La mise en œuvre du principe de non refoulement( Télécharger le fichier original )par Alexandre Hugues Landry Malap Yaoundé 2 - Diplome D'Etudes Approfondies 2014 |
L'INTERET DE L'ETUDEL'intérêt de cette étude est double, il est d'abord pratique car il permet de voir la manière avec laquelle les Etats reçoivent le principe de non refoulement afin de mesurer le respect dudit principe et relever les difficultés de mise en pratique, étant donné par exemple que la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et des Libertés fait de ce principe, un principe de droit coutumier qui devrait être respecté par tous37(*). Ce sujet est également d'un intérêt juridique, car il permet d'évaluer la force juridique des conventions et accords signés par les États en matière de protection des réfugiés, et de se demander si ces conventions ne restent pas de simples formalités que remplissent les États sans les appliquer38(*). De l'autre côté, ne constituent- elles pas simplement des conventions de plus, auxquelles prennent part les États pour montrer aux yeux du monde que l'on s'intéresse au droit international, quand bien même ceux-ci ne facilitent pas la mise en oeuvre des règles pourtant acceptées comme devant être appliquées par les signataires en premier lieu et par d'autres lorsque les règles sont considérées par la majorité de ces pays comme relevant du jus cogens. C'est autour de ce double intérêt qu'il est convenable d'évaluer le champ d'application et l'effectivité du principe du non refoulement. LA REVUE DE LA LITTERATURELa mise en oeuvre du principe de non refoulement passe tout d'abord par le respect des critères de sélection des réfugiés, critères qui sont mentionnés dans la définition du réfugié.Il est reconnu au plan international les raisons qui permettent d'être considéré comme réfugié39(*). C'est toutefois un droit qui rencontre plusieurs obstacles quant à sa mise en oeuvre, non seulement de la part des administrations étatiques des pays d'accueil qui doivent passer au tri de ces personnes, mais aussi de la part des requérants d'asile qui tout simplement veulent traverser les frontières. Ainsi, Alain MORICE et Claire RODIER dans la revue « classer-trier migrants et réfugiés : des distinctions qui font mal40(*) », montrent la différence que les Etats font entre les migrants clandestins et les réfugiés. Les premiers pouvant être considérés comme des personnes qui pour d'autres raisons qui ne sauraient rentrer dans la catégorie de la crainte mentionnée dans la convention de Genève, choisissent de quitter leurs pays, d'aucun pour la recherche d'une meilleure situation économique, d'autres pour multiples autres raisons inavouées, alors rentrent souvent clandestinement dans les autres pays, tout en se confondant aux véritables réfugiés et demandeurs d'asile. De plus, ce ne sont pas toutes les crises ou conflits qui constituent des dangers pour les personnes qui fuient, il arrive même parfois que certaines parties du territoire soient épargnées par ces multiples crises, pourtant il y a souvent des personnes qui profitent de ces situations pour quitter leur pays , ce qui ne facilite pas la tâche aux pays d'accueil qui doivent donner l'asile aux personnes qui le méritent au sens du droit international des réfugiés. D'autres auteurs comme Michel AGIER dans son ouvrage Gérer les indésirables des camps des réfugiés au gouvernement humanitaire41(*), relève également une autre catégorie de difficultés auxquelles les États d'accueil sont confrontés. Les requérants d'asile dans leurs relations pour la reconnaissance du statut de réfugié par l'un et de l'obtention de ce statut par l'autre. Car bon nombre d'ambigüités entourent la problématique liée à la définition même du terme réfugié, la question qui pourrait traverser les esprits est celle de savoir de quel type de crainte s'agit-il ? Ou encore quel est le degré de la crainte qui pourrait être considérée comme motif de la fuite, ou même à quel niveau d'anxiété faut-il se trouver pour justifier un départ de son pays. L'on pourrait noter également, les expressions telle que « persécution 42(*)», et se poser la question du traitement dont il faut être victime, ou, à quel niveau doit il se situer. Une présence insistante de l'autre à côté d'un proche, des marques de supplice sur le corps, l'auteur relève ici l'attitude des Etats face aux requérants d'asile, car parmi eux il y a bien entendu ceux qui ont des raisons valables de fuir leurs pays et demander asile ailleurs et d'autres qui sont tout simplement de mauvaise foi profitant des faveurs qu'octroie le droit d'asile alors même qu'ils ne fuient aucune persécution. L'auteur relève aussi la difficulté du tri entre vrais et faux réfugiés, dans la mesure où plusieurs événements sont à la base des fuites des populations (événements qui ne répondent pas toujours aux définitions données par les conventions au termerefugié)43(*), faut-il encore pouvoir les identifier et donner valeur à ces événements afin de permettre aux victimes de bénéficier du statut des réfugiés. Dans une situation de masse par exemple, il faut rechercher parmi les personnes qui fuient leurs pays, celles qui sont véritablement persécutées, ce qui n'est pas toujours aisé, car pour plusieurs44(*), c'est souvent une occasion idoine de se retrouver dans un autre pays, parfois pour des raisons inavouées comme la recherche d'une vie économique plus favorable dans un autre pays, celles-ci sont appelées par définition des migrants clandestins et leur nombre ne cesse de croitre dans le monde entier. Ainsi, les États dans leur double devoir de protéger leurs frontières et d'appliquer le principe de non refoulement, utilisent leurs propres mécanismes leur permettant de déceler les faux réfugiés, les écartant du processus d'octroi du droit d'asile, tout en octroyant l'accès aux vrais réfugiés45(*). Pour les auteurs, la mise en oeuvre du principe de non refoulement passe nécessairement par le tri et la distinction faite entre vrais et faux réfugiés46(*), donc, entre les migrants qui peuvent être considérés comme des indésirables et les réfugiés reconnus comme tels, parce que remplissant les conditions relatives au statut de réfugié. Les auteurs pensent que les États font bien de mettre des mécanismes efficaces de contrôle afin de limiter des flux des populations qui n'auraient pas besoin de fuir leurs pays47(*). Tandis que d'autres auteurs comme François Crépeau dans son ouvrage « droit d'asile de l'hospitalité aux contrôles migratoires 48(*)»montrent à quel point le droit d'asile est entrain de laisser place au durcissement des politiques relatives à l'entrée des étrangers dans certains Etats, les Etats ayant davantage peur d'exposer leurs territoires en ayant le souci de protéger leurs ressortissants. Le constat étant aujourd'hui que les territoires des Etats économiquement développés sont davantage sollicités non seulement par les demandeurs d'asile ou les réfugiés, mais aussi par les migrants clandestins, ce qui poussent ces Etats à instaurer d'énormes barrières au niveau de leurs frontières, d'aucuns profitant de cette situation pour fouler aux pieds ou ignorer totalement le droit d'asile. Jérôme VALLUY dans« L'Europe des camps : La mise à l'écart des étrangers 49(*)», relèvent que, dans le cas de l'Europe, la tendance est de plus en plus hostile aux étrangers et davantage des réfugiés sont confondus. Le continent n'hésite pas à assimiler ces derniers aux migrants clandestins si bien que les lois nationales qui y sont votées renforcent le contrôle des frontières empêchant les entrées irrégulières, le constat étant que, même le réfugié est frappée par ces mesures restrictives lorsque les preuves ou les raisons évoquées par celui-ci paraissent insuffisantes aux yeux de la loi desdits pays. Les pays industrialisés n'hésitent par exemple pas à penser que leurs frontières sont sollicitées pour des raisons économiques par des personnes qui recherchent des conditions de vie meilleures, même lorsque les ressortissants d'un pays sont victimes des conflits causant leur fuite50(*), le droit d'asile mis en place par ces pays devient l'exception et le refoulement la règle, au mépris de l'article 33 de la convention de Genève qui proscrit toute mesure tendant à refouler un réfugié51(*). D'après l'analyse faite par ces différents auteurs sur la question du non refoulement l'on est en droit de relever que la question mérite d'être explorée du moment où le droit international des réfugiés fait du principe de non refoulement un principe cardinal de ce droit et ceci justifie l'intérêt de certains auteurs pour la question. Mais comme la question reste encore d'actualité, au regard des violations observées çà et là, il est tout aussi convenable de relever que les États d'accueil qui sont les véritables acteurs de la mise en oeuvre de ce principe52(*), doivent s'activer et arrêter de confondre migrants clandestins et réfugiés. Car ce sont deux catégories bien distinctes de personnes, les premiers peuvent être expulsés, car irrégulièrement installés, et les seconds, quoique irrégulièrement entrées ou installés bénéficient d'une protection qui les mette à l'abri des poursuites judiciaires en attendant leur régularisation auprès des autorités du pays d'accueil de concert avec le Haut-commissariat aux réfugiés du lieu de leur installation. L'article 31 paragraphe1 de la Convention dispose que : « Les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie, ou leur liberté était menacée, au sens prévue par l'article premier, entrent ou se trouvent sur le territoire sans autorisation, sous la réserve qu'ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières 53(*)». Dans ce dernier cas, les États d'accueil devraient se renseigner sur l'actualité du pays dont le réfugié est le ressortissant. Il serait également préférable que les États, dans la facilitation de l'octroi du droit d'asile, prévoient des habitations provisoires54(*), pour les réfugiés qu'ils accueillent, en évitant de les regrouper au même endroit afin de ne pas les exposer au risque qu'ils deviennent des cibles pour certains agents de renseignements de leurs pays d'origine respectifs, les États pourraient aussi insérer dans leurs budgets respectifs les prévisions pouvant apporter une assistance matérielle aux réfugiés lorsque le HCR éprouve des difficultés55(*). De ces mesures, sortira la garantie d'une meilleure mise en oeuvre du principe de non refoulement. S'il certains doctrinaire qui croient que, les pays continuent de fermer leurs frontières, afin de lutter contre les entrées clandestines des personnes qui sont a la recherche des conditions de vie plus favorables56(*), d'autres pensent que la distinction, migrants clandestins et réfugiés éloigne les risques potentiels d'insécurité57(*). Sans affirmer que ces positions sont illégitimes, l'on notera tout de même que, ce sont les territoires des États que sollicitent les refugies, Afin donc d'éviter les abus, soit de la part de ces États, soit de la part des requérants d'asile. Il faut une étroite collaboration dans la pratique entre les organismes humanitaires, au premier rang desquels le HCR comme le recommande les conventions relatives au statut des réfugiés afin de lever les ambiguïtés nées de la définition du terme réfugié58(*). * 37Le droit international des droits de l'homme dans l'article 14 de la Déclaration universelle des droits de l'homme parle de la liberté de trouver asile ailleurs reconnu à tout individu. * 38 La multitude de conventions et d'accords internationaux et régionaux relatifs aux droits des réfugiés, qui malgré leur existence les droits des réfugiés continuent d'être bafoués * 39 L'article premier de la convention de Genève op cit, p. 3. * 40 Alain Morice, Claire Rodier, « Classer-trier migrants réfugiés », op cit, p. 2. * 41 Michel Agier, Gérer les indésirables des camps des réfugiés au gouvernement humanitaire, Flammarion, Paris, 2008, 349 pages. * 42Le terme « persécution » est employé dans la définition donnée par la convention de Genève de 1951. * 43 Thèse d'Emnet sur les réfugiés climatiques op cit, p. 2. Catégorie des réfugiés non encire pris en compte par le droit international des réfugiés. * 44WinfriedLang, « Asile, refuge et droits de l'homme », in droit d'asile et des réfugiés, colloque de Caen de la SFDI, 1996, Pedone, 1997, P. 80. * 45Susin Park, les principes directeurs relatifs à la pratique du HCR, 2010, pp. 1-16. * 46Alain Morice, Claire Rodier, « Classer-trier migrants réfugiés : des distinctions qui font mal... », op.cit, p. 3. * 47Ibid. * 48 François Crépeaux, Droit d'asile, de l'hospitalité aux contrôles migratoires, éd. Bruylant et éd. ULB 1995, Pp. 186 et s. * 49 Jérôme Valluy, « L'Europe des camps : la mise à l'écart des étrangers », revue cultures et conflits, éd. L'Harmattan, n°57, Paris, 2005, Pp. 5-11. * 50 Jérôme Valluy, « l'Europe des camps : la mise à l'écart des étrangers », op.cit, p. 5. * 51 Stéphane Doumbé Bilé, « Du non usage de l'article 33 de la convention de Genève de 1951, réflexions sur la jurisprudence Bereciartua-Echarri », petites affiches n°58, RIDC, Paris, 1990, Pp. 617-624. * 52 Dumas (J), Les sanctions pénales des crimes allemands, éd. Rousseau, Paris, 1916, 105 pages. * 53 L'article 31, paragraphe 1 de la convention de Genève de 1951 qui protège les demandeurs d'asile irrégulièrement entrés. * 54 Voir l'article 33 de la convention de Genève de 1951. * 55 Voir le rôle du HCR sur la collaboration avec les pouvoirs publics étatiques disponible sur le site www.unhcr. Ch. * 56 Jérôme Valluy , « L'Europe des camps : la mise à l'écart des étrangers », op.cit, p. 5. * 57 Alain Morice, Claire Rodier, « Classer-trier, migrants et réfugiés, des distinctions qui font mal », op.cit, p. 4. * 58 Voir UNHCR, Note on diplomatic Assurance, paragraphe 20 à 26. |
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