La mise en œuvre du principe de non refoulement( Télécharger le fichier original )par Alexandre Hugues Landry Malap Yaoundé 2 - Diplome D'Etudes Approfondies 2014 |
SECTION II : L'ENCADREMENT JURIDIQUE DU PRINCIPE AU PLAN REGIONAL : CAS DE L'AFRIQUELes bases préalablement fixées par les textes universels ont servi de points de repère pour l'inspiration des pays proches géographiquement, en les amenant à introduire régionalement des textes en matière des réfugiés. A cet effet, la convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, et son protocole additionnel de Bellagio du 30 janvier 1967, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948145(*), constituent des cadres par excellence d'application universelle, de protection des réfugiés. Ceux-ci inspirent les États dans leur souci de rapprocher les droits des réfugiés à leur environnement, afin d'adapter les règles qui s'y trouvent à leurs réalités propres de par les liens culturels, historiques et autres qui les rapprochent, car en matière de réfugiés le bon voisinage est le point essentiel. Les personnes qui fuient trouvent d'abord refuge dans les pays proches de leurs frontières, à l'instar de la Déclaration de Carthagène de 1984 relative au statut des réfugiés en Amérique latine (Colombie)146(*), la convention de l'Organisation de l'Union Africaine (OUA) actuelle Ainsi, l'on note l'existence de plusieurs conventions au plan régional, à l'instar de ; la convention de l'Union Africaine du 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique147(*), sur laquelle l'on prêtera un intérêt particulier, sans oublier l'apport de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (CADHP) du 28 juin 1981 et certains accords conclus en matière de réfugié dans le continent148(*). PARAGRAHE I : LA CONVENTION DE L'OUA DE 1969 ET LE PRINCIPE DE NON REFOULEMENTSans exclure d'autres champs d'investigation afin de mieux appréhender la question de la mise en oeuvre du principe de non refoulement, il sera intéressant de mettre un accent particulier sur le continent africain, pour la simple raison que ce continent a aussi une histoire singulière, et a été et continue d'être le théâtre de multiples déplacements des personnes, fuyant à raison leurs pays pour d'autres pays. C'est une délimitation géographique qui permet de spécifier les réalités qu'a connu ou que ce continent continue de connaitre, occasionnant ainsi des flux migratoires, il est donc important de relever que le phénomène des réfugiés est également ancien en Afrique, partant par exemple de la période coloniale et après cette période avec l'obtention des indépendances des pays d'Afrique et plus encore aujourd'hui avec les instabilités politiques149(*). Les colons arrivés s'installer sur le continent rencontrèrent parfois des rudes résistances, car souvent considérés par des populations comme des envahisseurs, ceci faisait d'eux des `'persona non grata `' c'est-à-dire qu'on refuse de recevoir. Et lorsqu'ils faisaient face à de telles résistances, ils employaient des méthodes fortes, en l'occurrence ; la violence entrainant mort d'hommes, ces situations ont orchestré la fuite des milliers de personnes vers d'autres pays afin d'y trouver refuge. A- Les innovations et les particularités de la convention de l'OUA Après les indépendances des pays africains, le continent n'a toujours pas été épargné par ces fuites massives des populations. Les indépendances s'étant obtenues pendant la période des années 50 et 60150(*), il fallait bien que les populations africaines prennent leur destin en mains, d'où le début des luttes pour le pouvoir, où les plus forts remportaient parfois au prix du sang. Ces quêtes pour le pouvoir ont occasionné des conflits internes pour la plupart, ethniques provoquant de la sorte des persécutions, des massacres atroces, des viols des femmes et filles, et si certains réussissaient à s'échapper c'était pour traverser les frontières. Notons déjà qu'il n'existait pas à ces périodes suscitées de réglementation véritable, en dehors de quelques accords entre les États sur l'extradition. Par exemple pour l'État du Cameroun, un accord avec le Mali a été conclu entre les deux pays en 1964, permettant d'extrader un réfugié lorsque la demande d'extradition est présentée par l'un ou l`autre pays, même pour une infraction politique151(*), l'on est en droit de penser qu'aujourd'hui cette convention tombe en désuétude et doit être renégociée pour le respect des droits de la personne humaine et le respect du principe de la non extradition pour délit politique152(*). La plupart de temps, les réfugiés ne pouvaient compter que sur l'humanisme des pays dans lesquels ils devraient trouver refuge, même avec la signature en 1951 de la convention sur la protection des réfugiés et son entrée en vigueur en 1954153(*), plusieurs refus d'accepter les réfugiés étaient constatés et continuent encore de l'être dans les pays africains. Toutefois, avec l'actualité toujours accrue des réfugiés dans les pays africains, où les luttes pour le pouvoir continuent d'être la source des fuites, le continent a pris conscience du besoin qu'il ya de recadrer la vie de ces populations154(*), qui ont véritablement besoin qu'on leur ouvre les portes. Ainsi, plusieurs pays africains sont parties à la convention de Genève du 28 juillet 1951 et son protocole additionnel de 1967 sur la protection des réfugiés, preuve que, le continent africain souhaite donner une valeur juridique à la protection de la personne du refugié, car aucun pays du continent n'est épargné par le risque de voir ses ressortissants endurer de telles souffrances. La réflexion a donc été poussée dans ce continent, en vue de « contextualiser » les règles régissant la vie des refugiés. C'est ainsi que les pays se sont motivés à élaborer leur propre convention, tout en s'inspirant tout de même des règles générales énoncées dans la convention de Genève de 1951, qui par exemple dans son article 33 alinéa 1 précité, protège le principe de non refoulement. Cette convention signée au sein de l'Organisation de l'Union Africaine (OUA) le 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des refugiés en Afrique155(*), parmi ces aspects donc, il ya le principe de non refoulement comme énoncé dans l'article 33 de la convention de Genève qui trouve tout aussi une consécration dans un des articles de celle de l'OUA qui doit être respecté par tous les États signataires156(*). Les domaines du droit qui seront donc utilisés ici seront entre autres ; les différentes conventions relatives aux réfugiés et le protocole additionnel à la convention de 1951, avec un accent mis sur la convention de l'O.U.A de 1969, sans oublier les accords relatifs aux réfugiés157(*), tout en identifiant certaines pratiques étatiques dans certains pays d'Afrique en ce qui concerne l'accueil ou non des refugiés sur leurs territoires. A cet effet il y aura besoin, pour compléter notre réflexion, d'avoir des emprunts tantôt au droit international humanitaire applicable aux victimes de guerre avec la 4ème convention de Genève de 1949 et ses deux protocoles additionnels I et II de 1977, également des emprunts au droit international des droits de l'homme qui défend grandement le principe de non refoulement car c'est un principe lié à la personne humaine158(*). Le droit international dans sa sphère humanitaire sera donc notre principale source d'inspiration. Conscients du besoin de sauvegarder les droits des réfugiés et de leur réserver un cadre légal d'expression ou de reconnaissance des droits fondamentaux sur le continent, les pays africains se sont retrouvés après que certains aient déjà signé et ratifié la convention de Genève, autour d'une table au sein de leur organisation afin d'aménager les principes contenus dans la convention cadre et l'appliquer à leur propre contexte159(*). Ce travail fut effectif le 10 septembre 1969 avec la signature de la convention régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés160(*). L'histoire particulière du continent ne pouvait pas laisser ces pays indifférents aux souffrances des réfugiés, car le continent a été, et continue d'être un véritable bal des mouvements de migrations des populations fuyant des persécutions diverses161(*). Les déplacements massifs des populations vers les frontières voisines, phénomènes causés d'abord par la colonisation, ensuite après les indépendances de ces pays, des luttes pour le pouvoir ont commencé entre les nationaux entrainant parfois de vives révolutions dans ces pays, et les populations civiles qui sont la plupart de temps victimes de ces assauts, sont souvent contraintes à la fuite. Sans oublier de mentionner des conflits religieux et ethniques qui constituent aussi des catégories de conflits qui entrainent des fuites des populations162(*), nous pouvons à titre d'illustration citer le cas le plus alarmant en Afrique, de la guerre civile du Rwanda entre les Hutu et les Tutsi de 1994 qui fit non seulement de nombreuses victimes mais également de nombreux réfugiés dont plusieurs fuyaient vers l'Ouganda. Les pays du continent africain ont donc réfléchi sur la manière avec laquelle il fallait mettre en oeuvre la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés, afin de l'accommoder au contexte africain. Au regard des troubles importants présents sur le continent, à titre d'illustration, le conflit Rwandais qui causa de nombreuses fuites de personnes, le Cameroun fut par exemple une terre d'accueil pour plusieurs de ces réfugiés qui firent même l'objet des demandes d'extradition du Rwanda163(*), et des demandes de transfèrement de la part du tribunal pénal international pour le Rwanda. Le problème des réfugiés fut ainsi longuement débattu avec pour base légale la convention mère de Genève, et une touche particulière fut aussi apportée dans cette convention après que les États se soient convenus des points importants. Une convention dénommée la convention de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés164(*), celle-ci revient sur les principes directeurs énoncés dans la convention de Genève, elle est un corps de 15 articles avec un préambule qui démontre de la détermination des pays signataires d'enrayer les souffrances dont sont victimes les réfugiés et les pratiques qui ne leur permettent pas de jouir pleinement de leurs droits, comme celle du refoulement165(*). Le préambule rappelle encore la place prépondérante qu'occupent la convention de Genève de 1951, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 et même la Charte des Nations Unies et la Déclaration des Nations Unies sur l'Asile Territorial. Ceci montre clairement que la convention de l'OUA eut un arsenal assez riche de sources d'inspiration166(*), lui permettant d'aboutir à l'élaboration des règles qui seront applicables sur le continent. Après une définition du réfugié donnée à l'article premier paragraphe 1 de cette convention167(*), définition qui ne s'éloigne pas de celle contenue dans la convention de Genève de 1951. La convention poursuit avec une originalité qui n'a pas été précisée dans celle de Genève dans son paragraphe 2 en ces termes : « le terme réfugié s'applique également à toute personne qui, du fait d'une agression, d'une occupation extérieure, d'une domination étrangère ou d'événements troublant gravement l'ordre public dans une partie ou dans la totalité de son pays d'origine ou du pays dont elle a la nationalité 168(*)». L'originalité ici réside dans le fait que la convention mère de Genève ne précise pas les personnes fuyant les guerres, elle parle tout simplement des persécutions d'ordre politique, social sans parler des conflits interétatiques ou internes qui sont d'ailleurs la catégorie la plus répandue aujourd'hui, et celle qui rend les personnes qui fuient encore plus vulnérables. L'Afrique, consciente du fait que les populations réfugiées de son continent sont pour la plupart des personnes qui fuient des conflits surtout internes169(*), a poussé la réflexion sur la protection de tels réfugiés, les conflits internes étant aujourd'hui la catégorie qui divise encore davantage les peuples et créent la plupart de temps des alliances régionales dans un pays. Le continent africain, qui brille par sa multitude d'ethnies, et où parfois, celles qui regorgent la plus importante partie du territoire ont tendance à dominer les autres. Ce qui crée donc au sein de la population des graves remous qui finissent par s'ériger en violences occasionnant par là même, la fuite des populations sans défense qui luttent pour leur vie et qui espèrent dans leurs déplacements trouver refuge dans un pays voisin, qui leur offre une hospitalité en les accueillant sur leurs territoire respectifs. C'est ainsi que le principe de non refoulement fut réaffirmé par les rédacteurs et signataires de la convention de l'OUA du 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés. L'article 2 paragraphe 3 dispose à cet effet que : « Nul ne peut être soumis par un État membre à des mesures telles que le refus d'admission à la frontière, le refoulement ou l'expulsion qui l'obligerait à retourner ou à demeurer dans un territoire ou sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté seraient menacées pour des raisons énumérées à l'article 1 paragraphe 170(*)». Le nombre de réfugiés de guerre et d'autres conflits encore se faisant davantage croissant, et face aux multiples refus d'accès aux territoires voisins dont sont victimes les populations, la convention poursuit son originalité et son souci de prévoir toutes les situations, afin d'empêcher ces refus d'admission ou ces refoulements abusifs qui violent carrément le droit international des réfugiés171(*). La convention de l'OUA encourage donc les États signataires à mettre tout en oeuvre pour faciliter l'application des règles qui s'y trouvent, en ouvrant les frontières aux personnes qui fuient des persécutions, qui demandent l'asile dans ces pays, afin que ceux-ci soient mis hors de danger et qu'ils n'aient plus à craindre pour leur vie, véritable cause de leur fuite afin qu'ils leur soient évitées d'autres atrocités comparables aux violences physiques et psychologiques dont ils ont déjà été victimes. Cette convention s'inscrit donc dans l'actualité africaine de conflits internes, où les peuples continuent de se déchirer et de se diviser pour des raisons multiples, entre autres ; politiques avec la quête du pouvoir, religieuses et autres encore172(*), et les États se doivent de permettre aux personnes qui fuient les combats de trouver un abri sûr chez eux173(*). Aucun État africain ne pouvant prétendre vivre en retrait, mais plutôt en communion avec les autres174(*), surtout à l'ère de la mondialisation ambiante ou le communautarisme est la politique la mieux partagée actuellement, plusieurs domaines touchant à cet effet à la vie humaine méritent d'être encadrés juridiquement, par le droit international175(*), comme c'est tout à fait le cas des réfugiés. B- L'appel à la solidarité africaine comme particularité de la convention de l'OUA Afin de donner encore plus de facilité de mise en oeuvre du principe de non refoulement, la convention de l'OUA prévoit une mesure toute particulière que les États sont appelés à appliquer lorsqu'ils éprouvent des difficultés, ceci leur permet plus aisément de respecter le droit des réfugiés et partant, le principe de non refoulement qui constitue la base même du droit des réfugiés. L'article 2 paragraphe 4 de la convention de l'OUA dispose que : « lorsqu'un État membre éprouve des difficultés à continuer d'accorder le droit d'asile aux réfugiés, cet État membre pourra lancer un appel aux autres États membres, tant directement que par l'intermédiaire de l'OUA, et les autres États membres, dans un esprit de solidarité africaine et de coopération internationale prendront toutes les mesures appropriées pour alléger le fardeau dudit État membre accordant le droit d'asile 176(*)». La convention de l'OUA dans le paragraphe 4, article 2 recommande cette solidarité aux Etats africains. Car dans la culture de ces Etats, cette vertu est une de leur qualité, afin qu'ils continuent de l'exprimer à l'endroit des réfugiés en leur tendant la main car ils en ont besoin à ce moment-là, une façon de dire que le problème d'une personne doit devenir celui de tous, autour duquel des efforts devraient être déployés afin de trouver une solution favorable à la situation. Les Etats Face à la difficulté à continuer à octroyer l'asile, ne devraient pass'inquiéter, car il faudra tout simplement lancer un appel au secours qui177(*), ensuite devra être entendu par les autres États, qui auront à leur tour le devoir de répondre favorablement. En effet, la convention de l'OUA met un accent particulier sur la nécessité d'observer le principe de non refoulement178(*), c'est pour cette raison qu'elle pose des bases juridiques solides et met tous les gardes fous possibles, afin de respecter ce principe. Aucun État n'aurait plus de raisons valables de bloquer ses frontières aux motifs que sa capacité d'accueil des réfugiés est limitée ou sous prétexte que les demandeurs d'asile sont nombreux au point qu'il faille les refouler car le territoire ne peut pas les contenir, le paragraphe 4 par conséquent est clair là-dessus et précise l'aide que l'État devrait demander au lieu de refuser d'admettre les réfugiés sur son territoire. Une autre précision apportée par la convention est qu'elle recommande que les États n'appliquent guère de refoulement abusif sous prétexte de préserver les liens d'amitié qui lient le pays d'accueil à l'État d'origine du réfugié au risque de les exposer aux traitements dégradants s'ils sont renvoyés dans leurs pays d'origine ou dans les pays dont ils ont la nationalité179(*). Ainsi l'article 2 paragraphe 2 dispose que « l'octroi du droit d'asile aux réfugiés constitue un acte pacifique et humanitaire et ne peut être considéré par aucun État comme un acte de nature inamicale 180(*)», ce paragraphe signifie que le fait pour l'État d'accueil d'octroyer le droit d'asile à un réfugié, ne doit pas amener l'État d'origine à penser que l'État d'accueil est désormais un ennemi au point d'entacher leurs relations amicales. Mais plutôt que l'État d'accueil à fait application du droit international en vigueur en la matière démontrant la supériorité des normes internationales sur les accords bilatéraux181(*), et que les relations qu'entretiennent ces deux États devraient continuer d'être pacifiques et au beau fixe. L'État d'origine du réfugié ne doit pas pouvoir profiter des bonnes relations qui existent entre lui et le pays d'accueil pour faire des demandes officielles ou officieuses auprès des autorités de l'État d'accueil afin d'obtenir le refoulement du réfugié182(*). Ce type de refoulement qui sera purement et simplement considéré comme abusif, sauf dans le cas précisé dans la convention de Genève à l'article premier alinéa 2, de la commission d'un crime de droit commun par le réfugié183(*), ce n'est que dans cette mesure qu'un demandeur d'asile ou un réfugié même ayant acquis ce statut peut être expulsé, et même dans ce cas, le pays requis doit s'assurer que le réfugié ne risque pas la torture, ou des traitements inhumains ou dégradants. L'article 2 de la convention de l'OUA est donc, au niveau du continent, le cadre d'expression parfait du respect du principe de non refoulement, car non seulement il fait du refoulement un acte prohibé, mais également prévoit des facilités de mise en oeuvre de celui-ci. Cette convention de l'OUA rentre donc en droite ligne de ces particularités qui y sont énoncées afin de prévenir les futurs arrivages sur les frontières des pays signataires des personnes fuyant des persécutions. Du moment où les conflits ne font que se multiplier sur le continent, car les gens luttent toujours pour le pouvoir, compromettant la vie des civils qui, par crainte de voir leur intégrité physique atteinte, et qui est même souvent atteinte, fuient en direction des frontières pour atteindre d'autres pays. La plupart de temps par la marche à pied, et ces derniers, lorsqu'ils réussissent à atteindre les frontières non seulement sont épuisés par la marche, mais également, ont énormément besoin des soins184(*), de la nourriture. Un refus d'admission se présenterait donc comme une autre arme qu'on leur pointe sur la figure, et abandonnés à eux même, ils n'existent plus pour le commun des mortels. Il ya lieu de souligner à titre d'exemple, les récents événements en Afrique de l'ouest, pour ce qui est de la Côte-D'ivoire avec la guerre civile postélectorale de 2010-2011185(*). La situation n'est pas toujours revenue à la normale nonobstant les efforts du nouveau gouvernement, des massacres ont été orchestrés dans ce pays, faisant des milliers de victimes dans la population civile, qui perdaient leur vie et des milliers d'autres qui fuyaient leurs domiciles parce que persécutés par les camps adverses dès qu'il y avait un soupçon d'appartenance à telle ou à telle personne. Des villages ont même été rasés par des personnes armées. Des situations similaires sont observées aujourd'hui en Afrique toute entière avec aussi le fameux printemps arabe, et la république centrafricaine, où les gouvernements au pouvoir ont été déstabilisés186(*). Toutes ces situations occasionnent des déplacements massifs des populations vers des pays voisins, preuve que l'Afrique représente l'un des continents à fort taux de réfugiés, partant de ceux qui trouvent asile dans le continent jusqu'à ceux qui le trouvent en occident. Nicole GUIMEZANES dans son ouvrage « le statut juridique des réfugiés » fait des statistiques pour relever la situation des réfugiés dans le monde, ainsi pour ce qui est du continent africain, il ressort qu'en 1988187(*), le nombre de demandes d'asile présentées par les africains étaient de 14725, en 1989 , elles étaient de 23456, en 1990, elles étaient de 22119, et en 1991, elles étaient de 16494. Même avec cette évolution en dents de scie, la comparaison faite avec les autres continents place l'Afrique en première place, c'est-à-dire que le continent africain est le véritable théâtre de persécutions entrainant les fuites. C'est donc à dessein que ce continent a élaboré un instrument juridique propre à ses réalités.188(*), en gardant toutefois l'esprit de la convention cadre c'est à dire la convention de Genève189(*).Comme la convention de Genève est le cadre universel d'établissement du droit international des réfugiés où tous les pays du monde sont appelés à faire partie, la convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés est un cadre régional, où tous les pays d'Afrique sont attendus. Cette dernière reste au-dessus de tous les accords bilatéraux ou multilatéraux qui ont été conclus et pourraient encore être conclus entre les États dudit continent relatifs aux droits des réfugiés. Même les accords signés, soit au niveau régional, soit au niveau sous régional en matière de réfugié, cette convention n'interdit pas les accords mais il faut que ceux-ci ne se détachent pas de l'esprit de la convention de l'OUA de 1969 qui elle-même puise sa source dans la convention de Genève de 1951190(*). En Afrique où les rebellions sont souvent mal organisées, et où, les milices ignorent tout du droit de la guerre, et partant, du droit international humanitaire191(*). Par la nécessité de préserver les droits fondamentaux reconnus à l'homme, partant de la méconnaissance du droit des réfugiés, les populations civiles sont souvent prises pour cibles, et constituent d'ailleurs la source de pression employée par certaines milices et certains rebelles aux jours d'aujourd'hui, pour faire des revendications. Au Cameroun le gouverneur de la région de l'Est a pris un arrêté le 20 janvier 2014 refoulant 36 « migrants centrafricains » selon ses termes, sans compter que ces personnes souvent prises en otage lorsqu'elles sont des femmes sont la plupart de temps violées et violemment tabassées192(*). Face à ces situations, les populations qui réussissent souvent à prendre la fuite préfèrent, au lieu de subir de tels actes, quitter le pays et aller s'installer dans un autre pays. Abandonnant parfois derrière eux maisons et tout type de bien, n'emportant que le stricte nécessaire pour la survie et parfois même rien du tout, abandonnant même familles et proches avec pour seul objectif, rejoindre une frontière et la traverser, afin de trouver refuge dans un autre pays, souhaitant ainsi être reçues en respect du principe de non refoulement, appliquant le droit d'asile avec toutes les garanties que ce droit octroie. La convention de l'OUA vient ainsi mettre un terme à certaines pratiques étatiques qui avaient cours dans certains États telles que le refoulement, l'expulsion, le refus d'admission, la reconduite à la frontière, le refus d'acceptation, qui exposaient encore ces personnes aux risques présents dans leurs pays d'origine. Le moins que l'on puisse dire est que, tous ces accords qui ne respectent pas les grands principes énoncés dans la convention, ne devraient plus exister, dans la mesure où, certains n'ont pas toujours été renégociés, comme c'est le cas de l'accord d'extradition du 06 mai 1964 sur l'établissement et la circulation des personnes entre le Cameroun et le Mali193(*). Toutefois, la tendance est plutôt à les motiver à accommoder ces accords aux conventions relatives au statut des réfugiés en mettant de côté leurs liens parfois historiques qui ne satisfont plus les intérêts du droit international public en vigueur, surtout en matière de la sauvegarde des droits des réfugiés à qui l'on doit encore certains droits fondamentaux, bien que certains aient déjà disparus. * 145La convention de Genève de 1951 et son protocole additionnel de 1967, la Déclaration Universelle des droits de l'homme, tous ces textes sont les cadres par excellence d'expressions des droits des réfugiés sur le plan international. * 146 La Déclaration de Carthagène de 1984. * 147 La Convention de l'OUA du 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés. * 148L'accord d'extradition liant le Cameroun au Mali de 1964 disponible au MINREX. * 149L a crise centrafricaine qui en date du 10 janvier 2014 avait déjà enregistré plus de 54000 réfugiés à l'Est du Cameroun selon les chiffres donnés par l'agence du HCR installée au Cameroun. * 150 Le Cameroun obtint son indépendance le 1er janvier 1960. * 151 L'accord entre le Cameroun et le Mali du 06 mai 1964, article 16, p. 4. * 152Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 10 décembre 1966. * 153La convention de Genève de 1951 est entrée en vigueur en 1954. * 154Les récentes crises dénommés « printemps arabe » en Egypte et en Lybie, la crise post électorale ivoirienne... * 155L'OUA qui elle-même a été créée en 1963, remplacée aujourd'hui depuis la conférence de Durban de 2002 par l'Union Africaine (UA). * 156Une quarantaine d'Etats africains actuellement ont signé la convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés. * 157L'accord d'extradition entre le Rwanda et la République Démocratique du Cameroun de 1966. * 158 Jean Louis Constantinesco, Traité de droit comparé, Tome II, La méthode comparative, LGDJ, Paris, 1974, p. 10 et s. * 159La convention de l'OUA de 1969. * 160Date de la signature de la convention citée ibid.. * 161 Les combats entre les forces régulières et celles de la Seleka en Centrafrique * 162BokoHaram au Nigéria. * 163Cfr. Article 13 du Règlement Intérieur du TPIR, citant les rwandais ci-après : RUZINDANA Augustin, MUGENZI Justin, BUTERA Jean-Baptiste, MUTA BARUKU Sylvain, NTAGERURA André, MPIRANYA Protais, SEMANZA Laurent, MUBERUKA Félicien, BARIHENDA Augustin, SETAKO Éphrem, NKUNDIYE Léon, BENS BAGOSORA Théoneste, NSENGIYUMVA Anatole, MUSABE Pasteur, NZIRORERA Joseph, NAHIMANA Ferdinand, RIZIMUNGI Télesphore, BAKUZAKUNDI Michel, BARAYAGWUIZA Jean Bosco. * 164La convention de L'OUA de 1969 op. cit.pp. 3-7. * 165Article II, par. 3 de la convention de l'OUA interdisant le refoulement, p. 4. * 166Les textes relatifs aux droits des réfugiés et au principe de non refoulement internationaux op. cit. * 167 Article I, par. 1 de la convention de l'OUA, p. 2. * 168 L'originalité de la convention de l'OUA qui étend la reconnaissance du statut de réfugié à ceux qui fuient les guerres à l'article I, par. 2 de la convention de 1969. * 169 La récente crise du Tchad, de la RDC et même du Mali. * 170 Article II, par. 3. * 171 L'élargissement du domaine d'intervention de la convention de l'OUA. * 172 Les extrémistes Nigérians de la secte Boko-Haram. * 173 René Degni-Segui, L'action des institutions africaines en matière de réfugié, in droit d'asile et des réfugiés, pp. 232-238. * 174 Préambule de la convention de l'OUA, par. 6-7. * 175 Tavernier (P), l'ONU et l'affirmation de l'universalité des droits de l'homme, op. cit, p. 22. * 176 Article II, par. 4 de la convention de l'OUA qui appelle à la solidarité africaine. * 177Ibidem. * 178 Les résolutions de l'atelier sur les réfugiés et personnes déplacées tenue en Afrique à Kigali au Rwanda du 25 février au 04 mars 1986. * 179Convention de New York du 03 décembre 1984 contre la torture et les autres traitements inhumains ou dégradants, cette convention a posé le principe de la non extradition pour délit politique. * 180Article II, par. 2 de la convention de l'OUA. * 181 Article 103 de la Charte des Nations Unies dispose qu' « en cas de conflit entre les obligations des membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront. » * 182 Frederick Sudre, « Les grands arrêts de la cour européenne des droits de l'homme », PUF, 5ème éd., 2009. * 183Article I, par. 2 de la convention de l'OUA. * 184Voir l'assistance humanitaire apportée par le HCR, le CICR, Amnesty International et d'autres organismes humanitaires dans les camps des réfugiés syriens... * 185La récente guerre post-électorale ivoirienne. * 186Les crises centrafricaines, tchadiennes. * 187 Nicole Guimezanes, Le statut juridique des réfugiés, op. cit. pp. 11-21. * 188 La convention de l'OUA de 1969 op.cit. * 189 La convention de Genève de 1951 op. cit. p. 18. * 190Ibidem. * 191 Patricia Buirette, Le droit international humanitaire, La découverte, Paris, 1996, PP. 32-52. * 192CalogeropoulosStratis, Droit humanitaire, droits de l'homme et victimes des conflits armés, in études et essais sur le droit international humanitaire et les principes de la croix rouge, 1984, p. 661. * 193L'accord d'extradition liant le Cameroun au Mali de 1964 tombe en désuétude et doit être renégocié pour épouser les principes contenus dans les conventions de Genève de 1951 et de l'OUA de 1969. |
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