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Mesures de politique agricole et sécurité alimentaire au Bénin: cas des subventions d'intrants agricoles

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par Senghor LAGA
Université d'Abomey-Calavi - DEA/Master recherche 2015
  

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La revue de littérature empirique

Parmi les études qui abordent la politique agricole, nous distinguons celles qui ont mesuré les effets des politiques macroéconomiques et ceux des politiques sectorielles.

Au nombre des effets des politiques macroéconomiques en Afrique, on trouve les effets de la politique de libéralisation et de privatisation du programme d'ajustement Structurel (PAS), les effets de la dévaluation, et les effets de la subvention des agriculteurs européens en Afrique. Parlant des effets de la politique de libéralisation de PAS, Bouet et al, (2009) estime que si une libéralisation agricole pourrait favoriser certains pays en développement, elle aurait certainement un effet négatif sur d'autres pays en développement, importateurs nets de produits agricoles et alimentaires. Ces pays sont très hétérogènes. Par ailleurs, les bénéfices de la libéralisation commerciale multilatérale pourraient être nuls, voire négatifs, pour les pays ayant actuellement des accès préférentiels vers des pays riches, comme les Pays les Moins Avancés (PMA) vers l'Union européenne.

Dans l'ensemble, ces politiques n'ont pas eu les effets escomptés du fait des asymétries d'information, d'un niveau peu concurrentiel, du rôle des incertitudes liées aux risques naturels, à la faiblesse des marchés des facteurs de production et à un environnement institutionnel déficient (Hugon, 2008). Pour Bouet et al. (2009) ce sont les institutions inadaptées ou de mauvaises qualités, des infrastructures de transports ou de télécommunication médiocres, des politiques macroéconomiques défaillantes qui sont les facteurs majeurs du sous-développement. Le modèle des pays développés (ou de la Banque Mondiale et du FMI) transposé à l'Afrique n'a pas intégré les facteurs des réussites agricoles comme en Asie (prix garantis et stabilisés, proximité du crédit, rôle de l'Etat dans les infrastructures, voire subventions et protections).N'Diougou (2005) a montré qu'avec la libéralisation et la mondialisation, l'agriculture ouest-africaine entre directement dans une compétition impitoyable et déloyale avec des agricultures hautement productivistes jouissant de larges mesures de soutien et de subvention. La politique nationale des pays membres de la CEDEAO est influencée par la politique régionale de la communauté. Selon lui, la politique agricole des pays membres de la communauté a été influencée depuis les indépendances par :la convention de Yaoundé 1 (1963) et Yaoundé 2 (1969), la convention de Lomé 1 (1974) et Lomé 2 (1979), les politiques de stabilisation des recettes extérieures.

La plupart de ces politiques n'ont pas été efficaces. Selon Assogba (1995), l'inefficacité de ces politiques de développement prouve que toutes les stratégies extérieures élaborées à travers les expériences occidentales ne peuvent être que défavorables. Le regard est tourné vers le plan d'action de Lagos de 1980 et le nouvel ordre économique intérieur de la CEDEAO de 1998. Mais pour Sabourin (1987), tous les projets de négociations globales pour un Nouvel Ordre Economique International ont échoué et les pays en voie de développement recherchent de nouveaux mécanismes de restructuration de l'économie internationale pour un développement plus large et des échanges commerciaux mieux réglementés : l'accord de partenariat économique ACP-UE de Cotonou (2007).

La politique agricole de l'UEMOA (PAU) élaborée en 2001 s'est fixé pour objectif global de contribuer, de manière durable, à la satisfaction des besoins alimentaires de la population, au développement économique et social des s membres et à la réduction de la pauvreté. Malheureusement, la PAU a été un «bébé mort-né'' à cause de la démarche et du faible niveau de protection dont jouit l'agriculture ouest-africaine. En effet, les droits de douane aux frontières connus sous l'appellation du Tarif Extérieur Commun (TEC) sont tellement faibles que l'Afrique de l'Ouest est devenue trop rapidement une zone franche pour de nombreux produits alimentaires d'importation. Cela a sans aucun doute contribué à aggraver la situation de pauvreté des ménages ruraux (N'Diogou, 2005).Au Bénin, Houndékon (1996), Bailey (2002), Adégbola (2005) et Abiassi (2006) ont montré qu'avec la libéralisation, le volume des importations a augmenté affectant la compétitivité intérieure du riz local.

En Afrique, nous notons que les politiques sectorielles des pays sont influencées par les accords de partenariat : les politiques agricoles régionales et la politique agricole de l'Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE). Plusieurs politiques sectorielles ont été mises en oeuvre tant au niveau régional qu'au niveau des pays. Au nombre de ces politiques, on peut citer les politiques d'irrigation, les politiques de formation et de recyclage des producteurs, les mesures d'accompagnement de la production (subvention d'intrants, construction de pistes rurales, aménagement des bas-fonds).

S'agissant des subventions, Martin et al. (1989) trouvent que dès lors que l'on protège ou que l'on subventionne l'agriculture, deux possibilités se présentent: soit le prix intérieur de ce secteur augmentera par rapport au prix intérieur de l'industrie et des services, soit ses coûts de production diminueront par rapport aux autres secteurs. En conséquence, la production agricole deviendra plus rentable et la valeur du produit marginal du capital et du travail augmentera dans le secteur agricole par rapport aux autres secteurs. Dans ces conditions, une partie du capital et du travail précédemment mis en oeuvre dans l'industrie et les services se déplacera vers le secteur agricole, de sorte que la production dans l'industrie et dans les services aura tendance à diminuer. Quoi qu'il en soit, la protection accordée à l'agriculture a l'effet d'une taxe à l'importation sur les autres secteurs de production de biens échangés (Martin et al, 1989). Une politique de prix incitatifs favorise la production. En effet selon Hugon (2008) les pays africains (Côte d'Ivoire, Kenya, Malawi) qui ont adopté des prix incitatifs et/ou stabilisés ont connu des progrès notables de production. Bon nombre d'auteurs ont montré que l'application de prix incitatifs encourage les producteurs à augmenter leur offre. Soulé et al (2011) ont montré qu'avec la mise en oeuvre au Bénin du Programme d'Urgence d'Appui à la Sécurité Alimentaire (PUASA) qui a permis la distribution de semences améliorées et des engrais spécifiques aux producteurs agricoles en 2008-2009, la production de produits vivriers particulièrement du riz a augmenté de 113% par rapport à son niveau de 2007 et de 187% par rapport à son niveau de 2003.

Pour Andrew et al. (2013) la subvention semble avoir été le catalyseur à moyen et à long terme de l'augmentation de la demande d'engrais et de semences améliorées, malgré quelques impacts négatifs sur le développement du secteur privé sous la forme d'effets de substitution à court terme. Le secteur privé endosse de plus en plus le rôle de fournisseur principal d'engrais destinés au programme et son exclusion du marché du détail des engrais subventionnés n'a pas empêché la croissance de la demande d'engrais du commerce à moyen terme. Sur le marché des semences, l'augmentation de la subvention aux semences depuis 2009-2010 semble étouffer légèrement les ventes commerciales. Toutefois, comme le marché des engrais, à moyen ou à long terme, elle pourrait stimuler la demande de semences améliorées à mesure que les paysans constatent les avantages de l'adoption de ces technologies.

En matière de politique en faveur de la sécurité alimentaire, il existe une multitude d'initiatives engageant à la fois la responsabilité des Etats des différentes organisations d'intégration régionale, des réseaux de recherche, d'opérateurs économiques et des ONG. C'est dans cette optique que le Réseau de Prévention des Crises Alimentaires au Sahel et en Afrique de l'Ouest (RPCA) lors de sa 23e réunion a souligné une prise en compte insuffisante des données nutritionnelles et socio- économiques; ce qui contribue à l'insécurité alimentaire. Certes plusieurs pays disposent actuellement des politiques ou plans d'actions de nutrition adoptés (Burkina Faso, Gambie et Sénégal par exemple), d'autres ont des politiques agricoles et ou sanitaires qui intègrent des objectifs de nutrition (Bénin, Mauritanie, Mali par exemple). Mais les effets de ces politiques sont invisibles. C'est pourquoi Savadogo (2009) a fait une remarque pertinente : Il constate une absence totale de la revue de littérature sur les études d'impact de la politique agricole de l'UEMOA qui aurait pu permettre de savoir si cette Politique Agricole a propulsé la sécurité alimentaire dans les différents Etats membres et pour l'Union dans son ensemble  ou si la PAU incorpore en son sein des mécanismes pour juguler à l'avenir les effets des chocs internationaux des prix alimentaires.

En somme, il a été constaté que la majeure partie des sommets, réunions et ouvrages se sont penchés sur l'importance de la sécurité alimentaire. Ils ont aussi abordé les causes et les conséquences de l'insécurité alimentaire, les politiques mises en oeuvre ainsi que leurs effets sur l'économie en générale et en particulier sur la sécurité alimentaire. Cependant, ils n'exposent pas clairement et par une approche économétrique l'efficacité des mesures de politique agricole sur la sécurité alimentaire au Bénin. C'est sans doute ce à quoi les parties qui vont suivre seront consacrées.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo