourd'hui.54
Tous les travaux, aménagement et ouvrages ne sont pas,
par principe, soumis à l'étude d'impact. Bien qu'elle soit
toujours rassurante en raison de son caractère préventif,
l'étude d'impact est couteuse et ne saurait être engagé de
manière fantaisiste. C'est pourquoi l'on procède en pratique
à la détermination de la nature de ceux des ouvrages ou
aménagements qui seront soumis à une étude d'impact.
Cependant, certaines législations prévoient exceptionnellement
une telle étude même pour les plans ou programmes.55
§2. L'élaboration de l'étude
d'impact
L'élaboration de l'étude d'impact soulève
le problème de l'auteur de l'étude, du moment de l'étude
ainsi que le financement de cette dernière.
En ce qui concerne l'auteur de l'étude, il s'agit selon
le système, soit du pétitionnaire ou responsable du projet, qu'il
soit une personne publique si c'est un ouvrage public ou une personne
privée si c'est une construction privée ; soit de l'organisme
public qui devra autoriser le projet ; soit l'hypothèse de lege
feranda, d'un organe spécialisé dans l'environnement ou un
organisme public ad hoc, indépendant et de caractère
scientifique.56
En ce qui concerne le moment de l'étude, il constitue
un enjeu non moins essentiel .Il est souhaitable, en tout état de cause,
que l'étude intervienne le plus en amont possible du processus de
décision. Même s'il parait difficile de situer juridiquement le
moment idéal, il est clair en toute hypothèse que le projet doit
faire l'objet au moins d'études préliminaires ou de
pré-faisabilité qui permettent d'identifier certains risques
majeurs.57
Quant au financement de l'étude, il est normalement
supporté par l'auteur du projet, qu'il soit public ou privé. Mais
l'on estime qu'en raison des couts importants d'une telle étude
scientifique nécessairement complexe, «des fonds spéciaux
pourrait être mis à la disposition des responsables
d'études d'impact pour accorder des prêts spéciaux ou de
subventions en faveur de certains projets sensibles » .58
§3.Les effets juridiques de l'étude
d'impact
Bien que les textes prévoient rarement les effets
juridiques directs des études d'impacts, il est nécessaire de les
envisager afin que ces études contribuent réellement à la
prévention des atteintes à l'environnement .Divers
hypothèses peuvent alors être envisagées.
Suivant une première hypothèse, lorsque le
contrôle de l'administration de l'environnement peut conduire à un
veto, il y a lieu de dire que l'effet est radical (puisque l'entrepreneur
n'aura pas l'autorisation administrative ou sera contraint de cesser les
activités) et automatique.59
53 1 Nations Unies, Résolution 55/2 adoptée par
l'Assemblée générale lors de ses cinquante
cinquième sessions
54 La définition du développement
durable telle qu'issue du sommet de Johannesburg définit ce
précepte comme « un développement qui répond aux
besoins du présent sans compromettre la capacité des
générations futures à répondre aux leurs »
55 KAMTO, M., Droit de l'environnement en
Afrique, Vanves, EDICEF/AUPELF, 1996, p.96
56 KAMTO,M.,op.cit.,p.96
57 KAMTO, M., Droit de l'environnement en
Afrique, Vanves, EDICEF/AUPELF,1996, p.97
58 KAMTO, M., op.cit.,,1996,p.97
59 Ibidem
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Dans les autres hypothèses, l'étude d'impact ne
sert qu'à éclairer les décideurs, étant entendu que
les médications ou limitations aux atteintes portées à
l'environnement peuvent ensuite être transformées en des
prescriptions techniques obligatoires imposées à l'exploitant de
l'administration.60
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