IV. INTERET ET INCONVENIENT PLUS ENJEUX A LONG
TERME
1. INTERET ET INCONVENIENTS
En permettant une définition et une répartition
précises des responsabilités, les mécanismes de
redevabilité donnent un cadre clair pour l'action. Ils offrent aussi aux
parties prenantes la possibilité de dénoncer le non-respect des
obligations contractées, de surveiller la suite donnée à
une plainte et d'observer les résultats produits. C'est pourquoi ils
aident aussi à déterminer ce qui a bien ou mal fonctionné.
Le processus cyclique de suivi, d'information et d'évaluation favorise
l'acquisition de connaissances, ce qui a pour effet d'améliorer la
qualité des activités ultérieures de coopération
pour le développement.
Les organisations humanitaires travaillent dans des situations
complexes qui ont fréquemment un effet dévastateur pour les
communautés affectées. Les organisations humanitaires, qui les
aident en fournissant une assistance visant à reconstruire leurs vies
opèrent souvent dans l'urgence et un contexte difficile. De ce fait,
être vraiment à l'écoute des populations affectées
n'est pas toujours une priorité. Pourtant, lors d'une crise, les
organisations humanitaires ont un énorme pouvoir. Qu'elles fournissent
de la nourriture, des abris ou une assistance médicale, pour les
populations affectées, leurs actions peuvent faire la différence
entre la vie et la mort.
Chaque année, des dizaines de millions de personnes
reçoivent une aide humanitaire vitale, mais des millions d'autres
souffrent, sans la moindre aide ou protection, et leur nombre ne cesse
d'augmenter. Les promesses d'aide aux personnes affectées pour
réduire leur vulnérabilité aux prochaines catastrophes et
leur permettre de mener leur propre intervention humanitaire restent de vains
mots.
Les acteurs humanitaires détiennent une partie de la
solution. La majeure partie de la solution n'est toutefois pas entre les mains
des acteurs humanitaires. Ils ne sont pas responsables des conflits, du
changement climatique et des inégalités à l'origine des
crises.
La concrétisation des programmes de
développement durable exigera des efforts plus vigoureux et plus
constructifs que jamais, et ce, de la part d'un éventail de partenaires
bien plus large qu'auparavant. Les mécanismes de redevabilité
devront être renforcés de façon à accroître
l'efficacité de la coopération internationale pour le
développement dans un sens propice à la réalisation de ces
objectifs mondiaux. Ils rempliront les trois fonctions suivantes, qui sont
particulièrement importantes :
- La redevabilité permet de spécifier
les rôles et les responsabilités et d'améliorer
l'apprentissage,
- La redevabilité peut inciter à agir de
manière responsable
- La redevabilité peut créer
légitimité et confiance
L'impact d'une exigence accrue de redevabilité a
été exposé à de nombreuses critiques et mises en
garde. Ces critiquent partent toutes d'un constat simple : « Toute
organisation publique a besoin d'un minimum d'intimité pour exister
» au risque de ne devenir qu'un « d'hologramme manipulable à
l'infini ». Dans le type d'information produite et diffusée, les
agences doivent donc garder à l'esprit en permanence deux dangers
fondamentaux :
- Le danger d'une simple redevabilité
de surface, agissant en réalité comme un « voile de
protection » sur la compréhension véritable de l'action des
agences : une codification et une bureaucratisation trop étendue des
obligations de redevabilité, risque, par son excès
d'informations, son trop technique, de ne faire qu'aveugler et rendre «
opaque » l'action des agences. Ce faisant, elles peuvent inciter les
acteurs à s'esquiver derrière une forêt d'informations
formelles, et faiblement porteuses de sens pour les parties prenantes
extérieures, pour ne pas avoir à rendre compte de la pertinence
véritable des actions menées. La mise en avant de cet effet
pervers de la redevabilité apparaît bien souvent dans le
témoignage de nos interlocuteurs ayant un regard sur les outils de
reddition des comptes des agences vis-à-vis de leurs tutelles. Certains
d'entre eux mettent en cause la capacité des informations
échangées à permettre une meilleure compréhension
des choix stratégiques engagés par l'agence et de la pertinence
de ses outils de mise en oeuvre, mais aussi plus largement une meilleure
interconnaissance et un meilleur dialogue entre une agence et les diverses
parties prenantes de sa redevabilité.
- Le danger qu'un excès de
redevabilité ne stérilise l'élaboration
de choix stratégiques forts, la prise de risque et
l'innovationqui sont aujourd'hui au coeur de l'efficacité des politiques
de développement. Cette remarque, également présente dans
un grand nombre des témoignages, souligne à quelle point les
choix stratégiques forts, nécessaire à la pertinence de
l'action, peuvent être de nature polémique et peu
consensuelle. Une mise en transparence trop poussée de l'information
stratégique et une attention trop forte portée sur les
résultats court le risque de s'accompagner d'un aplanissement des zones
d'innovation propres des agences.
Danger d'instrumentalisation ou danger de paralysie sont les
deux faces d'un même enjeu : il ne peut y avoir de relation de
redevabilité pertinente dans une situation de trop grande
méconnaissance et de trop grande méfiance mutuelle d'une agence
et des parties prenantes extérieures.
D'autres inconvénients peuvent être le fait de
mauvaise utilisation des principes de la redevabilité qui peut entrainer
le ternissement de l'image de l'organisation, le refus de financement de ses
projets par les bailleurs, le retrait du certificat, etc.il y a aussi un aspect
capital en ce qui concerne la diffusion ou transmission des messages de
sensibilisation. Si l'information n'est pas bien reçue (de travers), les
conséquences pèseront sur la mise en oeuvre des projets de
l'organisation. Ce qui peut se traduire par le désintéressement
des parties prenantes au programme notamment les bénéficiaires,
la méfiance vis-à-vis des porteurs de projets...
C'est pourquoi le suivi de la redevabilité doit se
focaliser sur le processus (comment les décisions ont été
prises? Comment est-ce que les bénéficiaires ont
été informés) plutôt que sur les résultats
des activités du projet (combien avez-vous reçu ?).
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